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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 50A
1re chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 03 JANVIER 2023
N° RG 21/06553 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UZ67
AFFAIRE :
[D] [U]
C/
S.A.S. PREMIUM ENERGY exerçant sout le nom commercial LA FEDERATION DE L’HABITAT E
COLOGIQUE (FHECO), FEDERATION HABITAT ECO (FHE), prise en la
personne de son représentant légal domicilié en cette quali
té audit siège
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Août 2021 par le Juge des contentieux de la protection de CHARTRES
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 1118000636
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 03/01/23
à :
Me Julien GIBIER
Me Banna NDAO
Me Mathieu KARM
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TROIS JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [D] [U]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Julien GIBIER de la SELARL GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000021 – N° du dossier 180468
APPELANT
****************
S.A.S. PREMIUM ENERGY exerçant sout le nom commercial LA FEDERATION DE L’HABITAT ECOLOGIQUE (FHECO), FEDERATION HABITAT ECO (FHE), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
N° SIRET : 522 01 9 3 22
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentant : Me Paul ZEITOUN de la SELEURL PZA PAUL ZEITOUN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1878 – Représentant : Me Banna NDAO, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 667 – N° du dossier 22/006
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
immatriculée au RCS de PARIS sous le n° B 542 097 902
N° SIRET : 542 097 902
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Mathieu KARM de la SCP PICHARD DEVEMY KARM, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000040 – N° du dossier 34666 – Représentant : Me Sébastien MENDES GIL de la SELARL CLOIX & MENDES-GIL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P173
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 18 Octobre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Philippe JAVELAS, Président, chargé du rapport, et Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,
Madame Laurence TARDIVEL, Vice présidente placée,
Greffier, lors des débats : Madame Anne-Sophie COURSEAUX,
EXPOSE DU LITIGE
Le 3 juillet 2017, M. [D] [U] a signé avec la société Premium Energy, exerçant sous le nom commercial Fédération Habitat écologique, un bon de commande pour la pose de panneaux aérovoltaïques, pour un montant de 29 900 euros TTC. La société Cetelem a consenti à M. [U], le même jour un crédit affecté d’un montant de 29 900 euros, remboursable en 144 mensualités de 207,64 euros.
Les panneaux ont été installés le 19 juillet 2017.
Un nouveau bon de commande, pour un montant de 15 300 euros TTC, a été signé le 18 septembre 2017 par M. [U], aux fins d’acquérir des panneaux photovoltaïques et une pompe à chaleur pour l’extension de sa maison.
Par acte de commissaire de justice délivré le 19 juillet 2018, M. [U] a assigné les sociétés Premium Energie et BNP Paribas Personal Finance devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chartres aux fins de voir principalement prononcer l’annulation, et subsidiairement la résolution, des contrats passés entre lui-même et la première défenderesse, et prononcer corrélativement l’annulation du contrat de crédit souscrit auprès de la seconde.
Par jugement contradictoire du 26 août 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chartres a :
– prononcé la jonction de la procédure enrôlée au greffe le 25 mai 2020 sous le numéro de rôle 11 20-125 avec celle enrôlée précédemment au greffe du tribunal d’instance de Chartres le 6 septembre 2018 sous le numéro 11 18-636,
– débouté M. [U] de l’ensemble de ses demandes formées tant à l’encontre de la société Premium Energy qu’à l’encontre de la société BNP Paribas Personal Finance,
– condamné M. [U] à payer à la société Premium Energy la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
– débouté les parties de toute demande plus ample ou contraire,
– condamné M. [U] à payer à la société Premium Energy la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [U] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [U] aux entiers dépens,
– ordonné l’exécution provisoire de la décision.
Par déclaration reçue au greffe le 28 octobre 2021, M. [U] a relevé appel de ce jugement.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 6 septembre 2022, M. [U], appelant, demande à la cour de :
– infirmer le jugement rendu le 26 août 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chartres en ce qu’il :
* l’a débouté de l’ensemble de ses demandes formées tant à l’encontre de la société Premium Energy qu’à l’encontre de la société BNP Paribas Personal Finance,
* l’a condamné à payer à la société Premium Energy la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
* a débouté les parties de toute demande plus ample ou contraire,
* l’a condamné à payer à la société Premium Energy la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
* l’a condamné à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
* l’a condamné aux entiers dépens,
* a ordonné l’exécution provisoire de la décision,
Statuant à nouveau,
– prononcer l’annulation, et subsidiairement la résolution, des contrats passés avec la société Premium Energy exerçant sous le nom commercial Fédération Habitat écologique,
– prononcer corrélativement l’annulation du contrat de crédit souscrit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance,
– l’autoriser, avant-dire droit, à suspendre le remboursement des échéances du crédit,
– condamner la société Premium Energy à reprendre possession, contre remboursement préalable et complet du prix de vente, soit 45 200 euros, des matériels vendus et à remettre en état son immeuble, sous astreinte de 100 euros par jour de retard,
– désigner, subsidiairement et avant-dire droit, tel expert qu’il plaira avec la mission habituelle,
– condamner, à titre infiniment subsidiaire si la cour rejette la demande de résolution, la société Premium Energy à lui verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts du fait des dysfonctionnements de l’installation,
– dire et juger que la société BNP Paribas Personal Finance a commis une faute la privant de sa créance de restitution, et en conséquence,
– le dispenser de restituer la somme de 29 900 euros prêtée par la société BNP Paribas Personal Finance,
– condamner la société BNP Paribas Personal Finance à lui rembourser les échéances perçues avec intérêts au taux légal à compter de la date du premier prélèvement et capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil,
– condamner en tout état de cause la société Premium Energy à le garantir de toutes condamnations pouvant être prononcées à son encontre au profit de la société BNP Paribas Personal Finance tendant au remboursement du prêt,
– condamner in solidum la société Premium Energy et la société BNP Paribas Personal Finance à lui verser la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner in solidum la société Premium Energy et la société BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 21 septembre 2022, la société Premium Energy, intimée, prie la cour de :
– la déclarer recevable et bien fondée en toutes ses demandes,
– rejeter toutes les prétentions et demandes formées à son encontre par M. [U],
– rejeter toutes les prétentions et demandes formées à son encontre par la société BNP Paribas Personal Finance,
– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Chartres en date du 26 août 2021 en toutes ses dispositions,
A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour ne confirmait pas le jugement rendu le 26 août 2021,
– débouter M. [U] de sa demande tendant à la voir condamnée à lui verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– débouter la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande à son encontre de remboursement du capital versé assorti des intérêts,
– débouter la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande de garantie à son encontre,
En tout état de cause,
– condamner M. [U] à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du caractère parfaitement abusif de l’action initiée par ce dernier,
– condamner M. [U] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [U] aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 24 mars 2022, la société BNP Paribas Personal Finance, intimée, demande à la cour de :
– confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chartres le 26 août 2021 en toutes ses dispositions,
A titre principal,
– déclarer irrecevable la demande de M. [U] en nullité du contrat conclu avec la société Premium Energy,
– déclarer, par voie de conséquence, irrecevable la demande de M. [U] en nullité du contrat de crédit conclu avec elle,
– dire et juger à tout le moins que les demandes de nullité des contrats ne sont pas fondées,
– débouter M. [U] de sa demande en nullité du contrat conclu avec la société Premium Energy, ainsi que de sa demande en nullité du contrat de crédit conclu avec elle et de sa demande en restitution des mensualités réglées,
– déclarer irrecevable la demande de M. [U] en résolution du contrat conclu avec la société Premium Energy,
– déclarer, par voie de conséquence, irrecevable la demande de M. [U] en résolution du contrat de crédit conclu avec elle,
– dire et juger, à tout le moins que les demandes de résolution des contrats ne sont pas fondées,
– débouter M. [U] de sa demande en résolution du contrat conclu avec la société Premium Energy, ainsi que de sa demande en résolution du contrat de crédit conclu avec elle et de sa demande en restitution des mensualités réglées,
– déclarer non fondée la demande de M. [U] visant à la suspension judiciaire du contrat de crédit affecté, à tout le moins, l’en débouter,
Subsidiairement, en cas de nullité ou résolution des contrats,
– déclarer irrecevable la demande de M. [U] visant à être déchargé de l’obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins l’en débouter,
– condamner, en conséquence, M. [U] à lui régler la somme de 29 900 euros en restitution du capital prêté,
– en tout état de cause, déclarer irrecevable la demande de M. [U] visant à la privation de sa créance, à tout le moins, le débouter de sa demande,
Très subsidiairement,
– limiter la réparation qui lui serait due eu égard au préjudice effectivement subi par l’emprunteur, à charge pour lui de l’établir et eu égard à la faute de l’emprunteur ayant concouru à son propre préjudice,
– limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour M. [U] d’en justifier,
A titre infiniment subsidiaire, en cas de privation de sa créance,
– condamner M. [U] à lui payer la somme de 29 900 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de sa légèreté blâmable,
– enjoindre à M. [U], de restituer, à ses frais, le matériel installé chez lui à la société Premium Energy dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l’arrêt, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d’électricité, et dire et juger qu’à défaut de restitution, il restera tenu du remboursement du capital prêté,
– subsidiairement, priver M. [U] de sa créance en restitution des sommes réglées du fait de sa légèreté blâmable,
– dire et juger, en tout état de cause, en cas de nullité des contrats, que la société Premium Energy est garante de la restitution du capital prêté, ce qui n’exonère toutefois pas l’emprunteur de son obligation lorsqu’il n’en a pas été déchargé,
– condamner, en conséquence, la société Premium Energy à garantir la restitution de l’entier capital prêté, et donc à lui payer la somme de 29 900 euros au titre de la créance en garantie de la restitution du capital prêté,
– subsidiairement, si la cour ne devait pas faire droit à la demande de garantie de restitution du capital prêté ou n’y faire droit que partiellement,
– condamner la société Premium Energy à lui payer la somme de 29 900 euros ou le solde, sur le fondement de la répétition de l’indu, et à défaut sur le fondement de la responsabilité,
En tout état de cause,
– condamner la société Premium Energy à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre vis-à-vis de M. [U],
– en conséquence, en cas de décharge de l’obligation de l’emprunteur sur le fondement de la responsabilité de la banque, condamner la société Premium Energy a lui régler la somme de 29 900 euros dans la limite toutefois de la décharge prononcée,
– débouter M. [U] de toutes autres demandes, fins et conclusions,
– débouter la société Premium Energy de ses demandes en ce qu’elles sont dirigées à son encontre,
– ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,
– en tout état de cause, condamner M. [U] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel de l’article 700 du code de procédure civile, le condamner aux entiers dépens de l’instance avec distraction au profit de la SCP Pichard.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 22 septembre 2022.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I) Sur la nullité des contrats de vente et de crédit
M. [U] soutient que les deux bons de commande qu’il a régularisés à la suite d’une opération de démarchage à son domicile, ne respectent pas les dispositions du code de la consommation, dès lors que certaines informations sont manquantes et plus précisément les procédés de démontage de la toiture, d’intégration et de mise en oeuvre des panneaux, le délai de livraison et d’installation, les bons litigieux se bornant à indiquer un délai de livraison maximum de quatre mois, les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations et sur la dénomination sociale du vendeur le coût détaillé du matériel, de chaque prestation.
Il indique, par ailleurs, que les nullités relatives entachant les bons de commande ne peuvent être couvertes par les conditions d’exécution du contrat en l’absence de connaissance du vice de sa part et d’intention de le réparer.
La société Premium Energy réplique que :
– les deux bons de commande litigieux sont conformes aux dispositions du code de la consommation : l’ensemble des caractéristiques essentielles exigées par le code de la consommation ont été expressément indiquées, le prix unitaire de chaque matériel n’avait pas à être mentionné, la stipulation du délai dans lequel le cocontractant s’engage à livrer et à installer les biens est conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation et aux dispositions de l’article L.111-1 du code de la consommation, toutes les informations relatives à la dénomination sociale du vendeur figurent aux bons de commande,
– les nullités alléguées par M. [U] sont relatives et ont été, en l’espèce, couvertes par les conditions d’exécution du contrat, dès lors que M. [U], qui avait connaissance des vices entachant les documents contractuels, du fait de la reproduction des articles du code de la consommation au verso des bons de commande litigieux, a entendu les réparer, en réceptionnant les matériels sans réserve et en laissant les contrats se poursuivre en payant régulièrement les échéances du prêt souscrit auprès de la banque.
La société BNP Paribas Personal Finance développe une argumentation analogue à celle de la société Premium Energy au soutien de sa demande de confirmation du jugement déféré en ce qu’il a débouté M. [U] de sa demande de résolution des contrats de vente et de crédit affecté. À titre liminaire, elle soulève un moyen d’irrecevabilité de la demande d’annulation tirée de la mauvaise foi de M. [U].
Réponse de la cour
A) recevabilité de la demande
La société BNP Paribas soutient que les conventions doivent être exécutées de bonne foi et que M. [U] est de mauvaise foi en essayant d’obtenir la nullité du contrat de vente tout en sachant qu’il conservera le bien acquis du fait de l’impossibilité matérielle pour la société venderesse de le récupérer.
Toutefois, le seul fait de remettre en cause un contrat postérieurement à l’expiration du délai de rétractation ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi alléguée de M. [U], qui agit en raison de la rentabilité économique de son acquisition qu’il estime insuffisante, alors qu’ils doit, par ailleurs, rembourser les échéances d’un prêt.
D’autant moins, que la société venderesse étant in bonis, rien ne fait obstacle à ce qu’elle puisse récupérer les matériels livrés à M. [U].
Aucune violation des dispositions de l’article 1134 ancien du code civil n’étant, en l’espèce, établies, le moyen ne pourra donc être accueilli.
La demande de M. [U] sera, par suite, jugée recevable.
B) Bien-fondé de la demande
Il n’est pas discuté que le contrat principal est soumis aux dispositions du code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement.
Les dispositions de l’article L221-9 du code de la consommation, prévues à peine de nullité du contrat en application de l’article L242 du même code, énoncent que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties.
Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L. 221-5.
(…) Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5.
Aux termes des dispositions de l’article L. 221-5 du code de la consommation, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, notamment les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2.
L’article L.111-1 du même code dispose qu’avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1. Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2. Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;
3. En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4. Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;
5. S’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;
6. La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés à l’article R111-1 du même code.
En l’espèce, les bons de commande en litige signés par M. [U] portent sur :
Bon de commande du 3 juillet 2017 : une centrale aérovoltaïque d’une puissance de 4000 wc comportant 15 panneaux de marque Soluxtex d’une puissance unitaire de 300 WC, un onduleur de marque Effekta, un optimisateur Solaredge, un système de récupération de chaleur solaire + bouches d’insufflation + rejet surplus air chaud + moteur GSE AIR’SYSTEM pour une surface de captable de 30 m², moyennant un prix de 29 900 euros TTC, financé par l’intermédiaire de la banque Cetelem auprès de laquelle un contrat de crédit a été signé le même jour, livrable ‘ dans un délai maximum de 4 mois’,
Bon de commande du 18 septembre 2017 : une centrale photovoltaïque d’une puissance de 1800 wc, comprenant six panneaux de marque Soluxtex d’une puissance unitaire de 300 wc, un micro onduleur emphase, une pompe à chaleur Air/air de marque Airwelle ou équivalent dotée de deux unités intérieures et d’un compresseur, moyennant un prix de 15 300 euros TTC, payé au comptant et en trois échéances par M. [U], et livrable ‘ dans un délai maximum de 4 mois’.
La mention pré-imprimée figurant dans les bons de commande litigieux, selon laquelle la livraison des matériaux et la pose auront lieu dans un délai maximum de 4 mois, est irrégulière au regard des exigences de l’article L. 111-1, 3°, du code de la consommation, dès lors que cette mention ne distingue pas entre le délai de pose des modules et celui de réalisation des prestations à caractère administratif et qu’un tel délai global ne permet pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise le moment de l’exécution définitive de ses obligations par le vendeur (Cass. 1re civ., 15 juin 2022, n° 21-11.747).
Les bons de commandes encourent , par suite et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres griefs invoqués par M. [U], l’annulation.
La société venderesse et la banque font, cependant, valoir que cette nullité a été couverte en raison de l’exécution volontaire du contrat par M. [U].
Il est de règle que la nullité qui découle de l’irrégularité formelle du contrat au regard des dispositions régissant la vente hors établissement et dont la finalité est la protection du consommateur, est une nullité relative.
L’article 1182 du code civil, énonce que la confirmation est l’acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Cet acte mentionne l’objet de l’obligation et le vice affectant le contrat.
La confirmation ne peut intervenir qu’après la conclusion du contrat.
L’exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation. En cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu’après que la violence a cessé.
La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers.
Il s’en déduit que la confirmation d’un acte nul impose, d’une part, la connaissance du vice l’ayant affecté et, d’autre part, l’intention de le réparer.
En matière de démarchage, la connaissance du vice par le consommateur résulte de la reproduction, sur le bon de commande, des articles L. 121-23 à L. 121-26 anciens du code de la consommation (Cass. 1er civ. 9 décembre 2020, n°18-25.686).
Cependant, il est constaté que les articles du code de la consommation reproduits au verso des bons de commande signés les 3 juillet et 18 septembre 2017 -article L. 111-1, L. 221-18, L. 121-17 – ne correspondent pas à ceux en vigueur au jour de la signature des bons mais aux textes qui étaient en vigueur du 1er juillet 2014 au 1er juillet 2016, comme le souligne pertinemment M. [U], de sorte qu’ils ne pouvaient permettre à ce dernier d’avoir précisément connaissance des irrégularités affectant les bons de commande. Le seul fait que M. [U] ait laissé le contrat s’exécuter en acceptant la livraison, en signant l’attestation de réception des travaux, en acceptant qu’il soit procédé au raccordement de l’installation et ait commencé à rembourser les échéances du crédit, ne peut s’analyser en une confirmation tacite de l’obligation entachée de nullité, alors que ces faits ne démontrent pas qu’il a eu connaissance du vice affectant le bon de commande en litige et l’intention de le réparer.
En conséquence, il y a lieu d’annuler le contrat de vente et, subséquemment, le contrat de crédit affecté.
En effet, aux termes de l’article L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé. Il n’est pas contesté que le crédit consenti par la société BNP Paribas Personal Finance est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services. En raison de l’interdépendance des deux contrats, l’annulation du contrat principal conclu avec la société Premium energy emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la société BNP Paribas Personal Finance.
Il appartiendra à la société Premium energy, comme sollicité par M. [U], de reprendre le matériel et de procéder à la remise en état dans un délai de quatre mois à compter de la signification du présent arrêt, contre remboursement préalable et complet du prix de vente, soit la somme de 45 200 euros.
Passé ce délai et à défaut d’exécution, la société Premium Energy sera condamné à verser à M. [U] une astreinte de 50 euros par jour de retard.
II) Sur la créance de restitution de la société BNP Paribas Personal Finance
L’annulation du prêt affecté a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu’elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d’autre.
M. [U] fait valoir que la banque a commis une faute en ne vérifiant pas la régularité du bon de commande et en libérant hâtivement les fonds s’en s’être assurée, au préalable, du bon achèvement de l’ensemble des prestations financées, de sorte qu’il doit être exonéré de son obligation de restituer à la banque les fonds qui lui ont été prêtés.
La société BNP Paribas Personal Finance réplique qu’elle n’a commis aucune faute :
– dans la vérification formelle du bon de commande, aucun texte ne mettant à sa charge l’obligation de vérifier cette régularité, même s’il existe une interdépendance des contrats, et les irrégularités relevées constituant de simples insuffisances de mention et non des omissions complètes, c’est-à-dire des irrégularités manifestes qu’elle aurait été en mesure de détecter,
– liée à la vérification de la prestation financée, l’emprunteur ayant lui-même disposé des fonds en donnant l’ordre de paiement, et elle-même n’ayant versé les fonds qu’au vu d’un procès-verbal de réception.
Elle ajoute que, même si une faute était retenue à son encontre, elle ne serait pas de nature à engager sa responsabilité, en l’absence de préjudice en lien causal avec cette faute, l’installation de M. [U] étant fonctionnelle.
La banque sollicite, dès lors, la condamnation de M. [U] à lui restituer le capital emprunté, soit la somme de 29 900 euros toutes taxes comprises.
Réponse de la cour
M. [U], en premier lieu, reproche à la banque de ne pas avoir procédé, préalablement à la libération des fonds, aux vérifications qui lui auraient permis de constater que le contrat de vente et d’installation était affecté d’une cause de nullité.
Dans la logique de l’opération commerciale unique et afin de protéger le consommateur, le prêteur est tenu de vérifier la régularité formelle du contrat principal et d’informer l’emprunteur d’une éventuelle irrégularité afin que celui-ci puisse confirmer le contrat ou y renoncer. A défaut, le prêteur commet une faute susceptible d’engager sa responsabilité.
En ne vérifiant pas la régularité du bon de commande, la société BNP Paribas personal finance a donc, et contrairement à ce qu’elle soutient, commis une faute.
Cependant, M. [U], sur qui repose la charge de la preuve du préjudice qu’il dit avoir subi, ne caractérise pas de préjudice en lien causal avec cette faute de la banque, dès lors qu’il ressort des pièces de la procédure – procès-verbal de réception des travaux, attestation de conformité du consuel, courrier de la société Enedis du 18 octobre 2017 informant M. [U] de la mise en service de son installation – que l’installation a été réceptionnée sans réserve et a été raccordée, et que cette installation est parfaitement fonctionnelle.
M. [U] reproche, en deuxième lieu, à la société BNP Paribas Personal Finance d’avoir libéré hâtivement les fonds, sans s’être assurée au préalable de l’exécution complète du contrat principal.
Dans la logique de l’opération commerciale unique, l’emprunteur ne saurait être tenu d’un engagement financier qui n’aurait pas pour contrepartie la livraison d’un bien ou l’exécution d’une prestation de service. L’article L. 312-48 du code de la consommation prévoit du reste que les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien
ou de la fourniture de la prestation. Il est donc justifié que le prêteur s’enquière de l’exécution complète du contrat principal et ne délivre les fonds qu’après une telle exécution, sous peine de commettre une faute.
L’emprunteur qui détermine l’établissement de crédit à libérer les fonds au vu d’une attestation de livraison n’est pas recevable à soutenir ensuite, au détriment du prêteur, que le bien ne lui a pas été livré (1 Civ., 14 novembre 2001, pourvoi n° 99-15.690).
Il incombe donc au prêteur de vérifier que l’attestation de fin de travaux qui lui est adressée suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée.
En l’espèce, le document destiné à la société BNP Paribas personal finance et qui a été signé par M. [U], est libellé ainsi :
‘ Dossier n°……
Le vendeur ou prestataire de services certifie sous sa responsabilité que le matériel conforme au bon de commande a été livré.
L’acheteur n’a pas demandé, dans les termes prévus par la loi, la réduction de 14 à 3 jours du délai de rétractation dont il dispose
Le montant du versement comptant a été intégralement versé par l’acheteur.
Le client demande à BNP Paribas d’adresser le financement de 29 900 euros correspondant à cette opération de vente ou prestation de services dans les conditions prévues au contrat et ce en accord avec ce dossier.’
Cette attestation est signée par l’emprunteur, datée du 19 juillet 2017, si elle est de nature à identifier l’opération financée, n’est pas propre à caractériser l’exécution complète du contrat principal, dès lors que le bon de commande stipulait que le raccordement au réseau et les démarches administratives étaient comprises dans la commande.
En outre, l’attestation de fin de travaux est rédigée par la société prestataire qui exprime elle-même la demande de paiement et non pas par l’emprunteur qui, par sa signature, se contente d’acquiescer à cette demande.
Ce libellé aurait dû inciter le prêteur à opérer une vérification auprès de son client pour s’assurer que les prestations avaient effectivement été achevées.
La société BNP Paribas personal finance a donc commis une faute en libérant les fonds sans s’assurer que la prestation financée avait été entièrement exécutée.
Pour autant, il est constant que l’installation a été effectivement raccordée au réseau public le 18 octobre 2017, sans qu’aucun défaut de conformité des travaux y fasse obstacle et que l’ acquéreur dispose d’une centrale photovoltaïque opérationnelle, en sorte qu’il a reçu la contrepartie du contrat conclu avec la société venderesse et ne démontre aucun préjudice en lien causal avec les conditions de libération du capital prêté.
Il n’y a pas lieu, en considération de ce qui précède, de dispenser M. [U] de la restitution du capital emprunté.
M. [U] sera, par suite, condamné à payer à la société BNP Paribas personal finance la somme de 29 900 euros au titre de la restitution du capital emprunté, sous déduction des échéances acquittées, outre les intérêts au taux légal à compter de la présente décision.
C’est en vain que M. [U] sollicite la capitalisation des intérêts dus sur les échéances remboursées, la capitalisation des intérêts étant, en matière de crédit à la consommation, prohibée par les dispositions de l’article L. 312-23 devenu L. 313-52 du code de la consommation.
Cette demande sera donc rejetée.
III) Sur les demandes reconventionnelles de la société BNP Paribas personal finance à l’encontre de la société venderesse
La société BNP Paribas personal finance demande à être garantie par la venderesse du remboursement du capital prêté, en application des dispositions de l’article L. 312-56 du code de la consommation, ou, à tout le moins, à ce que la venderesse soit condamnée au paiement du capital emprunté sur le fondement de la répétition de l’indu, dès lors qu’elle a réceptionné une somme de la banque qui se trouve dépourvue de tout fondement, la société Premium energy n’ayant aucune créance à l’encontre de la banque.
La banque demande, en outre, que la société venderesse soit condamnée à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre vis-à-vis de l’emprunteur ou à lui payer des dommages et intérêts équivalents au montant du capital emprunté.
La société Premium Energy s’oppose à la demande de la banque, motifs pris de ce qu’elle n’a commis aucune faute et que la banque a elle-même commis des fautes en ne vérifiant pas la régularité du bon de commande et en libérant hâtivement les fonds.
Réponse de la cour
L’annulation du contrat principal étant survenue du fait de la société Premium energy, elle sera condamnée à garantir la société BNP Paribas Personal Finance de la restitution par M. [U] du capital emprunté sauf à déduire les mensualités acquittées, ce conformément aux dispositions de l’article L. 311-33 du code de la consommation devenu L. 312-56 du code de la consommation.
La société Premium energy ne peut, pour se soustraire à son obligation de garantie, invoquer la faute du prêteur qu’elle a elle-même provoquée en soumettant à l’emprunteur un bon de commande non conforme aux dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile et en sollicitant prématurément la libération des fonds.
Il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de garantie formée par M. [U] à l’encontre de la société Premium Energy.
IV) Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive de la société Premium Energy (3 000 euros)
Le débouté de la société Premium Energy de la totalité de ses demandes par le présent arrêt infirmatif emporte rejet de cette demande.
V) Sur les demandes accessoires
La société Premium Energy qui succombe au principal, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe
Infirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;
Statuant à nouveau,
Déclare recevable la demande de M. [D] [U] en nullité du contrat conclu avec la société Premium Energy, exerçant sous le nom Fédération habitat écologique ;
Prononce l’annulation des contrats conclus les 3 juillet et 18 septembre 2017 entre M. [D] [U] et la société Premium energy exerçant sous le nom Fédération habitat écologique ;
Dit qu’il appartiendra à la société Premium energy exerçant sous le nom commercial Fédération habitat écologique de reprendre les matériels et de procéder à la remise en état de l’immeuble de M. [D] [U] dans le délai de quatre mois à compter de la signification du présent arrêt, contre remboursement préalable et complet du prix de vente, soit la somme de 45 200 euros ;
Dit qu’à défaut d’exécution par la société Premium energy, exerçant sous le nom commercial Fédération habitat écologique de s’exécuter dans le délai imparti, elle devra payer à M. [D] [U] une astreinte de 50 euros par jour de retard ;
Constate l’annulation de contrat de crédit affecté conclu entre M. [D] [U] et la société BNP Paribas Personal Finance exerçant sous l’enseigne Cetelem ;
Dit n’y avoir lieu, du fait de cette annulation, à suspendre le remboursement des échéances à venir du crédit ;
Condamne M. M. [D] [U] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 29 900 euros, au titre de la restitution du capital emprunté sous déduction des échéances acquittées outre les intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
Condamne la société Premium energy exerçant sous le nom commercial Fédération habitat écologique à garantir la société BNP Paribas personal finance de la restitution par M. [D] [U] du capital emprunté sauf à déduire les mensualités acquittées ;
Déboute M. [D] [U] du surplus et de ses autres demandes ;
Déboute la société Premium energy exerçant sous le nom commercial Fédération habitat écologique de la totalité de ses demandes ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
Condamne la société Premium energy, exerçant sous le nom commercial Fédération habitat écologique, à payer à M. [D] [U] la somme de 5 000 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société Premium energy, exerçant sous le nom commercial Fédération habitat écologique, aux dépens de première instance et d’appel.
– prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Mme DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,