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PhD/CS
Numéro 23/2614
COUR D’APPEL DE PAU
2ème CH – Section 1
ARRÊT DU 26 juillet 2023
Dossier : N° RG 21/03688 – N° Portalis DBVV-V-B7F-IBD2
Nature affaire :
Demande du bailleur tendant à faire constater la validité du congé et à ordonner l’expulsion
Affaire :
[I] [V]
C/
[L] [W]
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 26 juillet 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 12 juin 2023, devant :
Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,
assisté de Mme DENIS, greffier présent à l’appel des causes,
Philippe DARRACQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller faisant fonction de Président
Monsieur Marc MAGNON, Conseiller
Madame Joëlle GUIROY, Conseillère
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur [I] [V]
né le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Muriel GASSER, avocat au barreau de BAYONNE
INTIME :
Monsieur [L] [W]
né le [Date naissance 3] 1955 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représenté par Me Philippe LALANNE de la SCP LALANNE-JACQUEMAIN LALANNE, avocat au barreau de DAX
sur appel de la décision
en date du 02 NOVEMBRE 2021
rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE DAX
FAITS-PROCEDURE -PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES
Par acte sous seing privé du 1er janvier 2016, M. [I] [V] et Mme [U] [V] ont donné à bail, exclu de la loi du 6 juillet 1989, à M. [L] [W] un bien immobilier, à usage de résidence secondaire, dénommé [Adresse 10], à [Localité 7], pour une durée de cinq ans expirant le 1er janvier 2021, moyennant un loyer annuel de 250 euros.
Mme [U] [V] est décédée le [Date décès 5] 2019.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er avril 2020, le bailleur a donné congé « pour cause de vente du moulin » à effet au 1er janvier 2021.
Le locataire s’étant maintenu dans les lieux, et suivant exploit du 30 avril 2021, M. [V] a fait assigner M. [W] par devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Dax en validité du congé et expulsion.
Par jugement contradictoire du 2 novembre 2021, le juge des contentieux de la protection a :
– prononcé la nullité du congé
– dit que le bail s’est renouvelé pour une nouvelle période de cinq ans à compter du 1er janvier 2021
– débouté M. [V] de ses demandes
– condamné M. [V] aux dépens, outre le paiement d’une indemnité de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration faite au greffe de la cour le 18 novembre 2021, M. [V] a relevé appel de ce jugement.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 8 février 2023.
***
Vu les dernières conclusions notifiées le 11 mai 2022 par l’appelant qui a demandé à la cour d’infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de :
– constater que le congé délivré est valable
– constater la résiliation du bail en date du 1er janvier 2016 liant les parties
– condamner M. [W] à quitter les lieux
– condamner M. [W] à une indemnité de 1.000 euros pour résistance abusive, outre une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions notifiées le 8 mars 2022 par l’intimé qui a demandé à la cour de débouter M. [V] de son recours, confirmer le jugement entrepris et de condamner M. [V] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
L’appelant fait grief au jugement d’avoir annulé le congé en retenant que l’accusé de réception avait été signé par le facteur, sans avoir reçu de pouvoir à cet effet, et qu’il n’était pas établi que M. [W] résidait à l’adresse d’expédition du courrier dont il n’avait pas pu prendre connaissance alors que :
– le courrier a été distribué le 8 avril 2020 à l’adresse déclarée par le locataire dans le bail, [Adresse 6] à [Localité 11] où résidait M. [W], celui-ci ayant également déclaré cette adresse au titre de son immatriculation au RCS de Dax en qualité d’agent immobilier
– le facteur tenait de l’arrêté du 15 avril 2020, adaptant le code des postes et des communications électroniques en période de pandémie, le droit de signer l’accusé de réception après s’être assuré de la présence du destinataire, sans contrôle d’une pièce d’identité
– M. [W] connaissait le congé au travers des échanges épistolaires entre les parties
– en tout état de cause, il incombe à M. [W], destinataire du congé, d’établir l’absence de mandat de la personne qui a signé l’accusé de réception
L’intimé objecte que le congé doit être annulé, le facteur ayant signé l’accusé de réception sans respecter le formalisme prescrit par l’arrêté du 15 avril 2020 et alors qu’il n’était plus domicilié à l’adresse d’expédition où se trouvait son précédent logement qu’il avait donné en location à des tiers avant de s’installer lui-même chez sa mère. Il ajoute que le congé ne respecte pas plus le formalisme légal de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 ni la clause du bail par laquelle les parties sont convenues, au terme du bail, d’engager un processus de vente.
En l’espèce, le contrat de bail liant les parties stipule que « le congé devra revêtir la forme soit d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception, soit d’un acte d’huissier de justice. Le délai de préavis commencera à courir à compter du jour de la première présentation de la lettre recommandée avec accusé de réception ou de la signification de l’acte d’huissier ».
S’agissant de l’application des dispositions de l’arrêté du 15 avril 2020 ayant modifié, en raison de la situation sanitaire résultant de l’épidémie de covid-19, l’arrêté du 7 février 2007 fixant les modalités relatives au dépôt et à la distribution des envois postaux, il faut constater que cet arrêté du 15 avril 2020 est postérieur à la date de distribution de la lettre litigieuse faite le 8 avril 2020, selon un courrier postérieur de la Poste se référant à l’historique « traceo ».
Par conséquent, les moyens de l’appelant fondés sur cet arrêté sont inopérants, la distribution de la lettre litigieuse étant soumise de l’arrêté du 7 février 2007 dans sa version applicable au 8 avril 2020.
L’article 4 de l’arrêté du 7 février 2007, dans sa version applicable en la cause, dispose que la preuve de distribution doit comporter les informations prévues aux articles 2 et 3 ainsi que :
– les nom et prénom de la personne ayant accepté l’envoi et sa signature (le destinataire ou son mandataire) ;
– la pièce justifiant son identité ;
– la date de distribution ;
– le numéro d’identification de l’envoi.
L’article 4-1 suivant précise que si la personne qui accepte l’envoi a déjà précédemment justifié de son identité à l’adresse, conformément à l’article 4 du présent arrêté, auprès du même employé chargé de la distribution soit en tant que destinataire, soit en tant que titulaire d’un mandat du destinataire en cours de validité, l’employé peut remettre l’envoi sans nouvelle présentation d’une pièce d’identité. L’employé indique alors sur la preuve de distribution et, le cas échéant, sur l’avis de réception, que tel est bien le cas et appose sa signature sur ces mêmes supports pour en attester.
En l’espèce, l’accusé de réception versé aux débats est vierge de toute mention, date, identité et signature de la personne ayant accepté l’envoi, et n’est revêtu que d’une signature non identifiable mais dont il est acquis qu’il s’agit de celle du facteur.
Sur le plan formel, cette signature peut, au mieux, présumer que le facteur connaissait l’identité du destinataire ou de son mandataire, mais l’accusé de réception n’a aucune valeur sur les modalités effectives et la preuve même de la distribution de l’envoi recommandé.
Le courrier de la Poste du 18 mars 2021 reconnaît la non-conformité de la distribution de l’envoi, et l’historique « traceo », simple document administratif interne, mentionnant qu’il a été distribué le 8 avril 2020 à 14h03, ne peut suppléer l’omission des mentions réglementaires nécessaires à la valeur probante de la distribution d’un envoi recommandé, et, au surplus, ne donne aucun renseignement sur l’identité de la personne qui aurait pu le recevoir.
Il s’ensuit qu’il n’est pas démontré que l’envoi recommandé du congé a été distribué à M. [W] ou un mandataire, au moins trois mois avant le terme du bail.
Et, il ne résulte pas des échanges épistolaires versés aux débats que M.[W] avait effectivement pris connaissance de ce congé au moins trois mois avant l’expiration du bail.
Il s’ensuit que le congé n’a pas été valablement donné, en violation des clauses du bail.
Par conséquent, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.
M. [V] sera condamné aux dépens d’appel et à payer une indemnité complémentaire de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
y ajoutant,
CONDAMNE M. [V] à payer à M. [W] une indemnité complémentaire de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur DARRACQ, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Catherine SAYOUS, greffier suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.
Le Greffier Le Président