Clause de médiation : 13 décembre 2022 Cour d’appel de Reims RG n° 22/00063

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Clause de médiation : 13 décembre 2022 Cour d’appel de Reims RG n° 22/00063
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ARRET N°

du 13 décembre 2022

R.G : N° RG 22/00063 – N° Portalis DBVQ-V-B7G-FDN6

S.A. COFIDIS

c/

[G]

S.A.S. NORME PROTEC

AL

Formule exécutoire le :

à :

la SELARL DEROWSKI & ASSOCIEES

Me Camille ROMDANE

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE- SECTION INSTANCE

ARRET DU 13 DECEMBRE 2022

APPELANTE :

d’un jugement rendu le 06 décembre 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Charleville-Mézières

S.A. COFIDIS au capital de 67 500 000 EUROS immatriculée au RCS de LILLE METROPOLE sous le n° B 325 307 106, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés de droit audit siège

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Me Patrick DEROWSKI de la SELARL DEROWSKI & ASSOCIEES, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE

INTIMES :

Monsieur [N] [G] agissant en son nom personnel et es qualité d’héritier de Madame [M] [A] épouse [G] née le 4 août 1952 à [Localité 7] (08) et décédée le 15 février 2021.

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Camille ROMDANE, avocat au barreau de REIMS

S.A.S. NORME PROTEC SAS au capital de 4 000 euros, inscrite au RCS de CHAUMONT sous le n° B 840 368 369 , prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés de droit audit siège,

[Adresse 3]

[Localité 4]

N’ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

M. Benoît PETY, président de chambre

Mme Anne LEFEVRE, conseiller

Mme Christel MAGNARD, conseiller

GREFFIER :

Madame Lucie NICLOT, greffier

DEBATS :

A l’audience publique du 08 novembre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 13 décembre 2022,

ARRET :

Réputé contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 13 décembre 2022 et signé par M. Benoît PETY, président de chambre, et Madame Lucie NICLOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Le 31 août 2020, M. [N] [G] et Mme [M] [A], son épouse, respectivement âgés de 67 et 68 ans, dans le cadre d’un démarchage à domicile, signaient un bon de commande de réfection de la toiture de leur domicile, sis [Adresse 2] (Ardennes), d’un montant de 16 300 euros, au profit de la société Norme Protec, SAS.

Le même jour, M. et Mme [G] signaient une offre de crédit affecté au financement de ces travaux auprès de la société Cofidis SA, pour un emprunt de 16 300 euros, remboursable en 144 mensualités au taux annuel effectif global de 4,96 %.

Le 13 octobre 2020, M. [G] signait un procès-verbal de réception des travaux, son épouse était alors hospitalisée.

Mme [G] est décédée le 15 février 2021.

Le 8 juin 2021, M. [G], agissant en son nom personnel et en qualité d’héritier de son épouse, a fait assigner la société Norme Protec et la société Cofidis devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Charleville-Mézières, en nullité des deux contrats et en paiement solidaire de dommages et intérêts.

Lors de l’audience du 4 octobre 2021, la société Cofidis s’est opposée à l’ensemble des demandes et a sollicité subsidiairement la restitution par l’emprunteur des sommes prêtées.

La société Norme Protec, régulièrement convoquée, n’a pas comparu.

Le jugement du 6 décembre 2021 a, sous exécution provisoire :

– prononcé la résolution du contrat conclu le 31 août 2020 entre les époux [G] et la société Norme Protec,

– prononcé la résolution du contrat conclu le 31 août 2020 entre les époux [G] et la société Cofidis,

– condamné M. [G] à payer à la société Norme Protec la somme de 7 800 euros ‘en restitution de la fourniture de produits et de la prestation de service livrée en nature au 13 octobre 2020″

– condamné la société Cofidis à payer à M. [G] la somme de 1 074,90 euros en restitution des sommes versées au titre du crédit annulé, outre les échéances intervenues entre le 11 mai 2021 et la date du jugement,

– débouté M. [G] de l’ensemble de ses demandes en dommages et intérêts,

– débouté les parties de leurs autres demandes,

– condamné in solidum la société Norme Protec et la société Cofidis aux dépens,

– condamné in solidum la société Norme Protec et la société Cofidis à payer à M. [G] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le 6 janvier 2022, la société Cofidis a fait appel de cette décision en toutes ses dispositions à l’exception de celle déboutant M. [G] de l’ensemble de ses demandes en dommages et intérêts.

Par conclusions du 23 mars 2022, la société Cofidis demande à la cour d’infirmer le jugement afin de :

– juger n’y avoir lieu de prononcer la nullité du contrat de vente avec la société Norme Protec, ni du contrat de crédit affecté avec la société Cofidis du 31 août 2020,

– juger que la société Cofidis a respecté ses obligations contractuelles et n’était pas tenue d’un devoir de mise en garde compte tenu de l’adaptation du crédit à la situation financière des emprunteurs,

– juger que M. [G] ne rapporte pas la preuve d’un abus de faiblesse dont lui-même et son épouse auraient été victimes,

– juger en tout état de cause que cette circonstance est inopposable à la société Cofidis,

– valider en conséquence le contrat de crédit,

– débouter M. [G] de l’ensemble de ses demandes,

subsidiairement, pour le cas où la nullité du contrat de crédit serait prononcée,

– juger qu’il convient de remettre les parties en l’état où elles se trouvaient avant la signature du contrat de crédit,

– juger que M. [G] sera tenu de restituer à la société Cofidis le montant du capital souscrit sous déduction des sommes réglées,

– en conséquence, le condamner à payer à la société Cofidis la somme de 13 971,05 euros avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,

– le débouter de l’ensemble de ses demandes indemnitaires comme étant non fondées,

– le condamner au paiement d’une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– le condamner aux dépens de première instance et d’appel.

Selon écritures du 4 mars 2022, M. [G], en son nom personnel et en qualité d’héritier de son épouse prédécédée, demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. [G] à payer à la société Norme Protec la somme de 7 800 euros en restitution des produits et services, débouté M. [G] de ses demandes en dommages et intérêts et de ses autres demandes et limité à 1 000 euros l’indemnité accordée au titre des frais irrépétibles, alors que 3 000 euros étaient sollicités de ce chef.

Il veut que la cour :

– annule le contrat de réfection de toiture du 31 août 2020,

– annule le contrat de crédit affecté du 31 août 2020, ou constate sa résolution de plein droit,

– condamne solidairement la société Norme Protec et la société Cofidis à lui payer une somme de 2 149,80 euros pour le préjudice financier subi par chacun des époux, à réévaluer au jour de l’arrêt à intervenir,

– prive la société Cofidis de sa créance de restitution compte tenu des multiples fautes qu’elle a commises,

– condamne solidairement la société Norme Protec et la société Cofidis à lui payer la somme de 3 000 euros pour la perte de trésorerie subie par chacun des époux,

– condamne solidairement la société Norme Protec et la société Cofidis à lui payer la somme de 4 000 euros pour le préjudice moral subi par chacun des époux,

– condamne solidairement la société Norme Protec et la société Cofidis à lui payer les sommes de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de l’instance d’appel,

– condamne solidairement la société Norme Protec et la société Cofidis au paiement des dépens de première instance et d’appel,

– déboute les sociétés Norme Protec et Cofidis de toutes leurs demandes plus amples ou contraires.

M. [G] fait valoir notamment que le démarcheur de la société Norme Protec ne pouvait ignorer l’état de faiblesse psychologique des époux [G] et que de nombreuses mentions obligatoires ne figurent pas sur le bon de commande. Il observe que les travaux ont été réalisés avant même que la société Cofidis ait accepté la demande de crédit.

La société Cofidis a fait signifier à la société Norme Protec sa déclaration d’appel et ses conclusions, par acte remis à personne morale le 8 février 2022. Cette intimée n’a pas constitué avocat, de sorte que l’arrêt sera réputé contradictoire.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 18 octobre 2022.

Motifs de la décision :

Selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. ‘Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.’

Sur la demande en nullité du contrat conclu entre M. et Mme [G] et la société Norme Protec :

sur la nullité pour dol :

Selon l’article 1137 du code civil,’Le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manoeuvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.

Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation.’

M. [G] en son nom et ès qualité fait valoir que le commercial mandaté par la société Norme Protec ne pouvait ignorer l’état de faiblesse psychologique des époux [G].

Il produit un certificat médical daté du 1er décembre 2020 du Docteur [H], médecin traitant de Mme [G] ‘depuis plusieurs décennies’, attestant qu’elle ‘souffre depuis plusieurs années d’une maladie dont le traitement peut altérer ses capacités de jugement, faisant d’elle une personne en situation de faiblesse.’ Il précise que son épouse était hospitalisée lorsque les travaux de toiture ont été exécutés et qu’elle est décédée le 15 février 2021. M. [G] communique également un certificat médical du Docteur [Z] daté du 16 décembre 2020, selon lequel il est atteint depuis 2005 d’une maladie de longue durée, ‘qui altère ses facultés de jugement et le met en situation de faiblesse’.

Les deux fils du couple témoignent de ce que, fin août 2020, leur mère était épuisée par cinq années de chimio-thérapie, sujette à des troubles et confusions, très perturbée dans ses capacités mentales et intellectuelles, et que leur père, atteint de la maladie de Parkinson, connaissait de grandes difficultés d’élocution, ne pouvait plus écrire, et sollicitait habituellement ses enfants pour tous travaux à entreprendre.

Mme [V], belle-fille de M. et Mme [G], atteste que Mme [G] se chargeait d’ordinaire de toutes les démarches administratives du foyer, jusqu’à la forte dégradation de son état de santé courant 2020, et qu’elle-même a pris le relais compte tenu des difficultés de compréhension de M. [G]. Un quatrième témoin, Mme [F], déclare que la dégradation de l’état de santé de Mme [G] a altéré son discernement et son évaluation de l’impact des travaux, alors que M. [G] n’était pas non plus en capacité de gérer la situation.

Ces pièces ne suffisent pas, cependant, à établir que la société Norme Protec a abusé d’un état de faiblesse de M. et Mme [G]. En effet, les époux [G] ne faisaient l’objet d’aucune mesure de protection, les certificats médicaux ont été rédigés plusieurs mois après les faits, les témoignages émanent du proche entourage et ces documents ne démontrent pas que le couple n’a pas compris l’objet et les conséquences de son engagement.

La société Norme Protec a remis à M. et Mme [G] une ‘estimation gratuite’ datée du 31 août 2020, signée par un commercial et par Mme [G], qui énumère des travaux de toiture pour un montant de 16 300 euros. Le bon de commande du 31 août 2020, signé par les mêmes personnes et par un second commercial, mentionne les travaux listés dans l’ ‘estimation gratuite’ et y ajoute les modalités du règlement à crédit des 16 300 euros, à savoir par 144 échéances de 178,91 euros au taux effectif global de 4,96 % par an, pour un montant global de 25 762,34 euros incluant les frais et l’assurance.

Il ne résulte pas davantage de la remise d’une ‘estimation gratuite’ que la société Norme Protec a manoeuvré pour tromper M. et Mme [G] et les obliger à contracter. Par suite, il n’y a pas lieu d’examiner, comme fondement d’un dol, le détail des manquements invoqués par l’appelant quant aux obligations d’information que le contrat doit respecter. La demande en nullité pour dol est donc rejetée.

Sur la nullité pour défaut de cause :

M. [G] soutient que la commande de travaux est dépourvue de cause, dans la mesure où les interventions exécutées sont inutiles et extrêmement coûteuses.

Sont produites aux débats deux pièces signées le 13 octobre 2020 par M. [N] [G] :

– une réception des travaux, dits conformes aux documents contractuels, après examen des ouvrages, sous réserve de tous recours en responsabilité pour vices ou défauts pouvant se manifester par la suite et tombant sous l’application des dispositions du code civil,

– une attestation de livraison et d’installation avec demande de financement, selon laquelle tous les travaux et prestations qui devaient être effectués ont été pleinement réalisés et il est demandé à la société Cofidis de procéder au décaissement du crédit et d’en verser le montant directement entre les mains de la société Cofidis.

Aucun autre renseignement n’est fourni sur les interventions effectuées par la société Norme Protec.

Dans ces conditions, M. [G] n’apporte pas la preuve de leur inutilité, puisque l’état du toit avant les travaux est ignoré et qu’un entretien de la toiture n’est pas nécessairement une chose inutile. En revanche, il prouve que le prix fixé est très important en produisant un courrier adressé par son assureur protection juridique à la société Norme Protec, qui fait état d’un devis correspondant exactement aux mêmes travaux pour un montant de 7 800 euros (pièce n°10).

Toutefois l’erreur sur la valeur ne constitue pas une cause de nullité, lorsqu’il n’y a pas tromperie sur les qualités essentielles de la prestation (article 1136 du code civil). Or aucune critique n’est formulée à l’égard des travaux effectués.

M. [G] est donc débouté de sa demande en nullité du contrat pour vice du consentement.

Sur la nullité pour non-respect des dispositions du code de la consommation :

. Quant aux mentions obligatoires :

L’article L. 111-1 du code de la consommation dispose :

‘Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;

3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;
5° S’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence de toute restriction d’installation de logiciel, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’Etat (…)’

Les caractéristiques essentielles du bien ou du service s’apprécient par rapport ‘aux qualités essentielles de la prestation (…) qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté’ de l’article 1133 du code civil. Par suite, l’absence de précision sur les modèles, références, poids, aspect des matériaux commandés (couvre-bandeau en zinc, dessus de toit PVC, pose de produits hydrofuges, algicides, fongicides) n’affecte pas en l’espèce la connaissance des caractéristiques essentielles des biens commandés.

Le bon de commande précise la date prévue pour l’intervention (8 septembre 2020) et la date limite d’exécution (8 décembre 2020). Il indique les noms de deux démarcheurs : MM. [B] et [U]. A ces égards les critiques de M. [G] ne sont pas fondées.

La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation ne figure pas sur le bon de commande. Cependant, la société Cofidis répond à raison que, si les dispositions en cause sont d’ordre public, l’omission de ladite information n’entraîne la nullité du contrat que sur démonstration du grief qui en résulterait. Or aucun grief n’est ici invoqué. Au surplus, il est justifié d’une démarche amiable préalable de l’assureur protection juridique de M. [G], qui n’a donc pas engagé d’emblée une action en justice.

. Quant au respect des dispositions relatives au droit de rétractation :

S’agissant des contrats conclus à distance et hors établissement, l’article L. 221-5 précise :

‘Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat (…)’

L’article L. 221-9 ajoute que le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5.

Il est constant que le formulaire détachable doit comprendre sur une face l’adresse exacte et complète à laquelle il doit être envoyé et sur l’autre face les modalités d’annulation de la commande, aucune autre mention que celles visées par les textes ne pouvant figurer sur le formulaire.

Or, le bon de commande litigieux comporte, au pied du verso, un formulaire de rétractation non détachable du bon de commande, qui, s’il était découpé, amputerait le bon de commande de la signature des parties au contrat (au recto) et priverait donc le consommateur de la preuve de son engagement. Au surplus, ce formulaire présente des caractères identiques à ceux du corps des conditions générales du contrat, son intitulé est écrit en caractères nettement plus petits que les titres ‘conditions générales de vente’et ‘conditions particulières d’exécutions techniques’, de sorte qu’il n’attire nullement l’attention sur la faculté de rétractation.

Il s’ensuit que le contrat de vente et prestation de service ne peut dès lors être tenu pour valable au regard des dispositions relatives au droit de rétractation, une information correcte de leurs droits quant à la possibilité d’une rétractation étant d’autant plus nécessaire que M. et Mme [G] connaissaient de graves soucis de santé.

Le contrat conclu avec la société Norme Protec doit donc être annulé, par application de l’article L. 242-1 du code de la consommation.

Sur la nullité du crédit affecté :

Selon l’article L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit est annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement annulé.

Il s’ensuit que le contrat de prêt entre M. et Mme [G] et la société Cofidis est également annulé.

Curieusement, après une motivation aboutissant à annuler les deux contrats, le jugement du 6 décembre 2021 prononce leur résolution. Il sera dès lors infirmé de ces chefs.

Sur les conséquences de la nullité des contrats :

Conformément à l’article 1178 du code civil, le contrat annulé est censé n’avoir jamais existé et les prestations exécutées donnent lieu à restitution.

Il s’ensuit que M. [G] doit restituer à la société Cofidis la somme de 16 300 euros et que la société Cofidis doit lui restituer les mensualités payées, soit 2 328,95 euros (soit 13 échéances) sauf à parfaire, selon les pièces produites, le montant des échéances payées de décembre 2020 à décembre 2021 n’étant pas contesté. De même, la société Norme Protec doit restituer à M. [G] les 16 300 euros versés et celui-ci, faute de pouvoir restituer la prestation en nature fournie, doit lui verser une somme de 7 800 euros correspondant à l’estimation du montant des travaux réalisés selon le courrier de l’assureur protection juridique, ainsi qu’exactement apprécié par le premier juge.

Sur les demandes en responsabilité contre la société Cofidis :

M. [G] reproche à la société Cofidis, spécialisée dans les opérations de crédit affecté sur démarchage à domicile, d’avoir accordé un crédit pour financer un contrat principal nul au regard des prescriptions du code de la consommation et fait valoir qu’une telle faute prive l’établissement de crédit de son droit à restitution.

Il est constant que le prêteur est tenu de vérifier la régularité formelle du contrat principal et d’informer l’emprunteur d’une éventuelle irrégularité afin que celui-ci puisse confirmer le contrat ou y renoncer.

Il est nécessaire cependant d’appliquer les règles d’un régime de responsabilité et de caractériser le préjudice résultant pour M. et Mme [G] de la faute du prêteur. En l’espèce, parce que la société Cofidis ne les a pas avertis de ce que les informations sur la mise en oeuvre du droit à rétractation ne répondaient pas aux textes du code de la consommation, M. et Mme [G] ont perdu une chance de faire application de leur droit de se rétracter. Leur préjudice pour perte de chance, dans le contexte qui a été décrit et s’agissant d’un démarchage auprès de personnes qui n’avaient rien demandé, est apprécié par la cour à la somme de 5 000 euros.

Il n’est pas démontré d’autre faute de la société Cofidis, puisqu’elle n’a pu participer à un dol inexistant, qu’elle n’avait pas de compétence pour se prononcer sur ‘le caractère tant inutile qu’exorbitant’ des travaux prévus, et qu’il n’est pas établi qu’elle ait manqué à son devoir de mise en garde ou de conseil envers M. et Mme [G], les facultés contributives des époux (revenus de 2 402 euros par mois pour des retraités propriétaires de leur logement) leur permettant d’assumer des échéances mensuelles de 179,15 euros.

En conséquence, la société Cofidis devra indemniser M. [G], agissant en son nom personnel et en qualité d’héritier de son épouse, pour un montant de 5 000 euros de la perte de chance d’utiliser le droit de rétractation.

Sur les demandes en responsabilité solidaire contre la société Cofidis et la société Norme Protec :

Sur le fondement de l’article 1240 du code civil, selon lequel ‘Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer’, M. [G] sollicite la condamnation des deux sociétés solidairement à réparer, d’une part, les préjudice financier et perte de trésorerie, à hauteur de respectivement 2 149,80 euros à réévaluer au jour de l’arrêt et 3 000 euros, d’autre part, le préjudice moral subi par le couple.

Il évalue le préjudice financier au montant des 12 échéances d’emprunt remboursées au 6 décembre 2021, montant à parfaire au jour de l’arrêt. Cependant, ces échéances seront restituées par la société Cofidis suite à l’annulation des contrats. Elles ne constituent donc pas un préjudice autonome qui pourrait s’ajouter aux restitutions.

La perte de trésorerie résulterait de ce que le remboursement du prêt a réduit le niveau de vie des époux et obère toujours la trésorerie disponible de M. [G]. Ce dernier bénéficiait en 2019 d’une retraite de 17 590 euros, soit 1 465 euros mensuels, et ne justifie pas de son revenu actuel, ni des charges particulières qu’il supporterait.

Le premier juge est approuvé en ce qu’il a relevé que les préjudices moral et financier allégués n’étaient pas caractérisés et débouté M. [G] de ses demandes en indemnisation à ces titres.

Sur les frais et dépens :

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement en ce qu’il condamne in solidum la société Cofidis et la société Norme Protec aux dépens, et à condamner la société Cofidis, appelante, aux dépens d’appel.

L’équité commande de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il condamne in solidum la société Norme Protec et la société Cofidis à payer à M. [G] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité permet en outre de condamner la société Cofidis, appelante, à payer à M. [G] une indemnité de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

Par ces motifs,

la cour,

Infirme le jugement du 6 décembre 2021, sauf en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles,

Statuant à nouveau,

Prononce l’annulation du contrat conclu le 31 août 2020 entre la société Norme Protec et M. et Mme [G],

Constate l’annulation du contrat de crédit affecté accepté le 31 août 2020 par M. et Mme [G] afin que la société Cofidis finance le contrat principal,

Dit que la société Norme Protec doit restituer à M. [G], agissant en son nom personnel et en qualité d’héritier de son épouse, la somme de 16 300 euros, et que M. [G], agissant en son nom personnel et en qualité d’héritier de son épouse, doit restituer à la société Norme Protec la somme de 7 800 euros,

Dit que M. [G], agissant en son nom personnel et en qualité d’héritier de son épouse, doit restituer à la société Cofidis la somme de 16 300 euros et que la société Cofidis doit restituer à M. [G], agissant en son nom personnel et en qualité d’héritier de son épouse, la somme de 2 328,95 euros correspondant aux mensualités payées, sauf à parfaire,

Condamne la société Cofidis à payer à M. [G], agissant en son nom personnel et en qualité d’héritier de son épouse, une somme de 5 000 euros en réparation de leur perte de chance d’exercer leur droit à rétractation,

Déboute M. [G], agissant en son nom personnel et en qualité d’héritier de son épouse, de ses autres demandes en indemnisation contre la société Cofidis et la société Norme Protec,

Condamne la société Cofidis à payer à M. [G], agissant en son nom personnel et en qualité d’héritier de son épouse, une somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel,

Déboute la société Cofidis de ses prétentions sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Cofidis aux dépens d’appel, avec possibilité de recouvrement direct au profit de Me Camille Romdane, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président

 


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