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2ème Chambre
ARRÊT N° 34
N° RG 19/07870 – N° Portalis DBVL-V-B7D-QJXL
(1)
SAS EXPERT SOLUTION ENERGIE
C/
M. [J] [X]
SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
– Me Laurent FRENEHARD
– Me Yves HONHON
-Me Erwan LECLERCQ
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 27 JANVIER 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 22 Novembre 2022
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 27 Janvier 2023 par mise à disposition au greffe
****
APPELANTE :
SAS EXPERT SOLUTION ENERGIE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Laurent FRENEHARD de la SELARL ACTAVOCA, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Cécile HUNAULT CHEDRU, Plaidant, avocat au barreau de ROUEN
INTIMÉS :
Monsieur [J] [X]
né le 18 Avril 1955 à [Localité 5]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représenté par Me Yves HONHON, Postulant, avocat au barreau de NANTES
Représenté par Me Ariane VENNIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE exerçant sous enseigne CETELEM
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Erwan LECLERCQ de la SCP LECLERCQ & CASTRES, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Laure REINHARD, Plaidant, avocat au barreau de NIMES
INTERVENANTE :
S.E.L.A.R.L. ATHENA, prise en la personne de Me [Z] [N], es qualités de liquidateur judiciaire de la SAS EXPERT SOLUTION ENERGIE
[Adresse 3]
[Adresse 3]
N’ayant pas constitué avocat, assignée par acte d’huissier le 30 Décembre 2021 à personne morale
2
EXPOSÉ DU LITIGE :
À la suite d’un démarchage à domicile, M.[J] [X] a, selon bon de commande du 23 mars 2017, commandé à la société Expert Solution Énergie (la société ESE) la fourniture et la pose d’une installation photovoltaïque, d’un ballon thermodynamique et d’un kit de relamping, moyennant le prix de 30 600 euros TTC.
En vue de financer cette opération, la société BNP Paribas Personal Finance (la BNP PPF), exerçant sous la dénomination commerciale Cetelem, a, selon offre acceptée le même jour, consenti à M. [X] un prêt de 30 600 euros au taux de 4,70 % l’an, remboursable en 180 mensualités de 241,91 euros, après un différé de remboursement de 180 jours.
Les fonds ont été versés à la société ESE au vu d’un bon de fin de travaux et d’une demande de déblocage des fonds du 6 mai 2017, l’installation ayant été raccordée au réseau en vue de la revente de l’électricité produite le 19 juin 2017.
Prétendant que le bon de commande était irrégulier et que l’installation ne permettait pas d’obtenir le rendement promis, M. [X] a, par acte du 24 septembre 2019, fait assigner la société ESE et la BNP PPF devant le tribunal d’instance de Brest en annulation des contrats de vente et de prêt.
Par jugement du 24 septembre 2019, le premier juge a :
prononcé la nullité du contrat en date du 23 mars 2017 conclu entre M. [X] et la société ESE,
prononcé la nullité du contrat en date du 23 mars 2017 conclu entre M. [X] et la BNP PPF,
condamné la BNP PPF à restituer les sommes déjà versées,
débouté les parties du surplus de leurs demandes,
condamné la BNP PPF à verser à M. [X] la somme de 2 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
ordonné l’exécution provisoire du jugement,
condamné la BNP PPF aux dépens.
La société ESE a relevé appel de cette décision le 6 décembre 2019, pour demander à la cour de :
dire que l’annulation du contrat conclu avec M. [X] le 23 mars 2017 n’est pas encourue,
par suite, débouter M. [X] et la BNP PPF des demandes formulées à l’encontre de la société ESE,
condamner M. [X] au paiement d’une indemnité de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel.
Le tribunal de commerce d’Angers ayant, par jugement du 7 juillet 2021, prononcé la liquidation judiciaire de la société ESE, la BNP PPF a, par acte du 30 décembre 2021, fait assigner en intervention forcée devant la cour son liquidateur, la SELARL Athena prise en la personne de Mme [Z] [N].
Celle-ci n’a cependant pas constitué avocat.
Ayant formé appel incident, la BNP PPF demande quant à elle à la cour de :
juger n’y avoir lieu de prononcer la nullité du contrat principal et du contrat de crédit affecté,
par conséquent, débouter M. [X] de ses demandes,
subsidiairement, en cas d’annulation des contrats, juger que la BNP PPF n’a commis aucune faute et que M. [X] ne justifie pas de l’existence d’un préjudice,
par conséquent, condamner M. [X] au remboursement du capital prêté de 30 600 euros, outres les intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition des fonds,
débouter M. [X] de toute autre demande,
condamner la société ASE à garantir le remboursement de la somme prêtée de 30 600 euros à la BNP PPF,
en tout état de cause, condamner M. [X] au paiement d’une indemnité de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d’appel.
M. [X] conclut quant à lui à la confirmation de la décision attaquée et sollicite en outre la condamnation solidaire de la société ESE et de la BNP PPF au paiement d’une indemnité de 3500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d’appel.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées pour la société ESE le 2 septembre 2020, pour la BNP PPF le 28 juillet 2022 et pour M. [X] le 23 juin 2020, l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 13 octobre 2022.
EXPOSÉ DES MOTIFS :
Il sera d’abord observé que, bien que dessaisie au profit de son mandataire judiciaire de ses droits et actions du fait de la procédure de liquidation judiciaire dont elle fait l’objet, la société ASE conserve un droit propre, distinct de celui du liquidateur, pour contester la fixation de créances à son passif .
La cour demeure donc saisie des contestations exprimées dans les conclusions qu’elle avait déposées alors qu’elle était encore in boni, lesquelles sont en toute hypothèse reprises par la BNP PPF.
Aux termes des articles L 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l’occasion d’une commercialisation hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
le nom du professionnel, ou la dénomination sociale et la forme juridique de l’entreprise, l’adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,
le cas échéant, son numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
les informations relatives à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte,
son éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l’assureur ou du garant,
les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,
le prix du bien ou du service,
les modalités de paiement,
en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,
les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,
s’il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,
la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,
lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation,
le numéro d’inscription du professionnel au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
s’il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et identifié par un numéro individuel en application de l’article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d’identification,
l’éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l’engagement.
Pour annuler le contrat de vente régularisé le 25 novembre 2015, le premier juge a retenu que le bon de commande était irrégulier en ce qu’il ne mentionnait ni la superficie, ni le poids, ni les références techniques permettant d’identifier le matériel vendu, ni les caractéristiques de l’onduleur, ni la date de livraison, ni le prix des démarches administratives à prévoir, ni le prix unitaire du matériel à installer.
M. [X] argue en outre de ce que le bon de commande ne mentionne ni la marque, ni le modèle, ni la capacité du ballon thermodynamique, ni le modèle et le type des panneaux photovoltaïques, ni la puissance et le modèle de l’onduleur, ni les conditions de paiement, et que le bordereau de rétractation ne précise pas dans quel délai il doit être envoyé.
Le bon de commande définit cependant l’objet de la vente comme portant sur un ‘pack GSE12 GSE Air System’ comprenant 12 panneaux photovoltaïques de marque Solarworld et de puissance de 285 Wc, un onduleur de marque Enphase, un kit GSE Intégration, un boîtier DC, le câblage, l’installation, le raccordement et les démarches administratives’.
Il était aussi précisé que l’installation aurait une puissance globale de 3 420 Wc, que la technologie des panneaux était de type monocristallin et que serait également fourni un ballon thermodynamique ainsi qu’un kit de relamping.
Or, les textes précités n’exigent nullement que le prix unitaire de chacun des biens fournis ou de chacune des prestations accessoires de pose et de démarches administratives promises soient mentionnées dans le contrat, seul l’indication du prix global à payer étant requise.
De même, il ne résulte pas de l’article R. 221-1 du code de la consommation et de son annexe, dans leur rédaction applicable à la cause, que le formulaire de rétractation lui-même contienne l’indication du délai dans lequel il doit être envoyé au fournisseur, cette information figurant en l’espèce dans les conditions générales du contrat.
D’autre part, contrairement à ce que prétend M. [X], le bon de commande mentionne le type de technologie des panneaux monocristallins, ainsi que le nombre et le montant des échéances de remboursement du crédit affecté au financement de l’opération, et, d’ailleurs, les caractéristiques essentielles du prêt.
En outre, le contrat satisfait à l’obligation d’indication du délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien et à exécuter le service accessoire de pose, en mentionnant qu’un technicien réaliserait une visite préparatoire à l’installation dans les deux mois, que les biens fournis seraient livrés dans les trois mois de cette pré-visite, que l’installation aurait lieu dans le mois de la livraison et que la demande de raccordement au réseau serait formalisée dès réception du récépissé de déclaration administrative de travaux.
Enfin, rien ne démontre que la surface, le poids, les références techniques du matériel fourni, ainsi que les caractéristiques techniques de l’onduleur et du kit de relamping soient entrés dans le champ contractuel et aient déterminé le consentement du consommateur, de sorte qu’ils ne peuvent être regardés comme des caractéristiques essentielles de l’installation fournie.
En revanche, il est exact que le bon de commande ne mentionne ni la marque, ni la capacité du ballon thermodynamique.
Or, la capacité d’un appareil de production d’eau chaude est une caractéristique déterminante pour l’acquéreur, puisqu’elle conditionne l’adéquation du produit fourni aux besoins de l’utilisateur.
Au surplus, sa marque, dont la fonction est de garantir l’origine d’un produit commercialisé, est une caractéristique essentielle pour le consommateur démarché qui doit ainsi pouvoir identifier le fabricant garant de la qualité, de la pérennité et de la sécurité de ses produits, et qui doit aussi pouvoir procéder utilement à des comparaisons de prix tenant compte de la technologie mise en oeuvre durant le délai de rétractation qui lui est ouvert par la loi.
Cependant, la société ESE et la BNP PPF soutiennent à juste titre que cette irrégularité, qui n’est sanctionnée que par une nullité relative, a, conformément aux dispositions de l’article 1338 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause, été confirmée par M. [X], lequel a renoncé en connaissance de cause à l’invoquer en laissant les travaux s’exécuter, la remise des fonds au fournisseur se réaliser, et le raccordement au réseau s’effectuer.
En effet, contrairement à ce que soutient M. [X] prétend, le bon de commande reproduisait bien de façon parfaitement lisible les dispositions de l’article L. 111-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la cause, énonçant que le contrat devait notamment comporter les caractéristiques essentielles des produits fournis.
Dès lors, en laissant exécuter les travaux d’installation, en prononçant, le 6 mai 2017, la réception sans réserve des travaux tout en signant, le même jour, un appel de fonds donnant ordre au prêteur de verser le financement emprunté entre les mains du fournisseur après installation des panneaux et du ballon d’eau chaude, puis en faisant procéder au raccordement de l’installation au réseau en vue de la revente de l’électricité produite, alors qu’il ne pouvait ignorer, à la lecture du bon de commande, que celui-ci aurait dû comporter l’indication de la marque et de la capacité du ballon thermodynamique, M. [X] a, en pleine connaissance de l’irrégularité du bon de commande, entendu renoncer à la nullité du contrat en résultant et, de ce fait, manifesté la volonté non équivoque de couvrir l’irrégularité de cet acte.
Étant observé que la cour n’est plus saisie de moyens de nullités du contrat tenant à l’insuffisance de performance de l’installation, il convient donc de réformer le jugement attaqué en ce qu’il a prononcé l’annulation des contrats de vente et, subséquemment, de prêt.
Il n’y a pas matière à application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque, tant en première instance qu’en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Infirme le jugement rendu le 24 septembre 2019 par le tribunal d’instance de Brest en toutes ses dispositions ;
Déboute M. [X] de ses demandes ;
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [X] aux dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT