Bon de visite : 1 juillet 2022 Cour d’appel de Bourges RG n° 21/00752

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Bon de visite : 1 juillet 2022 Cour d’appel de Bourges RG n° 21/00752
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AJ-SD/AB

N° RG 21/00752

N° Portalis DBVD-V-B7F-DLZR

Décision attaquée :

du 24 juin 2021

Origine :

conseil de prud’hommes – formation paritaire de Bourges

——————–

M. [K] [R]

C/

S.A.R.L. IMMO DIFFÉRENCE exerçant sous l’enseigne [V] [U] IMMOBILIER

——————–

Expéd. – Grosse

Me BIGOT 1.7.22

Me VERNAY

[F] 1.7.22

COUR D’APPEL DE BOURGES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 01 JUILLET 2022

N° 126 – 18 Pages

APPELANT :

Monsieur [K] [R]

7 impasse des Perdrix- 18230 SAINT DOULCHARD

Représenté par Me Marie-Pierre BIGOT de la SCP AVOCATS BUSINESS CONSEILS, avocat au barreau de BOURGES

INTIMÉE :

S.A.R.L. IMMO DIFFÉRENCE

exerçant sous l’enseigne [V] [U] IMMOBILIER

43 rue Jean Baffier- 18000 BOURGES

Représentée par M. [ZZ], gérant

Ayant pour avocat postulant Me Pascal VERNAY-AUMEUNIER de la SCP SOREL, du barreau de BOURGES

Assisté à l’audience par Me Cédric BEUTIER, avocat plaidant du barreau de NANTES

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Mme BOISSINOT, conseiller rapporteur

en l’absence d’opposition des parties et conformément aux dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme JARSAILLON

Lors du délibéré : Mme VIOCHE, présidente de chambre

Mme BOISSINOT, conseillère

Mme BRASSAT-LAPEYRIERE, conseillère

Arrêt n° 126 – page 2

1er juillet 2022

DÉBATS : A l’audience publique du 20 mai 2022, la présidente ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l’arrêt à l’audience du 1er juillet 2022 par mise à disposition au greffe.

ARRÊT : Contradictoire – Prononcé publiquement le 1er juillet 2022 par mise à disposition au greffe.

* * * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [K] [R], né le 15 février 1977, a été salarié de la SARL Immo Différence en qualité de négociateur immobilier VRP du 28 juillet 2003 au 31 juillet 2007. Il a ensuite été de nouveau recruté par cette société suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps plein du 6 juin 2009, moyennant une rémunération constituée de manière exclusive par des commissions et une rémunération mensuelle minimale de 1 321,02 euros bruts, constituant une avance sur commissions.

La SARL Immo Différence exploite une agence immobilière à Bourges, sous franchise commerciale [V] [U]. Le contrat de travail de M. [R] est régi par la convention collective nationale de l’immobilier.

Par avenant du 17 janvier 2012, une rémunération complémentaire annuelle calculée sur le chiffre d’affaires transactions hors taxe encaissé par l’agence a été convenue entre les parties.

Par courrier du 6 mars 2017, M. [R] a sollicité de son employeur une autorisation d’absence du 6 juin au 13 juillet 2017 afin de suivre une formation professionnelle relative à la conduite de taxi à laquelle il a finalement renoncé par courrier du 20 avril 2017, les dates de cette formation ayant été modifiées.

Par courrier du 23 août 2018, M. [R] a sollicité la rupture conventionnelle de son contrat de travail, laquelle a été refusée par la SARL Immo Différence, par courrier du 3 septembre 2018.

M. [R] a ensuite été placé en arrêt de travail pour cause de maladie à compter du 27 septembre 2018, cet arrêt de travail étant régulièrement prolongé jusqu’au 25 février 2019.

Le 26 février 2019, dans le cadre d’une visite de reprise, M. [R] a été déclaré inapte à tous postes dans l’entreprise avec la mention de ce que ‘tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé’.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 8 mars 2019, M. [R] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement, fixé au 18 mars 2019. La SARL Immo Différence lui a ensuite notifié son licenciement pour inaptitude par courrier recommandé avec accusé de réception du 21 mars 2019.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 9 avril 2019 auquel son employeur a répondu le 25 avril 2019, M. [R] a dénoncé le reçu pour solde de tout compte qui lui avait été remis par la SARL Immo Différence.

Le 20 décembre 2019, M. [R] a saisi le conseil de prud’hommes de Bourges d’une contestation de son licenciement et de demandes en paiement de rappel de commissions ainsi que les congés

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payés afférents, de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, harcèlement moral et violation de l’obligation de sécurité, d’une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, de l’indemnité légale de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement nul ou dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 24 juin 2021, le conseil de prud’hommes de Bourges a condamné la SARL Immo Différence à payer à M. [R] les sommes de 1 640 euros au titre des commissions sur les ventes [D]/[ZV] et [X] et 164 euros au titre des congés payés afférents, a débouté M. [R] du surplus de ses demandes et l’a condamné aux entiers dépens ainsi qu’au paiement de la somme de 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le 7 juillet 2021, par la voie électronique, M. [R] a interjeté appel de cette décision, la contestant en toutes ses dispositions.

Vu les dernières conclusions déposées au greffe le 10 mai 2022, par lesquelles M. [R] demande à la présente cour de :

– Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il a condamné la Société Immo Différence à lui verser la somme de 1 640,00 euros au titre de commissions sur vente, outre 164,00 euros au titre des congés payés afférents,

– Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il l’a débouté de ses demandes au titre des commissions complémentaires annuelles, des dommages et intérêts pour perte des commissions Empruntis, des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, des dommages et intérêts pour harcèlement, des dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité, de sa demande de la rupture de son contrat de travail (préavis, solde indemnité de licenciement, dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse),

Statuant à nouveau,

– Dire que l’inaptitude de Monsieur [R] a, au moins partiellement, une origine professionnelle et que l’employeur en avait connaissance au moment du licenciement,

– Condamner la Société Immo Différence à payer à Monsieur [R] les sommes suivantes :

– 5 750,00 euros bruts au titre des commissions complémentaires annuelles

– 2 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour perte des commissions Empruntis

– 2 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

– 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral

– 5 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité

– 19 883,19 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis

– 17 260,27 euros à titre de solde sur l’indemnité légale de licenciement

– 66 277,30 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, à tout le moins sans cause réelle et sérieuse,

– Dire que s’il n’est pas fait droit à la demande relative au préavis et à l’indemnité de licenciement au titre des indemnités minimales afférentes à un licenciement ayant une origine professionnelle, il y sera fait droit sur le fondement du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– Ordonner la remise d’un bulletin de salaire et de documents de fin de contrat de travail rectifiés et conformes à l’arrêt à intervenir et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours à compter de la signification de l’arrêt,

– Condamner la Société Immo Différence à la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

– Condamner la Société Immo Différence aux entiers dépens.

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Vu les dernières conclusions déposées au greffe le 19 avril 2022, par lesquelles la SARL Immo Différence demande à la présente cour de :

– Déclarer Monsieur [K] [R] mal fondé en son appel ;

– Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de BOURGES en ce qu’il l’a condamnée à verser à Monsieur [K] [R] les sommes de 1 640 euros au titre des commissions sur les ventes [D]/[ZV] et [X], et de 164 euros au titre des congés payés afférents,

Et statuant à nouveau,

– Débouter Monsieur [K] [R] de ses demandes à ce titre ;

– Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de BOURGES pour le surplus ;

– Débouter Monsieur [K] [R] de l’ensemble de ses demandes ;

– Condamner Monsieur [K] [R] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

Vu l’ordonnance de clôture en date du 18 mai 2022,

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

– Sur les demandes en paiement de solde de rémunérations

Il sera rappelé à titre préliminaire que, lorsque le salarié est rémunéré au moyen de commissions, ses droits à commissions ne peuvent en aucune façon être réduits pour cause d’arrêt maladie.

– Sur le rappel de commissions ‘vente et mandat’

L’article 4 du contrat de travail de M. [R] en date du 6 juin 2009 dispose : ‘La rémunération du salarié est constituée de manière exclusive par des commissions.

Toutefois, conformément aux dispositions conventionnelles, le salarié bénéficiera d’une rémunération mensuelle minimale de 1 321,02 euros bruts.

Il est précisé que cette rémunération mensuelle brute minimale constitue une avance sur commissions.

(—-)

Sur toutes les affaires réalisées grâce à son intervention directe, le salarié est rémunéré par un pourcentage sur le montant des commissions hors taxe effectivement encaissées par l’agence :

10% si celui-ci a rentré un mandat simple,

12% si celui-ci a rentré un mandat exclusif,

10% si celui-ci a sorti un mandat (vente).

Le décompte des commissions se fait au plus tard à la fin de chaque mois, en fonction de l’encaissement effectif des commissions perçues par l’employeur. Il est tenu compte dans ce décompte tant des commissions qui ont été réglées que des avances éventuelles consenties au salarié’.

Par ailleurs, aux termes de l’article 10 de l’avenant n°31 du 15 juin 2006 à la convention collective nationale des administrateurs de biens, sociétés immobilières et agents immobiliers, ‘Le négociateur immobilier, V.R.P. ou non, bénéficie d’un droit de suite concernant les commissions qu’il aurait perçues dans le cas où le contrat de travail n’aurait pas expiré, sous les 2 conditions

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cumulatives suivantes :

– ces affaires devront être la suite et la conséquence du travail effectué par lui pendant l’exécution de son contrat de travail ;

– ces affaires devront avoir été réalisées dans la durée du droit de suite étant entendu que celui-ci ne saurait porter sur des affaires pour lesquelles l’employeur lui-même n’aurait pas effectivement perçu les honoraires correspondants’.

M. [R] sollicite un rappel de commissions ‘sur affaire réalisée’ en application des dispositions de l’article 4 de son contrat de travail relatives à sa rémunération. Il prétend être directement intervenu dans les ventes [D]/[ZV] et dans l’établissement du mandat de vente [X], de sorte que ses droits ne pourraient être réduits pour cause d’arrêt maladie ou de congés aux dates auxquelles les compromis de vente et mandat de vente ont été signés.

La SARL Immo Différence conteste que M. [R] soit directement intervenu dans les ventes [D]/[ZV] et soutient que le salarié ne peut se prévaloir du mandat ayant permis la vente ultérieure du bien immobilier de M. [X], de sorte qu’il ne peut réclamer des commissions de vente sur ces deux affaires.

Comme elle le fait observer, l’article 10 de l’avenant précité du 15 juin 2006, dont l’application a été retenue par le conseil de prud’hommes, ne correspond pas exactement à la situation de M. [R] puisque le contrat de travail de ce dernier n’était pas rompu lorsque les ventes litigieuses ont eu lieu et que la SARL Immo Différence a perçu les honoraires correspondants. Toutefois, l’article 4 du contrat de travail du salarié vise expressément ‘toutes les affaires réalisées grâce à son intervention directe’ sans qu’il soit pour autant nécessaire, comme l’ont retenu les conseillers prud’homaux par une motivation que la cour fait sienne, que cette intervention ait lieu à chaque stade de la réalisation d’une vente.

En l’espèce, le contenu de l’agenda versé aux débats par M. [R] montre un premier rendez-vous ‘[D]’ le 31 mars 2018. Sans être contredit sur ce point, le salarié explique qu’à cette date, un premier mandat a été signé par le client. Alors que M. [R] était en congés d’été, un second mandat de vente sans exclusivité a été signé le 18 juillet 2018 par Mme [C] [ZY], négociatrice immobilière, laquelle a mentionné l’identité de M. [K] [R], comme étant le négociateur ayant apporté son concours à cette vente.

Dans une attestation rédigée le 15 septembre 2019, M. [AR] [AK], ancien négociateur immobilier dont le témoignage n’a pas lieu d’être écarté des débats du seul fait qu’il est lui-même en litige avec son employeur, confirme cette pratique : ‘Il est habituel que lors d’une absence de l’un d’entre nous, qu’un collègue prenne le relais sur les affaires en cours, sans que cela nuise à l’absent. C’est à dire que ce dernier perçoit normalement sa commission dès lors qu’un de ses acquéreurs et un mandat en cours se finalise par un achat/vente’.

Par ailleurs, l’agenda de M. [R] et le bon de visite versés à la procédure corroborent ses allégations selon lesquelles il a fait visiter l’immeuble de M. [D] situé 79, rue Louis Mallet à Bourges (18) à M. [ZU] et Mme [BI] le 25 septembre 2018, ces derniers formulant ensuite une proposition d’achat par courriel du même jour dans lequel ils confirment la visite du bien immobilier ‘par l’entremise de Mr [R] de l’agence [V] [U]’.

L’agenda du salarié confirme encore que ce dernier avait envisagé une nouvelle visite du bien avec M. [ZU] et Mme [BI] le 27 septembre 2018, visite qu’il n’a pu assurer du fait de son arrêt-maladie renouvelé régulièrement par la suite. Dès lors, même si la vente a eu lieu ultérieurement à la suite d’une nouvelle offre, M. [D] n’ayant pas accepté celle initialement formulée par les acquéreurs, il n’en reste pas moins que M. [R] est directement intervenu dans la réalisation de cette transaction, ce que confirme également M. [AK] dans son témoignage.

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L’arrêt-maladie de M. [R] ne peut conduire à priver ce dernier des commissions auxquelles il aurait pu prétendre s’il avait pu poursuivre le travail, de sorte que la décision querellée est confirmée en ce qu’elle a fait droit à sa demande de rappel de commissions au titre du mandat de vente et de la vente [D]/[ZV].

S’agissant de la vente ‘[X]’, l’employeur ne conteste pas, et a au demeurant écrit à M. [R] le 25 avril 2019, qu’un premier mandat de vente, rédigé par ce dernier, est arrivé à échéance le 8 octobre 2018, de sorte qu’un nouveau mandat de vente lui a succédé le 7 novembre 2018, rédigé par M. [ZZ], gérant de la SARL. Cette dernière conteste sans en justifier la validité de ce premier mandat en ce qu’il n’aurait pas été régularisé par l’ensemble de la succession. Cependant, M. [AK] atteste en ces termes : ‘M. [R] est bien titulaire du mandat [X] au 11 rue de Varennes à Morthomiers. Il a effectué de nombreuses démarches pour son obtention, car il s’agissait d’une succession avec de nombreux héritiers, dont certains en Belgique’.

Il s’en infère que le conseil de prud’hommes a pertinemment retenu l’intervention directe de M. [R] au titre de cette vente, sa décision étant également confirmée en ce qu’elle a fait droit à la demande en paiement d’un rappel de commissions formée pour ce motif par le salarié.

– Sur la commission complémentaire annuelle

Si le contrat de travail peut contenir une clause de variabilité de la rémunération du salarié dans le temps, cette clause doit être fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l’employeur. En effet, l’évolution de la rémunération variable du salarié ne peut dépendre de la seule volonté de ce dernier.

En l’espèce, l’article 1 de l’avenant au contrat de travail de M. [R] en date du 6 juin 2009 énonce : ‘A compter de l’exercice 2011, le salarié bénéficiera d’une commission complémentaire annuelle calculée sur le chiffre d’affaires transaction hors taxe encaissé par l’agence.

Il est convenu que le treizième mois et l’indemnité de congés payés est incluse dans cette commission complémentaire annuelle.

Ainsi, dès que le salarié aura personnellement réalisé sur l’exercice de référence un chiffre d’affaires encaissé hors taxe d’au moins 150 000 euros, il bénéficiera d’une commission complémentaire annuelle brute de :

5% (incluant 0,454% au titre des congés payés) sur le chiffre d’affaires hors taxe encaissé sur l’exercice de référence compris entre 460 000 et 650 000 euros.

10% (incluant 0,90% au titre des congés payés) sur le chiffre d’affaires hors taxe encaissé dépassant 650 000 euros.

Il est précisé que les seuils déterminés (460 000 et 650 000 euros) ont été fixés au regard notamment de la taille de l’équipe commerciale transaction de l’agence qui comprend au jour de la signature des présentes 2 négociateurs immobilier V.R.P.

Ainsi, toute éventuelle arrivée de négociateur supplémentaire entraînera un relèvement du seuil de 115 000 euros au prorata de la date d’arrivé de ce dernier au cours de l’exercice de référence.

Il est convenu que l’exercice s’entend ici comme étant la période allant du 1er janvier au 31 décembre de chaque année;

Cette commission sera versée le 31 mars de l’exercice suivant.

Enfin, il est expressément convenu que cette commission ne sera due au salarié qu’à la condition expresse qu’il fasse partie des effectifs de la Société au 31 décembre de l’exercice de référence.’

M. [R] invoque le caractère illicite de la clause de variabilité de sa rémunération prévue par avenant à son contrat de travail en date du 18 novembre 2011, en ce qu’elle fait

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dépendre sa rémunération de la seule volonté de son employeur.

Il ajoute que la société Immo Différence ne pouvait prétendre lui imposer unilatéralement une modification substantielle de sa rémunération, laquelle équivaut à une modification de son contrat de travail. Il prétend qu’à défaut pour la société Immo Différence de lui avoir proposé ou, à tout le moins, de l’avoir informé, avec un délai de prévenance suffisant, de l’effectivité de la modification de sa rémunération, telle que prévisionnée par l’avenant du 18 novembre 2011 et ainsi, à défaut de l’avoir informé de l’intégration dans l’équipe commerciale transaction d’un nouveau négociateur immobilier, le relèvement du seuil de ses droits à commission lui est inopposable.

M. [R] soutient encore qu’il n’a pas été rempli de ses droits au titre de la commission complémentaire annuelle sur le chiffre d’affaires transaction hors taxes encaissé sur l’année 2018 puisqu’au cours de cette année, l’agence comportait trois négociateurs immobiliers et non quatre, comme le prétend l’employeur, Mme [W] [BP] ne faisant pas partie, selon lui, de l’équipe commerciale puisqu’elle aurait toujours exécuté des fonctions administratives et de location. Il sollicite en outre le rejet des pièces produites par la SARL Immo Difference sur ce point, eu égard à la communauté d’intérêts existant entre Mme [BP] et M. [ZZ], tous deux disposant du même nombre de parts au sein de la société.

La SARL Immo Différence estime pour sa part que le salarié a été rempli de ses droits en matière de commission complémentaire annuelle, et conteste l’existence d’une modification unilatérale de sa rémunération. Elle soutient que les parties ont expressément convenu d’un ajustement du seuil de déclenchement de la commission en fonction d’un événement prédéterminé et précis, le relèvement du seuil de 115 000 euros en cas d’arrivée d’un nouveau négociateur. Elle prétend qu’en 2018, la société comportait quatre négociateurs immobiliers et non trois, comme le prétend M. [R], Mme [W] [BP] faisant bien partie de l’équipe commerciale de l’agence.

S’il ne peut être contesté que le recrutement d’un nouveau négociateur immobilier relève du pouvoir de direction de l’employeur, sa présence ouvre la possibilité d’un chiffre d’affaires plus important de sorte que la clause de variabilité inscrite à l’article 1er de l’avenant précité tient compte de cette perspective en relevant de 115 000 euros le seuil de déclenchement de la commission complémentaire annuelle.

Cette dernière dépend, non de la volonté de l’employeur, mais du chiffre d’affaires réalisé par l’ensemble des négociateurs immobiliers de la société, dont le nombre peut varier au fil des recrutements et des départs, à l’image de l’arrivée de Mme [ZY] à la fin de l’année 2017. Contrairement à ce que soutient M. [R], la clause de variabilité de cette commission complémentaire annuelle est par conséquent licite.

Par ailleurs, les dispositions de l’article 1 précité étant suffisamment explicites, leur application ne constituent pas une modification de la rémunération du salarié et la SARL Immo Différence n’avait pas à recueillir son accord pour sa mise en oeuvre. La clause de variabilité précitée est également opposable au salarié.

Pour établir la qualité de négociatrice immobilière de Mme [W] [BP], la SARL Immo Différence produit à la procédure plusieurs pièces qui seront examinées avec la prudence qui s’attache à la lecture de documents émanant ou concernant un associé de la société, par ailleurs compagne du gérant de cette dernière, sans qu’il y ait toutefois lieu de les écarter. Elle verse en premier lieu aux débats un avenant au contrat de travail à durée indéterminée de Mme [BP] en date du 27 décembre 2017, dont il résulte que la salariée, initialement embauchée en qualité d’assistante commerciale, a exercé à compter du 1er janvier 2018, des fonctions de négociateur immobilier. Ce contrat est cependant insuffisant à établir à lui seul le

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contenu exact de l’activité de la salariée.

La société produit ensuite 8 mandats de vente signés entre les mois d’avril et de décembre 2018, sur lesquels apparaît le nom de [W] [BP], l’un d’eux ayant abouti à la signature d’un compromis de vente le 5 juin 2018 (vente Quillez-Ferreira De Jésus/Paget) pour laquelle Mme [N] confirme dans une attestation du 25 novembre 2020 l’intervention de cette dernière (visite de l’acquéreur, négociation avec le vendeur, constitution du dossier de compromis de vente et accompagnement chez le notaire pour la signature de l’acte définitif).

M. [R] conteste que Mme [BP] ait accompagné la cliente lors de la signature de l’acte de vente, soutenant sans le démontrer que, seul, M. [ZZ] était présent. En effet, la page d’agenda sur laquelle figure la mention ‘signature Quilez’ le 4 septembre ne peut être formellement rattachée au gérant de la SARL et n’exclut pas, en toute hypothèse, la présence de Mme [BP]. De même, celle produite par l’employeur et portant la mention ‘signature Quilez/Paget chez Armandet’ ne renseigne pas davantage sur l’identité du négociateur immobilier ayant accompagné les clients chez le notaire. Il ne peut par ailleurs être tiré de conséquences de la signature par M. [ZZ] ou Mme [ZY] de certains des mandats de vente évoqués, compte tenu des explications ci-dessus développées. En revanche, le salarié fait pertinemment observer que leur faible nombre, comparativement à celui des autres négociateurs immobiliers de l’agence et le seul acte de vente dans lequel Mme [BP] est intervenue ne peuvent suffire à établir la réalité d’une activité de négociatrice immobilière.

L’employeur verse encore à la procédure le témoignage de Mme [O] [M], assistante commerciale, laquelle écrit le 30 mars 2020, ‘[W] [ZW] m’a formé au poste d’assistante, en plus de s’occuper de ses autres fonctions dont la transaction’. Le témoin explique cependant être arrivé au sein de l’agence au mois de septembre 2018, de sorte qu’elle ne peut en toute hypothèse évoquer l’activité de Mme [BP] au cours de mois antérieurs.

En outre, son témoignage est contredit par celui de M. [P] [BS], conseiller de vente, lequel a travaillé au sein de l’agence de la fin de l’année 2018 au mois d’octobre 2019 et qui atteste de ce que ‘pendant cette période chez [V] [U], la collaboratrice [W] [BP] s’occupait des tâches administratives et de location principalement, mais ne faisait pas de visite de bien à la vente, ni de transaction, malgré qu’elle pouvait occasionnellement signer des mandats de vente’. Cette attestation doit être rapprochée du contenu des pages d’un agenda 2018 mentionnant plusieurs rendez-vous intitulés ‘bail’ ou ‘état des lieux’, qui, s’il ne peut être assurément attribué à Mme [BP], vient néanmoins conforter la description faite par M. [BS] des fonctions de la salariée.

Surtout, ce témoignage rejoint ceux de Mme [S] et de M. [AK], portant sur la période antérieure. Mme [S] atteste ainsi : ‘J’ai également été surprise de découvrir que Monsieur [ZZ] considérait Madame [W] [BP] comme négociateur immobilier transaction au même titre que Monsieur [K] [R], [AR] [AK] et [C] [ZY]. Je ferai remarquer que Madame [W] [BP] s’occupait principalement des dossiers de location et de la partie administrative de l’agence, mais d’aucune façon, de transactions commerciales immobilières’.

Quant à M. [AK], il écrit : ‘J’ai constaté aussi que les fonctions de Madame [BP] ne lui permettait d’être inclus dans le calcul de la prime, selon notre contrat. Puisqu’elle ne s’occupait que de l’administratif ainsi que de la location et non de la vente’.

Au surplus, les deux exemplaires de ‘tableaux de résultats hebdomadaires’ portant sur les semaines 27 et 28 du mois de juillet 2018, produits par M. [R], portent mention des seuls prénoms d'[K] ([R]), [C] ([ZY]), [AR] ([AK]) et [Z] ([ZZ]) au

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sujet d’items tels que ‘mandats’, ‘estimations’, ‘clients sortis’, ‘affaires visitées’ relevant spécifiquement des négociateurs immobiliers, étant précisé que l’item ‘location’ ne comporte aucun chiffre. En outre, le tableau de suivi des mandats entrés au cours des trois premiers mois de l’année 2018 ne porte pas mention du nom ou du prénom de Mme [BP].

Il se déduit de ces éléments que, contrairement à ce qu’ont estimé les conseillers prud’homaux, la réalité de l’activité de Mme [BP] au cours de l’année 2018 ne correspondait pas à celle d’un négociateur immobilier dans la mesure où elle n’est intervenue en cette qualité que de manière très marginale, en dépit de l’avenant produit à la procédure par la SARL Immo Différence.

Dès lors, l’assiette de calcul de la commission complémentaire annuelle devait être déterminée en considération de la présence de trois négociateurs immobiliers salariés , et non quatre comme soutenu par l’employeur. Cette commission complémentaire annuelle s’élevait à la somme de 8 272,90 euros. La société Immo Différence ayant d’ores et déjà réglé à M. [R] la somme de 2 522,90 euros, elle est condamnée à lui payer la somme complémentaire de 5 750 euros à titre de rappel de commission complémentaire, la décision querellée étant infirmée de ce chef.

– Sur la demande en paiement de dommages et intérêts pour perte des commissions Empruntis

En application des dispositions de l’article L1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

Par ailleurs, l’article 1241 du code civil dispose : ‘Chacun est responsable du dommages qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence’.

M. [R] soutient en l’espèce qu’il avait été convenu avec la société Immo Différence qu’il percevrait les commissions payées par la société Empruntis (anciennement Broker) sur les emprunts contractés par les clients de l’agence par son intermédiaire. Il rappelle avoir été apporteur d’affaire Empruntis sur les prêts contractés par les clients [G] et [B] sans que ces commissions ne lui aient été payées. Il soutient qu’en s’abstenant de justifier de leur défaut de paiement, l’employeur a violé son obligation d’exécuter le contrat de travail de bonne foi.

La SARL Immo Différence lui rétorque que sa demande est injustifiée. Elle explique qu’elle n’a jamais reçu la moindre commission de la part de la société Empruntis puisqu’il s’agissait d’une relation existante uniquement entre cette société et M. [R], sans qu’elle soit elle-même concernée.

Il n’est pas contesté en l’espèce que M. [R] percevait une ‘commission Empruntis’, directement versée par l’organisme de crédit, lorsqu’il lui apportait un client venant à signer ultérieurement un prêt pour l’acquisition du bien immobilier mis en vente par l’intermédiaire de l’agence [V] Hocquet. Il en justifie par les différents courriers accompagnant les chèques qui lui étaient adressés, le dernier courrier reçu étant daté du 20 mars 2018. Il verse également aux débats l’attestation d’une cliente de l’agence, Mme [H], ainsi que plusieurs courrier et courriels confirmant qu’au cours de l’année 2018, il a apporté d’autres affaires à la société Empruntis, affaires pour lesquelles il n’a pas perçu de commissions.

Cependant, dans la mesure où cette ‘commission Empruntis’ ne lui était pas versée par son employeur, elle ne constitue pas une rémunération au sens de l’article L 3221-3 du code du travail, et la responsabilité de la SARL Immo Différence ne peut être engagée du fait de son absence de versement sur le fondement de l’exécution déloyale du contrat de travail.

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Par ailleurs, M. [R] prétend en l’espèce sans toutefois le démontrer que son employeur serait à l’origine de l’absence de versement des commissions qui lui étaient dues, étant précisé que la SARL Immo Différence verse pour sa part à la procédure une attetation de la SARL Forus Finance, – laquelle sous la dénomination ‘Empruntis’, accorde les prêts sollicités -, dont il résulte qu’elle n’a versé aucune commission à la SARL Immo Différence. La preuve d’une faute de l’employeur ne se trouve ainsi pas rapportée.

La décision sera par conséquent confirmée en ce qu’elle a débouté M. [R] de sa demande de dommages et intérêts de ce chef.

– Sur la demande en paiement de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail

En application des dispositions de l’article L1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. La bonne foi contractuelle étant présumée, il appartient au salarié qui se prévaut d’une exécution déloyale du contrat de travail par son employeur, de démontrer que ce dernier a pris des décisions pour des raisons étrangères à l’intérêt de l’entreprise ou que ces décisions ont été mis en oeuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle.

M. [R] soutient que la SARL Immo Différence a usé de tous moyens, même les plus déloyaux, pour ne pas lui régler les rémunérations qui lui étaient légitimement dues. Il affirme avoir été humilié et blessé de devoir solliciter la stricte application de son contrat de travail alors qu’il n’avait lui-même jamais failli.

Il résulte de ce qui précède que la SARL Immo Différence s’est abstenue de payer à M. [R] l’intégralité de la rémunération qui lui était due en n’appliquant pas pleinement les dispositions de l’article 4 de son contrat de travail et en étendant de manière injustifiée l’assiette de calcul de la commission complémentaire annuelle à laquelle il pouvait prétendre, de manière à limiter injustement les sommes dont elle lui était redevable.

Il en résulte un comportement déloyal dans l’exécution du contrat de travail, lequel, au-delà des conséquences financières indemnisées par les sommes d’ores et déjà allouées, a causé un préjudice moral conséquent au salarié.

La décision querellée est par conséquent infirmée en ce qu’elle a débouté M. [R] de ce chef de demande et la SARL Immo Différence sera condamnée à lui payer la somme de 2 000 euros de dommages et intérêts.

– Sur la demande en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral

Aux termes des articles L 1152-1 et L 1152-2 du code du travail, le harcèlement moral d’un salarié se définit par des agissements répétés ayant pour objet ou effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale, ou de compromettre son avenir professionnel et aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral, ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

En application de l’article L 1154-1 du code du travail, il incombe au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un tel harcèlement, éléments au vu desquels

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la partie défenderesse doit prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il résulte de ces dispositions que pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de supposer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.

En l’espèce, M. [R] soutient avoir été victime de multiples faits de harcèlement moral après le mois de mars 2018, alors qu’il avait refusé de signer un avenant à son contrat de travail réduisant sa rémunération.

Le salarié évoque en premier lieu les brimades et humiliations dont il aurait été victime de la part de M. [ZZ], relayé en cela par sa compagne Mme [BP]. Il produit le témoignage de son ancienne collègue, Mme [L] [S], laquelle atteste de ce qu’en conséquence de la demande de formation formulée par le salarié en 2017, le gérant de la société ne lui ‘adressait quasiment plus la parole’, la situation s’étant aggravée après qu’il eut refusé de signer un avenant à son contrat de travail. Sur ce dernier point, la SARL Immo Différence ne conteste pas avoir proposé à deux de ses salariés en mars 2018, Mrs [R] et [AK], la signature d’un avenant à leur contrat modifiant leur rémunération.

Mme [S] atteste encore de ce que M. [ZZ] ‘faisait des remarques ‘humiliantes’ sur la tenue vestimentaire de Monsieur [K] [R], alors qu’aucune prescription n’était imposée par l’enseigne…’. Elle écrit enfin que Mme [W] [BP] lui a annoncé lors d’un entretien que ‘le repas d’agence annuel de fin d’année avait été supprimé sous prétexte que Monsieur [K] [R] avait demandé une formation’, estimant que cette suppression constituait en réalité une punition avec ‘répercussion sur l’ensemble du personnel employé dans l’agence’. Ce témoignage n’a pas lieu d’être écarté du seul fait de la condamnation pénale dont Mme [S] a fait l’objet en lien avec une précédente relation salariale.

Ses observations sont corroborées par celles de M. [AK], lequel indique qu’à l’occasion d’un déplacement au cours duquel il a accompagné M. [ZZ], ce dernier n’a cessé de dénigrer M. [R], en affirmant qu’il ne pouvait plus compter sur lui et ce, ‘malgré les bons salaires qui lui étaient versés’. M. [AK] témoigne encore de ce que le gérant de la société dénigrait également le salarié ‘devant les clients à l’accueil en disant qu’il ne posait jamais les bonnes questions’ et de ce que, lors des réunions matinales, il ignorait M. [R], s’adressant à lui seul.

Si la suppression du repas de fin d’année ne concerne pas spécifiquement le salarié, la description faite par les deux témoins de l’isolement dans lequel ce dernier a été placé comme du dénigrement dont il a fait l’objet est suffisamment précise pour que la première série de faits, invoquée par le salarié, soit considérée comme étant matériellement établie.

M. [R] prétend en second lieu avoir fait l’objet d’intimidations, à tout le moins de fortes pressions, exercées par le gérant de la SARL afin de le conduire à signer l’avenant de réduction de sa rémunération. Il s’en est ouvert auprès de l’inspection du travail, comme en témoignent les échanges de mails avec cette dernière les 5, 11, 15 et 17 avril 2018. M. [AK] en atteste, expliquant que, suite à la réunion du mois de mars 2018 entre lui-même, M. [R] et M. [ZZ], ce dernier aurait exigé d’eux pendant plusieurs semaines des échanges entre tous trois sur le sujet, deux à trois fois par semaine, exerçant une ‘pression importante afin de [les] faire céder’. Le témoin indique au surplus que le gérant les ‘menaçait de [leur] rendre la vie

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au travail difficile. Ce qu’il a réussi sans mal à faire’ outre de geler leurs salaires. Selon M. [AK], M. [ZZ] aurait encore prétendu qu’ils étaient ‘des barons’ et il les aurait menacés de les remplacer par une ‘armée de mexicains’.

En dépit du fait qu’il provienne d’un salarié également en litige avec la SARL Immo Différence, ce témoignage est suffisamment précis pour que les faits invoqués soient considérés comme matériellement établis, étant précisé que les échanges évoqués ayant seulement eu lieu entre M. [ZZ], M. [R] et M. [AK], aucun autre salarié de l’entreprise ne pouvait ou bien en attester, ou bien en contredire la teneur.

M. [R] évoque encore une suppression de ces moyens de travail en ce que M. [ZZ] lui a demandé, dans un courriel du 22 octobre 2018, écrit alors qu’il se trouvait en arrêt-maladie, de restituer la clé de l’agence, ce fait étant également matériellement établi.

M. [R] reproche encore à son employeur d’avoir porté atteinte à sa rémunération en ne respectant pas ses droits à indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS) et à indemnités complémentaires de prévoyance pendant son arrêt de travail, en ce qu’il n’aurait pas établi en temps utile l’attestation de salaire nécessaire à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) pour calculer les IJSS auxquelles il pouvait prétendre ni régularisé la demande d’indemnité complémentaire auprès du régime de prévoyance.

Sur le premier point, le salarié produit un courriel adressé à son employeur le 27 février 2019, auquel était joint son arrêt-maladie, ainsi qu’un nouveau message électronique de relance du 22 mars 2019, faisant référence à un signalement de la CPAM qui n’est toutefois pas joint, de sorte que ce premier reproche ne peut être retenu.

Sur le second point en revanche, il produit un premier courriel de Mme [BP], en date du 18 février 2019, lui assurant de ce qu’une ‘demande a été faite chez Malakoff [son] organisme de prévoyance’ après qu’il eut adressé à l’agence le formulaire de demande de prestations puis un second du 3 avril 2019, en réponse à sa réclamation du 28 mars 2019, par lequel Mme [BP] sollicite plusieurs éléments complémentaires ‘pour finaliser [son] dossier de prévoyance’, ce dont il s’infère qu’à la date du 3 avril 2019, ce dossier n’avait en réalité pas encore été constitué. M. [R] produit parallèlement ses bulletins de paie de l’année 2019, dont il résulte qu’il ne percevait plus de rémunération depuis le mois de janvier, et que le remboursement par l’organisme de prévoyance des sommes qui lui étaient dues n’a pu intervenir qu’en juillet 2019. Il s’en déduit que ce quatrième fait est matériellement établi.

M. [R] se prévaut enfin de la dégradation de son état de santé qu’il estime consécutive aux agissements répétés de son employeur. Les arrêts de travail successifs qu’il verse à la procédure mentionnent le terme ‘dépression’ ou ‘syndrome dépressif’. Il produit encore un certificat médical du Docteur [E] [J], médecin psychiatre, en date du 22 décembre 2018, potentiellement adressé au médecin du travail et rédigé comme suit : ‘M. [R] [K] me semble en effet présenter une incompatibilité avec l’emploi qu’il tenait jusqu’à ce jour : son Sd dépressif actuel est lié directement à ce travail, et s’il va un peu mieux, il reste très fragile. S’il reprenait dans cet agence, le risque de décompensation serait majeur. Il me semble donc inapte à la reprise dans cette agence’.

Le salarié verse encore aux débats une attestation d’un psychologue du centre médico-psychologique de Bourges, selon laquelle il a été suivi régulièrement en consultation depuis le 29 octobre 2018 ‘pour un mal être au travail empêchant une reprise d’activité au sein de son entreprise’.

La dégradation de l’état de santé de M. [R] et son lien direct avec le contexte dans lequel il a travaillé sont par conséquent également établis. Pris dans leur ensemble, les éléments

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versés à la procédure permettent par conséquent de supposer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail.

Pour sa part, c’est de manière inopérante que la SARL Immo Différence répond en premier lieu que le salarié n’a émis aucune plainte au titre d’un éventuel harcèlement moral pendant toute la relation de travail puisque d’une part, elle était difficile à formuler dans le cadre d’une petite structure telle une agence immobilière et que d’autre part, son absence ne peut priver M. [R] de la possibilité d’invoquer ultérieurement un harcèlement moral.

Tout en contestant fortement les témoignages de Mme [S] et de M. [AK], la SARL Immo Différence produit en second lieu à la procédure plusieurs attestations de salariés ou d’anciens salariés de la société, d’un client et d’un notaire travaillant régulièrement avec l’agence immobilière.

M. [BL] [A], client de l’agence, atteste ainsi de ce que M. [ZZ] ‘a toujours valorisé et mis en avant ses collaborateurs’, ce qui a été le cas de M. [R], auquel il a confié la mission de représenter l’agence en l’étude notariée lors de la vente en septembre 2015 de l’un de ses biens immobiliers. Toutefois, au-delà du caractère général de la plupart des observations de M. [A], son témoignage ne contredit pas les allégations du salarié, lequel précise que, jusqu’au mois de mars 2018, date à laquelle il a refusé la signature d’un avenant à son contrat de travail et, à tout le moins jusqu’en avril 2017, lorsqu’il a envisagé une formation en vue d’une reconversion professionnelle, ses relations avec le gérant de la SARL sont restées bonnes.

Mme [ZY], conseillère immobilière, explique quant à elle avoir été formée à compter de son arrivée à la fin de l’année 2017 par M. [ZZ] et Mme [BP], M. [R] et M. [AK] lui apportant ‘leur soutien pendant cette période de formation sans aucune animosité’. Elle décrit la réunion commerciale par laquelle débutait chaque journée de travail, expliquant qu’elle avait lieu ‘dans une ambiance détendue’ et était l’occasion pour chaque négociateur immobilier de ‘s’exprimer sur les mandats’ et de ‘présenter les biens à estimer’, M. [ZZ] faisant part de son expérience tout en demeurant ouvert aux remarques de ses collaborateurs. De même, Mme [O] [M], assistante commerciale, explique être arrivée au sein de l’agence en septembre 2018 et avoir travaillé ‘très peu de temps avec [K] [R] et [AR] [AK]’, tout en soulignant ‘une bonne entente’. Elle ajoute n’avoir rien remarqué d’anormal au sein de l’équipe et ne pas avoir pensé que ‘ça irait jusque là’, [Z] [ZZ] ayant toujours eu ‘une attitude respectueuse avec [eux] tous’.

Si le témoignage de Mme [ZY] vient relativiser celui de M. [AK] en ce qui concerne le déroulement des réunions matinales, il demeure, comme celui de Mme [M], trop général pour remettre en cause le contenu des attestations versées aux débats par le salarié, s’agissant du dénigrement et des mesures d’intimidation décrites par les témoins. La même observation peut être formulée en ce qui concerne l’attestation rédigée par Mme [BE] [Y], laquelle, outre le fait qu’elle a seulement travaillé au sein de l’agence du 12 juin au 25 août 2018, soit en période estivale durant laquelle M. [R] a pris des congés comme en témoignent ses bulletins de paie, se limite à des observations générales sur ‘une certaine cohésion de groupe’ ainsi que sur la bienveillance de M. [ZZ] à son égard. Enfin, l’attestation rédigée par Maître [T] [I] témoigne seulement du professionnalisme de l’agence et de M. [ZZ] en particulier, ce qui n’est nullement l’objet du présent litige.

La SAS Immo Différence se limite par ailleurs à invoquer l’absence de ‘sérieux’ du motif pris de la suppression des moyens de travail du salarié, sans toutefois fournir aucune explication quant aux raisons pour lesquelles elle lui a demandé de restituer les clés de l’agence durant son arrêt de travail.

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L’attestation de son expert-comptable est enfin insuffisante à justifier du retard pris dans les démarches auprès de l’organisme de prévoyance et au demeurant contredite par les propres courriels de l’employeur.

Il se déduit de l’ensemble de ces éléments que la SAS Immo Différence échoue à prouver que ses agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Dès lors, le jugement querellé est infirmé de ce chef et la SAS Immo Différence sera condamnée à payer à M. [R] la somme de 5 000 suros en réparation du préjudice subi par le salarié, lequel se trouve caractérisé par la dégradation des conditions de travail du salarié et l’altération de son état de santé.

– Sur la demande en paiement de dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de sécurité

Les dispositions de l’article L 1152-4 du code du travail imposent à l’employeur de prendre ‘toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral’.

Par ailleurs, l’article L 4121-1 du même code dispose :

‘ L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1 Des actions de prévention des risques professionnels (ord. n°2017-1389 du 22 septembre 2017, art.2-5° en vigueur le 1er octobre 2017) ‘y compris ceux mentionnés à l’article L 4161-1″ ;

2 Des actions de formation et d’information ;

3 La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.’

En l’espèce, M. [R] prétend démontrer que son état de santé et ses arrêts de travail ayant débuté le 27 septembre 2018 ont été causés par les pressions, les faits de harcèlement, le stress et l’anxiété qu’il a subis au sein de la SARL Immo Différence à compter de la fin de l’année 2017 et, encore plus, à compter du mois de mars 2018.

Il soutient que la SARL Immo Différence ne justifie d’aucune mesure préventive pour prévenir les risques psycho-sociaux, ni n’a établi aucun document unique d’évaluation.

Il ajoute qu’informé de ce que ses conditions de travail portaient atteinte à sa santé, la SARL Immo Différence ne justifie d’aucune mesure corrective en ce qu’elle n’a rien entrepris pour faire cesser la situation venant les compromettre.

La SARL Immo Différence répond que le salarié ne démontre pas le manquement qu’il lui oppose, qu’il ne les a jamais dénoncés durant la relation de travail, qu’elle a établi le document unique d’évaluation des risques, que d’ailleurs, le salarié a signé. Elle ajoute qu’il ne justifie nullement du préjudice consécutif audit manquement à l’obligation de sécurité.

En premier lieu, le préjudice consécutif à la dégradation de l’état de santé de M. [R] a d’ores et déjà été indemnisé au titre du harcèlement moral dont il a été victime.

En second lieu, l’absence de dénonciation par le salarié, pendant le cours de la relation salariale, d’un manquement de son employeur à son obligation de sécurité est inopérante et ne

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peut le priver de la possibilité de mettre en cause la responsabilité de ce dernier.

En l’espèce, M. [R] affirme avoir prévenu M. [ZZ] et Mme [BP] de la dégradation de son état de santé en lien avec ses conditions de travail lors d’une réunion de bureau entre tous trois. M. [AK] en atteste, précisant qu’il occupe le ‘bureau d’à côté’ de sorte qu’il a pu entendre ce qui se disait. Toutefois, il ne peut avoir été témoin de propos tenus en son absence et le constat selon lequel il avait remarqué la perte de poids et les traits tirés du salarié ne peuvent suffire à considérer que la SARL Immo Différence avait une parfaite connaissance de la dégradation de son état de santé sans mettre en place de mesure corrective.

En revanche, la SARL Immo Différence produit un document unique d’évaluation des risques pour la santé et la sécurité des salariés signé de M. [R] le 9 janvier 2018. S’agissant des risques psychosociaux, ce document porte la mention d’une ‘discussion avec différents intervenant pouvant aider à trouver des solutions pour améliorer la situation’ débutée en mars 2017. Aucun élément concret ne vient cependant illustrer ces discussions et leur issue. Il s’en déduit qu’au delà de l’aspect formel de la rédaction d’un document unique d’évaluation des risques, l’employeur ne justifie pas de mesures visant à prévenir les risques psychosociaux au sein de l’agence.

La décision querellée sera par conséquent infirmée en ce qu’elle a débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité et la SARL Immo Différence sera condamnée à lui payer la somme de 1 000 euros de dommages et intérêts à ce titre.

– Sur la contestation du licenciement et les demandes indemnitaires afférentes :

Aux termes de l’article L 1226-10 alinéa 1 du code du travail, « Lorsque le salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail en application de l’article L 4624-4, à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel ».

L’article L 1226-12 alinéa 2 dispose que « l’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L 1226-10, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi ».

Aux termes de l’article L 1226-14 alinéa 1, « La rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l’article L 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d’un montant égal à celui de l’indemnité compensatrice de préavis prévue à l’article L 1234-5 ainsi qu’à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l’indemnité prévue par l’article L 1234-9 ».

Les règles protectrices applicables aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dès lors que l’inaptitude du salarié ou les réserves affectant son aptitude, quel que soit le moment où elle est constatée et invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l’employeur a connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement, même si la constatation par la sécurité sociale n’est pas encore intervenue ou n’a pas été sollicitée.

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De même, l’employeur qui est informé, au moment du licenciement, qu’une procédure avait été engagée par le salarié pour faire reconnaître le caractère professionnel de son accident ou de sa maladie doit mettre en oeuvre la législation professionnelle.

Il appartient aux juges du fond de rechercher l’existence du lien de causalité entre l’inaptitude ou les réserves affectant l’aptitude du salarié et l’accident ou la maladie dont il est atteint ainsi que la connaissance qu’avait l’employeur de l’origine professionnelle de cet accident ou de cette maladie.

M. [R] soutient en l’espèce que son inaptitude a, au moins partiellement, une origine professionnelle, ce dont son employeur avait connaissance au moment du licenciement.

La SARL Immo Différence le conteste en rappelant que les arrêts de travail qui lui ont été adressés ne visaient pas un accident du travail ou une maladie professionnelle, que l’avis d’inaptitude du médecin du travail n’en faisait pas davantage état, la convocation à la visite de reprise portant mention d’une ‘visite de reprise après maladie non-professionnelle’ et que le salarié n’a jamais fait de demande de reconnaissance de maladie professionnelle.

En l’espèce, même si M. [R] n’avait fait aucune démarche au moment de l’engagement de la procédure de licenciement en mars 2019 pour voir reconnaître par l’organisme de sécurité sociale compétent l’origine professionnelle de son inaptitude, il a été démontré ci-avant que l’employeur connaissait l’origine des arrêts de travail du salarié prolongés jusqu’au 25 février 2019, soit dépression ou syndrome dépressif. Le harcèlement moral dont M. [R] affirme avoir été victime a été ci-dessus retenu et il trouve son origine dans les agissements répétés de son employeur. Enfin, en dépit du contenu de la convocation de M. [R] à la visite de reprise, l’avis d’inaptitude du 26 février 2019 mentionnait : ‘tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé’. Il en résulte qu’à la date du licenciement du salarié, la SARL Immo Différence avait connaissance de l’origine au moins partielle de l’inaptitude de ce dernier.

En application de l’article L. 1152-3 du code du travail, le licenciement ayant pour origine le harcèlement moral subi, il est nul.

La décision querellée sera par conséquent infirmée en ce qu’elle a débouté M. [R] de sa demande au titre du complément d’indemnité de licenciement et la SARL Immo Différence sera condamnée à lui payer la somme de 17 260,27 euros à ce titre, étant précisé que son salaire mensuel moyen, non contesté dans son quantum, s’établit à la somme de 6 627,73 euros.

Par ailleurs, au regard des dispositions de l’article L 1235-3-1 du code du travail, le salarié dont le licenciement est entaché d’une des nullités prévues au deuxième alinéa de même article, peut prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Du fait de la nullité de son licenciement, M. [R] peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis équivalente à trois mois de salaire. La SARL Immo Différence sera par conséquent condamnée à lui payer la somme de 19 883,19 euros à ce titre.

M. [R] était âgé de 42 ans au jour de son licenciement et cumulait 9 ans d’ancienneté au sein de l’entreprise. Il s’est installé en qualité d’agent immobilier et a ouvert une agence immobilière à la fin du mois de novembre 2019. Il ne justifie pas particulièrement de sa situation entre la date de son licenciement le 21 mars 2019 et l’ouverture de son agence. En tenant compte de son âge et de son ancienneté au jour de son licenciement pour inaptitude, la SARL Immo Différence sera par conséquent condamnée à lui payer la somme de 45 000 euros de dommages et intérêts, laquelle réparera intégralement le préjudice qu’il a subi du fait de la nullité du licenciement dont il a fait l’objet.

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– Sur les autres demandes, les dépens et les frais irrépétibles :

Il sera ordonné à la SARL Immo Différence de remettre à M. [R] un bulletin de salaire et l’ensemble de ses documents de fin de contrat conformes au présent arrêt, dans un délai de 15 jours suivant la signification du dit arrêt, sans qu’il soit néanmoins nécessaire de prononcer une astreinte à cette fin.

Par ailleurs, en application des dispositions de l’article L.1235-4 du code du travail, la société sera condamnée d’office à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à M. [R] du jour de son licenciement au jour de l’arrêt, ce, dans la limite de six mois d’indemnités.

Le jugement querellé sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

La SARL Immo Différence, qui succombe principalement, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel et déboutée de sa demande d’indemnité de procédure. En équité, elle devra payer à M. [R] la somme de 2 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe :

INFIRME la décision déférée, sauf en ce qu’elle a accueilli la demande en paiement d’un rappel de commissions sur les ventes [D]/[ZV] et [X], et en ce qu’elle a débouté M. [K] [R] de sa demande de dommages et intérêts pour perte des commissions Empruntis,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

DIT que le licenciement de M. [K] [R] est nul,

CONDAMNE la SARL Immo Différence à payer à M. [K] [R] les sommes de :

– 5 750 euros à titre de rappel de commissions complémentaires annuelles,

– 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

– 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

– 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité,

– 19 883,19 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

– 17 260,27 euros au titre du solde de l’indemnité légale de licenciement,

– 45 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

ORDONNE à la SARL Immo Différence de remettre à M. [K] [R] un bulletin de paye l’ensemble de ses documents de fin de contrat conforme au présent arrêt, dans un délai de 15 jours suivant la signification du dit arrêt mais DIT n’y avoir lieu à astreinte ;

CONDAMNE la SARL Immo Différence à rembourser à Pôle emploi des indemnités de chômage versées à M. [K] [R], du jour de son licenciement au jour de l’arrêt, ce, dans la limite de six mois d’indemnités ;

CONDAMNE la SARL Immo Différence à payer à M. [K] [R] la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL Immo Différence aux dépens de première instance et d’appel et la déboute

Arrêt n° 126 – page 18

1er juillet 2022

de sa propre demande d’indemnité de procédure.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;

En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme VIOCHE, présidente de chambre, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

S. DELPLACE C. VIOCHE

 


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