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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
Chambre sociale 4-6
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 11 JANVIER 2024
N° RG 21/03633 – N° Portalis DBV3-V-B7F-U4JU
AFFAIRE :
[N] [E]
C/
S.A.R.L. TRANSDEV AEROPORT TRANSIT
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Août 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MONTMORENCY
N° Chambre :
N° Section : C
N° RG : 20/00058
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Jean-louis MARY
Me [O] [S] de
la SELARL AAZ
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE ONZE JANVIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [N] [E]
né le 08 Mai 1976 à [Localité 5] MAROC
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Jean-louis MARY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1539
APPELANT
****************
S.A.R.L. TRANSDEV AEROPORT TRANSIT
N° SIRET : 418 57 6 2 03
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Annie GULMEZ de la SELARL AAZ, , avocat au barreau de MEAUX, vestiaire : 31 –
S.A.S.U. FLYBUS
N° SIRET : 447 91 6 6 69
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Annie GULMEZ de la SELARL AAZ, avocat au barreau de MEAUX, vestiaire : 31 –
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Novembre 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique PITE, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Nathalie COURTOIS Président,
Madame Véronique PITE, Conseiller,
Madame Odile CRIQ Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,
FAITS ET PROCÉDURE
M. [N] [E] a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 22 juillet 2009, avec reprise d’ancienneté au 20 octobre 2003, en qualité de conducteur de car, par la société à responsabilité limitée Transdev Aéroport Transit, spécialisée dans le transport.
Il devint titulaire d’un mandat de délégué syndical le 21 octobre 2017.
A la suite de la signature d’une convention tripartite le 11 février 2019, il occupa les fonctions de superviseur au sein de la société par actions simplifiée Flybus faisant partie du même groupe et qui a pour activité le transport des voyages pour la société Aéroports de Paris, emploie plus de dix salariés et relève de la convention collective du personnel au sol des entreprises de transport aérien.
Convoqué par la société Flybus le 5 juillet 2019 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 6 août suivant, M. [E] a été licencié par courrier du 16 août 2019, énonçant une faute grave.
M. [N] [E] a saisi, le 3 février 2020, le conseil de prud’hommes de Montmorency, en vue de solliciter, à l’encontre de ses employeurs successifs, à titre principal, sa réintégration au sein de ses anciennes fonctions, d’obtenir une indemnité au titre de la violation du statut protecteur, et à titre subsidiaire, de contester le bien-fondé de son licenciement et solliciter diverses indemnités à ce titre, ce à quoi les sociétés s’opposaient.
Par jugement rendu le 30 août 2021, notifié le 23 novembre suivant, le conseil a statué comme suit :
Déboute M. [N] [E] de sa demande de réintégration au sein de la société Transdev Aéroport Transit et de la société Flybus ;
Dit que le licenciement de M. [N] [E] repose bien sur une faute grave ;
Déboute M. [N] [E] de l’intégralité de ses demandes.
Le 12 décembre 2021, M. [N] [E] a relevé appel par voie électronique de cette décision, intimant ses employeurs successifs.
Par ordonnance du 13 février 2023, le conseiller de la mise en état a rejeté les demandes tendant à voir prononcer la caducité de l’appel en raison de l’irrégularité de la déclaration d’appel et à voir juger que le jugement a un caractère définitif.
Selon ses dernières conclusions remises au greffe le 3 octobre 2023, M. [N] [E] demande à la cour de :
Infirmer le jugement entrepris en qu’il l’a débouté de l’intégralité de ses demandes, de sa demande de réintégration au sein de la société Transdev Aéroport Transit et de la société Flybus et a jugé que son licenciement reposait sur une faute grave.
Statuant à nouveau,
Débouter les sociétés Transdev Aéroport Transit et Flybus de leurs demandes de caducité de l’appel et de leurs demandes d’irrecevabilité de ses demandes additionnelles présentées en première instance et en appel
Annuler la convention tripartite en date du 11 février 2019 faute d’autorisation de l’inspection du travail
Ordonner à la société Transdev Aéroport Transit de le réintégrer dans ses effectifs dans les fonctions qui étaient les siennes à la date du 11 février 2019, et ce, sous astreinte de 200 euros par jour de retard commençant à courir huit jours après le prononcé de l’arrêt à intervenir
Condamner la société Transdev Aéroport Transit à lui payer une somme de 165.590 euros, arrêtée au 1er décembre 2023, sauf à parfaire, à titre d’indemnité due en suite de la violation du statut protecteur.
Subsidiairement,
Annuler son licenciement notifié par la Société Flybus par lettre du 16 août 2019 en raison de l’absence d’autorisation de l’inspection du travail
Ordonner à la société Flybus de le réintégrer dans ses effectifs dans les fonctions qui étaient les siennes à la date du 16 août 2019 et ce, sous astreinte de 200 euros par jour de retard commençant à courir huit jours après le prononcé de l’arrêt à intervenir
Condamner la société Flybus à lui payer une somme de 183.747 euros, sauf à parfaire à titre d’indemnité due en suite de la violation du statut protecteur.
Très subsidiairement,
Juger que son licenciement ne repose ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse
Condamner la société Flybus à lui payer les sommes suivantes :
°Indemnité de préavis : (2 mois) 7.068 euros, congés payés afférents 706,80 euros
°Indemnité de licenciement : (15 ans 9 mois et 26 jours) 15.693 euros
°Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 50.000 euros.
En tout état de cause,
Débouter la société Transdev Aéroport Transit et la société Flybus de leurs demandes
Condamner in solidum la société Transdev Aéroport Transit et la société Flybus à lui payer une somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’en tous les dépens de l’instance.
Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe le 13 octobre 2023, les sociétés Transdev Aéroport Transit et Flybus demandent à la cour de :
Vu l’article 910-4 du code de procédure civile
Vu l’absence de conclusions dans le délai de 3 mois de la notification des conclusions d’appel incident, et la modification et le rajout de prétentions à l’approche de la clôture
Juger M. [N] [E] irrecevable à solliciter l’infirmation de chefs de jugement non expressément visés dans ses écritures initiales
Juger M. [N] [E] irrecevable en sa demande formée hors délai de l’article 910 du code de procédure civile de « débouter les sociétés TAT et Flybus de leurs demandes de caducité de l’appel et de leurs demandes d’irrecevabilité liées aux demandes additionnelles présentées par M .[E] en première instance et en appel »
Ecarter corrélativement les moyens développés de la page 5 à 11 par M. [N] [E] à l’appui de cette demande de rejet.
1) A titre principal
Vu l’article 901 du code procédure civile et l’article 54, 2° du code procédure civile, ainsi que les articles 542 et 954 du code de procédure civile
Vu l’absence de mention des chefs du dispositif du jugement expressément critiqués dans le dispositif des conclusions initiales d’appel
Sauf à relever d’office la caducité de la déclaration d’appel au visa de l’article 914 du code procédure civile
Confirmer le jugement.
2) A titre subsidiaire
Infirmer le jugement en ce qu’il n’a pas statué sur la demande d’irrecevabilité des demandes nouvelles non visées dans la requête initiale à savoir la demande en réintégration au sein de la société Flybus et la demande d’indemnité de 67.500 euros au titre de la violation du statut protecteur à l’encontre de la société Flybus
Juger irrecevables les demandes nouvelles de M. [N] [E] d’annulation du licenciement notifié par la société Flybus qui ne faisaient l’objet d’aucune prétention en première instance, de réintégration au sein de la société Flybus et de condamnation de la société Flybus au paiement d’une indemnité pour violation du statut protecteur
Juger corrélativement irrecevables la demande d’annulation de la convention tripartite du 11 février 2019 et la demande d’annulation du licenciement en date du 16 août 2019 prononcé par la société Flybus, formées en cause d’appel.
3) A titre infiniment subsidiaire
Confirmer le jugement en ce qu’il a retenu que l’économie globale de la convention tripartite était d’organiser avec l’accord du salarié le transfert du contrat par changement d’employeur et la poursuite de sa relation contractuelle au sein de la société Flybus n’emportant pas rupture du contrat et débouté M. [N] [E] de l’ensemble de ses demandes
Débouter M. [N] [E] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
4) A titre très subsidiaire, si la cour devait considérer qu’il y a violation du statut protecteur, la société Transdev Aéroport Transit demande à la cour de céans de bien vouloir :
Déduire la somme de 17.292,75 euros nets de l’indemnité pour violation du statut protecteur
La société Flybus demande à la cour de céans de bien vouloir :
Annuler le contrat de travail conclu avec M. [N] [E]
Condamner M. [N] [E] à lui rembourser les salaires perçus du 11 février 2019 au 16 août 2019, soit la somme de 17.292,75 euros nets.
5) A titre encore plus subsidiaire
La société Flybus demande à la cour de céans de bien vouloir :
Fixer le salaire de référence de M. [N] [E] à la somme de 3.068,35 euros bruts
Limiter le montant de l’indemnité compensatrice de préavis à la somme de 6.136,71 euros bruts, outre 613,67 euros bruts de congés afférents
Limiter le montant de l’indemnité de licenciement à la somme de 13.308,95 euros
Limiter le montant de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse à trois mois de salaire.
6) En tout état de cause
Débouter M. [N] [E] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions
Condamner M. [N] [E] à régler à la société Transdev Aéroport Transit la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Condamner M. [N] [E] également à régler à la société Flybus la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Condamner M. [N] [E] aux entiers dépens, y compris les éventuels frais d’exécution de la décision à intervenir par voie d’huissier de justice.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.
Par ordonnance rendue le 18 octobre 2023, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 14 novembre 2023.
MOTIFS
I ‘ sur les moyens de procédure
Sur la recevabilité des demandes sur le fondement des articles 910 et 910-4 du code de procédure civile
Au visa de l’article 910-4 du code de procédure civile, les sociétés Transdev et Flybus soutiennent qu’en suite du défaut de mention des chefs de jugement critiqués dans le dispositif des premières conclusions de l’appelant, M. [N] [E] n’est pas recevable à solliciter ensuite, et notamment passé 3 mois de leur appel incident, l’infirmation, dont il ne parlait pas, du jugement en ce qu’il a rejeté sa demande de réintégration et a dit le licenciement fondé. Elles estiment par ailleurs que leur contradicteur n’est plus recevable à solliciter le rejet de leurs demandes en caducité de l’appel et en irrecevabilité de ses prétentions additionnelles, passé le délai de l’article 910 du code de procédure civile.
L’article 910 du code de procédure civile énonce que « l’intimé à un appel incident ou à un appel provoqué dispose, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, d’un délai de trois mois à compter de la notification qui lui en est faite pour remettre ses conclusions au greffe. »
L’article 910-4° du même texte énonce qu’« à peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l’alinéa 2 de l’article 902, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait. »
En l’occurrence, les sociétés Transdev et Flybus par conclusions remises au greffe le 9 juin 2022 ont fait appel incident seulement, à titre subsidiaire, sur la fin de non-recevoir des demandes additionnelles nouvelles tirée de l’article 70 du code de procédure civile, formée devant les premiers juges.
Dès lors, il n’y a lieu à application des dispositions de l’article 910 précité pour le surplus, et c’est à tort que les intimées estiment que la formulation d’un rejet de leur demande de caducité de l’appel, d’ailleurs non formée, serait irrecevable.
Ensuite, les seules conclusions de M. [N] [E] déposées le 3 octobre 2023 contiennent, entre autres choses, des moyens de défense opposés à l’appel incident. Il est ajouté à leur dispositif la formulation du rejet de la fin de non-recevoir fondée sur le lien suffisant des prétentions additionnelles présentées en 1ère instance.
N’en ayant déposé aucune dans le délai prévu à l’article 910 du code de procédure civile, l’intéressé n’était plus recevable passé 3 mois de l’appel incident d’y répliquer. Sa réplique doit donc être tenue pour irrecevable.
Sur la portée de l’appel
Les sociétés Transdev et Flybus observent que l’appelant n’a pas précisé dans sa déclaration la portée de son appel, tendant à la réformation ou à l’annulation du jugement. Elles soutiennent ensuite qu’il a omis de mentionner au dispositif de ses premières conclusions l’infirmation des chefs de jugement dont il poursuit l’anéantissement. Elles concluent que seulement le jugement peut être confirmé.
M. [N] [E] leur oppose la conformité de sa déclaration d’appel avec les dispositions de l’article 901 du code de procédure civile, visant les chefs de jugement critiqués. Il soutient n’y avoir besoin de porter au dispositif de ses conclusions ces mêmes chefs.
L’article 901 du code de procédure civile, dans sa version issue du décret du 25 février 2022, dispose que :
« La déclaration d’appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l’article 54 et par le cinquième alinéa de l’article 57, et à peine de nullité : (‘)
4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible ».
L’article 542 du même code dit que « l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel ».
L’article 562 du même code précise que l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent.
Cela étant, la déclaration d’appel du 13 décembre 2021 mentionne pour objet « appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués à savoir » suivis des chefs du dispositif du jugement querellés. L’article 901 ni aucune autre disposition du code de procédure civile ne faisant obligation à l’appelant de mentionner dans la déclaration d’appel qu’il demande l’infirmation des chefs de jugement critiqués, c’est à tort que les intimées suggèrent, à cet égard, la nécessaire confirmation du jugement.
Par ailleurs, par ses conclusions remises au greffe le 11 mars 2022 dans le délai de l’article 908 du code de procédure civile, M. [N] [E] sollicite : « infirmer le jugement en toutes ses dispositions ». Pour autant, nulle disposition ne lui fait obligation de détailler dans le dispositif de ses conclusions les chefs de jugement critiqués, qui figurent dans la déclaration d’appel.
Dès lors, c’est à tort que de ce motif, les intimées sollicitent la confirmation pure et simple du jugement.
Sur la recevabilité des demandes nouvelles
Les demandes additionnelles formées en première instance
Au visa des articles 4 et 70 du code de procédure civile, les sociétés Transdev et Flybus soutiennent que le jugement doit être infirmé faute d’avoir statué sur la fin de non-recevoir tirée du caractère nouveau des demandes additionnelles en réintégration et en condamnation au paiement d’une indemnité pour violation de son statut protecteur, dirigées contre la société Flybus.
Elles considèrent que ce litige est totalement nouveau, puisque dans ses premières écritures, M . [E] entendait être réintégré dans les effectifs de la société Transdev et non ceux de la société Flybus, et qu’il ne contestait, à l’égard de la société Flybus, que le bien-fondé du licenciement, sans égard à sa nullité.
L’article 70 du code de procédure civile expose que « les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant. »
Cela étant, il est acquis aux débats que par requête, M. [N] [E] sollicitait à titre principal sa réintégration dans les effectifs de la société Transdev ainsi qu’une indemnité en réparation de la violation de son statut protecteur, et qu’ensuite, devant le bureau de jugement du 1er mars 2021, il demanda en plus, à titre subsidiaire, sa réintégration dans les effectifs de la société Flybus et le paiement d’une indemnité pour violation de son statut protecteur dirigée contre cette défenderesse.
Etant précisé que le litige opposant trois parties dont deux employeurs successifs doit être appréhendé dans son ensemble, force est de constater que ces demandes additionnelles fondées sur la méconnaissance par la société Flybus de la protection due pendant 12 mois de l’exercice d’un mandat syndical, faute d’autorisation de l’inspection du travail, conduisant, selon le requérant, à la nullité de son licenciement, se rattachent par un lien suffisant au sens de l’article 70 précité à ses demandes initiales. En effet, il sollicitait sa réintégration et son indemnisation à l’encontre du premier employeur faute d’autorisation de l’inspection du travail préalable à la rupture de son contrat de travail induite, selon lui, par la convention de mutation du 11 février 2019, alors qu’il était délégué syndical, et il contestait, contre le second, le mérite du licenciement faute de cause. Ces demandes concernent les mêmes faits, d’un transfert de contrat entre les deux parties défenderesses suivi d’un licenciement dans le contexte d’un mandat syndical, et s’articulent sur les mêmes concepts, essentiellement d’une violation de la protection dérivant du mandat, en poursuivant le même objet d’une indemnisation de cette violation et du licenciement indu.
Les demandes en réintégration et en indemnisation formées contre la société Flybus doivent être déclarées recevables, et il sera ajouté au jugement, qui n’a pas statué sur la fin de non-recevoir dont il était régulièrement saisi.
Les demandes nouvelles formées en cause d’appel
Au visa de l’article 564 du code de procédure civile, les sociétés Transdev et Flybus font ensuite valoir le caractère nouveau en cause d’appel des prétentions adverses en annulation de la convention tripartite ou du licenciement, pour lesquels divers moyens avaient été présentés en 1ère instance, sans que le conseil n’en soit saisi. Elles estiment que la demande d’annulation du licenciement ne tend pas aux mêmes fins que celle de le voir juger mal-fondé, et n’en est ni l’accessoire ni le complément.
M. [N] [E] fait valoir les dispositions des articles 565 et 566 du code de procédure civile.
L’article 564 du code de procédure civile dit qu’à peine d’irrecevabilité soulevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, les articles 565 et 566 ajoutant que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges et que les parties peuvent par ailleurs y ajouter les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
Ce faisant, il est indubitable que la demande de nullité du licenciement, comme le prétend M. [N] [E] , est le complément, en étant la prémisse, de la prétention originaire du salarié en réintégration, sur laquelle le conseil de prud’hommes a statué. Elle ne saurait donc pas être tenue pour nouvelle.
Par ailleurs, si M. [N] [E] sollicite désormais l’annulation de la convention conclue avec ses employeurs successifs au dispositif de ses conclusions, il l’énonçait, comme il le relève, en première instance au soutien de ses prétentions originaires, si bien qu’elle en demeure le complément nécessaire.
Ces demandes sont recevables.
II ‘ sur les moyens de fond
Sur la convention tripartite et la violation du statut protecteur
M. [N] [E] considère que la convention tripartite a la nature d’une transaction au sens de l’article 2044 du code civil, comme étant la suite de ses doléances sur sa discrimination, et qu’ainsi ayant organisé la rupture de son contrat de travail en méconnaissance de son statut protecteur, elle est nulle.
Subsidiairement, en rappelant que la convention parle à 3 reprises de « rupture » et qu’il est impossible de renoncer à la protection, il fait valoir la rupture du contrat d’un commun accord en méconnaissance de l’autorisation nécessaire de l’inspection du travail, et conclut également à sa nullité.
Il dénie au reste la similarité de sa condition avec celle d’un salarié dont le contrat aurait été modifié suite à un transfert total ou partiel d’activité de l’entreprise.
Les sociétés Transdev et Flybus considèrent que sans transfert d’activité, l’autorisation de l’inspection du travail n’est pas prévue en cas d’accord commun des parties pour voir transférer le contrat du salarié au profit d’un autre employeur. Elles précisent que la convention, qui a pour seul objet d’organiser la poursuite du contrat de travail entre employeurs successifs en accordant avec le changement d’emploi une promotion, est exclusive de toute intention de rompre le contrat initial, et, l’analysant comme une novation, elles font référence, pour l’établir, à la commune intention des parties comme à la cohérence de l’acte en son entier.
Elles dénient par ailleurs que la convention contienne une transaction, faute d’aucune concession.
Cela étant, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l’intérêt de l’ensemble des travailleurs qu’ils représentent, d’une protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun, qui interdit à l’employeur de poursuivre par d’autres moyens que ceux institués dans le cadre légal, la rupture du contrat de travail.
En l’occurrence, la convention du 11 février 2019 intitulée « convention tripartite de mutation concertée », conclue entre les parties au litige, énonce que le contrat de travail liant M. [N] [E] à la société Transdev « est résilié d’un commun accord à la date du 10 février 2019 à minuit et corrélativement Monsieur [N] [E] est engagé par la société Flybus à compter du 11 février 2019 ». Sous la précision qu’il « est conclu concomitamment à la présente convention un contrat de travail entre la société Flybus » et M. [N] [E] , il est ajouté que ce nouveau contrat préservera son ancienneté acquise au sein de la société Transdev, ses primes dues par la société Transdev prorata temporis, ses congés payés, transférés chez le nouvel employeur, et qu’il conservera jusqu’à la fin du mois son ancienne mutuelle.
Elle s’achève sur ces termes, où le salarié voit la manifestation distincte d’une transaction « Monsieur [N] [E] se déclare ainsi définitivement rempli de tous ses droits à l’égard de la société Transdev Aéroport Transit, liés tant à l’exécution qu’à la rupture de son contrat de travail. Monsieur [N] [E] renonce en conséquence irrévocablement à se prévaloir des liens qui l’unissaient à la société Transdev Aéroport Transit ainsi qu’à toute contestation d’un quelconque motif de rupture. »
L’article 2044 du code civil indique que la transaction est un contrat par lequel les parties par des concessions réciproques terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître.
Ici, il est démontré que M. [N] [E] a saisi l’inspection du travail de la discrimination dont il se disait victime faute d’évolution professionnelle dans la société Transdev en dépit, selon lui, des promesses reçues, laquelle a interpellé par lettre du 1er août 2018 l’employeur, et les intimées concèdent que la modification intervint dans les suites de cette missive.
Cela étant, il ne se déduit pas de la convention de concessions réciproques, et qu’elle termine une contestation née. En effet, la société Transdev, comme elle le souligne, n’a rien concédé au salarié, qui sortit de ses effectifs. Par ailleurs, M. [N] [E] n’a rien concédé envers la société Flybus. Il ne se déduit pas non plus de son économie qu’elle ait pu avoir pour objet de mettre fin à un différend, dont les contours se trouveraient dans la seule allégation de l’intéressé de subir une discrimination, puisque son objet manifeste est d’organiser le transfert du contrat de travail de l’appelant au sein d’une autre société du groupe, avec son accord exprès, pour qu’il bénéficie de la progression de carrière souhaitée.
De même, il ne peut être prétendu, à l’instar de M. [N] [E] , que la société Transdev ait poursuivi la rupture de son contrat de travail, quoiqu’elle dérive nécessairement du montage organisant son transfert chez un autre employeur, qui éteint les obligations réciproques que les parties tenaient de la convention originaire.
La seule circonstance, que relève M. [N] [E] , d’une période d’essai au sein de la société Flybus ne contredit pas au demeurant ce transfert, dans l’instant où il était muté sur un autre poste que le sien, et devenait superviseur quand il était chauffeur.
Ensuite, s’il est vrai que la rupture conventionnelle est exclusive, dans les domaines où elle est applicable, de tout autre mode de rupture, il n’en reste pas moins que les dispositions de l’article L.1237-11 du code du travail ne sont pas applicables à une convention tripartite conclue entre un salarié et deux employeurs successifs ayant pour objet d’organiser, non pas la rupture du contrat, mais sa poursuite.
Dès lors, il s’en déduit que la société Transdev n’avait pas à obtenir l’autorisation de l’inspection du travail avant le transfert, puisque la loi ne la prévoit pas en cas de modification du contrat de travail avec l’accord du salarié et hors les conditions envisagées par l’article L.2414-1 du code du travail.
En conséquence, la demande de nullité de la convention du 11 février 2019 ne saurait pas prospérer, et il sera ajouté au jugement à cet égard. Celui-ci sera confirmé dans son rejet des prétentions de M .[E] en réintégration dans les effectifs de la société Transdev.
Il s’en déduit encore que c’est à raison que la société Transdev dénie toute violation du statut protecteur de ce motif et le jugement sera confirmé dans son appréciation conforme.
Sur le licenciement
La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est ainsi libellée :
« A la suite de notre entretien du 6 août 2019, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier en raison de la gravité des fautes commises par vous les 28 et 29 juin dernier.
En effet, le 28 juin 2019, alors que vous étiez en repos, vous vous êtes présenté dans les locaux de l’entreprise en fin d’après-midi. Vous avez pris possession d’un véhicule de type « navette » appartenant à l’entreprise dans le but de transporter « en VIP » certains membres de votre famille qui partaient sur un vol ASL à destination de OUIDA.
Lors de l’embarquement des passagers par bus, vous vous êtes positionné à proximité de la porte pour récupérer votre petit groupe de personnes que vous avez transporté au point de parking avion en navette.
Vous n’aviez au préalable demandé aucune autorisation pour effectuer cette démarche personnelle, ni à la compagnie aérienne, ni à l’assistant passage encadrant l’embarquement, de sorte que nous avons reçu une plainte de l’équipage ASL indiquant que cette pratique était inacceptable et nous demandant de rendre des comptes sur cet incident.
Une fois les membres de votre famille montés à l’avion, en man’uvrant avec la navette pour quitter le point de parking R10, vous avez eu un accrochage avec un véhicule de type Charlatte appartenant à l’assistant GEH. La navette Flybus était endommagée toutefois vous ne l’avez pas signalé aux responsables présents avant de quitter l’entreprise.
Peu après votre départ, le superviseur en poste, Monsieur [K] [[B]], a été interpelé par un responsable GEH qui l’a informé de l’accrochage intervenu en R10 et de l’absence de rédaction d’un constat. Informé par des collègues que vous veniez d’utiliser la navette, Monsieur [B] vous a contacté immédiatement. Vous lui avez alors affirmé que vous feriez un rapport d’accident le lendemain sur votre vacation de travail. Le 29 juin, vous avez effectivement rédigé un rapport sur l’accrochage.
Cependant celui-ci indique qu’il s’est produit le 29 juin et non le 28 et qu’il serait intervenu dans le cadre de votre activité professionnelle au cours d’un « contrôle sur les aires » ce qui n’est pas le cas. Au cours de l’entretien disciplinaire du 6 août dernier nous sommes revenus ensemble sur les faits reprochés.
Vous avez confirmé avoir pris la navette Flybus pour l’utiliser à des fins personnelles sur un jour de repos mais vous nous avez assuré avoir demandé l’autorisation à un Chef d’Escale de Permanence, Monsieur [V], avant de prendre cette initiative.
Pour notre part, nous ne pouvons que constater que le Responsable auquel vous faites référence est à ce jour absent de l’entreprise et ce depuis le 23 avril 2019. La vive réaction de la compagnie aérienne à la suite de votre intervention sur son vol indique également que celle-ci n’avait pas été autorisée au préalable.
Nous en concluons que vous vous êtes présenté dans l’entreprise sur un jour de repos sans autorisation d’un supérieur hiérarchique, ce qui constitue une violation des dispositions du règlement intérieur applicable dans l’entreprise. Votre utilisation du matériel roulant de l’entreprise à des fins personnelles sans autorisation d’un supérieur hiérarchique, constitue également une violation des dispositions de règlement intérieur.
Quant à votre intervention non autorisée sur le vol ASL, elle traduit selon nous au minimum votre absence de maitrise des procédures de sûreté aéroportuaires. En effet, vous ne devriez pas ignorer que, sauf autorisation expresse, les passagers d’un vol ne doivent pas sortir « du flux » encadré successivement par les agents de passage, les conducteurs de bus en charge des transports pour le compte des compagnies et assistants et les membres de l’équipage à bord [de] l’avion concerné.
C’est pour cette dernière raison que la compagnie ASL nous a fait part de son mécontentement avec force. Votre intervention dans le traitement des passagers du leur vol a eu un impact très néfaste sur notre image de marque auprès de cette compagnie cliente de longue date.
Concernant l’accrochage survenu entre la navette Flybus et le Charlatte GEH, vous avez confirmé en entretien les circonstances dans lesquelles il s’est produit. Cependant, contrairement aux rapports du superviseur Flybus et du Leader régisseur GEH en poste au moment des faits, vous nous avez dit avoir tout entrepris pour déclarer immédiatement l’accident. Précisément, sur le lieu de l’accroche vous auriez échangé avec des agents GEH en leur expliquant que même si le Charlatte n’avait rien vous préfériez qu’un constat soit établi. Le rapport du Leader GEH indique au contraire que lorsqu’il s’est rendu en R10 pour gérer la situation vous étiez déjà parti. C’est pour cette raison [qu’]il s’est ensuite présenté à notre base bus. Vous affirmez que lorsque (‘) vous êtes rentré à la base T3 avec le véhicule, vous avez demandé à Monsieur [B], superviseur en poste de venir constater les dégâts mais que celui-ci vous a répondu qu’il n’avait pas le temps de gérer cette situation. Or Monsieur [B] confirme qu’à aucun moment vous ne l’avez sollicité. Il précise que ce n’est que lorsque le Leader GEH s’est présenté dans nos locaux qu’il a pris connaissance de l’accrochage et qu’il en a constaté les conséquences avec ce dernier. Ce n’est que lorsqu’il vous a contacté que vous vous êtes engagé à rédiger un rapport d’accident le lendemain en venant au travail.
Poursuivant, vous nous avez indiqué avoir glissé le jour même un rapport d’accident sous la porte du bureau de Monsieur [V] puisque le superviseur n’avait pas le temps de le faire avec vous.
Nous n’avons pas trouvé de trace de ce rapport.
Enfin, vous nous avez indiqué avoir signalé votre accrochage par e-mail, en plus des démarches précédentes, adressé aux responsables de l’entreprise.
Suite à notre entretien vous nous avez transféré un message sensé correspondre. Nous n’avons pu que constater que ce message n’est pas précis, non signé et facilement falsifiable. D’ailleurs, le Directeur d’exploitation, sensé en être destinataire, n’en a pas trouvé de trace dans sa boite de réception à la date mentionnée. Nous avons donc pris en considération vos indications mais les rapports rédigés le 28 juin par les différents exploitants sont parfaitement concordants et ne correspondent pas à vos explications. De plus les démarches que vous indiquez avoir effectuées s’avèrent invérifiables. Renforçant plus encore notre conviction, lorsque nous avons abordé ensemble le sujet de votre rapport d’accident du 29 juin, relatant les circonstances de l’accrochage de façon mensongère, vous nous avez simplement répondu que vous ne [vous] souveniez plus pourquoi vous aviez écrit cela.
En conséquence de ce qui précède, il nous apparait clairement que vous avez tenté de camoufler l’accrochage du 28 juin 2019 d’abord en partant sans en informer qui que ce soit, ensuite en rédigeant un rapport mensonger.
Nous ne pouvons tolérer de telles attitudes de la part d’un de nos salariés, à plus forte raison s’agissant d’un membre du personnel d’encadrement. Le cumul de vos négligences dans le respect des règles et vos man’uvres pour tenter [de] dissimuler vos fautes portent lourdement atteinte à la confiance qui existait dans notre relation professionnelle. Il nous est impossible d’envisager sereinement la poursuite de notre relation contractuelle.
Nous prenons donc la décision de vous licencier pour faute grave et la rupture de votre contrat de travail intervient dès réception de la présente lettre. Les sommes vous restant dues vous seront adressées par courrier ainsi que votre le solde de votre compte, votre certificat de travail et l’attestation destinée aux ASSEDIC.
[‘] »
Sur la nullité
M. [N] [E] fait valoir la protection d’un an suivant la fin de son mandat de délégué syndical que provoqua le transfert de son contrat de travail, ce que la société Flybus lui dénie puisque le mandat syndical était exercé chez un autre et qu’il n’y eut aucun transfert d’activité ou perte de marché.
L’article L.2411-3 du code du travail subordonne le licenciement du délégué syndical à l’autorisation de l’inspection du travail. Cette autorisation est aussi requise pour le licenciement de l’ancien délégué syndical durant les 12 mois suivant la date de cessation de ses fonctions, s’il a exercé ces dernières pendant au moins un an.
Il est acquis aux débats que l’intéressé n’étant plus délégué syndical suite au transfert de son contrat de travail au sein de la société Flybus ne peut bénéficier de la protection instituée au 1er alinéa de l’article L.2411-3.
Cependant, n’étant pas non plus, dans les effectifs de son nouvel employeur par l’effet de la mutation concertée, ancien délégué syndical pour ne l’avoir jamais été, il ne saurait non plus bénéficier de la protection organisée par le 2ème alinéa du texte.
La demande de nullité du licenciement de ce motif ne saurait pas prospérer et il sera ajouté au jugement, qu’elle doit être rejetée.
Sur le bien-fondé
La société Flybus soutient les griefs contenus dans sa lettre de licenciement, tout en contestant les attestations adverses, imprécises.
Se fondant sur l’usage permettant de véhiculer ses proches sur le tarmac, M. [N] [E] prétend avoir obtenu l’autorisation de son superviseur d’utiliser le véhicule et estime mensongers les mails et attestations adverses. Il plaide pour le surplus l’accrochage sans gravité.
Selon l’article L.1235-1 du code du travail, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du code du travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. L’employeur doit rapporter la preuve de l’existence d’une telle faute, et le doute profite au salarié.
L’article 1-7 du règlement intérieur précise que « tout transport de voyageur ou de marchandise, même à titre gracieux, dans un véhicule de l’entreprise est interdit en dehors des prestations professionnelles faisant l’objet du travail. Tout conducteur ne peut, sans autorisation spéciale délivrée par la Direction et renouvelée chaque fois, dévier pour ses propres besoins les véhicules des itinéraires préalablement fixés. »
Il est acquis aux débats que M. [N] [E] a fait usage à des fins personnelles d’un véhicule de l’employeur un jour de repos, pour chercher sa famille au sortir de l’avion.
Le mail adressé le 3 juillet 2019 par l’un des préposés de la compagnie ASL airlines à M. [X], régulateur de la société Flybus, que l’appelant dispute inutilement aux motifs de n’être pas conforme aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile et d’être resté sans réponse connue, précise « suite à une plainte de l’équipage, je reviens vers toi sur l’incident survenu le 28 juin 2019 sur le départ du vol FPO 975 CDG ‘ OUD. Une navette VIP Flybus est [venue] prendre en porte d’embarquement un petit groupe de nos passagers sans demande de notre part. La navette s’est [rendue] à l’avion en aire Roméo sans autorisation de la compagnie pour l’embarquement. Commercialement ce n’est pas acceptable. Merci de nous rendre compte sur ce qui s’est passé. »
Si quelques salariés attestent, dans des termes parfois identiques, de l’usage leur permettant de transporter avec le véhicule de la société les membres de leur famille, il n’en résulte pas, à le supposer vrai, qu’aucune autorisation ne devait être sollicitée pour ce faire alors que l’accès au tarmac est réglementé, et le mail de la compagnie d’aviation signifie qu’elle aurait dû l’être. M. [N] [E] ne prétend nullement l’avoir demandée.
Par ailleurs, M. [B], superviseur, a adressé à M. [X] le 1er juillet 2019 un mail précisant n’avoir pas été prévenu de l’accident survenu le 28 juin entre la navette de la société et le véhicule de transport des bagages, qu’il apprit fortuitement de son propriétaire se plaignant de l’absence de constat. Il ajoute avoir appelé M. [N] [E] pour la déclaration d’accident à laquelle ce dernier s’engageait.
Si M. [N] [E] dénonce le mensonge de cette déclaration, quoique au reste il n’aurait pu être témoin de la manière dont l’accrochage fut d’abord porté à la connaissance de son chef, le témoignage de son collègue M. [D], dont il se prévaut, ne la contredit pas dans l’instant où il parle de leur conversation le lendemain d’où il ressort seulement que le superviseur était au courant.
Il est établi par mail du 29 juin 2018 que M. [N] [E] signala le « petit » accrochage, ayant occasionné un « petit choc », qui « n’empêche pas de rouler ».
Toutefois, comme l’affirme l’employeur, son rapport officiel du 29 juin expose qu’il a « utilisé le Viano pour une prestation contrôle sur les aires » et qu’il heurta à cette occasion un « charlate », le jour même.
Etant acquis aux débats qu’il ne contrôlait pas les aires, n’officiait pas le 28 juin 2019 pour les besoins de l’entreprise, et que l’accident était survenu la veille, force est de constater que son rapport est mensonger.
Enfin, si M. [N] [E] prétend avoir été autorisé à prendre le véhicule à des fins personnelles, il ne ressort d’aucune pièce, et notamment pas, comme il le prétend, du témoignage de M. [D] disant que le 29 juin 2019 le superviseur « était bien au courant de la prise de véhicule », qu’il ait été informé avant son usage de celle-ci et l’ait autorisée.
Dès lors, l’employeur rapporte suffisamment la preuve des faits énoncés au soutien du licenciement dans la lettre afférente.
Même sans mise à pied préalable à titre conservatoire dont la nécessité n’épuise pas les contours de la gravité de la faute et qu’aucun texte n’exige, ces faits doivent être tenus pour suffisamment graves pour recevoir une telle qualification au regard de l’infraction portée aux règles de sécurité dans les zones de circulation de l’aéroport, de l’atteinte à l’image en résultant pour la société Flybus et de la dissimulation du salarié, et le jugement sera confirmé dans son exacte appréciation des faits et des conséquences en résultant, les demandes de M. [N] [E] étant rejetées.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Déclare irrecevable la réplique de M. [N] [E] à l’appel incident de la société à responsabilité limitée Transdev Aéroport Transit et de la société par actions simplifiée Flybus relative à l’omission de statuer sur la fin de non-recevoir tirée de l’article 70 du code de procédure civile, figurant dans ses conclusions remises au greffe le 3 octobre 2023 ;
Dit recevable en cause d’appel la demande en nullité de la convention tripartite formée par M. [N] [E] contre la société à responsabilité limitée Transdev Aéroport Transit et la société par actions simplifiée Flybus ;
Dit recevable en cause d’appel la demande en nullité du licenciement formée par M. [N] [E] contre la société par actions simplifiée Flybus ;
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
Dit recevables les demandes en réintégration et en indemnisation de la violation de son statut protecteur formées par M. [N] [E] contre la société par actions simplifiée Flybus ;
Déboute M. [N] [E] de ses demandes en nullité de la convention tripartite dirigées contre la société à responsabilité limitée Transdev Aéroport Transit et la société par actions simplifiée Flybus et en nullité du licenciement dirigée contre la société par actions simplifiée Flybus ;
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [N] [E] aux entiers dépens.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Nathalie COURTOIS, Présidente et par Madame Isabelle FIORE Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,