Cession d’actions : 23 novembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 23/01186

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Cession d’actions : 23 novembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 23/01186
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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 36Z

14e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 23 NOVEMBRE 2023

N° RG 23/01186 – N° Portalis DBV3-V-B7H-VWIF

AFFAIRE :

S.A.S. MENUISERIE [T] [F]

C/

[R] [U] [B]

[V] [B]

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 08 Février 2023 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° RG : 2023R00017

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 23.11.2023

à :

Me Cindy FOUTEL, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Sylvie GAZAGNE, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT TROIS NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.S. MENUISERIES QUINCAILLERIES FERMETURES [T] [F]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 9]

Représentant : Me Cindy FOUTEL, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 754 – N° du dossier 2023069P

Ayant pour avocat plaidant Me Romain ROSSI-LANDI, du barreau de Paris

APPELANTE

****************

Monsieur [R] [U] [B]

né le [Date naissance 4] 1977 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentant : Me Sylvie GAZAGNE de la SCP GAZAGNE & YON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 511 – N° du dossier 2310240

Ayant pour avocat plaidant Me Pauline COSSE, du barreau de l’EURE

INTIME

****************

Monsieur [V] [B]

né le à PORTUGAL (78450)

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 11]

Madame [C] [B] née [G]

née le à PORTUGAL (78450)

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 11]

Madame [J] [B]

née le [Date naissance 5] 1982 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 11]

Représentant : Me Sylvie GAZAGNE de la SCP GAZAGNE & YON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 511

Ayant pour avocat plaidant Me Pauline COSSE, du barreau de l’EURE

PARTIES INTERVENANTES VOLONTAIRES

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 11 Octobre 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de président chargé du rapport et Madame Marina IGELMAN, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de président,

Madame Marina IGELMAN, Conseiller,

Mme Florence SCHARRE, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Elisabeth TODINI,

EXPOSE DU LITIGE

M [T] [F] est le président de la S.A.S. Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F].

[K] [B], décédée le [Date décès 6] 2021, était la compagne de M. [T] [F].

À son décès, [K] [B] a laissé pour lui succéder :

– ses parents, M. [V] [B] et Mme [C] [G] épouse [B],

– son frère, M. [R] [U] [B]

– et sa soeur, Mme [J] [B].

Par acte d’huissier de justice délivré le 5 janvier 2023, M. [R] [U] [B] a fait assigner en référé la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] aux fins d’obtenir principalement :

– le paiement de la somme de 211 258,60 euros correspondant au solde du compte courant d’associé d'[K] [B] à titre de provision,

– le paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– sa condamnation aux dépens.

Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 8 février 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Versailles a :

– condamné la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] à payer à M. [R] [U] [B] la somme de 211 258,60 euros,

– condamné la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] à payer à M. [B] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens sont les frais de greffe s’élèvent à la somme de 40,66 euros.

Par déclaration reçue au greffe le 20 février 2023, la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.

Dans ses dernières conclusions déposées le 4 septembre 2023 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] demande à la cour, au visa des articles 32, 122 et 873 alinéa 2 du code de procédure civile et 815-3 du code civil, de :

‘- juger la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] recevable et bien-fondée en ses demandes ;

à titre principal,

– juger M. [R] [B] irrecevable en ses demandes ;

– déclarer Mme [C] [G] épouse [B], M. [V] [B] et Mme [J] [B] irrecevables en leur intervention volontaire ;

– débouter Mme [C] [G] épouse [B], M. [V] [B] et Mme [J] [B] et M. [R] [B] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

– infirmer l’ordonnance de référé du tribunal de commerce de Versailles du 8 février 2023 (RG 2023R00017) en toutes ses dispositions en raison de l’existence de contestations sérieuses faisant obstacle à ce qu’il soit statué en référé ;

– déclarer irrecevable la demande des consorts [B] tendant à voire « ordonner à la sas Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] de communiquer son registre des mouvements des actions » ;

à titre subsidiaire,

– accorder à la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] un délai de deux années pour payer la somme de 211 258,60 euros ;

en tout état de cause,

– condamner M. [R] [B] à payer à la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– condamner M. [R] [B] aux entiers dépens.’

Dans leurs dernières conclusions déposées le 17 juillet 2023 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. [R] [U] [B], M. [V] [B], Mme [C] [B] et Mme [J] [B] demandent à la cour, au visa des articles 724 et 1376 du code civil, 554, 560 et 873 alinéa 2 du code procédure civile :

‘- d’infirmer partiellement l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a condamné la S.A.S. Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] à payer la somme de 211 258,60 euros à M. [R] [B] ;

– de confirmer l’ordonnance entreprise pour le surplus ;

– d’ordonner la recevabilité de l’intervention volontaire en cause d’appel de M. [V] [B], de Mme [C] [B] et de Mme [J] [B] ;

– d’ordonner à la S.A.S. Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] de communiquer son registre des mouvements des actions ;

y faisant droit,

– de condamner la S.A.S. Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] à payer la somme de 211 258,60 euros correspondant au solde du compte courant d’associé aux héritiers de [K] [B] définis par acte de notoriété établi le 13 décembre 2021 ;

– d’ordonner que cette somme devra être versée entre les mains de Maître [Z] [N], notaire, membre de la selarl [Localité 11] Notaires en charge de la succession de [K] [B] ;

– de débouter la S.A.S. Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

– de condamner la S.A.S. Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] à payer à M. [R] [U] [B] une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour avoir formé appel principal après s’être abstenue, sans motif légitime, de comparaître en première instance;

– de condamner la S.A.S. Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] à payer à M. [R] [U] [B], M. [V] [B] et Mme [C] [G] épouse [B] et Mme [J] [B] une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– de condamner la S.A.S. Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] aux entiers dépens ;’.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 septembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

sur la recevabilité de l’intervention volontaire de M. [V] [B], de Mme [C] [B] et de Mme [J] [B]

La société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] invoque l’irrecevabilité de l’intervention volontaire en appel de M. [V] [B], de Mme [C] [B] et de Mme [J] [B] au motif que cette intervention est irrecevable dès lors qu’ils ont omis d’agir en première instance et qu’ils n’ont pas la qualité de tiers.

M. [V] [B], Mme [C] [B] et Mme [J] [B], qui n’étaient pas parties en première instance, soutiennent que compte tenu de la demande présentée par leur fils et frère, coindivisaire dans la succession d'[K] [B], ils ont intérêt à intervenir en cause d’appel.

Sur ce,

En vertu des dispositions de l’article 554 du code de procédure civile, ‘peuvent intervenir en cause d’appel dès lors qu’elles y ont intérêt les personnes qui n’ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité.’

En l’espèce, M. [R] [U] [B] apparaît dans l’ordonnance attaquée comme seul demandeur en première instance.

Il apparaît en conséquence que M. [V] [B], Mme [C] [B] et Mme [J] [B] n’ont été ni parties ni représentés par leur coindivisaire en première instance, de sorte qu’ils ont la qualité de tiers (Civ. 2e, 6 juin 2019, n°18-17.735).

En conséquence, leur intervention volontaire à hauteur d’appel doit être déclarée recevable dès lors qu’il est établi qu’ils ont intérêt, en qualité de cohéritiers, à obtenir le versement d’une provision entrant dans l’indivision successorale.

Sur la provision

Arguant de l’absence de qualité à agir de M. [R] [B], la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] affirme qu’il ne pouvait réclamer seul le paiement d’une provision, s’agissant d’un acte d’administration nécessitant la majorité des deux tiers des indivisaires.

La société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] invoque ensuite l’existence de contestations sérieuses faisant obstacle au paiement de la provision sollicitée, exposant en premier lieu que, si l’indivision successorale pourrait éventuellement être créancière de la somme de 211 258,60 euros au titre du remboursement du compte courant d'[K] [B], M. [R] [B] n’est titulaire que d’une quote-part des droits indivis de l’indivision successorale et ne justifie donc pas être créancier de cette somme.

En second lieu, l’appelante fait valoir que n’est pas démontrée la qualité d’associée d'[K] [B] et que ni la preuve de l’existence d’un compte courant d’associé ni celle du versement par la défunte de la somme de 211 258, 60 euros à la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] ne sont rapportées, ce qui fait obstacle à toute condamnation provisionnelle.

La société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] conteste que M. [T] [F] aurait pu reconnaître cette dette et affirme que ses propos ont été dénaturés.

Elle précise qu'[K] [B] était salariée de la société et que son salaire lui était régulièrement versé.

Les consorts [B] font valoir en réponse que, dans un courrier du 21 décembre 2021, la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] a indiqué au notaire en charge de la succession d'[K] [B] que le ‘solde courant de madame [B] au 01 juin 2021’ s’élevait au montant de 211 258,60 euros, ce qui implique qu’il s’agissait d’un compte courant d’associé.

Ils exposent que M. [T] [F] a ensuite reconnu à nouveau l’existence de cette dette dans plusieurs courriers et qu’il n’existe donc aucune contestation sur le principe de la dette, l’obligation de remboursement du compte courant d’associé d'[K] [B] n’étant pas sérieusement contestable.

Ils précisent que tout héritier est fondé, même avant partage et même sans le concours des autres indivisaires, à agir en cette qualité contre le tiers détenteur d’un bien qui aurait été soustrait à l’actif de la succession.

Les intimés soutiennent qu’il ne leur appartient pas de justifier que la défunte aurait effectivement versé la somme de 211 258, 60 euros, le compte courant ayant pu être alimenté par des dividendes qui n’ont pas été perçus ou par la rémunération de la salariée.

Enfin, les consorts [B] font valoir que le premier juge a commis une erreur en n’octroyant la provision qu’à M. [R] [B] alors que l’assignation visait l’indivision successorale comme demanderesse.

Sur ce,

Contrairement à ce qu’allèguent les intimés, l’assignation devant le premier juge n’indique que M. [R] [U] [B] comme demandeur, et non l’indivision successorale.

Cependant, l’intervention volontaire de M. [V] [B], Mme [C] [B] et Mme [J] [B] ayant été déclaré recevable, le moyen tiré du défaut de qualité de M. [R] [U] [B] doit être rejeté puisque l’intervention volontaire de l’ensemble des indivisaires régularise la procédure.

Aux termes de l’article 873 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce, statuant en référé, peut dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.

Ce texte impose donc au juge une condition essentielle avant de pouvoir accorder une provision, celle de rechercher si l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

Il sera retenu qu’une contestation sérieuse survient lorsque l’un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n’apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

À l’inverse, sera écartée une contestation qui serait à l’évidence superficielle ou artificielle et le montant de la provision allouée n’a alors d’autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.

Aux termes de l’article du 1353 du code civil, c’est à celui qui réclame l’exécution d’une obligation de la prouver et à celui qui se prétend libéré de justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

L’article 1376 du code civil dispose que ‘l’acte sous signature privée par lequel une seule partie s’engage envers une autre à lui payer une somme d’argent ou à lui livrer un bien fongible ne fait preuve que s’il comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l’acte sous signature privée vaut preuve pour la somme écrite en toutes lettres.’

Les consorts [B] versent aux débats pour justifier de leur demande un courrier établi par M. [F] , dirigeant de la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F], daté du 21 décembre 2021 et adressé au notaire chargé de la succession d'[K] [B] qui mentionne notamment que sont dues à la défunte les sommes suivantes :

‘- 211 258, 60 euros solde compte courant Madame [B] au 01 juin 2021

– 23 566, 75 euros chèques paie avril à décembre 2020 des menuiseries [T] [F] non encaissés,

– 3 268, 15 euros chèques paie janvier et juin 2021 des menuiseries [T] [F] non encaissés

——————-

238 093, 50 euros.

L’activité des menuiseries [T] [F] étant principalement orientée sur la location de bâtiment et compte tenu du Covid actuel, les menuiseries [T] [F] ont beaucoup de difficultés pour encaisser les loyers et ne peuvent donc malheureusement pas vous verser les 238 093, 50 euros en une fois.’

Par la suite, M. [T] [F] a, par deux courriers des 4 mars 2022 et 13 mai 2022, indiqué à nouveau que sa société ne pouvait pas régler la somme de 238 093, 50 euros du fait de ses difficultés financières.

C’est à juste titre que la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] indique que ces courriers à eux seuls sont insuffisants pour démontrer, avec l’évidence requise en référé, tant la qualité d’associée d'[K] [B] que l’existence d’un compte courant d’associé ou le versement par la défunte de la somme de 211 258, 60 euros à la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] dans ce cadre.

Ils ne comportent pas par ailleurs les mentions prévues à l’article 1376 du code civil relatif à l’engagement unilatéral.

En conséquence, il convient de dire qu’il existe une contestation sérieuse faisant obstacle à la condamnation provisionnelle de la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] sur ce fondement et l’ordonnance déférée sera infirmée sur ce point.

Sur la demande de communication du registre des mouvements des actions de la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F]

La société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] affirme que cette demande est irrecevable comme n’ayant pas été présentée en première instance.

Elle affirme que les consorts [B], défaillants à rapporter la preuve de leurs allégations, tentent d’inverser la charge de la preuve en demandant sa condamnation à leur communiquer son registre des mouvements des actions.

Les consorts [B] soutiennent que cette demande a pour finalité de faire écarter les prétentions adverses mais que leur prétention principale demeure inchangée.

Ils indiquent que, s’agissant d’une société anonyme, la cession d’actions n’implique aucune modification des statuts et sollicitent en conséquence la production par la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] de son registre des mouvements d’actions visé à l’article 10 de ses statuts.

Sur ce,

En application de l’article 564 du code de procédure civile, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

Cependant, l’article 566 du code de procédure civile prévoit que les parties peuvent aussi expliciter les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément.

Il convient de dire qu’en l’espèce, la demande de communication de pièces formée par les consorts [B] est l’accessoire de leur demande en paiement et qu’elle est en conséquence recevable.

Selon l’article 145 du code de procédure civile, ‘s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées, à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé’.

L’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile suppose que soit constaté qu’il existe un procès non manifestement voué à l’échec au regard des moyens soulevés par les défendeurs, sur la base d’un fondement juridique suffisamment déterminé et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée.

La société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] est une société par actions simplifiée qui prévoit dans l’article 8 de ses statuts que ‘les actions sont obligatoirement nominatives. Elles sont inscrites en compte conformément à la réglementation en vigueur et aux usages applicables’ et dans l’article 10 que ‘la transmission des actions émises par la société s’opère par un mouvement de compte à compte sur production d’un ordre de mouvement. Ce mouvement est inscrit sur le registre des mouvements coté et paraphé’.

C’est à juste titre que les intimés font valoir qu’ils ne peuvent connaître par eux-mêmes l’identité des associés de la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F], qui ne figurent ni dans les statuts de la société ni dans son extrait Kbis, ni dans les documents sociaux publiés.

Il existe cependant une obligation pour les sociétés par actions simplifiées de tenir un registre concernant les mouvements d’actions et autres titres émis par celle-ci. L’article R. 228-8 du code de commerce dispose ainsi que ‘les registres de titres nominatifs émis par une société sont établis par cette société ou par une personne qu’elle habilite à cet effet. Ces registres peuvent être tenus de manière chronologique sur support papier ou sur tout autre support durable, notamment au moyen d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé.’

L’article R. 228-9 du même code précise que ces registres ‘contiennent les indications relatives aux opérations de transfert et de conversion des titres, et notamment :

1° La date de l’opération ;

2° Les nom, prénoms et domicile de l’ancien et du nouveau titulaire des titres, en cas de transfert ;

3° Les nom, prénoms et domicile du titulaire des titres, en cas de conversion de titres au porteur en titres nominatifs ;

4° La valeur nominale et le nombre de titres transférés ou convertis. Toutefois, lorsque ces titres sont des actions, le capital social et le nombre de titres représenté par l’ensemble des actions de la même catégorie peuvent être indiqués en lieu et place de leur valeur nominale ;

5° Le cas échéant, si la société a émis des actions de différentes catégories et s’il n’est tenu qu’un seul registre des actions nominatives, la catégorie et les caractéristiques des actions transférées ou converties ;

6° Un numéro d’ordre affecté à l’opération.

En cas de transfert, le nom de l’ancien titulaire des titres peut être remplacé par un numéro d’ordre permettant de retrouver ce nom dans les registres.’

Dès lors que la qualité d’associée d'[K] [B], qui revêt un caractère déterminant dans le cadre de l’action en paiement des intimés, est contestée, les consorts [B] disposent d’un motif légitime à solliciter la communication par la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] de ce registre des mouvements. Il sera donc ordonné à la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] de le produire, selon les modalités prévues au dispositif, et il sera ajouté à la décision déférée de ce chef.

Sur la demande au titre de l’article 560 du code de procédure civile

La société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] indique que l’assignation devant le premier juge lui a été signifiée par remise à l’étude du commissaire de justice le 6 janvier 2023 pour une audience le 25 janvier, qu’elle n’a eu connaissance de cette citation qu’ultérieurement et qu’elle ne s’est pas trouvée en mesure de trouver un avocat pour assurer sa défense à l’audience eu égard à la brièveté des délais, ce qui constitue un motif légitime à sa non-comparution.

Elle souligne que M. [R] [B] ne justifie d’aucun préjudice justifiant l’octroi de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 560 du code de procédure civile.

Pour solliciter l’octroi de dommages et intérêts à ce titre, les consorts [B] soutiennent que la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F], qui avait reconnu être débitrice de la succession d'[K] [B], s’est abstenue de comparaître en première instance sans motif légitime, alors qu’elle avait écrit à leur conseil avant l’audience en confirmant avoir reçu l’assignation.

Sur ce,

A titre liminaire, il convient de constater que la demande de condamnation sur ce fondement n’est formée, dans le dispositif des conclusions des intimés qui seul lie la cour en vertu des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, que par M. [R] [U] [B] et non par l’ensemble des indivisaires.

En vertu des dispositions de l’article 560 du code de procédure civile, ‘le juge d’appel peut condamner à des dommages-intérêts celui qui forme un appel principal après s’être abstenu, sans motif légitime, de comparaître en première instance.’

Il convient de dire qu’en l’espèce, la brièveté du délai écoulé entre la date de l’assignation et l’audience devant le premier juge constitue un motif légitime de non-comparution en première instance pour la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F].

La demande de dommages et intérêts formée par M. [R] [U] [B] sera donc rejetée.

Sur les demandes accessoires

La société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] étant accueillie en son recours, l’ordonnance sera infirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.

Chaque partie succombant partiellement, chacune conservera la charge de ses propres dépens de première instance et d’appel.

L’équité commande de rejeter les demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Déclare recevable l’intervention volontaire de M. [V] [B], Mme [C] [B] et Mme [J] [B] ;

Déclare recevable la demande de communication de pièces formée par M. [R] [U] [B], M. [V] [B], Mme [C] [B] et Mme [J] [B] ;

Infirme l’ordonnance querellée ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de provision formée par M. [R] [U] [B], M. [V] [B], Mme [C] [B] et Mme [J] [B] ;

Ordonne à la société Menuiseries Quincailleries Fermetures [T] [F] de communiquer à M. [R] [U] [B], M. [V] [B], Mme [C] [B] et Mme [J] [B] son registre des mouvements des actions dans le délai d’un mois à compter de la signification du présent arrêt ;

Déboute M. [R] [U] [B] de sa demande au titre de l’article 560 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu’en appel,

Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens de première instance et d’appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller faisant fonction de Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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