Communication électronique : 19 octobre 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 18/06072

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Communication électronique : 19 octobre 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 18/06072
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délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 19 OCTOBRE 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 18/06072 – N° Portalis DBVK-V-B7C-N5J3

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 28 AOUT 2018

TRIBUNAL D’INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 11-18-000796

APPELANTE :

SCI CYLLENE

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Christel DAUDE de la SCP D’AVOCATS COSTE, DAUDE, VALLET, LAMBERT, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Simon LAMBERT, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

SA ORANGE

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Francette BENE de la SCP BENE, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Brigit VORPSI, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 05 Juin 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 26 juin 2023,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Fabrice DURAND, conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

M. Thierry CARLIER, conseiller

M. Fabrice DURAND, conseiller

Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL

ARRET :

– contradictoire ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

La SCI Cyllene est propriétaire d’une parcelle supportant une maison entourée d’arbres de haute tige cadastrée section BO n°[Cadastre 3] sur la commune de [Localité 6] (34).

Cette parcelle se trouve en bordure de la [Adresse 7] constituant une dépendance du domaine public communal.

Un poteau de ligne téléphonique est implanté à l’extérieur du mur clôturant la parcelle BO n°[Cadastre 3].

Aucun plan ni procès-verbal de bornage de la parcelle BO n°[Cadastre 3] n’a été établi.

Courant 2015, la SCI Cyllene a demandé à la SA Orange d’intervenir sur un arbre planté sur la parcelle BO n°[Cadastre 3] qui menaçait de dégrader le poteau précité.

Par courrier du 23 juin 2017, le maire de [Localité 6] a rappelé à la SCI Cyllene l’obligation lui incombant de procéder à l’élagage d’une partie des branches des arbres de sa propriété se trouvant au-dessus du domaine public.

Par déclaration au greffe enregistrée le 9 avril 2018, la SCI Cyllene a fait convoquer la SA Orange devant le tribunal d’instance de Montpellier aux fins de la voir condamner à lui payer 3 180 euros pour les frais d’élagage, à déplacer la ligne téléphonique implantée sur sa parcelle, et subsidiairement à lui payer 100 euros par an pour les frais futurs d’entretien.

Par jugement du 28 août 2018, le tribunal d’instance de Montpellier a :

‘ déclaré recevables les demandes de la SCI Cyllene ;

‘ rejeté l’ensemble de ces demandes ;

‘ rappelé à la SCI Cyllene qu’elle devait, selon les termes de la loi en vigueur, procéder à ses frais à toutes opérations d’élagage des arbres et plantations sur sa propriété de façon à éviter tout dommage sur les lignes de communications électroniques ;

‘ condamné la SCI Cyllene à verser à la SA Orange la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ condamné la SCI Cyllene aux entiers dépens.

Par déclaration au greffe du 5 décembre 2018, la SCI Cyllene a relevé appel de ce jugement.

Vu les dernières conclusions de la SCI Cyllene déposées au greffe le 8 avril 2020 aux termes desquelles elle demande à la cour :

‘ d’infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

‘ de condamner la SA Orange à lui payer les sommes de :

– 1 380 euros de frais d’élagage déjà engagés et de 1 800 de frais d’abattage à venir du pin qui menace de s’abattre sur la ligne, sommes à assortir des intérêts au taux légal à compter du 9 avril 2018 ;

– 1 350 euros de dommages-intérêts, soit 50 euros par mois à compter du 7 janvier 2019 à parfaire jusqu’à l’envoi d’une proposition par la SA Orange à la SCI Cyllene de convention conforme à l’article L.51 du code des postes et des télécommunications ;

‘ de condamner la SA Orange à procéder à l’enlèvement du poteau qui empiète côté ouest [Adresse 7] sur son terrain ;

‘ d’assortir cette condamnation d’une astreinte de 50 euros par jour de retard qui commencera à courir dans le délai d’un mois à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;

‘ de condamner la SA Orange à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens de première instance et d’appel ;

‘ de rejeter toutes demandes plus amples ou contraires ;

Vu les dernières conclusions de la SA Orange déposées au greffe le 30 avril 2019 aux termes desquelles elle demande à la cour :

‘ de confirmer le jugement déféré ;

‘ de rejeter toutes les demandes formées par la SCI Cyllene à son égard ;

‘ de condamner la SCI Cyllene lui payer 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ de condamner la SCI Cyllene aux entiers dépens ;

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 juin 2023.

MOTIFS DE L’ARRÊT

Sur les demandes afférents à l’élagage des arbres,

La SCI Cyllene fonde ses demandes de paiement des opérations d’élagage à l’encontre de la SA Orange sur l’article L. 51 du code des postes et des communications électroniques, dans sa rédaction applicable entre le 9 octobre 2016 et le 25 novembre 2018, qui dispose :

« I. ‘ Les opérations d’entretien des abords d’un réseau ouvert au public permettant d’assurer des services fixes de communications électroniques, telles que le débroussaillage, la coupe d’herbe, l’élagage et l’abattage, sont accomplies par le propriétaire du terrain, le fermier ou leurs représentants, que la propriété soit riveraine ou non du domaine public, afin de prévenir l’endommagement des équipements du réseau et l’interruption du service. A cette fin, l’exploitant du réseau ouvert au public est tenu de proposer au propriétaire du terrain, au fermier ou à leurs représentants l’établissement d’une convention. Sur le domaine public, les modalités de réalisation des coupes sont définies par la convention prévue au premier alinéa de l’article L. 46 ou par la permission de voirie prévue au troisième alinéa de l’article L. 47.

Par dérogation au premier alinéa du présent I, ces opérations sont accomplies par l’exploitant du réseau ouvert au public assurant des services fixes de communications électroniques :

1° Lorsque le propriétaire du terrain, le fermier ou leurs représentants ne sont pas identifiés ;

2° Lorsque l’exploitant et le propriétaire du terrain, le fermier ou leurs représentants en sont convenus ainsi par convention, notamment lorsque les coûts exposés par ces opérations sont particulièrement élevés pour ces derniers ou lorsque la réalisation de ces opérations présente des difficultés techniques ou pratiques de nature à porter atteinte à la sécurité ou à l’intégrité des réseaux.

II. ‘ En cas de défaillance de leur part, ces opérations sont accomplies par l’exploitant du réseau ouvert au public assurant des services fixes de communications électroniques, aux frais du propriétaire du terrain, du fermier ou de leurs représentants. L’exécution des travaux doit être précédée d’une notification aux intéressés, ainsi qu’au maire de la commune sur le territoire de laquelle la propriété est située. L’introduction des agents de l’exploitant en vue de procéder aux opérations d’entretien s’effectue selon les modalités prévues au huitième alinéa de l’article L. 48.

III. ‘ Sans préjudice des procédures prévues aux articles L. 2212-2-2 du code général des collectivités territoriales et L. 114-2 du code de la voirie routière et de la procédure mise en ‘uvre au titre de l’article L. 161-5 du code rural et de la pêche maritime, lorsque l’entretien des abords des équipements du réseau n’est pas assuré dans des conditions permettant de prévenir leur endommagement ou les risques d’interruption du service, le maire peut transmettre, au nom de l’Etat, une mise en demeure au propriétaire, en informant l’exploitant concerné de celle-ci. Si celle-ci reste infructueuse durant un délai de quinze jours, le maire peut notifier le constat de carence du propriétaire à l’exploitant aux fins qu’il procède lui-même aux travaux conformément au II du présent article. Si cette notification à l’exploitant reste elle-même infructueuse dans le délai de quinze jours, le maire peut faire procéder lui-même à ces opérations aux frais de l’exploitant, dans le respect des règles régissant les interventions des exploitants.

IV. ‘ (…) »

Sur la demande en paiement des frais d’élagage de 1 380 euros payés par la SCI Cyllene le 27 septembre 2015 et le 6 août 2016,

Ainsi que l’a exactement relevé le premier juge, l’article L. 51 du code des postes et des communications électroniques invoqué par la SCI Cyllene au soutien de ses demandes est entré en vigueur le 9 octobre 2016 et n’était donc pas applicable lorsque la SCI Cyllene a engagé ses frais d’élagage.

Lorsque la SCI a engagé ces frais de 780 euros le 27 septembre 2015 et de 500 euros le 6 août 2016, aucune disposition légale n’existait ‘ depuis l’abrogation du précédent texte par la loi n°96-659 du 26 juillet 1996 ‘ susceptible de justifier la prise en charge de ces frais d’élagage par la SA Orange.

L’arbre litigieux est planté sur la parcelle cadastrée BO n°[Cadastre 3] propriété de la SCI Cyllene.

En procédant à cet élagage, la SCI Cyllene n’a donc fait que remplir son obligation de propriétaire tenu d’entretenir ses végétaux et de couper les branches et racines qui dépassent la limite de sa parcelle et s’étendent sur la propriété d’autrui ou sur le domaine public.

La SCI Cyllene n’est donc pas fondée à se faire rembourser de ces frais par l’exploitant du réseau téléphonique.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.

Sur la demande de paiement des frais d’élagage futurs de 1 800 euros,

S’agissant de ces frais afférents à la période postérieure à l’entrée en vigueur de l’article L. 51 du code des postes et des communications électroniques, ce texte met expressément à la charge des propriétaires riverains les opérations d’entretien et d’élagage de leurs arbres susceptibles d’endommager les équipements du réseau.

En l’absence de convention conclue entre la SA Orange et la SCI Cyllene, cette dernière n’est pas fondée à se prévaloir de la dérogation prévue au premier alinéa du I de l’article précité.

Contrairement à la position soutenue par la SCI Cyllene dans ses écritures, le fait que l’exploitant du réseau soit tenu de proposer une telle convention au propriétaire du terrain, ce qui n’a pas été fait en l’espèce, n’a pas pour conséquence de dispenser le propriétaire concerné de supporter cette charge d’entretien.

Cette interprétation juridique du texte par la SCI Cyllene est d’autant plus erronée que la loi ne prévoit pas que cette convention entre les parties s’accompagne nécessairement d’un transfert de la charge d’entretien sur l’exploitant du réseau.

C’est donc à bon droit que le jugement déféré a rejeté la demande formée par la SCI Cyllene contre la SA Orange aux fins de lui faire supporter les frais d’élagage du pin abîmé planté sur sa propriété.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

Sur la demande d’enlèvement du poteau,

Ainsi que l’a exactement relevé le premier juge, la SCI Cyllene n’apporte pas la preuve de ce que le poteau téléphonique (un seul étant évoqué en cause d’appel au lieu de deux devant le tribunal) serait implanté sur la parcelle BO n°[Cadastre 3] dont elle est propriétaire.

Le plan topographique versé aux débats (pièce n°2) par la SCI Cyllene n’a pas la valeur d’un plan de bornage ni d’un procès-verbal de délimitation contradictoire de la parcelle.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de déplacement du poteau litigieux formée par la SCI Cyllene contre la SA Orange.

Sur la demande de dommages-intérêts,

Il s’agit d’une demande nouvelle formée devant la cour d’appel aux termes de laquelle la SCI Cyllene sollicite la condamnation de la SA Orange à lui payer 50 euros par mois à compter du 7 janvier 2019 et jusqu’à ce que la SA Orange conclue avec elle une convention telle que prévue par l’article L. 51 du code des postes et des communications électroniques.

Cette demande est recevable, conformément à l’article 566 du code de procédure civile, s’agissant d’une demande accessoire aux prétentions soumises au premier juge.

Cette demande indemnitaire fondée sur l’article 1240 du code civil impose à la SCI Cyllene de faire la triple démonstration de l’existence d’une faute imputable à la SA Orange, d’un préjudice et d’un lien de causalité directe entre cette faute et ce préjudice.

En l’espèce, la SCI Cyllene n’apporte pas la preuve d’une faute commise par la SA Orange au regard de l’obligation de proposer une convention conformément à l’article L. 51 du code des postes et des communications électroniques.

Il ressort au contraire des pièces versées aux débats que la SA Orange s’est montrée disponible pour échanger avec la SCI Cyllene, qu’elle a répondu à ses courriers et envoyé un de ses agents sur le terrain pour tenter de trouver une solution amiable au litige.

L’absence de solution amiable au présent litige tient uniquement à la ferme volonté de la SCI Cyllene de faire supporter ses frais d’élagage des arbres plantés sur sa propriété par l’exploitant du réseau, contrairement aux dispositions légales applicables depuis le 9 octobre 2016.

La SA Orange a également fait intervenir le maire de la commune, conformément à l’article L.51 précité, pour mettre en demeure la SCI Cyllene de respecter son obligation par courrier du 23 juin 2017.

En l’état de ce refus définitif d’appliquer la loi par la SCI Cyllene, la SA Orange s’est trouvée dans l’impossibilité de proposer une convention organisant les modalités d’entretien des végétaux et des arbres implantés sur la propriété de la SCI Cyllene. La SA Orange n’a donc commis aucune faute délictuelle.

En l’absence de faute démontrée, la demande de dommages-intérêts présentée par la SCI Cyllene contre la SA Orange doit donc être rejetée.

Sur les demandes accessoires,

Le jugement déféré est confirmé en ses dispositions ayant statué sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile.

La SCI Cyllene succombe intégralement en appel et doit donc en supporter les entiers dépens.

L’équité commande en outre de la condamner à verser à la SA Orange une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déclare recevable la demande nouvelle de dommages-intérêts formée par la SCI Cyllene en cause d’appel ;

Déboute la SCI Cyllene de cette demande ;

Condamne la SCI Cyllene à supporter les entiers dépens d’appel ;

Condamne la SCI Cyllene à payer à la SA Orange la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

Le greffier, Le président,

 


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