Clause de médiation : 15 décembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/00683

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Clause de médiation : 15 décembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/00683
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N° RG 21/00683 – N° Portalis DBVX-V-B7F-NL4E

Décision du TJ de SAINT ETIENNE

du 20 octobre 2020

RG : 11-19-000686

4ème chambre civile

[T]

C/

S.A.R.L. ECO-HABITAT.ENR

S.A. CA CONSUMER FINANCE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

6ème Chambre

ARRET DU 15 Décembre 2022

APPELANT :

M. [N] [T]

né le 09 Février 1967 à [Localité 9]

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représenté par Me Marion BREGERE, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, toque : 1

assistée de Me Karine LEBOUCHER, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEES :

LA S.A.R.L. ECO-HABITAT.ENR

[Adresse 2]

[Localité 5]

défaillante

S.A. CA CONSUMER FINANCE

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représentée par Me Renaud ROCHE de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON, toque : 713

INTERVENANTE :

LA S.E.L.A.R.L. ALLIANCE MJ, représentée par Me [D] [L], Mandataire judiciaire, ès qualité de liquidateur judiciaire de la SOCIETE ECO HABITAT ENR

[Adresse 4]

[Localité 6]

défaillante

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 07 Juin 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 15 Novembre 2022

Date de mise à disposition : 15 Décembre 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Dominique BOISSELET, président

– Evelyne ALLAIS, conseiller

– Stéphanie ROBIN, conseiller

assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier

A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Dominique BOISSELET, président, et par VALENTINE VERDONCK, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES

Dans le cadre d’un démarchage à domicile, [N] [T] a passé commande le 28 novembre 2017 de la fourniture, livraison et pose d’une centrale photovoltaïque auprès de la Sarl Eco-Habitat.Enr.

Le prix de 27.900 euros a été financé au moyen d’un crédit affecté souscrit le même jour auprès de la SA CA Consumer Finance, exerçant sous la marque Sofinco, remboursable en 180 échéances mensuelles de 237,22 euros.

La société Eco-Habitat.Enr a procédé à l’installation du kit photovoltaïque et M. [T] a signé le 13 décembre 2017 un procès-verbal de fin de travaux et un document attestant destiné au prêteur demandant le financement correspondant. Ce document a été remis par l’entreprise à la société CA Consumer Finance qui lui a réglé la somme de 27.900 euros.

Par lettre recommandée avec accusé de réception parvenue le 19 avril 2018, M. [T] a demandé à l’insta|lateur des informations afin de pouvoir utiliser l’application de suivi de la production de l’instal|ation photovoltaïque.

Par courrier adressé le 26 septembre 2018, M. [T] a indiqué à la société Eco-Habitat.Enr que le bon de commande ne respectait pas les dispositions du code de la consommation et que la promesse d’autofinancement était mensongère ; il demandait l’annulation du contrat.

Aux termes d’une lettre recommandée avec accusé de réception parvenue le 4 octobre 2018, M. [T] a mis la société CA Consumer Finance en demeure de lui rembourser les sommes versées, invoquant les mêmes griefs qu’à l’égard de la société Eco-Habitat.Enr, outre le versement des fonds avant expiration du délai de rétractation.

Selon actes d’huissiers de justice délivrés les 19 et 20 mars 2019, M. [T] a assigné la société Eco-Habitat.Enr et la société CA Consumer Finance à comparaître devant le tribunal d’instance de Saint Etienne, sollicitant à titre principal l’annulation des contrats.

A l’audience des débats, M. [T], représenté par son conseil, a demandé notamment :

à titre principal,

– l’annulation des contrats signés le 28 novembre 2017 pour violation des lois régissant le démarchage à domicile,

– le rejet des demandes en paiement formées par le prêteur qui a commis des fautes le privant du droit au remboursement du capital emprunté,

– la condamnation de la société CA Consumer Finance à lui restituer les sommes perçues au titre du paiement des mensualités, soit 6.404, 94 euros,

– si la faute du prêteur n’était pas retenue, la condamnation de la société Eco-Habitat.Enr à lui restituer la somme de 27.900 euros correspondant au montant du bon de commande et la privation rétroactive du prêteur de son droit aux intérêts,

– la condamnation solidaire des défendeurs à prendre en charge le coût des travaux de remise en état,

à titre subsidiaire, la résolution du contrat de vente sur le même fondement et avec les mêmes demandes subsquentes

à titre plus subsidiaire,

– le constat de l’exercice du droit de rétractation, de la caducité du bon de commande, de l’absence d’effet du contrat de crédit affecté,

– la condamnation de la société Eco-Habitat.Enr à verser une indemnité au titre du taux de pénalité applicable selon l’articIe L 121-21-4 du code de la consommation,

– et les mêmes demandes subséquentes.

La société CA Consumer Finance, représentée par son conseil, a notamment demandé au tribunal :

à titre principal,

– rejeter les prétentions adverses et dire qu’elle conservera les sommes versées au titre du remboursement du contrat de crédit ;

à titre subsidiaire,

– en cas d’annulation des contrats, juger qu’elle n’a commis aucune faute et de dire qu’elle conservera les sommes versées au titre du remboursement du contrat de crédit ;

à titre plus subsidiaire,

si le tribunal retient la nullité des contrats et une faute du prêteur, rejeter les demandes adverses et de condamner M. [T] à lui payer la somme de 27.900 euros au titre du capital.

La société Eco-Habitat.Enr n’a pas comparu.

Par jugement en date du 20 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Saint Etienne a :

– annulé le contrat souscrit entre la Sarl Eco-Habitat.Enr et M. [T] suivant bon de commande n°3271 signé le 28 novembre 2017,

– constaté l’annulation de plein droit du contrat de crédit en date du 28 novembre 2017 signé par M. [T], accordé par la SA CA Consumer Finance, en financement du bon de commande n° 3271 du 28 novembre 2017,

– condamné M. [T] à verser à la SA CA Consumer Finance la somme 21.495, 06 euros portant intérêt au taux légal à compter du 4 octobre 2018,

– rappelé que l’annulation des contrats impose que les panneaux photovoltaïques installés soient déposés,

– condamné solidairement la Sarl Eco-Habitat.Enr et la SA CA Consumer Finance à supporter les frais de remise en état de l’habitation de M. [T],

– condamné la Sarl Eco-Habitat.Enr à payer à M. [T] la somme 21.495,06 euros portant intérêt au taux légal à compter du 4 octobre 2018,

– condamné solidairement la Sarl Eco-Habitat.Enr et la SA CA Consumer Finance à régler à M. [T] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné in solidum la Sarl Eco-Habitat.Enr et la SA CA Consumer Finance aux dépens,

– ordonné l’exécution provisoire de la décision,

– rejeté pour le surplus les demandes des parties.

Par jugement rectificatif du 10 février 2021, le tribunal judiciaire de Saint Etienne a dit qu’il y avait lieu de remplacer la mention

‘condamne la Sarl Eco-Habitat.Enr à payer à M. [T] la somme 21.495,06 euros portant intérêt au taux légal à compter du 4 octobre 2018″

par la mention :

‘ condamne la Sarl Eco-Habitat.Enr à payer à M. [T] la somme 27.900 euros portant intérêt au taux légal à compter du 4 octobre 2018″.

M. [T] a relevé appel du jugement du 20 octobre 2020 par déclaration reçue au greffe de la Cour le 28 janvier 2021.

Entre-temps, la société Eco-Habitat.Enr a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Lyon le 16 décembre 2020.

Par acte d’huissier de justice du 1er avril 2021, M. [T] a appelé en cause la Selarl Alliance MJ, représentée par Me [D] [L], en qualité de liquidateur judiciaire de la Sarl Eco-Habitat.Enr.

En ses dernières conclusions du 15 février 2022, [N] [T] demande à la Cour ce qui suit, au visa des articles L.111-1 s. et L.221-1 s. et L.312-48 s. et L.242-1 du code de la consommation (rédaction en vigueur au 1er juillet 2016), 1103 s. et 1224 s. du code civil (rédaction postérieure au 1er octobre 2016) :

Principalement, confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a :

– ordonné la nullité du contrat de vente conclu entre Eco-Habitat.Enr et M. [T] au titre de la violation des lois régissant le démarchage à domicile,

– ordonné la nullité consécutive du contrat de prêt affecté conclu entre M. [T] et CA Consumer Finance,

– jugé que CA Consumer Finance a commis une faute dans la libération des fonds,

– condamné CA Consumer Finance à restituer les sommes d’ores et déjà versées par M. [T] au titre de l’emprunt souscrit,

– condamné solidairement les sociétés Eco-Habitat.Enr et CA Consumer Finance à prendre en charge le coût des travaux remise en état ;

infirmer la décision entreprise en ce qu’elle :

– déboute M. [T] de sa demande de priver CA Consumer Finance de fait de tout droit à remboursement contre M. [T], s’agissant du capital, des frais et accessoires versés entre les mains de la société Eco-Habitat.Enr,

subsidiairement,

– ordonner la résolution du contrat de vente conclu entre Eco-Habitat.Enr et M. [T] au titre de la violation des lois régissant le démarchage à domicile,

– ordonner la résolution consécutive du contrat de prêt affecté conclu entre M. [T] et CA Consumer Finance,

– juger que CA Consumer Finance a commis une faute dans la libération des fonds,

– condamner CA Consumer Finance à restituer les sommes d’ores et déjà versées par M. [T] au titre de l’emprunt souscrit,

– condamner solidairement les sociétés Eco-Habitat.Enr et CA Consumer Finance à prendre en charge le coût des travaux remise en état ;

très subsidiairement,

– ordonner la caducité du contrat de vente conclu entre Eco-Habitat.Enr et M. [T] au titre de la violation des lois régissant le démarchage à domicile,

– ordonner la nullité consécutive du contrat de prêt affecté conclu entre M. [T] et CA Consumer Finance,

– juger que CA Consumer Finance a commis une faute dans la libération des fonds,

– condamner CA Consumer Finance à restituer les sommes d’ores et déjà versées par M. [T] au titre de l’emprunt souscrit

statuant de nouveau et en toutes hypothèses,

– priver CA Consumer Finance de fait de tout droit à remboursement contre M. [T] s’agissant du capital, des frais et accessoires versés entre les mains de la société Eco-Habitat.Enr,

– si par extraordinaire, la faute du prêteur n’était pas retenue, fixer la créance de M. [T] à raison de la somme de 27.900 euros au passif de la procédure de liquidation judiciaire d’Eco-Habitat.Enr au titre du contrat principal,

et priver rétroactivement ‘BNP PPF’ de son droit aux intérêts du fait de l’anéantissement du contrat de crédit,

– condamner solidairement la Selarl Alliance MJ, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Eco-Habitat.Enr, et CA Consumer Finance à payer à M. [T] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre le paiement des entiers dépens,

– débouter la Selarl Alliance MJ et CA Consumer Finance de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

Par dernières conclusions du 8 novembre 2021, la SA CA Consumer Finance demande à la Cour de statuer comme suit, en visant les articles L.111-1 et suivants, L.312-1 et suivants, L.312-56 du code de la consommation et 1182 du code civil :

infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Saint Etienne du 20 octobre 2021 rectifié par jugement du 10 février 2021, sauf en ce qu’il a condamné M. [T] à verser à la SA CA Consumer Finance la somme 21.495, 06 euros portant intérêt au taux légal à compter du 4 octobre 2018 ;

par conséquent, statuant à nouveau et y ajoutant,

à titre principal,

‘ juger que les conditions de nullité des contrats de vente et de crédit ne sont pas réunies,

‘ juger que M. [T] ne peut plus invoquer la nullité du contrat de vente, et donc du contrat de prêt du fait de l’exécution volontaire des contrats, de sorte que l’action est irrecevable en application de l’article 1182 du code civil,

‘ juger que M. [T] n’a pas exercé régulièrement son droit de rétractation de sorte que les contrats ne sont pas caducs,

‘ juger que la société CA Consumer Finance n’a commis aucune faute,

en conséquence,

‘ débouter M. [T] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

‘ juger que la société CA Consumer Finance conservera les sommes versées au titre du remboursement du contrat de crédit ;

à titre subsidiaire et dans l’hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée,

‘ juger que l’absence de faute de l’établissement de crédit laisse perdurer les obligations de restitutions réciproques,

‘ juger que la société CA Consumer Finance conservera les sommes versées au titre du remboursement du capital du contrat de crédit,

‘ fixer au passif de la liquidation de la société Eco-Habitat.Enr, prise en la personne de son liquidateur, Me [L], la somme de 19.821,60 euros au titre des intérêts perdus ;

à titre infiniment subsidiaire et dans l’hypothèse où la nullité des contrats serait prononcée et une faute des établissements de crédit retenue,

‘ débouter M. [T] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

‘ fixer au passif de la liquidation de la société Eco-Habitat.Enr, prise en la personne de son liquidateur, Me [L], la somme de 47.721,60 euros au titre du capital et des intérêts perdus ;

en tout état de cause,

‘ condamner M. [T] à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

‘ condamner les mêmes aux entiers dépens de l’appel.

La Selarl Alliance MJ, représentée par Me [D] [L], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la Sarl Eco-Habitat.Enr, n’a pas constitué avocat.

Les dernières conclusions de M. [T] lui ont été signifiées le 23 février 2022.

Les conclusions de la société CA Consumer Finance lui ont été signifiées le 22 juillet 2021.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 juin 2022.

Il est expressément renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l’exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le bon de commande et l’offre de prêt ayant été signés en date du 28 novembre 2017, les articles du code de la consommation visés ci-après s’entendent dans leur rédaction actuelle, postérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et du décret n°2016-884 du 29 juin 2016.

Sur l’objet du contrat

Selon le bon de commande, le système était destiné à son auto-consommation de M. [T], qui précise posséder déjà une installation de production et revente totale d’électricité à EDF. Or, comme l’établit l’attestation de conformité, le système a été raccordé au réseau électrique public qui a été ainsi alimenté gratuitement sans permettre l’auto-consommation prévue.

M. [T] soutient que le système a ainsi produit de l’électricité gratuitement pour le réseau public, sans pouvoir auto-consommer, ni pouvoir vendre à défaut d’obtention du contrat EDF, situation dont il s’est aperçu tardivement.

Sur l’indication erronée du délai de rétractation

Dans le cas d’une vente par démarchage, l’article L.221-18 du code de la consommation prévoit que le consommateur dispose d’un délai de rétractation de 14 jours, un formulaire détachable devant être joint au contrat pour permettre cette faculté de rétractation. Le formulaire doit répondre aux caractéristiques précisées dans les articles R.221-1 et suivants du même code.

L’article L.221-18 du code de la consommation prévoit notamment que le consommateur dispose d’un délai de 14 jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu, comme en l’espèce, hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L.221-23 et L.221-25.

Le délai de rétractation court à compter du jour :

– de la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l’article L.221-4,

– de la réception du bien par le consommateur pour les contrats de vente de biens et les contrats de prestation de services incluant la livraison de biens.

Dans le cas d’une commande portant sur plusieurs biens livrés séparément ou dans le cas d’une commande d’un bien composé de lots ou de pièces multiples dont la livraison est échelonnée sur une période définie, le délai court à compter de la réception du dernier bien ou lot ou de la dernière pièce.

L’article L.221-5.2° du code de la consommation fait notamment obligation au professionnel de communiquer au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations sur les conditions, le délai et les modalités d’exercice du droit de rétractation, lorsqu’il existe, ainsi qu’un formulaire type de rétractation dont les mentions résultent des articles R.221-3 à R.221-5 du même code.

Aux termes de l’article L.221-20 du code de la consommation, lorsque les informations relatives au droit de rétractation n’ont pas été fournies au consommateur dans les conditions prévues au 2° de l’article L.221-5, le délai de rétractation est prolongé de 12 mois à compter de l’expiration du délai de rétractation initial, déterminé conformément à l’article L.221-18.

Toutefois, lorsque la fourniture de ces informations intervient pendant cette prolongation, le délai de rétractation expire au terme d’une période de 14 jours à compter du jour où le consommateur a reçu ces informations.

En l’espèce le bon de commande, comporte un bordereau détachable ‘annulation de commande’ invitant le client à envoyer le formulaire ‘au plus tard le quatorzième jour à partir de la commande’. Cette mention, qui limite le délai de rétractation à 14 jours à compter de la signature du bon de commande, n’est pas conforme à la loi et, par suite, ne constituet pas l’information valable devant être donnée aux acquéreurs selon les dispositions précitées.

Le premier juge n’a pas prononcé la nullité du contrat au regard des nombreuses irrégularités affectant le bon de commande, mais seulement en considération de la clause relative au droit de rétractation.

Cependant, la mention erronée relative au droit de rétractation n’est pas sanctionnée par la nullité du contrat mais par les dispositions spécifiques de l’article L.221-20 du code de la consommation, qui prévoient que, lorsque les informations relatives au droit de rétractation n’ont pas été fournies au consommateur dans les conditions prévues au 2° de l’article L.221-5, le délai de rétractation est prolongé de 12 mois à compter de l’expiration du délai de rétractation initial, déterminé conformément à l’article L.221-18.

Toutefois, lorsque la fourniture de ces informations intervient pendant cette prolongation, le délai de rétractation expire au terme d’une période de 14 jours à compter du jour où le consommateur a reçu ces informations.

Cette sanction spécifique est exclusive du prononcé de la nullité du contrat : Dès lors que le législateur a prolongé mais néanmoins limité dans le temps la faculté de l’acquéreur de se rétracter, la nullité du contrat rendrait cette limite inopérante.

Au regard de ces dispositions, c’est à tort que le premier juge a prononcé la nullité du contrat fondée sur la seule irrégularité de la mention relative au droit de rétractation.

Sur la nullité du contrat souscrit auprès de la société Eco-Habitat.Enr

Le bon de commande tenant lieu de contrat de vente, porte sur la fourniture et pose d’une centrale photovoltaïque d’une puissance de 3 kwc composée d’un système d’étanchéité, de modules solaires de 300 watts (1 kit de 3 kwc 10x 300 watts), de boitiers(s) AC/DC parafoudre, reliés à un onduleur emphase, de câbles et connecteurs MC4 pour auto-consommation.

Il est précisé que la prestation inclus le branchement électrique et les démarches administratives.

Ce bon est affecté de graves insuffisances au regard des dispositions des articles L.111-1 et L.221-5 du code de la consommation, en particulier :

– la désignation très imprécise des équipements, notamment l’absence d’indication des marques, références ou modèles des appareils,

– la prestation d’installation non détaillée, en particulier quant à la technique constructive (intégration ou superposition en toiture…)

De manière générale, la prestation à la charge du vendeur n’est pas suffisamment décrite pour que le consommateur contractant puisse vérifier sa bonne exécution.

Dans ces conditions, l’exécution du contrat par M. [T] ne vaut pas renonciation de sa part à se prévaloir de la nullité du contrat qui découle des insuffisances du bon de commande, dès lors qu’il a pu croire qu’il était tenu d’accepter l’exécution du contrat passé le délai de 14 jours après la signature du bon de commande et a ignoré qu’il bénéficiait d’un délai supplémentaire de rétractation de douze mois à compter de la livraison, en vertu de l’article L.121-21-1 du code de la consommation.

En outre, les coordonnées d’un médiateur de la consommation ne sont pas spécifiées dans les conditions prévues à l’article L.616-1 du code de la consommation auquel renvoie l’article L.111-1 du même code.

De fait, M. [T] n’a pu prendre conscience des atteintes faites à ses droits de consommateur qu’après avoir connu l’insuffisance de la production électrique à couvrir le coût de l’opération et mesurer les conséquences des insuffisances du bon de commande quant à ses imprécisions sur l’équipement fourni.

Tirant la juste conséquence de ces manquements à des dispositions d’ordre public, le tribunal a prononcé à bon droit la nullité du contrat.

Sur la nullité du contrat de crédit

En application de l’article L.312-55 du code de la consommation, l’annulation du contrat de vente entraîne celle du contrat de crédit en vue duquel il a été conclu.

Il ne fait pas débat que le prêt souscrit par M. [T] auprès de la société CA Consumer Finance est un crédit affecté exclusivement au financement du contrat annulé conclu avec la société Eco-Habitat Enr.

Le jugement est confirmé en ce qu’il a constaté que le contrat de crédit est annulé de plein droit.

Sur les conséquence de la nullité du contrat de vente

L’obligation d’enlever le matériel et assurer la remise en état du bâtiment de M. [T] trouve sa cause dans la nullité du contrat de vente imputable au seul vendeur. Il s’en suit que la société CA Consumer Finance ne peut être tenue de prendre en charge le coût des travaux de remise en état qui incombent à la société Eco-Habitat.Enr représentée par son liquidateur judiciaire. Le jugement est réformé sur ce point.

Sur les conséquences de la nullité du contrat de crédit

Ainsi que l’a rappelé le premier juge, les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de l’exécution de la prestation de services, qui doit être complète, et le prêteur qui délivre les fonds au vendeur sans s’assurer que celui-ci a exécuté son obligation commet une faute.

Cette faute occasionne un préjudice certain à l’emprunteur puisqu’elle le prive de la possibilité de bloquer le paiement jusqu’à l’achèvement des obligations de l’entrepreneur.

On ne saurait certes imposer au prêteur de vérifier la bonne exécution de la prestation en tous ses éléments matériels, mais il lui appartient, avant de débloquer les fonds, de s’assurer que le contrat a été entièrement exécuté pour justifier le paiement du vendeur.

Une attestation de fin de travaux, contenant l’ordre de paiement donné par l’emprunteur, ne peut légitimer le déblocage des fonds si le prêteur a connaissance de l’inachèvement de la prestation contractuelle, contrepartie du prix convenu.

En l’espèce, la prestation de la société Eco-Habitat.Enr devait comprendre, selon les indications du bon de commande, les prestations de ‘branchement électrique’ et ‘démarches administratives’ , ce qui implique notamment le raccordement de l’onduleur au compteur de production et la démarche d’obtention du consuel d’état (auprès d’ERDF).

La société CA Consumer Finance n’ignorait pas que la livraison et la pose de l’installation photovoltaïque ne constituait que l’exécution partielle du contrat et qu’en conséquence, en l’absence de spécification contractuelle du paiement d’un acompte à ce stade d’exécution, les clients n’étaient pas tenus de payer le prix correspondant à l’exécution complète du contrat.

Or, les fonds ont été débloqués par le prêteur au vu d’un document par lequel le client déclare ‘J’ai bénéficié de la livraison du bien ou de l’exécution de la prestation telle que prévue et à mon entière satisfaction. Je demande le financement correspondant.’

En remettant ce modèle d’attestation au vendeur pour le faire signer aux clients, la société CA Consumer Finance ne peut pas ignorer qu’elle fait attester ceux-ci de leur satisfaction alors qu’à ce stade, on ne peut être certain que les trravaux vont permettre la fourniture d’électricité, faute de mise en fonctionnement.

Ce formulaire participe d’une collusion entre le prêteur et l’entreprise, au détriment des consommateurs, pour une remise immédiate et prématurée au vendeur de la totalité des fonds, sans que celui-ci se soit acquitté de l’ensemble de ses obligations.

Le prêteur aurait du être d’autant plus prudent que M. [T], au regard de l’indigence des termes du bon de commande évoquée précédemment, ne pouvait pas sérieusement attester que la livraison du bien était intervenue ‘telle que prévue’.

En outre, le contrat de crédit étant annulé consécutivement à l’annulation du contrat principal, il doit être recherché si le prêteur, compte tenu de l’indivisibilité des contrats, a commis une faute en omettant de s’assurer de la régularité du contrat de vente, notamment au regard de la législation relative au démarchage à domicile, cette faute étant de nature à le priver de son droit à restitution du capital prêté.

En l’espèce, le contrat principal est nul à raison des nombreuses irrégularités qui l’affectent au regard des dispositions de protection du consommateur, notamment dans le cadre du démarchage à domicile qui l’expose à s’engager selon un discours du démarcheur non retranscrit dans le bon de commande quant aux obligations contractuelles du vendeur

En premier lieu, le contrat est affecté de nullité à raison de son imprécision manifeste dans la désignation du matériel vendu. Il incombait à l’organisme prêteur de relever cette anomalie qui engageait les emprunteurs dans une opération de crédit pour le paiement d’une prestation insuffisamment définie.

En second lieu, le formulaire de rétractation non conforme est significatif du peu de sérieux et de fiabilité de l’entreprise à laquelle CA Consumer Finance a cru bon de donner son agrément en lui confiant ses formulaires de demandes de prêts.

L’appui ainsi donné par le prêteur à cette entreprise a conduit M. [T] à s’engager dans une opération financièrement désastreuse, à raison du prix excessivement élevé de l’équipement vendu au regard des possibilités de revenus pouvant être tirés de sa production d’électricité ou des économies devant être réalisées par son auto-consommation.

La société CA Consumer Finance a donc commis une faute en consentant un crédit au vu d’un bon de commande affecté d’irrégularités manifestes qui auraient dû l’alerter sur les insuffisances du vendeur.

Cette faute a causé à l’emprunteur un préjudice équivalent au capital emprunté puisque celui-ci n’a plus de contrepartie, M. [T] perdant la propriété du matériel vendu, qu’il devra déposer de son bâtiment si le liquidateur judiciaire ne procède pas à son enlèvement. Ce préjudice sera réparé par la privation du prêteur du droit à restitution de ce capital.

Le jugement est réformé en ce qu’il a condamné M. [T] à rembourser le capital à la société CA Consumer Finance sous déduction des versements déjà réalisés, le prêteur devant, au contraire, lui restituer ces sommes.

Sur la fixation de la créance de la société CA Consumer Finance

Il résulte des articles L.622-21 à L622-23 du code de commerce que les actions en justice, autres que celles portant sur le paiement d’une somme d’argent ou la résolution d’un contrat pour défaut de paiement, en cours au moment du jugement d’ouverture, sont poursuivies après appel en cause du mandataire judiciaire.

La société CA Consumer Finance a bien appelé en cause le liquidateur judiciaire de la société Eco-Habitat.Enr mais ne justifie pas de sa déclaration de créance entre ses mains. Par suite, elle n’est pas recevable à voir fixer sa créance dans le cadre de la présente instance.

Sur les demandes accessoires

Les dépens d’appel sont, comme ceux de première instance, à la charge de la société CA Consumer Finance, partie perdante.

Il y a lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile en allouant à M. [T] la somme de 1.000 euros pour ses frais irrépétibles exposés en appel, en sus de l’indemnité déjà allouée par le tribunal.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement prononcé le 20 octobre 2020 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint Etienne, rectifié par jugement du 10 février 2021, en ce qu’il a :

– annulé le contrat souscrit entre la Sarl Eco-Habitat.Enr et M. [T] suivant bon de commande n°3271 signé le 28 novembre 2017,

– constaté l’annulation de plein droit du contrat de crédit en date du 28 novembre 2017 signé par M. [T], accordé par la SA CA Consumer Finance, en financement du bon de commande n° 3271 du 28 novembre 2017,

– rappelé que l’annulation des contrats impose que les panneaux photovoltaïques installés soient déposés,

– condamné la Sarl Eco-Habitat.Enr à supporter les frais de remise en état de l’habitation de M. [T],

– condamné la Sarl Eco-Habitat.Enr à payer à M. [T] la somme 27.900 euros portant intérêt au taux légal à compter du 4 octobre 2018,

– condamné solidairement la Sarl Eco-Habitat.Enr et la SA CA Consumer Finance à régler à M. [T] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné in solidum la Sarl Eco-Habitat.Enr et la SA CA Consumer Finance aux dépens,

– et ordonne l’exécution provisoire de la décision ;

Réforme le jugement en ses autres dispositions et, statuant à nouveau,

Déclare la SA CA Consumer Finance irecevable en ses demandes subsidiaires de fixation de sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la Sarl Eco-Habitat.Enr ;

La déboute de toutes ses autres demandes ;

Condamne la SA CA Consumer Finance à restituer à M. [T] les sommes versées au titre du contrat de crédit annulé ;

Condamne la SA CA Consumer Finance aux dépens d’appel ;

Condamne la SA CA Consumer Finance à payer à M. [T] la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute M. [T] du surplus de ses demandes.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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