Clause de médiation : 24 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 21/18250

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Clause de médiation : 24 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 21/18250
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 24 MAI 2023

N° 2023/ 229

N° RG 21/18250

N° Portalis DBVB-V-B7F-BITAQ

S.A. FRANFINANCE

C/

[E] [J]

S.A.S. HOME SOLUTION ENERGIE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Laure ATIAS

Me Lauriane BUONOMANO

Me Romain CHERFILS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge des contentieux de la protection de BRIGNOLES en date du 16 Novembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 19-000569.

APPELANTE

S.A. FRANFINANCE

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 4]

représentée par Me Laure ATIAS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, ayant pour avocat plaidant Me Jérôme BRUNET-DEBAINES, membre de la SCP BRUNET-DEBAINES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN,

INTIMEES

Madame [E] [J]

née le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 5], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Lauriane BUONOMANO, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, et plaidant par Me Karine LEBOUCHER, membre de la SELARL LEBOUCHER AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER

S.A.S. HOME SOLUTION ENERGIE

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 1]

représentée par Me Romain CHERFILS, membre de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, ayant pour avocat plaidant Me Cécile HUNAULT-CHEDRU, membre de la SELARL POINTEL & ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 07 Mars 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Philippe COULANGE, Président

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Mai 2023.

ARRÊT

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Mai 2023, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE ANTÉRIEURE

Suivant contrat conclu le 12 octobre 2017 dans le cadre d’un démarchage à domicile, Madame [E] [J] a commandé à la société HOME SOLUTION ENERGIE (ci-après HSE) la fourniture et l’installation d’un système de pompe à chaleur alimenté par des panneaux photovoltaïques posés en toiture de sa maison, moyennant le prix de 35.181 euros TTC entièrement financé par un crédit affecté souscrit auprès de la société FRANFINANCE et remboursable en 149 mensualités.

Sur la foi d’une attestation de livraison datée du 27 décembre 2017, la société de crédit a viré les fonds sur le compte du vendeur, et la première échéance a été prélevée sur le compte de l’emprunteur au mois d’août 2018.

Par courrier recommandé du 24 avril 2018, Madame [J] s’est plainte auprès de la société HSE de l’inefficacité de l’installation.

Un technicien est intervenu à son domicile le 23 avril 2019 et a préconisé le remplacement de la pompe à chaleur. Toutefois, la cliente a refusé la livraison de ce matériel le 7 mai 2019.

Par courrier adressé dans les mêmes formes le 30 septembre 2019, Madame [J] a réclamé l’annulation de la vente et le remboursement des sommes perçues, ce à quoi la société HSE a opposé un refus.

Par actes signifiés le 4 novembre 2019, Madame [J] a fait assigner les sociétés HSE et FRANFINANCE à comparaître devant le tribunal de proximité de Brignoles aux fins d’entendre :

– prononcer la nullité du contrat de vente pour violation des règles édictées par le code de la consommation en matière de démarchage à domicile,

– subsidiairement, prononcer la résolution judiciaire dudit contrat en raison de l’exécution défectueuse des obligations du vendeur,

– prononcer par voie de conséquence l’annulation ou la résolution du contrat de crédit affecté,

– condamner l’établissement de crédit à lui rembourser l’ensemble des mensualités prélevées sur son compte, et le priver de son droit à restitution du capital en raison de l’inexécution de ses propres obligations,

– condamner solidairement le vendeur et le prêteur à prendre en charge les coûts d’enlèvement de l’installation et de remise en état des lieux.

La société HSE a conclu au rejet de l’ensemble de ces prétentions.

La société FRANFINANCE a principalement conclu dans le même sens, et recherché subsidiairement la garantie du vendeur.

Aux termes d’un jugement rendu le 16 novembre 2021, non revêtu de l’exécution provisoire, le tribunal a :

– prononcé l’annulation du contrat principal, en raison de l’absence d’indication sur le bon de commande des caractéristiques techniques essentielles du bien vendu, par application des articles L 111-1, 221-5, 221-9 et 242-1 du code de la consommation,

– prononcé par voie de conséquence l’annulation du contrat de crédit en application de l’article L 312-55 du même code,

– condamné la société FRANFINANCE à rembourser à Madame [J] l’intégralité des mensualités prélevées sur son compte et privé en outre l’établissement de crédit de son droit à restitution du capital, pour avoir omis de vérifier la régularité du contrat principal avant de procéder au déblocage des fonds,

– condamné la société HSE à prendre en charge les coûts de dépose de l’installation et de remise des lieux en leur état antérieur,

– condamné solidairement les sociétés HSE et FRANFINANCE aux dépens de l’instance, ainsi qu’au paiement d’une somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– et condamné la société HSE à relever et garantir la société FRANFINANCE pour toutes les sommes mises à sa charge.

Les sociétés FRANFINANCE et HSE ont interjeté appel par déclarations respectivement adressées les 23 et 31 décembre 2021 au greffe de la cour, les deux instances ayant été jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état rendue le 14 juin 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par conclusions récapitulatives du 9 février 2023, auxquelles il convient de se reporter pour le détail de l’argumentation, la société HOME SOLUTION ENERGIE fait valoir :

– que le bon de commande est parfaitement régulier,

– qu’en tout état de cause, il a été confirmé par l’exécution volontaire du contrat en application de l’article 1182 du code civil,

– que Madame [J] ne peut se plaindre d’une exécution défectueuse de ses prestations, alors qu’elle a refusé la livraison d’un nouveau matériel dans le cadre de son service après-vente,

– que le bon de commande spécifiait bien que l’installation fonctionnerait en auto-consommation, sans nécessité de raccordement au réseau public, ni possibilité de vendre une partie de l’électricité produite,

– et que le relevé des factures EDF de l’intéressée démontre qu’elle a pu réaliser une économie de l’ordre de 18 % sur la période 2018-2019 par rapport à la période précédente.

Elle demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau,

– de débouter Madame [J] de l’intégralité de ses prétentions,

– de débouter la société FRANFINANCE de sa demande en garantie,

– et de condamner l’intimée aux entiers dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’au paiement d’une somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives du 8 août 2022, la société FRANFINANCE fait valoir pour sa part :

– qu’elle a libéré les fonds sur la foi d’un bon de commande régulier et d’une attestation de livraison signée par l’emprunteur,

– que l’intimée ne peut lui faire grief d’avoir payé de manière prématurée, alors qu’elle n’a jamais entendu exercer son droit de rétractation,

– que la rentabilité économique de l’installation ne constitue pas une caractéristique essentielle au sens de l’article 111-1 du code de la consommation si les parties ne l’ont pas fait entrer expressément dans le champ contractuel,

– qu’il s’agit d’un simple litige après-vente qui ne dispense pas Madame [J] de rembourser le crédit,

– et que la ‘fiche de dialogue’ produite au dossier établit que le montant emprunté n’excédait pas les capacités financières de son cocontractant.

Elle demande principalement à la cour d’infirmer le jugement, de débouter Madame [J] de l’ensemble des prétentions dirigées à son encontre, et de la condamner en revanche à reprendre le paiement des échéances de l’emprunt.

Subsidiairement, elle poursuit la condamnation de la société HSE à lui rembourser la totalité du prix financé par son concours, soit la somme de 35.181 euros.

En tout état de cause, elle réclame à l’encontre de tout succombant paiement d’une somme de 3.000 euros au titre de ses frais irrépétibles, outre ses dépens.

Par conclusions récapitulatives du 31 janvier 2023, auxquelles il est également renvoyé pour le détail de l’argumentation, Madame [E] [J] poursuit pour sa part à titre principal la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, faisant valoir qu’outre le défaut de désignation des caractéristiques essentielles des biens vendus, le bon de commande était affecté d’autres irrégularités tenant à l’absence d’indications précises relatives au délai de livraison, aux coordonnées du médiateur de la consommation, ainsi qu’aux conditions d’exercice du droit de rétractation, les conditions générales de vente étant de plus illisibles.

Elle soutient qu’il n’a pu exister de confirmation de l’acte de sa part, en l’absence de connaissance des vices qui l’affectaient.

Subsidiairement, elle poursuit la résolution du contrat principal sur le fondement de l’article 1224 du code civil en raison des manquements du vendeur à ses obligations, et par suite la résolution du contrat de crédit affecté.

Elle soutient à cet effet que l’installation :

– est interdite en l’absence de raccordement au réseau ERDF,

– ne permet pas de vendre l’électricité produite,

– ne fait pas l’objet d’une attestation de conformité valable,

– et ne dispose pas d’une puissance suffisante pour assurer sa fonction de chauffage.

Elle maintient d’autre part que l’établissement de crédit s’est abstenu de vérifier la régularité du contrat principal et la bonne exécution des prestations avant de débloquer les fonds, ces fautes devant conduire à le priver de son droit à la restitution du capital.

Pour le cas où la responsabilité du prêteur ne serait pas retenue, elle poursuit d’une part la condamnation de la société HSE à lui restituer la totalité du prix, et d’autre part la déchéance de la société FRANFINANCE du droit aux intérêts.

En tout état de cause, elle réclame paiement d’une somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre ses entiers dépens.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 21 février 2023.

DISCUSSION

Sur la demande d’annulation des contrats :

En vertu de l’article L 111-1 du code de la consommation, la conclusion d’un contrat de vente de biens ou de fourniture de services entre un professionnel et un consommateur doit être précédée d’une information portant notamment sur les caractéristiques essentielles des biens ou des service proposés, le prix et le délai de livraison du bien ou d’exécution de la prestation.

Cette obligation d’information est renforcée par l’article L 221-5 lorsque le contrat est conclu hors de l’établissement du professionnel, et notamment à l’occasion d’un démarchage à domicile, ce dernier étant alors notamment tenu de préciser en outre les conditions, le délai et les modalités d’exercice du droit de rétractation du consommateur, ainsi que d’annexer au contrat un formulaire-type à cette fin.

L’article L 242-1 dispose enfin que ces règles sont prescrites à peine de nullité. S’agissant toutefois d’une nullité relative, celle-ci peut être couverte par l’exécution volontaire du contrat par le consommateur en connaissance de cause, valant confirmation au sens de l’article 1182 du code civil.

En l’espèce, la cour approuve les motifs par lesquels le premier juge a considéré que les spécifications du bon de commande étaient insuffisantes pour décrire les caractéristiques techniques essentielles de l’installation, dans la mesure où la marque des panneaux solaires, leur nombre et leur mode de pose en toiture (intégration ou surimposition) n’étaient pas précisés, non plus que leurs performances , alors que ces éléments étaient indispensables pour éclairer l’acheteur au regard de l’importance de son investissement.

D’autre part, l’exécution volontaire du contrat par Madame [J] n’a pu valoir confirmation de l’acte au sens du texte susvisé, dès lors que les conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande, intégrant les dispositions du code de la consommation applicables, étaient reproduites en caractères minuscules difficilement lisibles, et n’étaient pas revêtues de la signature du client ni de la mention ‘lu et approuvé’ dans la case prévue à cet effet.

C’est donc à bon droit que le tribunal a prononcé l’annulation du contrat de vente, et par suite celle du contrat de crédit affecté qui en constituait l’accessoire.

Sur les fautes reprochées au prêteur :

Il est de jurisprudence constante que l’établissement de crédit est tenu de vérifier la régularité formelle du contrat principal et d’informer l’emprunteur de toute irrégularité afin que celui-ci puisse confirmer son consentement ou y renoncer. À défaut, il commet une faute susceptible d’engager sa responsabilité et de le priver de sa créance en restitution du capital prêté, sauf son recours contre le vendeur.

La mise en jeu de cette responsabilité implique également la preuve de l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité. En l’espèce cette preuve est suffisamment rapportée par le procès-verbal de constat dressé le 16 novembre 2020 par Maître [X], et par un rapport du cabinet d’expertises CO.GEX.BAT, dont il résulte que le système de récupération de chaleur vendu à Madame [J] est totalement obsolète et n’apporte aucun confort ni économie de chauffage.

Le jugement entrepris doit donc être également confirmé de ce chef.

Sur le recours en garantie du prêteur :

En vertu de l’article L 312-56 du code de la consommation, si la résolution judiciaire ou l’annulation du contrat principal survient du fait du vendeur, celui-ci peut, à la demande du prêteur, être condamné à garantir l’emprunteur du remboursement du prêt.

Il convient toutefois de réformer la décision du premier juge en ce qu’elle a étendu cette garantie au remboursement du capital et des intérêts, alors que, par suite de l’annulation des contrats, la société FRANFINANCE ne peut prétendre qu’à la restitution du capital.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a condamné la société HOME SOLUTION ENERGIE à garantir la société FRANFINANCE du remboursement de la totalité du prêt en principal et intérêts,

Statuant à nouveau de ce chef, dit que la société HOME SOLUTION ENERGIE ne sera tenue qu’à garantir la restitution du capital prêté,

Y ajoutant, condamne in solidum les sociétés FRANFINANCE et HOME SOLUTION ENERGIE aux dépens de l’instance d’appel, ainsi qu’à payer à Madame [E] [J] la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

 


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