Your cart is currently empty!
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 4IC
13e chambre
ARRÊT N°
RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
DU 17 NOVEMBRE 2020
N° RG 20/02252 – N° Portalis DBV3-V-B7E-T3MA
AFFAIRE :
[M] [Z]
C/
Maître [K] [X]
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Mai 2020 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° chambre :
N° Section :
N° RG : 2018L00357
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 17.11.2020
à :
Me Anne-lise ROY
Me Stéphanie TERIITEHAU
Me Stéphanie ARENA
TC de NANTERRE
PÔLE ÉCOFI
EXÉCUTION DES PEINES
MP
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [M] [Z]
né le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 21] (CHINE) de nationalité Chinoise
[Adresse 9]
[Localité 15]
Autre qualité : Intimé dans 20/02275 (Fond)
Représenté par Maître Anne-lise ROY, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 343 et par Maître Vincent CHRISTIN, avocat plaidant au barreau de PARIS
APPELANT
****************
Maître [K] [X] pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Green High Tech Energy Corp et de la SARL Groupe Novodiff
[Adresse 4]
[Localité 14]
Représenté par Maître Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 732 – N° du dossier 20200217 et par Maître Isilde QUENAULT, avocat plaidant au barreau de PARIS
Monsieur [E] [S]
né le [Date naissance 2] 1959 à [Localité 18] (Maroc) de nationalité Française
[Adresse 13]
[Localité 11]
S.A.R.L. HOUSE CONSULTING HOLDING prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
N° SIRET : 498 32 9 0 69
[Adresse 6]
[Localité 10]
Autres qualités : Appelants dans 20/02275 (Fond)
Représentés par Maître Stéphanie ARENA de la SELEURL ARENA AVOCAT, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 637 et par Maître Johann BOUSKILA, avocat plaidant au barreau de PARIS
S.A.R.L. GROUPE NOVODIFF prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 538 .97 1.1 51
[Adresse 9]
[Localité 15]
Défaillante
LE PROCUREUR GÉNÉRAL
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
[Adresse 7]
[Localité 12]
INTIMÉS
****************
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 05 Octobre 2020, Madame Sophie VALAY-BRIÈRE, présidente, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Sophie VALAY-BRIÈRE, Présidente,
Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,
Madame Delphine BONNET, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie PASQUIER-HANNEQUIN
En la présence du Ministère Public, représenté par Monsieur Fabien BONAN, Avocat Général dont l’avis du 4 août 2020 a été transmis le 6 août 2020 au greffe par la voie électronique.
La SAS Green High Tech Energy Corp (la société GHTE), immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre depuis le 19 février 2010, avait pour activité la commercialisation et la distribution de produits d’éclairage à basse consommation énergétique.
Dans le cadre de cette activité, elle avait conclu en 2011 avec une filiale de la société Technicolor un contrat de licence pour l’exploitation jusqu’à fin 2015 de produits de la marque Thomson.
Son capital social, d’un montant de 1 004 200 euros, était détenu depuis août 2012 par M. [E] [S] et par M. [I], via diverses sociétés dont la société House consulting Holding (la société HCH), associée majoritaire, dirigée par M. [S].
La société GHTE était également locataire-gérant du fonds de commerce de la société Global High Tech, dirigée par M. [S], qui commercialisait des panneaux solaires selon un contrat de location-gérance qui a expiré le 31 mars 2015.
Le 15 mai 2015, les actionnaires de la société GHTE ont cédé leurs actions à la SARL Groupe Novodiff (la société Novodiff), dirigée par M. [M] [Z], pour la somme de 1 000 euros.
La direction de la société GHTE a été successivement exercée par la société HCH, représentée par M. [S] à compter du 6 août 2012, par M. [Z] à compter du 15 mai 2015, puis par la société Novodiff à compter du 17 septembre 2015.
Sur la demande de M. [Z], en sa qualité de gérant de la société Novodiff, elle-même présidente de la société GHTE, en date du 10 mars 2016, le tribunal de commerce de Nanterre, par jugement en date du 24 mars 2016, a ouvert une procédure de sauvegarde au profit de la société GHTE et désigné la Selarl FHB, représentée par maître [N] [D], aux fonctions d’administrateur judiciaire et maître [X] aux fonctions de mandataire judiciaire.
Par jugement du 20 avril 2016 rendu sur la requête de l’administrateur judiciaire, le tribunal a converti la procédure en liquidation judiciaire, fixé la date de cessation des paiements au 21 octobre 2014 et nommé maître [X], ès qualités, aux fonctions de liquidateur judiciaire.
Saisi sur tierce opposition par M. [S] et la société HCH, le tribunal de commerce de Nanterre, par jugement rendu le 14 septembre 2016, a notamment confirmé la date de cessation des paiements au 21 octobre 2014.
En suite de l’assignation du 28 septembre 2016 délivrée par maître [X], ès qualités, à la société Novodiff aux fins d’extension de la procédure ouverte à l’encontre de la société GHTE, les parties se sont rapprochées et par ordonnance du 23 décembre 2016, le juge-commissaire a autorisé le liquidateur judiciaire à conclure une transaction avec la société Novodiff aux termes de laquelle cette dernière s’engageait à lui payer la somme de 600 000 euros.
La transaction, qui n’a été exécutée qu’à hauteur de 500 000 euros, n’a pas été homologuée par le tribunal.
Le 16 janvier 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la société Novodiff. Les organes de cette procédure n’ayant pas souhaité exécuter le protocole qu’ils ont remis en question en engageant une action aux fins de nullité de celui-ci, maître [X], ès qualités, a repris la procédure d’extension.
Par jugement du 19 avril 2018, confirmé par arrêt du 13 novembre 2018 de la présente cour, le tribunal, constatant la confusion des patrimoines entre les sociétés GHTE et Novodiff, a étendu la procédure de liquidation judiciaire de la première à la seconde.
Maître [X], ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés GHTE et Novodiff, estimant que les opérations de la procédure collective avaient mis en évidence un certain nombre de fautes de gestion imputables aux dirigeants de droit successifs a fait assigner la société HCH, M. [S] et M. [Z] devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins de sanctions pécuniaires et personnelles.
Par décision contradictoire assortie de l’exécution provisoire en date du 6 mai 2020, le tribunal a :
– débouté M. [S] et la Sarl HCH de leur demande de sursis à statuer ;
– dit recevable maître [X], ès qualités de liquidateur de la société GHTE, en son action à l’encontre de M. [Z] ;
– condamné la société HCH à payer la somme forfaitaire de 400 000 euros entre les mains de maître [X], ès qualités, avec capitalisation des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;
– condamné M. [E] [S] à payer la somme de 200 00 euros entre les mains de maître [X], ès qualités, avec capitalisation des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;
– condamné M. [M] [Z] à payer la somme de 200 000 euros entre les mains de maître [X], ès qualités, avec capitalisation des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;
– prononcé la faillite personnelle de M. [S] pour une durée de quinze ans ;
– prononcé la faillite personnelle de M. [Z] pour une durée de dix ans ;
– condamné solidairement la société HCH et M. [S] à payer à maître [X], ès qualités, la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné M. [Z] à payer à maître [X], ès qualités, la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné in solidum la Sarl HCH, MM. [S] et [Z] aux dépens, à l’exception des frais de greffe qui seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.
À l’appui de sa décision, le tribunal a retenu une insuffisance d’actif de 4 341 284,12 euros ; la qualité de dirigeant de droit de la société HCH dirigée par M. [S], de M. [Z] entre le 15 mai 2015 et le 17 septembre 2015 et celle de la société Novodiff, représentée par M. [Z], appréciant les fautes de gestion commises par celui-ci entre le 15 mai 2015 et le 20 avril 2016 ; les fautes de retard dans la déclaration de cessation des paiements au-delà du délai de 45 jours, de non-paiement des créances fiscales et sociales, de poursuite d’une activité déficitaire et de gestion contraire à l’intérêt de la société.
M. [Z] a interjeté appel de ce jugement le 22 mai 2020.
Par deux déclarations distinctes datées du même jour, M. [S] et la société HCH ont également interjeté appel de cette décision.
Les procédures ont été jointes sous le RG 20/2252 par ordonnances des 28 mai et 18 juin 2020.
Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 24 septembre 2020, M. [Z] demande à la cour de :
– ordonner le sursis à statuer dans l’attente du prononcé d’une décision définitive dans l’instance pendante devant la cour d’appel de Versailles sous le numéro 20/01371 ;
– réformer en tous points le jugement ;
– constater l’absence d’augmentation de l’insuffisance d’actif pendant sa période de gestion ;
– constater le paiement par la société Novodiff et lui-même de la somme de 502 942,72 euros à la liquidation judiciaire de la société GHTE ;
– constater qu’il n’a pas commis de faute de gestion ni poursuivi l’activité dans un intérêt personnel ;
par conséquent et statuant à nouveau,
à titre principal :
– débouter maître [X], ès qualités, de sa demande de condamnation au paiement de tout ou partie de l’insuffisance d’actif de la société GHTE formée à son encontre ;
– débouter maître [X], ès qualités, de sa demande de condamnation à une mesure de faillite personnelle et/ou interdiction de gérer le concernant ;
à titre subsidiaire :
– réduire la condamnation prononcée en première instance à hauteur de 200 000 euros à un montant proportionné au regard des moyens ci-dessus développés, des efforts financiers d’ores et déjà consentis et de ses capacités actuelles ;
– réduire la durée de la mesure de faillite personnelle prononcée à son encontre ;
en toutes hypothèses :
– condamner maître [X], ès qualités, à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 ainsi qu’aux entiers dépens.
Dans leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 21 août 2020, la société HCH et M. [E] [S] demandent à la cour de :
in limine litis, à titre principal,
– ordonner le sursis à statuer dans l’attente du prononcé de la contestation soulevée contre la créance de la société GHT, objet de l’instance pendante devant la cour d’appel de Versailles sous le numéro 20/01371 ;
– réformer le jugement en toutes ses dispositions ;
– constater l’absence de preuve de l’insuffisance d’actif à la date du 15 mai 2015 et subsidiairement l’absence d’augmentation de l’insuffisance d’actif pendant la période de gestion de la société HCH ;
– constater l’absence de faute de gestion commise par la société HCH ;
– constater qu’ils n’ont poursuivi aucun intérêt personnel ;
statuant à nouveau,
– débouter maître [X], ès qualités, de sa demande à leur encontre de condamnation au paiement de tout ou partie de l’insuffisance d’actif de la société GHTE ;
– débouter maître [X], ès qualités, de sa demande de condamnation de M. [S] à une mesure de faillite personnelle et/ou interdiction de gérer ;
plus subsidiairement :
– réduire la condamnation prononcée en première instance à hauteur de 400 000 euros contre la société HCH et de 200 000 euros contre M. [S] à un montant proportionné au regard des circonstances ci-dessus rappelées ;
– réduire la durée de la mesure de faillite personnelle prononcée à l’encontre de M. [S] ;
en toutes hypothèses :
– condamner maître [X], ès qualités, à leur payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 18 septembre 2020, maître [X], ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés GHTE et Novodiff, demande à la cour de :
– confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf sur le quantum de la condamnation ;
en conséquence,
– condamner solidairement la société HCH et MM. [S] et [Z] à lui payer la somme de 4 079 876,92 euros avec intérêts au taux légal de droit conformément aux dispositions de l’article 1231-7 du code civil ;
– dire que les intérêts se capitaliseront, pour ceux échus depuis une année entière au moins, en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;
– débouter M. [Z], la société HCH et M. [S] de l’ensemble de leurs demandes ;
– condamner solidairement la société HCH et MM. [S] et [Z] à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et le (sic) condamner aux entiers dépens dont distraction est requise au profit de la Selarl Teriitehau Minault, avocat, selon les dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Dans ses avis du 4 août 2020 notifiés aux parties par RPVA le 6 août suivant, le ministère public demande à la cour de rejeter la demande de sursis dès lors qu’il apparaît avec évidence que l’actif sera insuffisant pour régler le passif et de confirmer en tous points le jugement.
Sur le fond, il indique que les sanctions personnelles et patrimoniales prononcées à l’encontre de la société HCH et de MM. [Z] et [S] sont proportionnées et justes au regard de l’insuffisance d’actif définitive de 4 341 284,12 euros.
Il souligne en premier lieu que le retard de 18 mois dans la déclaration de cessation des paiements est établi alors que la société dont M. [S] était le dirigeant n’était plus en mesure de faire face à son passif exigible dès le mois de décembre 2014, contribuant indubitablement à l’aggravation de l’insuffisance d’actif de la société, au détriment de ses créanciers pour un montant supérieur à 1 000 000 d’euros ; en deuxième lieu, que le non-paiement des créances fiscales et sociales, d’un montant total de 575 000 euros, qui ne peut résulter d’une simple négligence, relève d’un projet de doter l’entreprise d’une solvabilité artificielle, que M. [S] ne pouvait ignorer en qualité de dirigeant de droit ; en troisième lieu, que la poursuite d’une activité déficitaire n’est pas sérieusement contestable compte tenu des résultats négatifs de la société GHTE depuis au moins 2011, et l’absence de mesure prise par M. [S] pour tenter de redresser cette situation ; en quatrième lieu enfin, que le grief de gestion contraire à l’intérêt de la société est constitué et imputable à la SARL HCH, dirigée par M. [S], et à M. [Z], précisant que le 23 mars 2016, soit en pleine période suspecte, ce dernier s’est remboursé son compte courant d’associé d’un montant de l0 453,l7 euros, et que la société HCH a perçu une somme de 184 566,75 euros, ramenée à 151 744,49 euros, de la part de la société GHTE alors que M. [S] ne pouvait ignorer l’état de cessation des paiements de celle-ci.
La déclaration d’appel a été signifiée à la SARL Groupe Novodiff qui n’a pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 octobre 2020.
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
SUR CE,
La cour rappelle, à titre liminaire, qu’elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de ‘constater’ qui ne sont pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile, mais uniquement des moyens.
1- Sur la demande de sursis à statuer
La SARL HCH et M. [S], qui font valoir que la demande en comblement de passif suppose que soient établis avec précision le principe et le montant d’une insuffisance d’actif définitive à la date du jugement mais aussi à la date de la démission du dirigeant poursuivi, contestent le montant de l’insuffisance d’actif retenu par le liquidateur judiciaire, notamment à la date de la démission de la société HCH, soit le 15 mai 2015. Ils prétendent que le passif retenu par le liquidateur judiciaire à la date du jugement déféré est composé d’une créance contestée d’un montant de 2 220 327 euros, qui serait détenue par la société GHT, également dirigée par la société HCH, qui fait l’objet d’une instance en cours devant la cour d’appel, de sorte qu’il convient de surseoir à statuer dans l’attente de l’issue de cette procédure susceptible de réduire le passif et du caractère définitif de l’état des créances, reprenant ensuite les motifs de cette contestation. Ils ajoutent par ailleurs que le passif allégué à la date du 15 mai 2015 retient également d’autres créances dont le quantum est inexact de sorte que l’insuffisance d’actif n’est pas établie.
M. [Z] s’associe à cette demande de sursis à statuer précisant que le rejet de la créance GHT, née durant la gestion de la société HCH et de M. [S], ramènerait le montant de l’insuffisance d’actif à la somme de 1 859 549 euros.
Maître [X] réplique d’une part qu’il n’est pas besoin d’attendre le caractère définitif de l’état des créances, l’action étant recevable même si les opérations de vérification du passif ne sont pas terminées dès lors qu’il apparaît avec évidence que l’actif sera insuffisant pour payer le passif, d’autre part, que l’ordonnance du juge-commissaire est assortie de l’exécution provisoire de droit de sorte que la demande de sursis doit être rejetée. Il ajoute que la contestation élevée par M. [S] et la société HCH est dilatoire et ne vise qu’à retarder l’issue de cette procédure dès lors que la créance déclarée par maître [V], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société GHT, est corroborée par la comptabilité de cette société, qui était dirigée par M. [S], qui l’a lui-même remise à maître [V], et par celle de la société GHTE également dirigée par M. [S]. Il précise en outre que M. [Z] n’avait pas critiqué cette créance ni lors de la vérification du passif ni lors de l’audience devant le juge-commissaire.
Il est constant qu’une procédure est en cours devant la présente juridiction s’agissant de la créance déclarée par maître [V], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société GHT, au passif de la société GHTE à hauteur de 2 220 327,70 euros admise par ordonnance du juge-commissaire du 6 novembre 2019 laquelle est assortie de l’exécution provisoire de droit.
Si cette procédure est susceptible d’avoir une incidence sur le montant du passif, donc de l’insuffisance d’actif retenue, et par voie de conséquence sur le quantum de la condamnation pouvant être mis à la charge des dirigeants, il est néanmoins possible de statuer sur l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif sans attendre le résultat de cette procédure dès lors que l’insuffisance d’actif est certaine et ce même si son montant n’est pas déterminé avec exactitude.
Tel est bien le cas en l’espèce puisque d’une part M. [Z] reconnaît à tout le moins une insuffisance d’actif de 1 859 549 euros et que, d’autre part, M. [S] et la société HCH, qui contestent l’existence d’une insuffisance d’actif au 15 mai 2015, indiquent qu’à la date où le juge statue elle s’établirait à 2 454 835,29 euros.
La demande de sursis sera par conséquent rejetée.
2-Sur la responsabilité pour insuffisance d’actif
L’article L. 651-2 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 9 décembre 2016, applicable immédiatement aux procédures collectives et aux instances en responsabilité en cours, dispose notamment que ‘lorsque la liquidation judiciaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif ne peut pas être engagée’.
* Sur la direction de la société
La société HCH, dirigée par M. [S], reconnaît avoir pris la direction de la société GHTE à compter du 6 août 2012 et ce jusqu’à la cession du capital social de celle-ci à la société Novodiff, le 15 mai 2015.
M. [Z], dirigeant de la société Novodiff, confirme que sa gestion s’est étendue du 15 mai 2015 au 24 avril 2016.
Maître [X] indique que la société GHTE a été présidée par la société HCH, représentée par M. [S], du 6 août 2012 au 15 mai 2015 puis par M. [Z] jusqu’au 17 septembre 2015, la publication de sa désignation n’étant réalisée que le 10 août 2015, et enfin par la société Novodiff.
Rappelant les dispositions de l’article L.227-7 du code de commerce, il soutient que M. [Z], dirigeant personne physique de la société Novodiff, encourt la même responsabilité que la société Novodiff, en sa qualité de dirigeant de la société GHTE.
Selon l’article L.227- 7 du code de commerce, lorsqu’une personne morale est nommée président ou dirigeant d’une société par actions simplifiée, les dirigeants de ladite personne morale sont soumis aux mêmes conditions et obligations et encourent les mêmes responsabilités civile et pénale que s’ils étaient président ou dirigeant en leur nom propre, sans préjudice de la responsabilité solidaire de personne morale qu’ils dirigent.
En raison de l’extension de la procédure collective de la société GHTE à la société Novodiff, la responsabilité pour insuffisance d’actif de cette dernière n’est plus recherchée. Toutefois, l’article L.651-1 du code de commerce ne subordonne pas la condamnation au paiement de l’insuffisance d’actif du représentant de la personne morale à la condamnation de celle-ci.
Selon l’historique des inscriptions modificatives publiées au registre du commerce et des sociétés de Nanterre, la société GHTE a été présidée par la société HCH, représentée par M. [S], à partir du 6 août 2012 puis par M. [Z] à compter du 10 août 2015 et enfin par la société Groupe Novodiff, dirigée par M. [Z], à compter du 17 septembre 2015 et jusqu’à l’ouverture de la procédure collective.
Néanmoins, il est constant que la cession d’actions et la fin des fonctions de direction de la société HCH sont intervenues le 15 mai 2015 C’est donc à cette date, et non à compter de celle de la publication de la nomination de M. [Z], que ce dernier est devenu dirigeant de droit de la société GHTE, en sorte que la responsabilité de la société HCH et de M. [S] peut être recherchée jusqu’à cette date et celle de M. [Z] à compter de celle-ci pour les fautes de gestion commises.
La responsabilité de la société HCH, de M. [S] et de M. [Z] peut donc être engagée en application des articles L.651-1 et L.651-2 du code de commerce.
* L’insuffisance d’actif
M. [Z] prétend que doivent être déduites du passif les sommes de 208 248,71 euros, déclarée par le CGEA au titre des indemnités de licenciement s’agissant d’une créance postérieure à l’ouverture de la liquidation judiciaire, et de 908 200 euros correspondant à une créance provisionnelle du Trésor public, ce qui ramènerait l’insuffisance d’actif à 3 871 628,21 euros, hors la créance GHT. Il précise que le passif était de 6 423 000 au 31 décembre 2014, soit un montant supérieur au passif total de la liquidation judiciaire de sorte que sa gestion a permis de diminuer la masse globale des créances et affirme que la preuve n’est pas rapportée par le liquidateur judiciaire que sa gestion aurait conduit à aggraver l’insuffisance d’actif.
La société HCH et M. [S] prétendent avoir racheté la créance du fournisseur Napco d’un montant initial de 2 300 000 euros afin de l’abandonner dans le cadre de la procédure collective et rappellent que la société HCH, qui a notamment versé une somme totale de plus de 173 000 euros au titre des nullités de la période suspecte en exécution de l’arrêt du 27 mars 2018, a engagé des efforts de l’ordre de 1 348 380 euros afin de réduire le passif. Ils affirment que le liquidateur judiciaire ne rapporte pas la preuve de l’existence d’une insuffisance d’actif au 15 mai 2015, date de cessation des fonctions de la société HCH, et rappellent que l’insuffisance d’actif apparaissant ou s’aggravant postérieurement à la cessation des fonctions de l’ancien dirigeant ne saurait lui être reprochée. Détaillant ensuite les dettes et les actifs existant à cette date, ils retiennent un solde positif de 1 880 000 euros. S’agissant de l’insuffisance d’actif au jour où le juge statue, ils prétendent que doivent être déduites du passif la créance de 770 000 euros du fournisseur Napco, rachetée par la société HCH moyennant 50 000 euros et abandonnée par celle-ci, la créance fiscale provisionnelle de 908 200 euros, la créance contestée de la société GHT et les indemnités de licenciement d’un montant de 208 248,71 euros déclarées par le CGEA qui sont postérieures à l’ouverture de la liquidation judiciaire, de sorte que l’insuffisance d’actif s’établirait à 2 454 835,29 euros.
Maître [X] expose que l’actif réalisé s’élève à la somme de 984 135,14 euros pour un passif non contesté admis à titre définitif de 5 064 012,06 euros soit une insuffisance d’actif de 4 079 876,92 euros.
Il explique que le superprivilége des salaires correspond à des sommes nées antérieurement au jugement d’ouverture et non aux indemnités de licenciement en sorte qu’il n’y a pas lieu de l’exclure du calcul de l’insuffisance d’actif ; que contrairement à ce qui est affirmé le passif provisionnel non converti de l’administration fiscale (908 000 euros) n’a pas été intégré dans le calcul du passif ; enfin, qu’aucun abandon de la créance Napco, rachetée par M. [S] et la société HCH, ne lui a été notifié.
Il prétend également que l’insuffisance d’actif existait déjà au 15 mai 2015 puisque les capitaux propres étaient négatifs de 3 700 000 euros au 31 décembre 2014, que la date de cessation des paiements a été fixée au 21 octobre 2014 et que les parts de la société GHTE ont été cédées 1 000 euros avec une garantie de passif. Il précise que la valorisation d’une licence de marque n’est pas identique à la valorisation de la propriété de la marque de sorte que l’argumentation sur la valorisation de la marque Thomson à hauteur de 1 200 000 euros ne peut qu’être écartée et que la responsabilité de la société HCH et de M. [S] est également engagée.
L’insuffisance d’actif est égale à la différence entre le montant du passif antérieur admis définitivement et le montant de l’actif réalisé de la personne morale débitrice. Elle s’apprécie à la date à laquelle le juge statue.
Elle doit être établie à la date de cessation des fonction du dirigeant dont la responsabilité est recherchée.
Il résulte de la synthèse du passif et de la liste des créances datés du 2 juin 2017 que le passif admis s’élève à la somme de 5 972 212,06 euros dont :
* 177 264,57 euros au titre du super privilège des salaires,
* 908 200 euros à titre provisionnel,
* 2 220 327,30 euros au titre de la créance déclarée par la société GHT,
* 775 000 euros au titre de la créance déclarée par la société Napco ltd.
La déclaration de créance du CGEA n’est pas versée aux débats mais le rapport du liquidateur judiciaire du 10 novembre 2017 indique d’une part que la somme de 251 468,03 euros déclarée par le CGEA à titre superprivilégié correspond à l’avance des créances salariales, d’autre part, qu’il a procédé au licenciement de douze salariés et deux apprentis et sollicité la prise en charge par les AGS de différentes sommes correspondant à des créances de salaires du mois d’avril 2016, des indemnités de frais professionnels, des indemnités de licenciements sans cause réelle et sérieuse pour un salarié, des indemnités transactionnelles pour un salarié, des contrats de sécurisation professionnelle pour trois salariés, des indemnités de salaire, de préavis, de rappel de salaire, de congés payés.
Il se déduit de ces éléments que la somme de 177 264,57 euros qui a été admise à titre super-privilégié, est constituée de salaires et indemnités dues antérieurement au jugement d’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, conformément aux articles L. 3253-2 et L. 3253-3 du code du travail. Elle n’a pas à être déduite du passif.
Il s’infère de la comparaison entre les sommes de 5 972 212,06 euros et de 5 064 012,06 euros que le liquidateur judiciaire n’a pas retenu la créance provisionnelle déclarée par le Trésor public dans le calcul de l’insuffisance d’actif, en sorte que la somme de 908 200 euros n’a pas à être déduite du passif.
La créance de la société GHT a été admise au passif par une ordonnance du juge-commissaire, certes assortie de l’exécution provisoire, mais qui est frappée d’appel. Il convient par conséquent de la déduire du montant de l’insuffisance d’actif à défaut de certitude sur la comptabilisation in fine de cette créance au passif de la société.
Il n’est pas contesté que la créance déclarée par la société Napco limited à hauteur de 2 109 521,58 euros et admise à hauteur de 775 000 euros a été rachetée par la société HCH moyennant un prix de 50 000 euros. Il est désormais justifié que par lettre datée du 28 septembre 2020, la société HCH a notifié au juge-commissaire et au liquidateur judiciaire l’abandon de cette créance, laquelle doit par conséquent être déduite du passif.
Le montant de l’actif réalisé n’est pas contesté.
L’insuffisance d’actif certaine s’établit ainsi au jour où la cour statue à la somme de 1 084 549,62 euros.
La société HCH ne peut prétendre en fournissant une lettre datée du 8 juillet 2015 adressée par une société Axdispro à ‘Thomson’, [Adresse 5] à [Localité 19], indiquant être intéressée par l’achat de la marque Thomson à hauteur de 1 200 000 euros, qu’elle disposait au 15 mai 2015 d’un actif de cette valeur alors d’une part qu’elle exploitait la licence de marque Thomson sans en être propriétaire et, d’autre part, qu’à l’actif de son bilan ne figurait qu’une somme brute de 10 059 euros au titre des ‘concessions et brevets’.
Au contraire, l’existence de capitaux propres négatifs depuis 2012, le montant des dettes (7 778 207 euros dont 770 386 euros de dettes fiscales et sociales au 31 décembre 2014 ; 6 721 275 euros dont 1 273 499 euros de dettes fiscales et sociales au 31 décembre 2015), la comparaison entre le montant des dettes et celui de l’actif net circulant figurant dans le bilan clos au 31 décembre 2014 (3 803 157 euros) et au 31 décembre 2015 (3 174 256 euros) démontrent que cette insuffisance d’actif, distincte de la cessation des paiements, existait à la date à laquelle la société HCH a cessé ses fonctions, peu important le montant exact de celle-ci à la date de son départ.
* Les fautes de gestion
o Le retard dans la déclaration de l’état de cessation des paiements
Rappelant qu’il avait souhaité placer la société GHTE sous la protection du tribunal de commerce en sollicitant une mesure de sauvegarde, M. [Z] expose en premier lieu que lorsque la société Novodiff a acquis la société GHTE, il n’avait pas connaissance de l’état de cessation des paiements de celle-ci, les cédants déclarant dans l’acte l’absence d’état de cessation des paiements, et qu’il croyait que le passif était maîtrisé et apurable par la reconstitution d’un fonds de roulement par la société Novodiff, un développement commercial efficace et le respect des échéanciers mis en place. En deuxième lieu, il argue des actions entreprises sur une période très courte pour obtenir le renouvellement du contrat de licence, ce qui supposait que la société soit in bonis, la reconstitution du stock, la condamnation des cédants et l’obtention d’échéanciers. Il en conclut que, dans ces conditions, l’absence de déclaration de cessation des paiements n’est pas constitutive d’une faute de gestion.
Tout en ne contestant pas que la date de cessation des paiements fixée par le tribunal s’impose à tous, la société HCH et M. [S] soutiennent que le retard de cinq mois apporté à la déclaration de cessation des paiements doit être apprécié au regard du fait qu’au 21 octobre 2014, la créance du fournisseur Napco de 2 300 000 euros n’était ni exigible ni exigée puisqu’ils avaient obtenu un moratoire ; que le Trésor public avait confirmé, le 11 mai 2015, son accord pour un moratoire sous réserve de la constitution de garanties par la société GHTE que le cessionnaire s’était engagé à constituer ; enfin, que l’exigibilité de la créance de la société HCH d’un montant de 455 000 euros, qui avait été réduite à 100 000 euros, avait été reportée au 15 janvier 2019. Ils expliquent ensuite avoir déployé des efforts considérables pour assainir la situation, réduire le passif et réorganiser la structure financière de la société entre le mois d’octobre 2014 et le 15 mai 2015 en détaillant les actions entreprises.
Soulignant qu’aucune déclaration de cessation des paiements n’a été déposée par la société Novodiff, maître [X] soutient que l’aggravation du passif, en période suspecte, qui est supérieure à 1 000 000 euros, est imputable à tous les dirigeants successifs. Il fait valoir que l’état de cessation des paiements est né alors que la société était dirigée par la société HCH et M. [S], qui ont préféré céder leurs parts à un prix dérisoire, démontrant ainsi leur parfaite connaissance de cet état de cessation des paiements, plutôt que de procéder à sa déclaration, de sorte qu’ils sont responsables non seulement de l’aggravation du passif créé sous leur gestion mais également du passif né postérieurement et qui n’aurait pas été généré s’ils avaient déposé la déclaration de cessation des paiements. Il ajoute en réponse aux arguments de M. [Z] que celui-ci ne pouvait pas ignorer l’état de cessation des paiements de la société GHTE lors du rachat compte tenu de la modicité du prix payé ; que la garantie de passif portait sur des litiges identifiés et n’avait pas pour objet de faire condamner les cédants pour un passif caché ; qu’il n’est pas exonératoire de poursuivre des négociations avec des organismes fiscaux et sociaux ou de solliciter l’ouverture d’une procédure de sauvegarde alors que la société est déjà en état de cessation des paiements et rappelle enfin que la négociation aux fins de renouvellement de la licence s’est faite au profit de la société Novodiff et non de la société GHTE et alors qu’une fusion entre les deux sociétés avait été annoncée.
Il fait valoir également que les arguments de la société HCH et de M. [S] tendant à contester la date de cessation des paiements ont déjà été soumis et rejetés par le tribunal lors de la tierce-opposition formée à l’encontre du jugement d’ouverture et que leur connaissance de cet état est démontrée notamment par l’arrêt ayant statué sur les nullités de la période suspecte, précisant qu’entre le 21 octobre 2014 et le 15 mai 2015 la TVA est restée impayée pour plus de 500 000 euros. Il critique enfin la réorganisation alléguée considérant qu’ils n’ont en réalité négocié qu’une baisse de la créance Napco sans toutefois la payer et choisi un repreneur qui ne présentait ni les garanties financières ni les compétences techniques pour reprendre l’activité.
Le défaut de déclaration de cessation des paiements dans le délai légal de 45 jours s’apprécie au regard de la date de cessation des paiements fixée dans le jugement d’ouverture ou dans un jugement de report.
En l’espèce, le jugement d’ouverture, devenu définitif, l’a fixée au 21 octobre 2014. Cette date s’impose à la juridiction saisie en responsabilité pour insuffisance d’actif, rendant ainsi inopérant l’examen des arguments relatifs à l’exigibilité de telle ou telle créance à cette date.
Il appartenait donc à la société HCH et à M. [S] de procéder à la déclaration de la cessation des paiements avant le 6 décembre 2014, ce qu’ils n’ont pas fait, pas plus par la suite que M. [Z], l’ouverture de la liquidation judiciaire étant intervenue sur conversion de la procédure de sauvegarde à la demande de l’administrateur judiciaire. L’absence de déclaration de cessation des paiements par les dirigeants successifs est donc établie.
Le fait que M. [Z], en qualité de gérant de la société Novodiff, elle-même présidente de la société GHTE, a sollicité par déclaration datée du 10 mars 2016 l’ouverture d’une procédure de sauvegarde ne saurait l’exonérer de sa responsabilité. En effet, il a affirmé que celle-ci n’était pas en état de cessation des paiements alors qu’il ne pouvait pas ignorer cet état au regard d’une part du prix d’acquisition des parts sociales et d’autre part de l’absence de garantie consentie, l’article 6.3 de l’acte de cession indiquant que ‘Le mandataire social de la société GHTE Corp déclare que la société a négocié un moratoire sur une période de 12 mois portant sur sa dette fiscale globale et certifiée par le mandataire social d’un montant de 568 570 euros qui sera mis en place sous la condition qu’une garantie soit consentie par la société GHTE. Le cessionnaire se porte fort de finaliser l’accord négocié avec l’administration fiscale et le cas échéant de consentir les garanties qui s’imposent.’ En outre, les négociations pour le renouvellement de la licence, opérées par celui-ci au profit de la société Novodiff, ne justifiaient pas le report de la déclaration de cessation des paiements de la société GHTE.
S’agissant de la société HCH et de M. [S], leur connaissance de l’état de cessation des paiements de la société GHTE au 15 mai 2015 est établie non seulement par le fait que la société HCH tenait la comptabilité de la société GHTE en vertu d’une convention de prestations de services mais également par le mail adressé le 26 janvier 2015 par la directrice financière de la société HCH à M. [W], directeur général délégué, M. [S] étant en copie, l’alertant de la demande en paiement d’une facture de 25 000 euros par un fournisseur et indiquant être dans la totale incapacité de la régler précisant ‘nous sommes clairement en cessation de paiement’. Il leur appartenait par conséquent de procéder à la déclaration de cessation des paiements sans tarder au lieu de rechercher un repreneur.
Cette faute a contribué à l’insuffisance d’actif en ce qu’entre le 6 décembre 2014 et l’ouverture de la procédure collective le passif a augmenté de la manière suivante :
– le PRS des Hauts de Seine a déclaré une créance de 433 595,16 euros au titre de la TVA due du 6 décembre 2014 au 31 janvier 2016,
– l’Urssaf a déclaré une créance de 75 996 euros au titre des cotisations dues entre les mois de juin 2015 et février 2016,
– AG2R La mondiale a déclaré une créance de 32 412,05 euros au titre des cotisations dues de 2015 à février 2016,
– la société Btlou, bailleur, a déclaré une créance de 59 225 euros au titre de loyers dus du 15 mai 2015 au 30 septembre 2015.
Dans le même temps, l’actif n’a pas été renforcé.
L’absence de déclaration de l’état de cessation des paiements, lequel ne pouvait au regard des éléments rappelés ci-dessus être ignoré de la société HCH, de M. [S] et de M. [Z], dans le délai légal constitue un manquement de ces derniers à leurs obligations qui ne peut pas s’analyser en une simple négligence.
Tant la faute de gestion que ses conséquences sur l’insuffisance d’actif sont donc démontrées.
o Le non paiement des cotisations sociales et fiscales
M. [Z] conteste avoir commis une faute, rappelant que la dette fiscale de 568 570 euros au 15 mai 2015, imputable à la société HCH et à M. [S], avait diminué de 18 000 euros au 28 javier 2016, que l’exercice 2015 fut le meilleur et qu’il avait commencé à préparer la saisine de la CCSF dès la fin du mois de septembre 2015 permettant ainsi l’obtention d’un moratoire le 28 janvier 2016, avant finalement de solliciter l’ouverture d’une sauvegarde.
La société HCH et M. [S] soutiennent pour l’essentiel en premier lieu que le non paiement de la TVA des mois de novembre et décembre 2014, compris dans le grief précédent, ne peut pas constituer une faute distincte et en deuxième lieu que c’est l’inexécution de ses obligations par la société Novodiff qui est à l’origine du préjudice souffert par le Trésor public.
Maître [X], ès qualités, rappelle que la société GHTE, sous la direction de tous ses dirigeants successifs, a déposé sans paiement des déclarations de TVA, pour plus de 500 000 euros en novembre et décembre 2014 et de 335 000 euros pour les mois de décembre 2015 et janvier 2016, ajoutant également que sous la direction de la société Novodiff et de M. [Z] les cotisations de l’Urssaf et de la société AG2R n’ont plus été payées à compter du mois de juin 2015. Il fait observer que tout en sollicitant un échéancier portant sur le passif généré par M. [S] et la société HCH, M. [Z] ne payait pas les cotisations courantes et qu’il n’a pas respecté la première échéance du moratoire destiné à obtenir artificiellement une sauvegarde.
Il ajoute que ce passif est né de la gestion de M. [S] et de la société HCH qui ne peuvent pas en reporter la responsabilité sur leur successeur, d’autant que le moratoire était sous la condition de présentation de garanties qui n’ont jamais été présentées.
Il ressort des documents comptables 2012, 2014 et 2015 que les dettes fiscales et sociales étaient de 263 751,60 euros au 31 décembre 2012, de 318 389 euros au 31 décembre 2013, de 770 386 euros au 31 décembre 2014 et de 1 273 499 euros au 31 décembre 2015. Par ailleurs les déclarations de créance font état d’impayés à compte du mois de novembre 2014 pour la TVA, de juin 2015 pour les cotisations Urssaf et de 2013 pour les cotisations AG2R.
Tant le non paiement des cotisations fiscales et sociales que le non respect du plan d’apurement sollicité le 11 mai 2015 par la société GHTE, auquel une réponse positive avait été apportée le même jour par mail, adressé en copie à M. [S], sous réserve de la constitution de garantie, puis mis en place selon décision de la CCSF du 22 janvier 2016 constituent une faute de gestion qui a nécessairement contribué à l’insuffisance d’actif à hauteur à tout le moins d’un million d’euros alors au demeurant que l’actif n’a pas été renforcé dans le même temps. Elle ne peut pas s’analyser en une simple négligence au regard des sommes non payées et de sa durée.
Elle est imputable à la société HCH et à M. [S] pour la période antérieure au 15 mai 2015 et au-delà à M. [Z].
o La poursuite abusive d’une activité déficitaire ayant rendu les capitaux propres négatifs
M. [Z] affirme que durant les dix mois qui ont précédé la demande de sauvegarde, il a tenté de développer l’activité et de restaurer la profitabilité de la société sans être rémunéré, sollicitant uniquement le remboursement de ses frais. Il explique que les paiements réalisés par la société GHTE au profit de la société Novodiff s’expliquent par de la facturation de matériel acheté et non payé par la société GHTE puis porté au compte courant d’associé. Il rappelle enfin que la société Novodiff a investi plus de 1 500 000 euros entre septembre 2015 et l’ouverture de la liquidation judiciaire, dont 500 000 euros au titre d’une transaction passée avec maître [X].
La société HCH et M. [S] soulignent que maître [X] ne met en avant aucun intérêt personnel s’agissant de la gestion de la société HCH, précisant que celle-ci n’était pas rémunérée pour son mandat social ; que les pertes 2011 et 2012 sont antérieures à son entrée en fonction ; qu’au contraire dès sa prise de fonction, elle a fait voter une augmentation de capital de 904 000 euros afin de restructurer les fonds propres ; que pour alléger les charges sociales de l’entreprise, elle a conclu avec la société GHTE, à la fin de l’année 2012, une convention d’assistance lui permettant de ne supporter que le coût majoré de 8% des ressources affectées à son service, dont le taux a été ramené à 1% en 2014 et qu’elle n’a finalement pas supporté puisque la société HCH a abandonné sa créance de 355 000 euros le 15 mai 2015 ; enfin, que son encours auprès de la société GHTE a augmenté durant la période considérée.
Le liquidateur judiciaire réplique que la société GHTE a, depuis l’origine, poursuivi abusivement une activité déficitaire qui a abouti à rendre négatifs les capitaux propres. Il considère que cette faute est imputable à tous les dirigeants successifs qui ont profité de cette poursuite d’activité pour se rembourser leurs comptes courants d’associés. Il précise que durant les dix mois de poursuite de cette activité déficitaire, M. [Z] a fait basculer l’activité de la société GHTE sur la société Novodiff en négociant le transfert de la licence de marque au profit de celle-ci, ajoutant qu’il n’est pas justifié de l’investissement allégué d’autant que le règlement d’une transaction pour réparer un préjudice résultant d’un détournement d’actif ne peut être considéré comme un investissement. Il relève que les comptes courants des associés, notamment celui de la société HCH, étaient assez faibles en comparaison des pertes et que les augmentations de capital réalisées n’étaient pas à la hauteur des pertes et des capitaux propres négatifs.
Il résulte des bilans communiqués que le résultat d’exploitation de la société GHTE était déficitaire depuis plusieurs années. Ainsi le déficit s’élevait à 1 430 532,67 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d’affaires net de 1 147 018,82 euros, à 1 294 857 euros au 31 décembre 2013 pour un chiffre d’affaires net de 3 755 071 euros, à 1 165 390 euros au 31 décembre 2014 pour un chiffre d’affaires net de 6 055 261 euros, et à 52 528 euros pour un chiffre d’affaires net de 2 955 453 euros au 31 décembre 2015.
De même ces documents montrent que les capitaux propres étaient négatifs depuis 2011 (861 485,65 euros) puis à hauteur de 1 252 188,32 euros au 31 décembre 2012, 2 547 046 euros au 31 décembre 2013, 3 712 436 euros au 31 décembre 2014 et 3 764 964 euros au 31 décembre 2015.
Il n’est pas contesté que lors de l’assemblée générale extraordinaire du 17 septembre 2012 les actionnaires de la société GHTE, notamment la société HCH représentée par M. [S], ont décidé d’une augmentation de capital social d’un montant de 904 000 euros. Toutefois celle-ci était manifestement insuffisante au regard des chiffres rappelés ci-dessus.
Or par la suite, il n’est justifié d’aucune autre convocation d’une assemblée générale extraordinaire aux fins de réduire le capital social, de reconstituer les capitaux propres ou de dissoudre la société et ce en violation des dispositions de l’article L.225-248 du code de commerce applicables à la SAS par renvoi de l’article L.227-1.
De plus, le bilan au 31 décembre 2014 montre que les dettes de la société GHTE vis à vis du groupe et associés n’étaient que de 103 217 euros démontrant ainsi, comme le soutient le liquidateur judiciaire, que les pertes ont été financées par les créanciers et non par les actionnaires.
Par ailleurs, M. [Z] ne justifie pas des investissements allégués, étant observé que les paiements dont il fait état correspondent en réalité à l’exécution partielle des engagements financiers pris dans l’acte de cession d’actions et du protocole transactionnel en date du 4 janvier 2017.
Si la reconstitution des capitaux propres appartient aux actionnaires et non aux dirigeants, il appartient en revanche à ces derniers de tirer les conséquences d’un défaut de reconstitution ou d’une reconstitution insuffisante, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce, sans que l’augmentation de 2012 ne puisse exonérer la société HCH et M. [S] de leur responsabilité.
Cette faute de gestion, qui est caractérisée sans qu’il soit besoin de démontrer l’intérêt personnel des dirigeants à la poursuite, est imputable à la société HCH, à M. [S] et à M. [Z]. Elle ne constitue pas une simple négligence compte tenu du nombre d’exercices concernés.
Elle a nécessairement contribué à l’insuffisance d’actif et diminué le gage des créanciers.
o La gestion contraire à l’intérêt de la société GHTE dans l’intérêt des dirigeants
Après avoir rappelé qu’il ne s’était jamais rémunéré directement ou indirectement au titre de ses fonctions dans la société GHTE, dont il n’était pas associé, M. [Z] explique en premier lieu que le paiement qu’il a reçu en mars 2016 de la part de la société GHTE correspond à un remboursement de frais de déplacements dont il ne peut plus justifier en raison de l’ancienneté de la dette et que les paiements reçus par la société Novodiff correspondent à des commandes et/ou paiements de matériel par la société Novodiff au bénéfice de la société GHTE, effectués au fur et à mesure de la réalisation des ventes du matériel par la société GHTE, permettant ainsi à celle-ci de relancer son activité. En deuxième lieu, il considère que l’octroi de la licence renouvelée à la société Novodiff n’est pas un détournement d’un actif de la société GHTE et que les autres points évoqués par le liquidateur judiciaire sont postérieurs au prononcé de la liquidation judiciaire. En troisième lieu, il reproche au liquidateur judiciaire d’affirmer faussement que la marque Thomson aurait été basculée au profit d’une société Mondiale affaire, gérée par Mme [Z].
Après avoir rappelé qu’aucun intérêt personnel n’a été poursuivi par la société HCH qui n’était pas rémunérée pour son mandat social, cette dernière et M. [S] prétendent que les sommes dont la société HCH a bénéficié n’ont fait que compenser très partiellement celles qu’elle continuait d’avancer pour le compte de GHTE dans le cadre de la convention d’assistance. Considérant qu’il convient de retenir l’évolution du solde, elle souligne que pendant la période suspecte son encours positif n’a pas diminué mais a au contraire augmenté de 395 662,97 euros au 1er janvier 2015 à 453 785,62 euros au 30 juin 2015 et que les facturations faites par HCH ne représentaient que des refacturations de frais réellement exposés augmentés d’une marge de 1%. Elle fait observer également que dans le même temps la société GHTE réglait d’autres fournisseurs, lesquels voyaient eux leur encours diminuer de sorte qu’il n’y avait pas de paiement préférentiel à son profit. Elle rappelle en outre qu’elle a également abandonné des créances de 355 947,28 euros via la résiliation du contrat de prestations, le solde étant ramené à 100 000 euros, et de 8 122,65 euros au 31 décembre 2015, et que la somme de 151 744,49 euros a été réglée à la liquidation judiciaire.
Les appelants indiquent enfin que la preuve d’une aggravation de l’insuffisance d’actif entre le 21 octobre 2014 et le 15 mai 2015, résultant des fautes reprochées, n’est pas établie par le liquidateur judiciaire.
Maître [X], ès qualités, prétend que les différents dirigeants successifs ont privilégié leur intérêt personnel au détriment de celui de la société GHTE, pour la société HCH en percevant une somme totale de 184 566,75 euros en période suspecte dont 88 319,61 euros au titre de son compte courant d’associé, la cour d’appel l’ayant condamnée à en rembourser une somme de l’ordre de 150 000 euros, et pour la société Novodiff et M. [Z] en se remboursant leur compte courant d’associé soit 285 379,48 euros pour la première entre janvier et mars 2016 et 10 453,17 euros pour le second la veille de l’ouverture de la procédure de sauvegarde, et ce alors que dans le même temps les créances fiscales et sociales augmentaient.
Il reproche également à M. [Z] et à la société Novodiff de s’être fait transférer l’activité de la société GHTE comme l’a retenu la cour d’appel dans son arrêt confirmatif d’extension de la procédure collective à la société Novodiff.
Il précise, enfin, que la licence d’exploitation Thomson a été transférée à la suite de l’ouverture de la procédure collective de la société Novodiff à la société Mondiale affaire, exerçant sous l’enseigne Novolight, initialement dirigée par M. [Z] et désormais par son épouse.
Il fait valoir que cette faute a contribué à l’insuffisance d’actif en ce que ces agissements ont eu pour effet d’empêcher la société GHTE de financer une période d’observation et d’exclure toute possibilité de redressement.
Il est constant que par arrêt du 27 mars 2018, la présente cour a constaté que la société HCH avait reçu de la société GHTE paiement de la somme totale de 151 744,44 euros entre le 17 février et le 28 juillet 2015, soit en période suspecte, et l’a condamnée à payer cette somme à la liquidation judiciaire. Ni le fait que le liquidateur ait demandé puis obtenu l’annulation judiciaire d’une partie de ces paiements ni l’augmentation de l’encours de la dette de la société GHTE à l’égard de la société HCH au titre des prestations de service ne retirent à ces paiements leur caractère fautif alors qu’au 11 mai 2015 la dette fiscale s’élevait à la somme de 568 570 euros et que les dettes fournisseurs, hors celle de la société HCH, atteignaient au 26 mars 2015 la somme de 574 777,77 euros selon la balance fournisseur annexé à l’acte de cession.
Ce faisant et contrairement à ce qu’elle allègue, la société HCH, qui avait connaissance de l’état de cessation des paiements de la société GHTE dont elle tenait la comptabilité comme déjà indiqué, a bien bénéficié au détriment des autres créanciers de la société GHTE de paiements préférentiels et ce nonobstant les abandons de créances consentis par ailleurs.
Malgré le paiement opéré en faveur de la liquidation judiciaire en suite de l’arrêt rendu, cette faute a contribué à l’insuffisance d’actif en ce qu’en privant la société GHTE de trésorerie la société HCH l’a empêchée de régler ses créanciers, augmentant ainsi le passif déclaré.
M. [Z], qui ne conteste ni s’être remboursé son compte courant d’associé ni les paiements opérés par la société GHTE au profit de la société Novodiff, ne démontre pas que la somme de 10 453,17 euros correspondrait à des frais de déplacement qu’il aurait avancés ou que les paiements correspondraient à du matériel acheté au bénéfice de la société GHTE.
En outre, par arrêt du 13 novembre 2018, devenu définitif, la présente cour a déjà retenu que l’activité de la société GHTE, dont le contrat de licence d’exploitation de la marque Thomson Lighting, avait été transférée sans contrepartie au profit de la société Novodiff.
Ces agissements réalisés au détriment des créanciers de la société GHTE, qui ne peuvent pas s’analyser en une simple négligence, l’ont également privée de trésorerie et l’ont empêchée de financer une période d’observation en vue d’une cession, ce qui a participé à l’aggravation de l’insuffisance d’actif.
Tant les fautes que le lien avec l’insuffisance d’actif sont donc caractérisés à l’égard de MM. [Z], [S] et de la société HCH.
* sur la sanction financière
M. [Z] indique qu’il est marié et père de trois enfants nés en 2001, 2003 et 2009, qu’il exerce un emploi de vendeur et que son épouse, inscrite à Pôle emploi, est gérante non rémunérée de la société Mondiale affaire, détenue par sa famille.
La société HCH et M. [S], qui sollicitent comme M [Z], la réduction de la condamnation prononcée en première instance, reprochent au tribunal de les avoir, pour les mêmes faits, condamnés au titre d’un même préjudice. M. [S] indique être âgé de 61 ans, avoir trois enfants, être soutien de famille et employer dix salariés.
Maître [X], ès qualités, critique le quantum de la condamnation alloué par le tribunal.
La sanction doit être proportionnée à la gravité des fautes retenues. Le dirigeant peut être condamné solidairement avec la personne morale qu’il dirige au titre d’un même fait et d’un même préjudice.
En revanche, il n’y a pas lieu de déterminer la part de l’insuffisance d’actif imputable à chacune des fautes reprochées à chacun des dirigeants.
M. [S] n’a pas justifié de sa situation patrimoniale et personnelle.
Aucun élément sur la situation financière de la société HCH n’est produit.
M. [Z] verse aux débats ses avis d’imposition qui montrent qu’il a perçu des revenus salariaux de 78 497 euros et des revenus locatifs de 1 579 euros en 2014, de 55 967 euros pour les premiers et de 1 816 euros pour les seconds en 2015, de 10 871 euros en 2016, rien en 2017 et 2018 et 9 968 euros en 2019, les revenus locatifs devenant négatifs pour ces trois dernières années.
Il ne s’explique pas sur son patrimoine.
Compte tenu du nombre et de la gravité des fautes retenues à l’encontre de la société HCH et de MM. [S] et [Z] ayant contribué à l’insuffisance d’actif, il convient de confirmer le jugement en ce qui concerne le montant des condamnations prononcées mais, y ajoutant, de prévoir que les condamnations de M. [S] et de la société HCH seront solidaires entre elles.
3-Sur les sanctions personnelles
M. [Z] reprend ses arguments sur la nécessité de signer le contrat de licence au profit des sociétés Novodiff et GHTE en raison des réticences de la société Technicolor à la renouveler au profit de la seule société GHTE, de son absence de rémunération et du caractère disproportionné de la sanction au regard du remboursement de la somme de 10 475 euros. A titre subsidiaire, il sollicite la réduction de la durée de la sanction compte tenu de sa situation actuelle et du contexte de son arrivée à la direction de la société GHTE.
M. [S] conteste avoir commis intentionnellement des fautes de gestion au préjudice de la société gérée afin de favoriser un intérêt personnel et reprend ses arguments sur la nécessité de poursuivre l’activité de la société GHTE postérieurement au 21 octobre 2014 pour favoriser son redressement, l’absence de paiements préférentiels, le règlement de la créance HCH par la société GHTE et son absence de rémunération.
Invoquant les dispositions des articles L.653-4, L.653-8 et L.653-5, maître [X] reproche aux dirigeants de ne pas avoir déposé la déclaration de cessation des paiements dans le délai légal, d’avoir en se remboursant leur compte courant d’associé en période suspecte fait un usage des biens contraire à l’intérêt de la société et d’avoir postérieurement à la date de cessation des paiements payé un créancier au préjudice des autres créanciers. Il précise que M. [S] a également dirigé la société GHT qui a fait l’objet d’une liquidation judiciaire et que sa responsabilité pour insuffisance d’actif est également recherchée à ce titre.
L’article L.653-1 du code de commerce permet de prononcer une mesure de faillite personnelle ou d’interdiction de gérer aux personnes physiques dirigeants de droit d’une personne morale ainsi qu’aux personnes physiques représentants permanents de personnes morales, dirigeants des personnes morales.
Aux termes de l’article L.653-4 3° et 5° du code de commerce, le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de tout dirigeant de droit ou de fait d’une personne morale contre lequel a été relevé le fait d’avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l’intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement et d’avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l’actif de la personne morale.
Comme développé ci-dessus, en procédant à des paiements préférentiels au profit de la société HCH qu’il dirigeait et dont il était associé, M. [S] a fait des biens de la société GHTE, alors en difficultés financières, un usage contraire à l’intérêt de celle-ci à des fins personnelles.
L’arrêt de la présente cour du 13 novembre 2018 a étendu la procédure collective de la société GHTE à la société Novodiff en raison des détournements d’actifs opérés par M. [Z] au profit de la société Novodiff, en sorte que la faute est constituée.
L’article L.653-5 du code de commerce prévoit également que le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée à l’article L.653-1 contre laquelle a été relevé le fait d’avoir payé ou fait payer, après cessation des paiements et en connaissance de cause de celle-ci, un créancier au préjudice des autres créanciers.
Tel est le cas du remboursement par M. [Z] de son compte courant effectué le 23 mars 20, soit postérieurement à sa demande aux fins d’ouverture d’une sauvegarde en date du 10 mars 2016 qui a abouti dès le 20 avril suivant au prononcé d’une liquidation judiciaire et fixation de la date de cessation des paiements au 21 octobre 2014.
Cette faute, qui concerne, s’agissant de M. [S], les mêmes faits que ceux déjà retenus au titre de l’article L.653-4 3°, ne sera pas sanctionnée le concernant.
Il n’y a pas lieu, enfin de statuer du chef de l’omission de la déclaration de cessation des paiements car, outre que M. [Z] n’a été nommé président de la société GHTE qu’à compter du 15 mai 2015 soit après l’expiration du délai de quarante-cinq jours ayant commencé à courir le 21 octobre 2014, cette faute n’est sanctionnée que d’une mesure d’interdiction de gérer.
M. [S] indique, sans en justifier, employer des salariés.
La gravité et le nombre de fautes reprochés à chacun justifient la confirmation du jugement de ce chef.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire,
Rejette la demande de sursis à statuer ;
Confirme le jugement en toutes ses dispositions notamment en ce qu’il a prononcé une mesure de faillite personnelle d’une durée de quinze années à l’encontre de M. [E] [S], né le [Date naissance 2] 1959 à [Localité 18] (Maroc), de nationalité française, demeurant [Adresse 13] à [Localité 19] ou [Adresse 3] à [Localité 17] et d’une durée de dix ans à l’égard de M. [M] [Z], né le [Date naissance 1] 1981 à [Localité 20] (Chine), de nationalité chinoise, demeurant [Adresse 8] à [Localité 16];
Y ajoutant,
Ordonne la solidarité entre les condamnations prononcées à l’encontre de M. [S] et de la société HCH au titre de leur responsabilité pour insuffisance d’actif ;
Condamne solidairement la société HCH, M. [E] [S] et M. [M] [Z] à payer à maître [X], ès qualités, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne solidairement la société HCH, M. [E] [S] et M. [M] [Z] aux dépens d’appel ;
Dit qu’en application des articles 768 et R.69-9° du code de procédure pénale, la présente décision sera transmise par le greffier de la cour d’appel au service du casier judiciaire après visa du ministère public ;
Dit qu’en l’application des articles L.128-1 et suivants et R.128-1 et suivants du code de commerce, cette sanction fera l’objet d’une inscription au Fichier national automatisé des interdits de gérer, tenu sous la responsabilité du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce auprès duquel la personne inscrite pourra exercer ses droits d’accès et de rectification prévus par les articles 15 et 16 du règlement (UE) 20/6/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Sophie VALAY-BRIÈRE, Présidente et par Madame Sylvie PASQUIER-HANNEQUIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,La présidente,