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2ème Chambre
ARRÊT N° 272
N° RG 20/04091 – N° Portalis DBVL-V-B7E-Q4DE
(1)
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
C/
M. [R] [M]
Mme [K] [Z] épouse [M]
Me [U] [N]
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
– Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN
– Me Hugo CASTRES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 26 MAI 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Aichat ASSOUMANI, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 14 Mars 2023 , tenue en double rapporteur , sans opposition des parties par Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre, et Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
ARRÊT :
Réputé Contradictoire, prononcé publiquement le 26 Mai 2023 par mise à disposition au greffe
****
APPELANTE :
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de SYGMA BANQUE
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Hugo CASTRES de la SCP LECLERCQ & CASTRES, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par la SCPA RD AVOCATS & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉS :
Monsieur [R] [M]
né le 02 Mai 1980 à [Localité 7] (95)
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Isabelle FARCY, Plaidant, avocat au barreau de NANTES
Madame [K] [Z] épouse [M]
née le 07 Octobre 1983 à [Localité 8] (44)
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN,Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Isabelle FARCY, Plaidant, avocat au barreau de NANTES
Maître [U] [N] (étude ALLIANCE), es qualité de mandataire liquidateur de la société SAS IC GROUPE anciennement dénommée IMMOCONFORT
[Adresse 3]
[Localité 6]
N’ayant pas constitué avocat, assignée par acte d’huissier le 08 décembre 2020 à personne
2
EXPOSÉ DU LITIGE :
A la suite d’un démarchage à domicile, M. [R] [M] a, selon bon de commande du 2 mars 2016, commandé à la société Immo Confort la fourniture et l’installation de panneaux photovoltaïques, moyennant le prix de 19 000 euros TTC.
En vue de financer cette opération, la société Sygma Banque (la société Sygma) a, selon offre acceptée le même jour, consenti à M. [M] et Mme [K] [Z] (les époux [M]) un prêt de 19 000 euros au taux de 5,75 % l’an, remboursable en 144 mensualités de 222,22 euros, assurance emprunteur comprise, après un différé de remboursement de 12 mois.
Les fonds ont été versés à la société IC Groupe au vu d’un certificat de livraison du 17 mars 2016, et le prêt a été remboursé par anticipation le 30 mai 2016.
Prétendant que le bon de commande était irrégulier et que l’installation ne permettait pas d’obtenir le rendement promis, les époux [M] ont, par actes du 20 décembre 2017, fait assigner la société Immo Confort et la société BNP Paribas Personal Finance (la BNP PPF), présentée comme venant aux droits de la société Sygma, devant le tribunal d’instance (devenu le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire) de Nantes, en annulation des contrats de vente et de prêt, et en remboursement des sommes versées au titre du prêt.
Par actes des 6 juin 2018 et 11 février 2019, ils ont fait assigné en intervention forcée la société Immo Confort, devenue IC Groupe, puis, appelé à la cause la SELAS Alliance, ès-qualités de liquidateur de la société IC Groupe, mise en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 13 décembre 2018.
Par jugement du 12 juin 2020, le premier juge a :
constaté la mise en cause de la SELAS Alliance, représentée par Mme [U] [N], en sa qualité de mandataire liquidateur de la société IC Groupe, ayant exercé sous le nom Immo Confort, et l’a déclarée recevable,
prononcé l’annulation du contrat passé entre la société IC Groupe et les époux [M] le 2 mars 2016, portant sur la mise en place d’une installation photovoltaïque,
fixé la créance des époux [M] au passif de la liquidation de la société IC Groupe à hauteur de 19 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
rappelé que le mandataire liquidateur pourra reprendre l’ensemble des matériels posés au domicile des époux [M],
prononcé l’annulation du contrat de crédit affecté conclu le 2 mars 2016 entre les époux [M] et la BNP PPF,
condamné la BNP PPF à rembourser aux époux [M], la somme de 19 487,23 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 20 décembre 2017,
débouté la BNP PPF de sa demande de restitution par les époux [M] du capital emprunté de 19 000 euros,
fixé au passif de la liquidation de la société IC Groupe la créance de la BNP PPF à hauteur de 9 500 euros,
débouté les époux [M] de leur demande de dommages et intérêts,
condamné la BNP PPF à payer aux époux [M] la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
fixé au passif de la liquidation de la société IC Groupe la créance des époux [M] au titre de l’article 700 du code de procédure civile, à hauteur de 3 000 euros,
condamné, in solidum, la BNP PPF et la SELAS Alliance, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société IC Groupe, aux dépens,
ordonné l’exécution provisoire.
La BNP PPF a relevé appel de ce jugement le 28 août 2020, pour demander à la cour de :
réformer cette décision en ce qu’elle a prononcé l’annulation des contrats et retenu une faute à l’encontre du prêteur le privant de son droit à restitution du capital prêté,
dire n’y avoir lieu à prononcer la nullité du contrat principal et du contrat de crédit,
par conséquent, débouter les époux [M] de l’intégralité de leurs demandes,
subsidiairement, en cas d’annulation ou de résolution des contrats, dire que la BNP PPF n’a commis aucune faute et que les époux [M] ne justifient pas de l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité à l’égard du prêteur,
par conséquent, dire que le prêt a d’ores et déjà été remboursé par anticipation et que la BNP PPF devra conserver le bénéfice du capital prêté remboursé par anticipation, à savoir la somme de 19 000 euros,
débouter les époux [M] de toute autre demande,
à titre infiniement subsidiaire, fixer sa créance, au passif de la liquidation judiciaire de la société IC Groupe à hauteur de 19 000 euros,
en tout état de cause, condamner les époux [M] au paiement d’une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d’appel.
Les époux [M] demandent quant à eux à la cour de :
confirmer le jugement attaqué, sauf en ce qu’il les a déboutés de leurs demandes de dommages-intérêts pour préjudice moral,
subsidiairement, retenir la responsabilité contractuelle, ou subsidiairement délictuelle, de la BNP PPF,
condamner la BNP PPF à leur restituer la somme de 19 487,23 euros, avec intérêts de droit à compter du règlement anticipé du 6 juin 2016, au titre du contrat du 2 mars 2016 annulé,
fixer leur créance à titre indemnitaire à la somme de 19 487,23 euros, avec intérêts de droit à compter du jugement pour le préjudice matériel,
débouter la BNP PPF de l’ensemble de ses demandes,
en tout état de cause, réformer le jugement attaqué en ce qu’il les a déboutés de leur demande de dommages et intérêts pour le préjudice moral et condamner la BNP PPF, venant aux droits de la société Sygma, à leur payer la somme de 1 500 euros chacun en réparation de ce préjudice,
condamner la BNP PPF à leur payer la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens,
fixer leur créance au passif de la liquidation judiciaire de la société IC Groupe à la somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel, ainsi qu’aux dépens.
La SELAS Alliance, ès-qualités de liquidateur de la société IC Groupe n’a pas constitué avocat devant la cour.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées pour la BNP PPF le 2 janvier 2023 et pour les époux [M] le 20 février 2023, l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 23 février 2023.
EXPOSÉ DES MOTIFS :
Sur la nullité du contrat principal
Aux termes des articles L 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l’occasion d’une commercialisation hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
le nom du professionnel, ou la dénomination sociale et la forme juridique de l’entreprise, l’adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,
le cas échéant, son numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
les informations relatives à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte,
son éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l’assureur ou du garant,
les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,
le prix du bien ou du service,
les modalités de paiement,
en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,
les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,
s’il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,
la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,
lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation,
le numéro d’inscription du professionnel au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
s’il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et identifié par un numéro individuel en application de l’article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d’identification,
l’éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l’engagement.
Les époux [M] arguent que les informations sur la nature du matériel seraient incertaines ou insuffisantes pour définir les caractéristiques techniques de l’installation et qu’elles laisseraient trop de latitude au vendeur quant au choix définitif des éléments de l’installation.
Cependant, le nombre et la puissance des panneaux sont bien mentionnés sur le bon de commande.
D’autre part, s’agissant de la marque, il sera observé que le bon de commande mentionnait des panneaux de marque Solarworld ou de puissance équivalente, ce dont il résulte que la marque des panneaux n’était pas entrée dans le champ contractuel, seule la puissance des panneaux l’étant.
En outre, si, selon la facture, les panneaux livrés étaient en définitive de marque Soluxtec, la puissance de ces panneaux est identique à celle mentionnée sur le bon de commande, soit 3 000 Wc et, en toute hypothèse, la livraison de panneaux de marque différente de celle commandée relève de l’action en résolution de la vente pour manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme, et n’est donc pas sanctionnée par la nullité du bon de commande qui suppose l’existence d’un vice lors de la formation du contrat.
Enfin, la mention d’un délai d’installation des produits commandés compris entre 2 à 3 semaines à compter de la signature du bon de commande est d’une précision suffisante au regard des prescriptions de l’article L. 111-1 précité, cet engagement couvrant nécessairement la livraison sur le chantier, par principe préalable à la pose, et aucun élément du dossier ne révélant que l’établissement d’un planning plus précis incluant la réalisation de prestations à caractère administratif était entré dans le champ contractuel.
En revanche, ainsi que l’a exactement relevé le premier juge, les modalités de pose, en intégration au bâti ou en applique sur la couverture existante, ne sont pas précisées, alors qu’il s’agit d’une caractéristique essentielle de la prestation accessoire d’installation.
Il est également exact que le bon de commande ne mentionne ni les coordonnées du médiateur de la consommation compétent dont le professionnel relève en application de l’article L. 616-1 du code de la consommation, ni les conditions de mise en oeuvre des garanties légales ou commerciales.
La BNP PPF soutient que ces irrégularités ne seraient sanctionnées que par une nullité relative que les époux [M] auraient renoncé à invoquer en acceptant la livraison et la pose des matériels, en signant le certificat de livraison, en procédant au remboursement du prêt, et en revendant l’électricité produite, sans jamais avoir résilié le contrat les liant à EDF.
Cependant, la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l’époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.
À cet égard, les dispositions de l’article L. 121-23 ancien du code de la consommation relative à l’indication des caractéristiques essentielles du produit ou de la prestation fournie, dont la teneur est identique à celle de l’article L. 111-1 issu de la loi du 17 mars 2014 applicable à la cause, étaient effectivement reproduites au verso du bon de commande, portant ainsi à la connaissance des époux [M] que celui-ci devait comporter, à peine de nullité, les conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités de pose.
Dès lors, en laissant l’entreprise poser les panneaux et en signant l’attestation de fin de travaux, les époux [M] ont, en pleine connaissance de cause, confirmé le bon de commande en dépit de ce qu’il ne mentionnait pas les modalités de pose.
En revanche, les conditions générales du contrat ne reproduisaient pas les dispositions des articles R. 111-1 et R 111-2 en vigueur au jour du contrat, rappelant que celui-ci devait comporter, à peine de nullité, les coordonnées du médiateur de la consommation compétent dont le professionnel relève en application de l’article L. 616-1 du code de la consommation, et que le professionnel devait communiquer ou mettre à la disposition du consommateur les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale.
Dès lors, rien ne démontre que les époux [M] avaient connaissance de ces vices du bon de commande lorsqu’ils ont laissé la société IC Groupe intervenir à leur domicile et signé le certificat de livraison.
Il n’est donc pas établi que les consommateurs aient, en pleine connaissance de l’irrégularité de ce contrat de vente, entendu renoncer à la nullité résultant de ces vices et qu’ils auraient de ce fait manifesté une volonté non équivoque de couvrir toutes les irrégularités de ce document.
Il convient donc d’écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier, et de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat conclu le 2 mars 2016 entre M. [M] et la société IC Groupe.
C’est également à juste titre que le premier juge, tirant les conséquences de l’annulation du contrat, a fixé la créance des époux [M] au passif de la liquidation judiciaire de la société IC Groupe à la somme de 19 000 euros.
Il a en revanche assorti à tort cette fixation de créance des intérêts légaux à compter du jugement, étant de principe d’ordre public que l’ouverture de la procédure collective emporte l’arrêt du cours des intérêts.
Le jugement attaqué sera donc réformé en ce sens.
Sur la nullité du contrat de prêt
Aux termes des dispositions de l’article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Il n’est pas contesté que le crédit consenti par la société Sygma, aux droits de laquelle se trouve la BNP PPF, est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.
En raison de l’interdépendance des deux contrats, l’annulation du contrat principal conclu avec la société IC Groupe emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la BNP PPF.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a constaté l’annulation de plein droit du contrat de crédit.
La nullité du prêt a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu’elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d’autre.
La BNP PPF demande à cet égard à la cour d’infirmer le jugement attaqué, en ce qu’il a dispensé les époux [M] de restituer le capital emprunté de 19 000 euros au motif de fautes qui lui auraient été imputées à tort par le premier juge, dès lors qu’il n’appartenait pas au prêteur de conseiller les emprunteurs sur l’efficacité juridique d’un contrat auquel il est tiers, et qu’elle s’est dessaisie du capital prêté sur présentation d’un certificat de livraison aux termes duquel les emprunteurs reconnaissaient que la livraison du bien et la prestation de service avait été réalisées et demandaient expressément la mise à disposition des fonds entre les mains du vendeur.
Les époux [M] concluent quant à eux à la confirmation du jugement les ayant dispensés de rembourser le capital prêté, en faisant valoir que le prêteur se serait fautivement dessaisi des fonds en faveur de la société IC Groupe, sans vérifier la validité du contrat de vente et sans s’assurer de l’exécution complète de la prestation, au vu d’une attestation de livraison ne permettant pas de vérifier que l’installation avait été raccordée et était fonctionnelle.
Le prêteur, qui n’a pas à assister l’emprunteur lors de l’exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d’une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, ne commet pas de faute lorsqu’il libère les fonds au vu d’une attestation de livraison qui lui permet de s’assurer de l’exécution complète du contrat principal.
Or, en l’occurrence, le certificat de livraison signé par M. [M] le 17 mars 2016, faisait ressortir sans ambiguïté que celui-ci attestait ‘sans réserve, que la livraison du ou des bien (s) et/ou la fourniture de la prestation de services (…ont) été pleinement effectuée(s) conformément au contrat principal de vente (qu’il a) préalablement conclu avec le vendeur, que cette livraison et/ou fourniture est intervenue le 17 mars 2016 (…et) qu’en conséquence, (il demandait) au prêteur, par (sa) signature du présent certificat et en (sa) qualité d’emprunteur, de procéder à la mise à disposition des fonds au titre dudit contrat de crédit affecté’.
Cependant, il est aussi de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu’il libère la totalité des fonds, alors qu’à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.
Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu avec la société IC Groupe, par l’intermédiaire de laquelle la société Sygma, aux droits de laquelle se trouve la BNP PPF, faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes.
En outre, si les époux [M] ont, en connaissance de cause renoncé à la nullité du contrat tirée du défaut d’indication des modalités de pose des panneaux, et si le prêteur ne pouvait déceler le défaut d’information relatives aux garanties dues par le fournisseurs qui pouvaient être communiquées par tous moyens sans nécessairement prendre la forme d’une mention au bon de commande, il demeure que la BNP PPF, professionnelle des opérations de crédit affecté, aurait dû relever que les coordonnées du médiateur de la consommation ne figuraient pas dans le bon de commande et qu’elle n’aurait donc pas dû libérer des fonds entre les mains du fournisseur avant d’avoir à tout le moins vérifié auprès des époux [M] qu’ils entendaient confirmer, également pour ce vice, l’acte irrégulier.
Le prêteur n’avait certes pas à assister les emprunteurs lors de la conclusion du contrat principal, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande, ce dont il résulte qu’en versant les fonds entre les mains du fournisseur, sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle du contrat principal, la BNP PPF, qui ne pouvait ignorer les énonciations du bon de commande au vu duquel elle a apporté son concours, a commis une faute susceptible de la priver du droit d’obtenir le remboursement du capital emprunté.
Toutefois, la BNP PPF fait valoir à juste titre que cette dispense de remboursement du capital emprunté est subordonnée à la démonstration par l’emprunteur de l’existence d’un préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.
Or, les époux [M] ne caractérisent nullement l’existence de leur préjudice, se bornant à conclure que celui-ci résiderait dans le fait de devoir rembourser le capital emprunté.
Ainsi que les intimés l’admettent eux-mêmes dans leurs écritures, l’installation a été raccordée au réseau le 9 juin 2016, et cette installation, comme le soutient à raison la BNP PPF, est en parfait état de fonctionnement et produit de l’électricité revendue à EDF.
Les époux [M] sous-entendent à cet égard que cette installation n’aurait pas les performances attendues et que le prix de revente de l’électricité ne leur permettrait pas de couvrir les échéances de remboursement du prêt, mais ils n’établissent nullement que la société IC Groupe leur aurait contractuellement promis que le niveau de rémunération de l’électricité produite par l’installation devait leur permettre de couvrir les mensualités de remboursement.
Il en résulte que, disposant d’une installation raccordée au réseau et mise en service, les emprunteurs n’ont subi aucun préjudice en lien causal certain avec la faute de la PNP PPF, et qu’il n’y a dès lors pas lieu de les dispenser de rembourser le capital emprunté.
Le crédit ayant été remboursé par anticipation, les époux [M] seront donc déboutés de leur demande en restitution du capital prêté de 19 000 euros, la BNP PPF étant seulement tenue de restituer les intérêts perçus, soit la somme de 487,23 euros.
Les intérêts de retard ne courront toutefois, conformément à l’article 1231-6 du code civil, qu’à compter de la demande formalisée par assignation du 20 décembre 2017.
Il est en effet de principe que les intérêts au taux légal courant sur les sommes dont le remboursement a été ordonné en conséquence d’une annulation du contrat ne peuvent avoir pour point de départ que le jour de la demande en justice.
Puisqu’il a été jugé que les époux [M] ne rapportaient pas la preuve d’un préjudice en lien causal avec la seule faute de la banque de n’avoir pas su déceler que le bon de commande ne comportait pas les coordonnées du médiateur de la consommation, leur demande subsidiaire de condamnation de la BNP PPF au paiement, à titre de dommages-intérêts, d’une somme équivalente au capital versé au fournisseur est dénuée de fondement et sera rejetée.
Sur les autres demandes
Puisque les époux [M] ont été condamnés à restituer le capital emprunté, la demande subsidiaire de la BNP PPF en fixation de sa créance de 19 000 euros au passif de la liquidation judiciaire de la société SVH est dénuée de fondement et sera rejetée.
La disposition du jugement ayant fixé au passif de la société IC Groupe la créance de la BNP PPF à hauteur de la somme de 9 500 euros, sera par conséquent réformée.
Par ailleurs, les époux [M] ne caractérisent pas l’existence d’un préjudice distinct des conséquences dommageables de l’opération déjà réparées par l’annulation des contrats, ni d’un préjudice moral né de l’opération litigieuse.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de dommages-intérêts complémentaire.
En outre, l’indemnité allouée par le premier juge aux époux [M] au titre de leurs frais irrépétibles de première instance a été correctement appréciée, et il n’y a pas matière à application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque en cause d’appel.
Enfin, partie principalement succombante en cause d’appel, les époux [M] supporteront seuls les dépens exposés devant la cour.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Infirme le jugement rendu le 12 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Nantes en ce qu’il a :
dit que la créance de 19 000 euros fixée en faveur des époux [M] au passif de la liquidation judiciaire de la société IC Groupe produira intérêts au taux légal,
condamné la société BNP Paribas Personal Finance à rembourser aux époux [M], la somme de 19 487,23 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 20 décembre 2017,
débouté la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande de restitution par Mme [K] [M] née [Z] et M.[R] [M] du capital emprunté de 19 000 euros,
fixé au passif de la liquidation de la société IC Groupe la créance de la société BNP Paribas Personal Finance à hauteur de 9 500 euros ;
Déboute M. et Mme [M] de leur demande de restitution du capital prêté de 19 000 euros ;
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à payer à M. et Mme [M] la somme de 487,23 euros au titre de la restitution des intérêts perçus, avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2017 ;
Déboute la société BNP Paribas Personal Finance de sa demande en fixation au passif de la liquidation judiciaire de la société IC Groupe d’une créance de 19 000 euros ;
Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions ;
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
Condamne M. et Mme [M] aux dépens d’appel ;
Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT