Augmentation de capital : décision du 25 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/03762
Augmentation de capital : décision du 25 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/03762
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Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 5

ORDONNANCE DU 25 MAI 2023

(n° /2023)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/03762 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHFWO

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Décembre 2022 du Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° J202200226

Nature de la décision : Contradictoire

NOUS, Patricia LEFEVRE, Conseillère, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Cécilie MARTEL, Greffière.

Vu l’assignation en référé délivrée à la requête de :

DEMANDEUR

S.A.S. GASCOGNE PAPIER

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Et assistée de Me Florian SIRODOT substituant Me Alexis LE LIEPVRE de la SCP LACOURTE RAQUIN TATAR, avocat plaidant au barreau de PARIS, toque : R176

à

DÉFENDEUR

S.A.S.U. CMI PROSERPOL

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Et assistée de Me Jean-Marie GUELOT de l’AARPI GUELOT & BARANEZ Avocats Associés, avocat plaidant au barreau de PARIS, toque : R007

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l’audience publique du 13 Avril 2023 :

Saisi par des actes extra-judiciaires des 12 avril et 15 septembre 2021, le tribunal de commerce de Paris a, par un jugement contradictoire du 9 décembre 2022 :

– condamné la société Gascogne papier à payer à la société CMI proserpol la somme de 724 920 euros ht au titre du solde du marché assortie des intérêts légaux ainsi qu’aux intérêts courus et à courir au taux annuel de 12 % subsidiairement au taux de refinancement de la banque centrale européenne majoré de 10 points de pourcentage, sur la somme facturée de 70 000 euros ht à compter du 17 mars 2019, sur la somme facturée de 70 000 euros ht à compter du 28 avril 2019 et sur les sommes respectives de 36 000 euros ht et 8 920 euros ht à compter du 15 juin 2019 ;

– condamné la société Gascogne papier à rembourser la société CMI proserpol, la somme de 69 066 euros ht correspondant au changement des résines et charbons effectué à frais avancés au mois de janvier 2020 ;

– dit que le vice du consentement, donné par la société CMI proserpol, entraîne la nullité relative du contrat établi entre les sociétés Gascogne papier et CMI proserpol,

– débouté la société Gascogne papier de toutes ses demandes à l’encontre de la société CMI proserpol,

– dit que la société CMI proserpol ne peut supporter les conséquences financières de l’erreur de la société Gascogne papier et que cette dernière est tenue de régler l’ensemble des travaux réalisés par la société CMI proserpol pour son compte ;

– débouté la société Gascogne papier de ses demandes de condamnation de la société Impulse, venant aux droits de la société Utilities performance et de son assureur la compagnie QBE Europe,

– débouté la société Gascogne papier de ses demandes plus amples, ou contraires aux présentes dispositions et l’a condamnée à payer d’une part la somme de 10 000 euros à la société CMI proserpol et d’autre part la somme de 5 000 euros à la société Impulse et son assureur au titre de l’article 700 du code de procédure civile, les déboutant du surplus,

– ordonné l’exécution provisoire qui est de droit sans constitution de garantie ;

– condamné la société Gascogne papier aux dépens.

Le 18 janvier 2023, la société Gascogne papier a interjeté appel de cette décision et par acte extra-judiciaire en date du a 28 février 2023, elle fait assigner la société CMI proserpol devant le premier président de la cour de céans, afin de voir ordonner, au visa de l’article 521 du code de procédure civile, la consignation de la somme de 889 450,87 euros entre les mains de la CARPA ou à défaut entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations dans les deux mois de la signification de sa décision, jugeant que cette somme sera reversée en tout ou partie, entre ses mains ou celles de la société CMI proserpol en fonction de l’arrêt à intervenir. Elle sollicite également que la société CMI proserpol soit condamnée aux dépens.

La société Gascogne papier soutient, par la voix de ce conseil, les termes de son assignation et des conclusions déposées à l’audience. Elle exprime ses craintes quant à la restitution des fonds en cas d’infirmation du jugement, son adversaire étant dans une situation financière délicate, puisque structurellement déficitaire depuis 2017, ce qui a entraîné un effondrement de son capital social. Elle relève également que si son chiffre d’affaires a significativement augmenté, il en est de même de ses dettes et que la situation financière de son associé unique (la société CMI France) est également délicate. Enfin, elle conteste que la garantie offerte par la société mère, la société John Cockerill soit sérieuse.

Elle met en avant son positionnement au sein du groupe international John Cokerill, dont les comptes consolidés font apparaître un chiffre d’affaires de 940 millions d’euros et qui détient 100% du capital social de la société CMI France, qui est son associée unique. Elle invoque également son redressement, un compte de résultat faisant apparaître un effacement de la perte, un quasi-doublement de son chiffre d’affaires ainsi que le soutien de la société mère et sa promesse de porte-fort.

SUR CE,

En vertu de l’article 524 alinéa l du code de procédure civile, lorsque l’exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d’appel, par le premier président statuant en référé que si elle est interdite par la loi ou si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives, le premier président pouvant dans ce dernier cas, prendre des mesures prévues aux articles 517 à 522 du code de procédure civile.

L’article 521 du code de procédure civile dispose : la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l’exécution provisoire soit poursuivie en consignant sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.

Ce dernier texte n’impose pas de caractériser le risque de conséquences manifestement excessives, il n’en demeure pas moins que le demandeur à la consignation doit, à tout le moins, établir la nécessité de cette mesure, eu égard aux circonstances de l’espèce, s’agissant d’une mesure dérogeant à l’exécution provisoire attachée à la décision.

Ainsi qu’il ressort des procès-verbaux des décisions de l’associé unique des 30 juin 2021 et 30 juin 2022, la société CMI proserpol rencontre des difficultés financières récurrentes, qui ont conduit son associé unique à des abandons de créances en 2013 et 2017 pour un total de 4 600 000 euros ; que sa dissolution avait été envisagée en 2019 et malgré une opération de re-capitalisation réalisée à la fin 2020, ses capitaux propres demeuraient inférieurs, à l’issue de chaque exercice, à la moitié du capital social en raison de pertes pour un montant cumulé sur ces deux exercices de huit millions d’euros. Cette situation délicate comme le caractère déficitaire du compte de résultat demeurent au 31 décembre 2021 (pièce CMI C12), ce qui a contraint l’associée unique, par une décision du 22 décembre 2022, a souscrire à une augmentation de capital par compensation avec sa créance en compte courant (pour trois millions d’euros) avant de procéder à une réduction du capital par imputation des pertes inscrites en compte pour plus de 8 millions d’euros. Enfin, il convient de relever d’une part, que le quasi-doublement du chiffre d’affaire au cours de l’exercice 2022 (pièce CMI C14) mis en exergue par la société CMI proserpol ne lui permet pas de couvrir en totalité ses charges d’exploitation, le bilan de cet exercice faisant apparaître des disponibilités insignifiantes (6768 euros) et des dettes conséquentes (9 033 954 euros) et d’autre part, que la société John Cockerill a été contrainte de fournir à sa filiale une lettre de soutien financier pour les exercices 2022 et 2023, au titre de ses engagements envers ses fournisseurs.

La situation financière de la société créancière est incontestablement dégradée, ce qui expose la société Gascogne papier à un risque de non-restitution des fonds en cas d’infirmation. Risque qui n’est pas annihilé par la promesse de porte-fort de la société belge John Cokerill en date du 21 mars 2023, faute de preuve indiscutable que son signataire a le pouvoir de l’engager à l’égard des tiers, en l’absence de production des statuts de la société John Cokerill dont il est l’un des administrateurs et en présence d’une délégation de pouvoirs (pièce CMI 22) limitée au pouvoir de représenter et de signer tous les contrats intragroupe dans lesquels la société est partie, à l’exception des contrats dont l’engagement dépasse la gestion journalière de la société.

Le risque de non-représentation des fonds est suffisamment caractérisé et il convient en application de l’article 521 du code de procédure civile d’ordonner la consignation par la société Gascogne papier de l’intégralité des causes du jugement (soit la somme non contestée de 889 450,87 euros) dans les termes du dispositif ci-dessous.

La société Gascogne papier sera condamnée aux dépens d’une instance engagée dans son seul intérêt et il sera dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Autorisons la société Gascogne papier à consigner la somme de 889 450,87 euros entre les mains du Bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Paris dans un délai de quinze jours à compter de la délivrance de la copie exécutoire de la présente ordonnance ;

Disons que faute de consignation dans ce délai, l’exécution provisoire retrouvera son entier effet ;

Disons que le Bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Paris ne sera délié de sa mission que sur la volonté commune des parties exprimée par une transaction ou sur présentation de l’arrêt de la Cour d’appel statuant sur l’appel interjeté à l’encontre du jugement du tribunal de commerce en date du 9 décembre 2022 et de sa signification ;

Disons n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons la société Gascogne papier aux dépens de l’instance.

ORDONNANCE rendue par Mme Patricia LEFEVRE, Conseillère, assistée de Mme Cécilie MARTEL, greffière présente lors de la mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

La Greffière, La Conseillère

 


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