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COMM.
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 13 octobre 2021
Rejet non spécialement motivé
M. GUÉRIN, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10506 F
Pourvoi n° K 20-12.417
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 13 OCTOBRE 2021
La société La Française des jeux (FDJ), société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 20-12.417 contre l’arrêt rendu le 26 novembre 2019 par la cour d’appel de Versailles (13e chambre), dans le litige l’opposant à la société DP jeux, société civile, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bellino, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société La Française des jeux, de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société DP jeux, et l’avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l’audience publique du 22 juin 2021 où étaient présents M. Guérin, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bellino, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société La Française des jeux aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société La Française des jeux et la condamne à payer à la société DP jeux la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société La Française des jeux.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt infirmatif attaqué D’AVOIR dit qu’en ne respectant pas les stipulations du contrat de courtier-mandataire la liant à la société DP Jeux dans la mise en oeuvre de la procédure contractuelle de cession de ce contrat, la société FDJ avait commis des fautes de nature à engager sa responsabilité contractuelle et D’AVOIR condamné la société FDJ à verser à la société DP Jeux la somme de 282 041,37 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice avec intérêts au taux légal à compter du 2 août 2012 ;
AUX MOTIFS QUE
« En l’espèce, les articles 6 et 10, relatifs respectivement à la durée et à la cession du contrat conclu le 20 novembre 1990, modifié, entre M. [W] et la société France Loto, devenue FDJ, sont rédigés en ces termes :
– Le présent contrat est conclu pour une durée indéterminée… Toutefois, sauf dérogation accordée par la FDJ, le présent contrat cessera de plein droit et sans préavis au soixante-sixième anniversaire du courtier-mandataire. Auparavant, le courtier-mandataire aura mis en oeuvre la procédure de cession prévue à l’article 10 du présent contrat.
-10.1 Le courtier-mandataire souhaitant cesser son activité ou céder une partie de celle-ci doit en informer [la FDJ] par courrier recommandé avec demande d’avis de réception, avec un préavis d’au moins trois mois et préciser la date souhaitée de la cessation de son activité.
[la FDJ] en informe immédiatement le GIE territorialement compétent qui dispose d’un mois pour proposer à [la FDJ], en accord avec le courtier-mandataire cédant, un ou plusieurs successeurs, personnes physiques représentant le nouveau courtier-mandataire proposé.
10.2 Les renseignements suivants sont également communiqués (…)
10.3 Après trois refus successifs des candidats présentés, [la FDJ] doit, soit désigner elle-même un cessionnaire au courtier-mandataire cédant, soit, si cette solution s ‘avère impossible, verser au courtier-mandataire cédant une indemnité fixée, sous réserves des dispositions de l’article 10.4 ci-après, à une fois virgule soixante-cinq les commissions du courtier-mandataire au titre de l’année civile précédente, recalculées sur la base des taux de commission applicables à la date de la cessation d’activité (…).
10.4 Toutefois, le montant de ces indemnités ne peut excéder le prix le moins élevé proposé par le(s) candidat(s) cessionnaire(s) présenté(s) par le courtier-mandataire cédant dont la candidature n’aura pas été agréée par [la FDJ].
[la FDJ] est alors libre de conclure un nouveau contrat avec le courtier-mandataire de son choix ».
Les parties s’accordent également pour reconnaître l’application des “Principes de resectorisation” tels qu’ils ressortent d’une note du 6 octobre 2003 diffusée par la FDJ dans son réseau à savoir : Efficacité (“établir une cartographie des courtages propre à mettre en oeuvre le plus efficacement possible la politique commerciale de l’entreprise”) et Pérennité (“mettre en place, dès que possible, des secteurs propres à assurer la viabilité du courtage, à court et moyen terme…doter chaque courtier de la capacité optimale à mettre en oeuvre la politique commerciale de I’entreprise”). Ceux-ci prévoient notamment de rechercher une meilleure efficacité du réseau en homogénéisant la taille des secteurs au fur et à mesure des départs des courtiers-mandataires en privilégiant les cessions aux courtiers-mandataires présents dans le réseau et en favorisant un meilleur découpage du territoire par le rachat des secteurs limitrophes et l’harmonisation avec les limites des départements.
Il est constant que M. [W] étant né le [Date naissance 1] 1943, la FDJ lui a proposé, le 18 décembre 2009, de reporter l’application de la clause de fin de contrat, dont la date a finalement été fixée au 15 juillet 2012, puis que par lettre du 29 février 2012 elle en a avisé le GIE Bourgogne Franche Comté, lui rappelant que conformément à l’article 10.1 du contrat il disposait d’un délai d’un mois pour lui proposer, en accord avec le courtier-mandataire, un ou plusieurs candidats à la reprise du secteur concerné.
En raison de la liberté du commerce, de la liberté contractuelle et de la possibilité pour une entreprise d’organiser librement son réseau de distribution, il ne peut pas être reproché à la FDJ d’avoir décidé de ne plus agréer de cession de gré à gré depuis 2010 et ce d’une manière générale. Il convient, en revanche, dans chaque cas particulier, de rechercher si elle a commis une faute dans l’application des stipulations contractuelles.
Il est établi par ce courrier qu’à l’origine la FDJ a convenu que le contrat de M. [W] s’inscrivait dans une procédure de cession et non dans un processus de résiliation visé à l’article 12 du même contrat.
Conformément à la procédure de l’article 10, le GIE Bourgogne Franche Comté a présenté le 16 mars 2012, en accord avec M. [W], un premier candidat à la reprise, M. [F] [W], puis, par lettre recommandée avec avis de réception du 26 mars suivant, la candidature de M. [K] [L], courtier-mandataire en activité et président du GIE Bourgogne Franche Comté.
Par courrier du 24 mai 2012, la FDJ a rejeté la candidature de M. [F] [W] au motif que celle-ci ne répondait pas à l’objectif consistant à homogénéiser la taille des secteurs et à en réduire le nombre en ce que M. [W] était extérieur au réseau, puis celle de M, [L] au motif que celui-ci n’avait pas accepté dans le délai qui lui avait été imparti une extension de son secteur selon certaines modalités.
Si aux termes de l’article 10 susvisé la FDJ n’avait pas l’obligation de se concerter avec le GIE Bourgogne Franche Comté pour tenter de trouver, en comité commercial, une solution portant sur les différentes candidatures, les principes de resectorisation, qu’elle a elle-même établis, précisent cependant qu’afin de veiller à l’équité entre courtiers, il convient de “connaître l’ensemble des propositions : après concertation entre les responsables régionaux et le GIE, les propositions de candidatures seront transmises à la FDJ pour une mise en cohérence nationale. Ces propositions seront débattues entre la FDJ et les GIE concernés et feront également l’objet d’un examen en comité commercial”.
La FDJ ne conteste pas que les deux propositions qui lui ont été adressées n’ont pas été débattues avec le GIE concerné et qu’elles n’ont pas fait l’objet d’un examen en comité commercial.
Or en ne respectant pas les principes qu’elle avait elle-même établis, la FDJ a commis une faute.
Par ailleurs, il est établi par le courrier échangé entre la FDJ et M. [L] le 10 mai 2012 et le projet de contrat versé aux débats, qu’avant même la fin du processus de cession tel que décrit à l’article 10 du contrat de courtier-mandataire et sa réponse sur les candidatures proposées par le GIE Bourgogne Franche Comté, dont celle de M. [L], la FDJ a proposé à celui-ci de régulariser un projet de contrat de prestation d’une durée de cinq années. En ne respectant pas les dispositions du contrat qui la liait à la société DP Jeux, la FDJ a également commis une faute.
Il convient ensuite d’examiner chacune des candidatures ou proposition pour rechercher si la FDJ a abusivement refusé de les agréer.
Concernant M. [F] [W] qui, bien que directeur général adjoint puis directeur général de la société DP Jeux depuis plusieurs années, n’était pas courtier-mandataire, le refus d’agrément de la FDJ était conforme à ses principes de resectorisation tendant à privilégier les courtiers-mandataires déjà présents dans le réseau.
S’agissant de M. [K] [L], courtier-mandataire limitrophe, la FDJ n’allègue pas que cette candidature contrevenait à ses principes de resectorisation en termes de taille de secteur ou de chiffre d’affaires mais prétend que, compte tenu de la réorganisation en cours, celle-ci était en contradiction avec l’objectif de “viabilité du courtage à court et moyen terme”.
Il sera relevé que la compatibilité de cette candidature avec les principes de sectorisation est démontrée par la proposition que la FDJ lui a adressée d’étendre son secteur en concluant un contrat d’un autre type, précisément sur le secteur de la société DP Jeux.
Contrairement à ce qui est vainement soutenu par la FDJ, ce dernier n’a pas refusé cette proposition mais a demandé par lettre du 10 mai 2012 qu’il soit auparavant statué sur sa candidature comme cessionnaire du contrat de courtier-mandataire de la société DP Jeux.
La FDJ ne peut pas plus prétendre s’être trouvée dans l’impossibilité de l’agréer comme cessionnaire du courtier partant en raison de la réorganisation en cours de son réseau de distribution alors qu’en juin 2012 aucune négociation n’était plus d’actualité du fait notamment du refus des courtiers-mandataires d’adhérer au protocole d’accord daté du 27 juillet 2011 et des actions judiciaires engagées en octobre et décembre 2011 par les courtiers-mandataires et leur représentant, l’UNDJ. Il résulte ainsi des lettres du 13 octobre 2011 et du 17 février 2012 adressées par la FDJ aux courtiers-mandataires que les contrats continuaient à s’appliquer et que son conseil d’administration lui avait demandé de mettre en place un programme de travail pour proposer un dispositif commercial incluant les aspects organisationnels et contractuels, ce qui ne constituait pas un obstacle à la signature d’un nouveau contrat de courtier-mandataire.
Il se déduit de ces éléments que la FDJ a commis une faute en refusant d’agréer M. [L] comme candidat à la reprise du secteur de la société DP Jeux.
Dés lors que le refus de la FDJ d’agréer ce dernier est abusif, il n’y a pas lieu de rechercher si la FDJ a également commis des fautes en ne recherchant pas puis en ne désignant pas un autre courtier-mandataire cessionnaire parmi MM. [G], [N], [O] et [T], dont il n’est pas prétendu par l’appelante qu’ils remplissaient les critères pour être agréés, ou en attribuant le secteur à sa filiale.
Puisqu’il n’était pas impossible à la FDJ d’agréer M. [L], le paiement de l’indemnité contractuelle de résiliation à hauteur de 1,65 fois le total des commissions de l’année précédente est exclu » ;
1°) ALORS QUE le droit d’agrément est libre et n’est limité que par l’abus ; les juges n’ont aucun pouvoir pour se prononcer sur le bien fondé et l’opportunité des critères objectifs et précis retenus pour refuser l’agrément d’un candidat ; qu’en se déterminant par des motifs impropres à établir que le refus d’agrément critiqué – lequel est fondé sur le critère précis et objectif, issu des principes de resectorisation, de la viabilité à court et moyen terme du courtage que le candidat proposait d’acquérir moyennant d’importants investissements financés totalement par un prêt – était abusif, la cour d’appel a violé les articles 1134, 1147 et 1149 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble les principes de liberté contractuelle et de liberté du commerce et de l’industrie ;
2°) ALORS QUE dans ses conclusions d’appel (p. 47, dernier § et p. 48, §1), la société FDJ a fait valoir que compte tenu de l’absence de toute visibilité sur la réorganisation qu’elle entendait mettre en oeuvre, elle ne pouvait accepter qu’un courtier-mandataire prenne des engagements financiers aussi conséquents, de l’ordre de plus de 1,5 millions d’euros entièrement financé par un prêt alors qu’elle pouvait résilier son contrat dans les années à venir, comme elle en avait informé son réseau et comme elle l’avait d’ailleurs fait, faisant ainsi perdre à son secteur toute viabilité économique ; qu’en ne répondant pas à ces chefs pertinents des conclusions d’appel de la société FDJ sur l’absence de viabilité économique de la candidature de M. [L], la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS, en tout état de cause, QUE n’est pas abusif le refus d’agrément justifié par la réorganisation d’un réseau de distribution ; que la société FDJ a fait valoir dans ses conclusions d’appel que l’un des objectifs fondamentaux des principes de resectorisation définis dans la note du 6 octobre 2003 était d’assurer la « pérennité » du courtage par la mise en place de « secteurs propres à assurer la viabilité du courtage à court et moyen terme », la gestion des resectorisations devant ainsi « contribuer à l’objectif de doter chaque courtier de la capacité optimale à mettre en oeuvre la politique commerciale de l’entreprise » ; que la société FDJ a expliqué que la réorganisation globale de son réseau de courtage entreprise pour répondre aux exigences de l’Etat d’en réduire les coûts impliquait une redéfinition des modalités de distribution ayant abouti, faute d’accord avec la profession sur la mise en place d’un nouveau mode de distribution, à la résiliation de la totalité des contrats de courtier mandataire en cours en 2014 si bien qu’au moment où la société DP Jeux a cessé son activité en juillet 2012, il lui était impossible de garantir à un éventuel cessionnaire, conformément aux principes présidant à la resectorisation de son réseau, la pérennité et la viabilité d’un contrat de courtage acquis moyennant d’importants investissements financés à l’aide de prêts ; qu’en affirmant qu’au stade où elle en était, la réorganisation du réseau de distribution de la société FDJ ne pouvait justifier l’impossibilité d’agréer un cessionnaire ou de signer un nouveau contrat de courtier-mandataire sans aucunement s’expliquer, ainsi qu’elle était invitée à le faire, sur les conséquences à court terme de cette réorganisation sur la pérennité du contrat que M. [L] proposait d’acquérir moyennant un investissement important financé entièrement par un prêt, la cour d’appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1147 et 1149 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble les principes de liberté contractuelle et de liberté du commerce et de l’industrie ;
4°) ALORS QUE les principes de resectorisation établis par la société FDJ définissent des critères de sélection des candidats à la reprise d’un secteur vacant dans le cadre d’un contrat de courtier-mandataire, critères qui ne s’appliquent pas à la reprise d’un secteur dans un autre cadre contractuel ; qu’en retenant que la compatibilité de la candidature de M. [L] avec les principes de resectorisation était démontrée par la proposition qui lui avait été faite par la société FDJ d’étendre son secteur sur celui de la société DP Jeux en concluant un contrat d’un autre type, la cour d’appel a statué par un motif erroné et a violé les articles 1134, 1147 et 1149 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble les principes de liberté contractuelle et de liberté du commerce et de l’industrie ;
5°) ALORS QU’ aux termes de l’article 10 du contrat de courtier-mandataire conclu entre la société DP Jeux et la société FDJ, la procédure d’agrément à laquelle est soumis tout éventuel candidat à la cession du courtage n’impose à la société FDJ aucune obligation de concertation avec le GIE ou d’examen en comité commercial des candidatures qui sont présentées à son agrément ; que dès lors la cour d’appel ne pouvait dire que la société FDJ avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité contractuelle pour ne pas avoir respecté les stipulations du contrat dans la procédure contractuelle de cession en ne débattant pas des candidatures soumises à son agrément avec le GIE Bourgogne Franche-Comté et en ne les examinant pas en comité commercial ; qu’en retenant dans les motifs de son arrêt que la société FDJ avait commis une faute à ce titre, la cour d’appel a violé les 1134, 1147 et 1149 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble les principes de liberté contractuelle et de liberté du commerce et de l’industrie ;
6°) ALORS QU’il résulte des constatations de l’arrêt attaqué que les échanges qui ont eu lieu entre la société FDJ et M. [L] sur une proposition de contrat de prestation à durée déterminée, qui est restée à l’état de projet, ont eu lieu en marge du processus de cession prévu à l’article 10 du contrat et que la société FDJ, conformément à la procédure contractuelle, s’est prononcée sur les candidatures soumises à son agrément par le GIE Bourgogne Franche-Comté ; qu’en jugeant néanmoins que la société FDJ n’avait pas respecté les dispositions du contrat qui la liait à la société DP Jeux, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles les 1134, 1147 et 1149 du code civil dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt infirmatif attaqué D’AVOIR condamné la société FDJ à verser à la société DP Jeux la somme de 282 041,37 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice avec intérêts au taux légal à compter du 2 août 2012 ;
AUX MOTIFS QUE
« Aux termes des articles 1142 et 1149 anciens du code civil, toute inexécution contractuelle se résout par l’allocation au créancier de dommages et intérêts qui sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé.
En refusant abusivement d’agréer M. [L], la FDJ a privé la société DP Jeux du prix de cession proposé par celui-ci, en sorte que l’appelante est bien fondée à solliciter réparation du préjudice subi lequel s’analyse justement en un gain manqué.
Il résulte de la lettre adressée le 26 mars 2012 par le GIE Bourgogne Franche Comté à la FDJ que M. [L] s’était engagé à reprendre la totalité des actions de la société DP Jeux moyennant “un prix égal à la situation nette au 31 décembre 2011 de DP Jeux tenant compte de la valeur incorporelle du courtage (commissions 2011 x coefficient égal à 2)”. Bien que non accompagnée d’un accord ferme de financement, cette proposition était signée de M. [L] lui-même en sa qualité de président du GIE et a été confirmée par celui-ci lorsqu’il a, par lettre du 10 mai 2012, sollicité de la FDJ qu’elle se prononce sur sa candidature.
Pour évaluer la valeur de marché du contrat de la société DP Jeux, le tribunal a retenu un coefficient moyen de 1,77 appliqué au chiffre d’affaires réalisé en 2011 soit 1 408 481 euros.
Le tableau récapitulatif des cessions de courtage produit par la FDJ, pour invalider tant ce coefficient que celui de 2,38 auquel prétend la société DP Jeux, dont il résulte un coefficient moyen de 1,598, ne peut être seul retenu dès lors que les cessions qui y figurent, qui datent de 1998 à 2002, sont trop anciennes pour servir de base à une cession de 2012.
Les éléments communiqués par l’appelante, dont il ressort que les offres d’achat formulées par, les candidats repreneurs en 2012 pour les 13 secteurs qui se libéraient du fait du départ à la retraite de courtiers-mandataires étaient en moyenne de 2,18 fois les commissions de l’année précédente pour une cession d’actions et de 2,57 fois pour une reprise directe du contrat, sont probants contrairement à ce qui est soutenu par la FDJ dès lors que s’il n’est pas démontré que ces offres se seraient concrétisées par des cessions il ne peut en être conclu que c’est en raison d’un désaccord sur le prix alors que celles-ci étaient soumises à la condition suspensive de l’agrément du cessionnaire par la FDJ.
L’offre de prix de M. [L], qui appliquait un coefficient de 2, inférieur à la moyenne entre les trois coefficients susvisés (1,598, 2,18 et 2,57), soit 2,11, au chiffre d’affaires 2011 (797 516 euros selon le bilan 2012) montre que celle-ci se situait dans la fourchette économiquement admise et ne pouvait pas être qualifiée de “mascarade”.
La société DP Jeux est dès lors fondée à fixer son préjudice à la somme de 282 041,37 euros (1 595 032 – 1 312 990,63 euros) correspondant au prix le moins élevé proposé par le candidat cessionnaire présenté par le courtier-mandataire cédant dont la candidature n’a pas été agréée par la FDJ, conformément à l’article 10.4 du contrat, déduction faite de l’indemnité de résiliation déjà perçue, seule cette somme constituant le gain manqué et non celle calculée en appliquant un coefficient de 2,38 » ;
ALORS QUE le créancier de l’obligation contractuelle méconnue ne peut obtenir réparation que d’un gain manqué certain ; en l’espèce, le gain manqué résultant du refus prétendument abusif de la société FDJ d’agréer M. [L] n’est certain ni dans son principe, ni dans son montant dès lors qu’il n’y a aucune certitude, même si l’agrément avait été donné, que la proposition de rachat, faite sous la condition suspensive de l’obtention d’un prêt et non accompagnée d’une offre ferme de financement, ait abouti à un acte définitif de cession au prix proposé ; en indemnisant un gain manqué qui n’était certain ni dans son principe ni dans son montant, la cour d’appel a violé les articles 1147 et 1149 du code civil dans leur réaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime.