Augmentation de capital : décision du 1 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/01787
Augmentation de capital : décision du 1 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/01787
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 9

ARRÊT DU 01 JUIN2023

(n° , 16 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/01787 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFDGU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Janvier 2022 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2022000008

APPELANTE

S.A.R.L. ATHOS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTES sous le numéro 338 959 414,

Dont le siège social est situé [Adresse 11]

[Localité 5]

Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020,

Assistée de Me Hubert MAZINGUE de la SELAFA HUBERT MAZINGUE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0008,

INTIMES

Monsieur [I] [C]

Né le [Date naissance 3] 1958 à [Localité 12]

Demeurant [Adresse 2]

[Localité 10]

S.A. BANQUE POPULAIRE DEVELOPPEMENT, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 378 537 690,

Dont le siège social est situé [Adresse 7]

[Localité 8]

S.A.S. NAXICAP RENDEMENT 2018, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 522 212 182,

Dont le siège social est situé [Adresse 7]

[Localité 8]

S.A. NAXICAP PARTNERS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 437 558 893,

Dont le siège social est situé [Adresse 7]

[Localité 8]

Représentés par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065,

Assistés de Me Cécile LABARBE, avocat au barreau de , toque : P0200, et de Me Marie BOURGON-FARRAN, avocat au barreau de PARIS,

S.A.S. OUEST CROISSANCE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTES sous le numéro 342 048 022,

Dont le siège social est situé [Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477,

Assistée de Me Jean-François PAQUE, avocat au barreau de PARIS, toque : K35,

S.A.S. QUARTUS RESIDENTIEL, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 380 497 701,

Dont le siège social est situé [Adresse 1]

[Localité 9]

Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056,

Assistée de Me Catherine DENOUN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1498,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Mars 2023, en audience publique, devant la Cour, composée de :

Mme Sophie MOLLAT-FABIANI, présidente de chambre,

Mme Isabelle ROHART, conseillère,

Mme Déborah CORICON, conseillère,

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l’audience dans le respect des conditions prévues à l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL

ARRÊT :

– contradictoire,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

– signé par Mme Sophie MOLLAT, présidente de chambre, et par Mme Saoussen HAKIRI, greffière, présente lors de la mise à disposition.

**********

La SAS Ardissa a été créée en 1994 par la société Athos qui la détenait entièrement jusqu’en 2010. Elle exerçait une activité de promotion immobilière et est désormais dénommée Quartus Résidentiel.

La Banque Populaire Développement (ci après BPD) est une société de capital risque, dont les actionnaires sont 18 Banques Populaires régionales, le solde étant détenu par Natixis. Elle investit dans des sociétés, soit directement, soit à travers ses filiales, telles Naxicap Rendement 2018. Ces 2 sociétés sont gérées par Naxicap Partners, filiale de Natixis et M. [C], membre du directoire de Naxicap, est l’un des mandataires sociaux.

En 2010, dans le but de renforcer ses fonds propres, les sociétés Ouest Croissance et BPD sont entrées au capital de la société Ardissa à hauteur de 1,43 % et 3,49 %, la société Athos conservant 95,08 % du capital.

Les sociétés minoritaires ont également souscrit des obligations remboursables et convertibles en actions pouvant donner accès à 38 % du capital.

En 2014, pour faire face à d’importantes difficultés financières, de nouveaux fonds ont été apportés par les minoritaires en compte courant avec la possibilité de détenir 80 % du capital de la société Ardissa après conversion.

Par assemblée générale du 10 avril 2015 sur proposition de la société Athos, ont été votées à l’unanimité une réduction du capital social de 10.167.702 euros par réduction du nominal des actions de 50 euros à 12,96 euros et une augmentation de capital de 13.174.000 euros sans droit préférentiel de souscription souscrite par BPD, Ouest Croissance et Naxicap par compensation de créances au titre des obligations convertibles et des obligations remboursables en actions précédemment émises.

Ce premier coup d’accordéon a donné lieu à une nouvelle répartition du capital social de la société Ardissa ; la société Athos détenant 20 % du capital, la société Ouest Croissance 24,2 % du capital, la société BPD 27,9 % du capital et la société Naxicap 27,9 % du capital.

Par décision du 2 juin 2015, la présidence de la société Ardissa a été confiée à la société Naxicap, remplaçant la société Athos.

Le 22 octobre 2015, la société Athos a adressé à la société Naxicap un courrier recommandé avec accusé de réception dans lequel elle se plaignait de sa mise à l’écart progressive de la conduite des affaires de la société Ardissa et où elle notifiait sa décision de sortir du capital, en précisant le montant attendu pour le prix de sa participation et rappelant la nécessité de remboursement du compte courant d’associés.

Compte tenu des difficultés persistantes, le résultat de la société Ardissa, fin 2015, étant déficitaire de plus de 13 millions d’euros, BPD a consenti des avances en compte courant pour un montant de 27 millions d’euros.

Le 3 mai 2016, compte tenu des pertes de l’exercice et de la perte de plus de la moitié des capitaux propres, l’assemblée générale de la société Ardissa, sous la présidence de la société Naxicap, décidait d’opérer un second coup d’accordéon avec une réduction de capital motivée par des pertes de 15.182.759,60 euros et une augmentation de capital d’un montant de 38.450.739,60 euros, avec droit préférentiel de souscription.

La BPD a souscrit à l’augmentation de capital, par compensation de créances détenues par les actionnaires financiers, ramenant la valeur de l’action à 1,20 euro.

La société Athos, qui avait voté contre ces résolutions, a alors assigné en abus de majorité, et après modification de ses demandes initiales, a demandé à titre principal la nullité des opérations de réduction et augmentation de capital ayant modifié les statuts, la condamnation à 300.000 euros de dommages-intérêts des sociétés BPD, Ouest Croissance et Naxicap Rendement et la condamnation à 100.000 euros de dommages-intérêts de la société Naxicap Partners et de M. [C].

Par jugement du 13 janvier 2022, le tribunal de commerce de Paris a dit l’action de la société Athos recevable et non prescrite, a débouté la société Athos de toutes ses demandes, a débouté la société BPD, la société Naxicap Rendement 2018, la société Naxicap Partners et M. [C] de leurs demandes de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive, a condamné la société Athos à payer à chacun des défendeurs, la BPD, la société Naxicap Rendement 2018, la société Naxicap Partners, M. [C], la société Ouest Croissance et la société Quartus Résidentiel la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, a ordonné l’exécution provisoire et a condamné la société Athos aux dépens.

******

Dans ses conclusions notifiées par RPVA le 10 janvier 2023, la société Athos demande à la cour de :

REFORMER le jugement rendu le 13 janvier 2022 par le tribunal de commerce de Paris en ce qu’il a :

– Débouté la société Athos de toutes ses demandes et notamment ses demandes de nullité de l’assemblée générale, de responsabilité des sociétés BPD, Naxicap Rendement 2018 et Ouest Croissance avec règlement de dommages et intérêts en réparation de préjudices (demande d’expertise si nécessaire), et de responsabilité de la société Naxicap Partners et de M. [C] avec règlement de dommages et intérêts pour le préjudice subi outre ses demandes en réparation des différents préjudices à l’encontre des sociétés BPD, Ouest Croissance, Naxicap Rendement 2018, Naxicap Partners et M. [C],

– Condamné la société Athos à payer à chacun des défendeurs, la société BPD, la société Naxicap Rendement 2018, la société Naxicap Partners, M. [C], la société Ouest Croissance et la société Quartus Résidentiel la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du CPC.

– Ordonné l’exécution provisoire et condamné la société Athos aux dépens.

CONFIRMER le jugement du 13 janvier 2022 en ce qu’il a décidé que l’action de la société Athos n’est pas prescrite et qu’elle est donc recevable.

Sur la nullité de l’assemblée générale et la responsabilité des sociétés BPD, Ouest Croissance et Naxicap Rendement 2018

A titre principal

ANNULER pour fraude les opérations de réduction et d’augmentation de capital adoptées en assemblée générale extraordinaire du 3 mai 2016 de la société Quartus Résidentiel (ex Ardissa), objet des résolutions 5 à 14, réalisées le 24 mai 2016 et celles qui en sont la suite ou la conséquence,

CONDAMNER in solidum les sociétés BPD, Ouest Croissance et Naxicap Rendement 2018, à payer à la société Athos la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

A titre subsidiaire

ANNULER pour abus de majorité et violation de l’intérêt commun des associés les opérations de réduction et d’augmentation de capital adoptées en assemblée générale extraordinaire du 3 mai 2016 de la société Quartus Résidentiel (ex Ardissa), objet des résolutions 5 à 14, réalisées le 24 mai 2016 et celles qui en sont la suite ou la conséquence.

CONDAMNER in solidum les sociétés BPD, Ouest Croissance et Naxicap Rendement 2018, à payer à la société Athos la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

A titre très subsidiaire

En l’absence d’annulation des résolutions 5 à 14 adoptées par l’assemblée générale extraordinaire de la société Quartus Résidentiel (ex Ardissa) le 3 mai 2016,

CONDAMNER in solidum, pour avoir agi en violation des droits de la société Athos, les sociétés BPD, Ouest Croissance, Naxicap Rendement 2018 à payer à la société Athos la somme de 19.700.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

Subsidiairement, si la cour s’estime insuffisamment informée, notamment sur les projets immobiliers de la société Quartus Résidentiel (ex Ardissa) à la date du 3 mai 2016.

DESIGNER tel Expert qu’il plaira à la cour avec pour mission de :

1. Décrire et vérifier les conditions et modalités des opérations de réduction et d’augmentation de capital réalisées au sein de la société Ardissa, nouvellement dénommée Quartus Résidentiel le 3 mai 2016.

2. Évaluer, au regard du portefeuille des projets et programme immobiliers de la société Quartus Résidentiel et de ses filiales le préjudice subi par la société Athos du fait de sa dilution dans le capital d’Ardissa.

CONDAMNER in solidum les sociétés BPD, Ouest Croissance et Naxicap Rendement 2018 à payer à la société Athos la somme de 6 240 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

Sur la responsabilité de la société Naxicap Partners et de M. [C]

JUGER que la société Naxicap Partners, présidente de la société Quartus Résidentiel (ex Ardissa) et M. [C], président de la société Naxicap Partners, ont commis une faute dans l’exercice de leur mandat et un manquement à leur obligation de loyauté vis à vis de la société Athos.

En conséquence,

CONDAMNER in solidum la société Naxicap Partners et M. [C] au paiement d’une somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la société Athos.

En tout état de cause

JUGER que les fautes commises par les sociétés BPD, Ouest Croissance, Naxicap Rendement 2018, Naxicap Partners et M. [C] ont causé un préjudice moral à la société Athos.

En conséquence,

CONDAMNER in solidum les sociétés BPD, Ouest Croissance, Naxicap Rendement 2018, Naxicap Partners et M. [C] à payer à la société Athos la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral.

ORDONNER à titre de dommages et intérêts complémentaires la publication de l’arrêt à intervenir dans trois journaux ou revues françaises au choix de la société Athos, aux frais des sociétés BPD, Ouest Croissance, Naxicap Rendement 2018, Naxicap Partners et M. [C], dans la limite de 5000 euros par insertion, et les condamner à paiement in solidum.

ORDONNER la capitalisation des intérêts en application de l’article 1343-2 du code civil.

DÉBOUTER les sociétés BPD, Ouest Croissance, Naxicap Rendement 2018, Naxicap Partners et M. [C] de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

CONDAMNER in solidum les sociétés BPD, Ouest Croissance, Naxicap Rendement 2018, Naxicap Partners et M. [C] à payer à la société Athos la somme de 100 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, frais qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Athos.

CONDAMNER in solidum les sociétés BPD, Ouest Croissance, Naxicap Rendement 2018, Naxicap Partners et M. [C] aux entiers dépens de première instance et d’appel par application de l’article 696 du code de procédure civile.

******

Dans ses conclusions notifiées par RPVA le 4 janvier 2023, la société Quartus Résidentiel demande à la cour de :

A titre incident

INFIRMER le jugement en ce qu’il a jugé la demande d’annulation des résolutions 5 à 14 prises lors de l’assemblée générale du 3 mai 2016 non prescrites.

JUGER que cette demande est irrecevable et prescrite.

Pour le surplus

CONFIRMER le jugement du 13 janvier 2022 en ce qu’il a débouté la société Athos de l’ensemble de ses moyens, fins et conclusions.

CONDAMNER la société Athos à verser à la société Quartus Résidentiel la somme de 20 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNER la société Athos aux entiers dépens dont le recouvrement sera poursuivi par la SELARL 2H Avocats en la personne de Maître Hardouin, par application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

******

Dans ses conclusions notifiées par RPVA le 14 décembre 2022, la société Ouest Croissance demande à la cour de :

DÉCLARER recevable mais mal fondé l’appel d’Athos.

CONFIRMER le jugement en ce qu’il a débouté Athos de toutes ses demandes.

INFIRMER le jugement du 13 janvier 2022 en ce qu’il n’a pas fait droit à la demande d’indemnisation de Ouest Croissance et en tant que besoin, réparant l’omission de statuer.

CONDAMNER Athos à régler à Ouest Croissance des dommages et intérêts d’un montant de 100 000 euros.

CONFIRMER le jugement en ce qu’il a condamné Athos à régler à Ouest Croissance la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile., ainsi qu’aux entiers dépens.

CONDAMNER Athos à régler à Ouest Croissance la somme complémentaire de 50 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

******

Dans leurs conclusions notifiées le 20 janvier 2023, les sociétés BPD, Naxicap Partners, Naxicap Rendement 2018 et M. [C] demandent à la cour de :

REJETER l’appel principal et ACCUEILLIR l’appel incident,

A titre incident

INFIRMER le jugement du tribunal de commerce de Paris du 13 janvier 2022 en ce qu’il a jugé non prescrite la demande d’annulation des résolutions prises lors de l’assemblée générale du 3 mai 2016 et DÉCLARER cette demande irrecevable comme prescrite.

Pour le surplus

CONFIRMER le jugement du tribunal de commerce de Paris du 13 janvier 2022 en ce qu’il a débouté la société Athos de toutes ses demandes.

INFIRMER le jugement du tribunal de commerce de Paris en ce qu’il a débouté les concluants de leur demande tendant à condamner la société Athos à leur verser la somme de 200 000 euros chacun pour procédure abusive.

Statuant à nouveau et y faisant droit,

CONDAMNER la société Athos à verser aux sociétés BPD, Naxicap Rendement 2018, Naxicap et à M. [C] la somme de 200 000 euros chacun à titre de dommages et intérêts en application de l’article 1240 du code civil, pour procédure abusive.

DÉBOUTER la société Athos de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions.

CONDAMNER la société Athos à verser à chacun des concluants intimés la somme de 50 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNER la société Athos aux entiers dépens.

******

SUR CE,

Sur la prescription de l’action en nullité des délibérations sur le fondement de l’abus de majorité.

La société Quartus Résidentiel soutient que l’action en nullité des délibérations est prescrite, en application de l’article L. 235-9 du code de commerce qui prévoit une prescription de 3 mois. Elle fait valoir que la société Athos ne sollicitait pas initialement de demande de nullité de l’assemblée générale du 3 mai 2016, puisqu’elle sollicitait uniquement l’indemnisation de son préjudice allégué sur le fondement de la responsabilité civile de droit commun. Elle indique que ce n’est que tardivement dans les conclusions n°3 le 10 avril 2019 que la société Athos a sollicité la nullité des opérations de réduction et d’augmentation de capital, soit quelques semaines à peine avant l’expiration du délai de prescription.

Elle conclut que l’action en nullité de l’augmentation de capital était prescrite depuis le 30 septembre 2017, dans le délai de prescription de 3 mois suivant les assemblées du 3 mai 2016 et du 30 juin 2017 l’une délibérant sur l’augmentation de capital et l’autre sur la modification de la dénomination sociale en Quartus Résidentiel et la désignation d’un nouveau Président.

De leur côté, les sociétés BPD, Ouest Croissance et Naxicap font valoir que le délai abrégé de 3 mois prévu par l’article L. 235-9 du code de commerce trouve également à s’appliquer s’agissant d’une action fondée sur un abus de majorité allégué qui vise à faire annuler une délibération portant sur une augmentation de capital. Elles ajoutent que l’arrêt de la Cour de cassation produit par la société Athos indique que l’allégation d’une fraude ne modifie pas la durée de la prescription applicable à une action en nullité d’une délibération sociale.

La société Athos répond que l’action en annulation d’une délibération fondée sur un abus de majorité relève de la prescription triennale prévue par l’article L. 235-9 du code de commerce. Elle indique que l’abus de majorité puise sa source dans le droit commun de la responsabilité et que l’action en nullité se prescrit donc selon les règles de droit commun. Elle souligne qu’elle a pris connaissance des opérations de constitution et d’apports de la société Quartus après l’assemblée générale du 30 juin 2017. Elle prétend que l’usage du mot « réorganisée » dans le rapport de gestion du président d’Ardissa participait à cette dissimulation et précise que son action en nullité est fondée sur les règles du droit commun et non sur les règles propres à l’article L. 225-149-3 du code de commerce.

La cour rappelle que les lois spéciales dérogent aux lois générales et il s’ensuit que les textes spécifiques au droit des sociétés priment sur le droit commun.

L’article L. 235-9 du code de commerce prévoit que l’action en nullité relative à une augmentation de capital se prescrit par trois mois à compter de la date de l’assemblée générale suivant la décision d’augmentation de capital.

En l’espèce, si l’action en nullité de la société Athos est fondée sur l’abus de majorité, c’est à dire sur un abus de droit, il convient néanmoins de considérer que l’action en abus de majorité invoqué dans la situation spéciale d’une augmentation de capital obéit au régime juridique propre aux augmentations de capital et il y a donc lieu de faire application de l’article L. 235-9 du code de commerce qui précise que l’action en nullité d’une décision d’augmentation de capital est prescrite par 3 mois.

Or, l’ assemblée délibérant sur l’augmentation de capital s’est tenue le 3 mai 2016 et ce n’est que par conclusions du 10 avril 2019 que la société Athos a demandé la nullité des délibérations pour abus de majorité. Il s’ensuit, en application de l’article L. 235-9 du code de commerce, qu’au jour de la demande l’action en nullité était prescrite, la prescription étant acquise depuis le 4 août 2016.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu’il a dit non prescrite l’action en nullité fondée sur l’abus de majorité.

Sur la prescription de l’action en nullité fondée sur la fraude

La société Athos fait valoir que que l’opération d’augmentation de capital présente un caractère frauduleux en ce qu’elle a permis aux majoritaires d’apporter leurs actions Ardissa et dans le même temps de n’avoir plus à répondre à la demande d’Athos visant au rachat de sa participation. Elle sollicite la nullité des résolutions adoptées le 3 mai 2016 sur le fondement de la fraude. Elle indique que les associés d’Ardissa n’ont pas été invités à se prononcer sur la dissolution de la société ou sur la poursuite de l’activité, ce qui, selon elle, est anormal. Elle ajoute que le président d’Ardissa s’est opposé au report de l’assemblée générale extraordinaire du 3 mai 2016 en se prévalant d’une fausse urgence et pour de faux motifs. Elle souligne qu’aucune réunion du comité stratégique ne s’était tenue pendant plus de 10 mois. Elle prétend qu’elle n’était pas en mesure de pouvoir en huit jours voter une augmentation de capital nécessitant une mise de fonds de près de 8 millions d’euros.

La société Athos ajoute que la société Ardissa ne risquait pas d’être en état de cessation des paiements à la suite des investissements réalisés en 2015 et que le tribunal a fondé sa décision sur des motifs purement hypothétiques et non documentés. Elle indique qu’il n’y avait aucune urgence financière à mettre en ‘uvre l’opération et que les commissaires aux comptes n’exprimaient pas la moindre réserve sur la continuité de l’exploitation liée à l’endettement financier et, selon elle, l’augmentation de capital aurait pu être remplacée par une lettre de confort ou un engagement de bloquer temporairement le remboursement des comptes courants.

La société Athos fait également valoir que le montant de l’augmentation de capital était exorbitant et cinq fois supérieur au montant prévu par les textes.

Les intimés soulèvent la prescription de l’action fondée sur la fraude en soutenant que l’action en nullité, même fondée sur la fraude se prescrit par 3 mois en application de l’article L. 235-9 du code de commerce.

La société Athos invoque une dissimulation des motifs ayant conduit à adopter des délibérations contraires aux intérêts des minoritaires et soutient que la fraude corrompant tout, elle a pour effet d’écarter les prescriptions abrégées.

Selon l’article L. 235-9 du code de commerce, l’action en nullité relative à une augmentation de capital se prescrit par trois mois à compter de la date de l’assemblée générale suivant la décision d’augmentation de capital.

La fraude allléguée ne peut avoir d’incidence sur le cours de la prescription que dans la mesure où elle aurait empêché les demandeurs d’agir en annulation.

En l’espèce, il ne résulte pas des pièces au débat que la société Athos ait été empêchée d’agir avant la fin de la prescription, ayant eu connaissance de l’augmentation de capital votée le 3 mai 2016, ne contestant pas avoir participé à cette assemblée générale.

Il s’ensuit que la demande est prescrite et le jugement sera infirmé en ce qu’il a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription.

Sur la demande de dommages intérêts fondée sur l’abus de majorité

La société Athos demande l’octroi de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait d’un abus de majorité.

Elle fait valoir que la finalité du coup d’accordéon consistant en la création du groupe Quartus a été dissimulée et que les majoritaires soutiennent vainement qu’il était dans l’intérêt de la société Ardissa de procéder à une augmentation de capital, préalable nécessaire à la création du groupe Quartus.

La société Athos soutient que les majoritaires ont fait main basse sur la quasi totalité de sa participation minoritaire dans la société Ardissa, à son insu et à son détriment, dans l’unique dessein de favoriser leurs intérêts particuliers, leur objectif étant d’apporter leurs titres à la société tête d’un nouveau groupe.

Elle prétend que les majoritaires ont obtenu l’éradication quasi totale de la société Athos du capital de la société Ardissa en utilisant le mécanisme licite de l’article L. 225-248 du code de commerce pour atteindre un but illicite en éludant la règle de l’intérêt commun des associés de l’article 1833 du code civil.

Elle ajoute que le nominal de l’action Ardissa s’élevait à 12,96 euros le 10 avril 2015 alors même que la société Ardissa était endettée, mais disposait d’un portefeuille de projet de plus d’un milliard de dollars.

La société Quartus répond que les pièces versées aux débats démontrent que l’opération critiquée était incontournable et indispensable à sa pérennité. Elle indique que l’exercice 2016 a été positif avec un résultat de 1.937.000 euros soutenu par la cession de la société Edmond Coignet qui a généré un profit exceptionnel de 10 millions d’euros.

Elle souligne que le coup d’accordéon était un impératif juridique et économique. Sur le plan juridique, elle indique que les capitaux propres étaient descendus à 11 % du capital social et étaient inférieurs à la moitié du capital social pour la deuxième fois en un an et que la société était dans une situation difficile nécessitant une contribution de ses actionnaires. Sur le plan économique, la pérennité de la société Quartus était , selon elle, compromise, car elle ne pouvait plus payer les salaires des employés depuis 2014 et devait relancer son activité.

Elle précise que sa survie n’a été assurée entre 2014 et 2016 que par les apports en compte courant des sociétés BPD et Naxicap Rendement. Elle ajoute que le groupe majoritaire a procédé à 9 apports en compte courant entre le 18 juin 2015 et le 15 avril 2016 pour un total de plus de 26 millions d’euros. Selon elle, l’opération a été réalisée de manière transparente et dans des conditions exclusives de toute mise à l’écart d’un groupe d’actionnaires.

La société Quartus mentionne que le calendrier de l’opération a été similaire à celui du premier coup d’accordéon, le droit préférentiel de souscription des minoritaires a été intégralement maintenu, le motif de l’opération a été exposé de manière claire dans le rapport du président, la souscription par compensation de créances à permis à la société Ardissa de renforcer ses fonds propres, ce qui était indispensable pour obtenir des financements bancaires.

La société Quartus souligne qu’il est incompréhensible qu’Athos, qui n’a pas soutenu la société Ardissa en refusant de participer aux apports de trésorerie, prétende aujourd’hui faire annuler cette opération, qui était conforme à l’intérêt social d’Ardissa et même indispensable à sa survie.

De leur côté, les sociétés BPD et Naxicap font valoir que l’analyse des comptes de la société Ardissa confirme que cette opération, imposée par la loi et les statuts, était non seulement conforme mais commandée par l’intérêt social de la société Ardissa. Elles indiquent qu’il ressort de l’expertise privée réalisée par la société Prorevise, une situation d’endettement significativement dégradée s’élevant à 105 millions d’euros en 2015 et une trésorerie disponible de 2,5 millions à fin 2015. Elles soulignent que les conditions de la recapitalisation réalisée en 2015 n’avaient pas permis de redresser la situation de la société Ardissa et qu’il était nécessaire de recapitaliser à un niveau plus drastique afin de rassurer les banques. Selon elles, dès lors que l’opération a conduit à l’apurement du passif et au renforcement de la structure financière de la société, sa conformité à l’intérêt social n’est pas contestable.

Elles indiquent que le deuxième critère de l’abus de majorité, à savoir la rupture d’égalité entre associés n’est pas davantage caractérisé en ce que la réduction de capital a affecté à l’identique l’ensemble des associés, le droit préférentiel de souscription n’a pas été supprimé et l’autre actionnaire minoritaire, la société Ouest Croissance, a voté en faveur de l’opération. Elles soulignent que la différence de situation des actionnaires s’explique par leur participation respective à l’effort actionnarial.

Elles font valoir que leur objectif n’a jamais été de prendre le contrôle d’Ardissa, comme en témoigne le pacte d’associés qui prévoyait une sortie des investisseurs au terme de 5 ans avec une option de rachat au profit d’Athos. Elles ajoutent qu’il n’y a rien de fautif dans l’intégration d’Ardissa dans le groupe Quartus qui a permis de s’adosser à un groupe plus solide ayant une stratégie de diversification des métiers et de rassurer les banques de manière à pouvoir obtenir de nouveaux des financements, mais également que l’intégration d’Ardissa au groupe Quartus n’a jamais été le motif caché de l’opération d’augmentation de capital.

La société Ouest Croissance mentionne qu’elle n’a jamais été actionnaire majoritaire, sa participation ayant été réduite de 24,18 % à 0,94 % par le vote du 3 mai 2016, d’autant que ses créances avaient été converties en capital sur proposition de la société Athos un an auparavant. Elle indique qu’il était nécessaire de voter cette augmentation de capital dans la mesure où la société Ardissa avait perdu environ 33 millions d’euros et devaient reconstituer ses fonds propres. Elle relève que la société Athos n’indique pas en quoi augmenter le capital d’une société en état de faillite et dont la recapitalisation était vitale aurait été contraire à son intérêt social.

La cour considère que l’abus de majorité, consistant en un abus du droit de vote commis par un ou plusieurs associés en assemblée générale, n’est caractérisé que lorsque une décision a été prise contrairement à l’intérêt social, dans l’unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité.

Ces deux éléments doivent exister de façon cumulative pour qu’un abus de majorité puisse être retenu.

En l’espèce, l’appelante soutient que les décisions ont été prises en violation de l’intérêt commun des actionnaires, ce qui est une notion différente de l’intérêt social, seule la violation de l’intérêt social permettant de démontrer l’existence d’un abus de majorité.

Or, il résulte des pièces au débat, et notamment du rapport Prorevise, corroboré par d’autres éléments, que le résultat de la société Ardissa à la clôture de l’exercice 2015 était déficitaire à hauteur de 13,6 millions d’euros, qu’à cette date les capitaux propres de la société d’un montant de 1.993.845 euros étaient devenus inférieurs à la moitié du capital social de 16.732.020 euros, de sorte que, en application de l’article 225-248 du code de commerce, applicable aux Sas, la société Ardissa était tenue, au plus tard à la clôture du 2° exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes était intervenue, de réduire son capital d’un montant au moins égal à celui des pertes qui n’ont pu être imputées sur les réserves, à moins que dans ce délai, les capitaux propres aient été reconstitués à concurrence d’une valeur au moins égale à la moitié du capital social.

La situation financière de la société Ardissa était inquiétante, ce qui s’est confirmé par la suite puisque les pertes ont encore été importantes les années suivantes et il apparait que le montant de l’augmentation de capital n’était pas disproportionné puisque fin 2019, les capitaux propres ont, à nouveau , été inférieurs à la moitié du capital social.

C’est dans ce contexte que les associés ont voté un coup d’accordéon, avec maintien du droit préférentiel de souscription, que le capital social a été réduit de 15,2 millions d’euros par incorporation des pertes et réduction corrélative de la valeur nominale des actions à 1,20 euros. Puis il a été proposé à tous les actionnaires de souscrire à une augmentation de capital pour l’augmenter de 38,5 millions d’euros, mais seul le groupe BPD a souscrit à cette augmentation de capital.

La société Athos considère que ce coup d’accordéon n’ a pas été réalisé conformément à l’intérêt commun des actionnaires, au motif qu’ aucun argent frais n’a été apporté dans la société , la souscription s’étant effectuée par compensation avec les créances que la groupe BPD détenait à l’encontre de la société Ardissa.

Cependant, compte tenu de l’endettement de la société, de la perte de plus de la moitié des capitaux propres, de la possibilité pour tous les actionnaires de souscrire à l’augmentation de capital, avec maintien du droit préférentiel de souscription et sans prime d’émission, c’est en conformité avec l’intérêt social de la société Ardissa que l’assemblée générale, à laquelle la société Athos était présente, a voté une augmentation de capital.

Par ailleurs, le fait que la BPD a souscrit à l’augmentation de capital par compensation avec les avances en compte courant consenties antérieurement n’est pas de nature à remettre en cause le coup d’accordéon, la compensation étant un mode de paiement admissible. En effet, la conversion des dettes de la société Ardissa envers ses assiciés en capital a permis de réduire son endettement, la reconstitution des capitaux propres et de retrouver la confiance des banques.

Il s’ensuit que l’augmentation de capital ainsi réalisée était justifiée par la poursuite de l’intérêt social.

De surcroît, le droit préférentiel de souscription n’ayant pas été supprimé, la société Athos avait la possibilité de souscrire, comme les autres actionnaires, à l’augmentation de capital et les délibérations de l’assemblée générale ayant voté l’augmentation de capital ne s’analysent pas en une rupture de l’égalité entre les actionnaires.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il n’a pas retenu d’abus de majorité.

Sur la demande de dommages-intérêts fondée sur la fraude

La société Athos demande l’octroi de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait d’une fraude commise par les majoritaires.

Elle fait valoir que que l’opération d’augmentation de capital présente un caractère frauduleux en ce qu’elle a permis aux majoritaires d’apporter leurs actions Ardissa et dans le même temps de n’avoir plus à répondre à la demande d’Athos visant au rachat de sa participation. Elle indique que les associés d’Ardissa n’ont pas été invités à se prononcer sur la dissolution de la société ou sur la poursuite de l’activité. Elle ajoute que le président d’Ardissa s’est opposé au report de l’assemblée générale extraordinaire du 3 mai 2016 en se prévalant d’une fausse urgence et pour de faux motifs. Elle soutient également que c’est au mépris des ses droits qu’une réunion du comité stratégique s’est tenue de manière concomitante avec l’assemblée générale ayant statué sur le coup d’accordéon, alors qu’aucune réunion du comité stratégique ne s’était tenue pendant plus de 10 mois. Elle prétend qu’elle n’était pas en mesure de prévoir en huit jours de souscrire à une augmentation de capital nécessitant une mise de fonds de près de 8 millions d’euros.

La société Athos prétend que la société Ardissa ne risquait pas d’être en état de cessation des paiements à la suite des investissements réalisés en 2015 et que le tribunal a fondé sa décision sur des motifs purement hypothétiques et non documentés. Elle indique qu’il n’y avait aucune urgence financière à mettre en ‘uvre l’opération et que les commissaires aux comptes n’exprimaient pas la moindre réserve sur la continuité de l’exploitation liée à l’endettement financier et fait valoir que l’augmentation de capital aurait pu être remplacée par une lettre de confort ou un engagement de bloquer temporairement le remboursement des comptes courants.

La société Athos fait également valoir que le montant de l’augmentation de capital était exorbitant et cinq fois supérieur au montant prévu par les textes.

Les sociétés BPD et Naxicap font valoir que la société Athos ne démontrent pas le caractère frauduleux de l’opération, que les indices démontrant l’intention frauduleuse font défaut et qu’aucune intention d’évincer les minoritaires ne peut être constatée. Ainsi, elles rappellent que l’augmentation de capital a été réalisée sans prime d’émission, le droit préférentiel de souscription a été entièrement maintenu, le délai de souscription de vingt jours était bien supérieur au délai légal de cinq jours et l’opération a été décidée par l’assemblée générale après un débat au cours duquel la société Athos a pu exprimer son désaccord.

Elles soulignent que le grief tiré de l’absence de vote sur la dissolution anticipée ou la poursuite d’activité est un reproche purement formel qui ne permet pas de caractériser une quelconque fraude, les associés ayant voté à la majorité des deux tiers les deux opérations successives de réduction et d’augmentation du capital, optant ainsi pour la continuation de la société. Elles relèvent par ailleurs que la société Athos s’était bien gardée de demander la dissolution de la société Ardissa auparavant.

Elles font valoir que la société Athos, lorsqu’elle était président de la société Ardissa en 2015, n’avait pas laissé s’écouler un délai de quinze jours entre l’assemblée d’approbation des comptes et l’assemblée délibérant sur l’opération d’augmentation de capital. Elles ajoutent qu’aucune résolution de dissolution n’avait été proposée au vote à l’époque.

Elles soulignent que la réduction de capital a été réalisée en respectant l’égalité des actionnaires et qu’elle a affecté à l’identique l’ensemble des associés à proportion de leur participation dans le capital social. Elles précisent que la société Athos a bénéficié d’un droit d’information préalable aux assemblées générales et d’un droit d’information permanent.

S’agissant de la souscription par compensation de créances, elles soulignent que rien n’empêchait la société Athos de souscrire à l’augmentation de capital par compensation avec les 600 000 euros de son compte courant, que cette technique avait été utilisée lors du premier coup d’accordéon en 2015 sous la présidence de la société Athos et qu’elle était contractuellement prévue entre les parties dans la convention de compte courant.

Enfin, elles indiquent que le coup d’accordéon n’est pas frauduleux car justifié par l’intérêt social. Selon elles, la situation économique et financière de la société Ardissa rendait la reconstitution des fonds propres indispensable.

La société Ouest Croissance reprend ses arguments développés au titre de l’abus de majorité et souligne que la société Athos n’indique pas en quoi augmenter le capital de la société Ardissa, qui était en état de faillite et devait reconstituer ses capitaux propres, aurait été contraire à l’intérêt social. Elle fait donc valoir qu’aucune fraude n’est caractérisée.

Elle ajoute que la reconstitution des fonds propres était en toute hypothèse une obligation résultant de l’article L. 225-248 du code de commerce et que la société Ardissa aurait disparu au regard de sa situation financière et comptable sans décision d’augmentation de capital de l’assemblée générale.

La cour considère que la fraude consiste à se soustraire à une règle obligatoire par l’emploi de moyens licites.

En l’espèce, ainsi qu’il a été précédemment développé, aucune atteinte à l’intérêt social n’est démontré et au contraire, la reconstitution des capitaux propres était indispensable à la survie de la société. Par ailleurs, le fait que le comité stratégique se soit pas réuni juste avant l’assemblée générale, alors qu’aucune disposition légale ou contractuelle n’impose une telle réunion, est insuffisant à caractériser une fraude, d’autant que la société Athos n’était plus, à cette date, membre du comité stratégique, qu’elle a été régulièrement convoquée par courrier du 25 avril 2016 à l’assemblée générale du 3 mai 2016 en vue de l’augmentation de capital et qu’elle a participé au vote.

Il sera également souligné que l’assemblée générale avait décidé que le délai pour souscrire à l’augmentation de capital était de 20 jours, ce délai étant supérieur au délai légal de 5 jours, ce qui permettait à la société Athos, qui avait été régulièrement convoquée à l’assemblée générale , avait reçu tous les documents joints, dont le rapport de gestion et le motif de l’opération proposée au vote, la possibilité de souscrire à l’augmentation de capital, éventuellement par compensation de créance, d’opter pour la souscription à l’augmentation de capital, ce qu’elle a choisi de ne pas faire.

Il s’ensuit que les droits de la société Athos et notamment son droit à l’information et son droit de souscrire à l’augmentation de capital ont été respectés et qu’aucune fraude n’est caractérisée.

C’est en vain que la société Athos reproche aux dirigeants de la société Ardissa, devenue Quartus, de ne pas avoir convoqué une assemblée générale pour statuer sur une éventuelle dissolution de la société en raison de la perte de plus de la moitié des capitaux propres, puisque par le coup d’accordéon projeté, les dirigeants régularisaient la situation en vue de reconstituer les capitaux propres.

Compte tenu de l’absence de fraude, le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société Athos de ses demandes de dommages-intérêts.

Sur la demande de dommages-intérêts à l’encontre des dirigeants

La société Athos demande la condamnation solidaire de la société Naxicap et de M. [C], président de la société Naxicap Partners, elle-même président de la société Ardissa, au paiement d’une somme de 100.000 euros de dommages-intérêts en soutenant qu’ils ont agi au mépris de la loi, des statuts et du pacte d’associés en n’appliquant pas les règles relatives au comité stratégique.

Selon elle, M. [C] s’est rangé du coté des associés majoritaires rompant l’égalité entre les associés majoritaires et minoritaires. Elle reproche à M. [C] d’avoir eu connaissance avant le 3 mai 2016 des décisions portant création de la société Quartus et du projet d’apport des titres de BPN en vue de la constitution de cette société et de ne l’avoir jamais informé. Elle prétend que son expropriation est liée aux manquements du président qui a manqué à son obligation de loyauté.

La société Naxicap et M. [C] répondent que la société Athos ne démontre l’existence d’aucun préjudice ni lien de causalité avec les prétendus manquements dont elle fait état.

Ils précisent que le comité stratégique s’est réuni le 3 mai 2016 à 11 heures, avant l’assemblée générale, que le coup d’accordéon litigieux a été abordé par le comité stratégique après la clôture de l’exercice 2015 et que la société Athos n’aurait pu être mise au courant avant.

La cour relève que la société Athos ne précise pas le fondement textuel de cette demande et semble reprocher au dirigeant un manquement au devoir de loyauté et une atteinte à l’intérêt commun des associés.

Cependant, ainsi qu’il a été dévoloppé précédemment, le dirigeant, même s’il a refusé de reporter la date de l’assemblée générale, a rempli son devoir d’information, a convoqué le comité stratégique dont le représentant d’Athos n’était plus membre, et a pris les dispositions nécessaires pour faire face à la perte de plus de la moitié des capitaux propres.

Aucune déloyauté et aucune faute n’étant caractérisée, le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société Athos de cette demande.

Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral et de publication de la décision

La société Athos reproche aux autres actionnaires, les sociétés BPD, Ouest Croissance, NR 2018 et Naxicap Partners, ainsi qu’à M. [C] d’avoir participé à sa «  quasi éviction » du capital d’Ardissa, ce qui selon elle, porte atteinte à son image.

Cependant, la cour n’ayant retenu aucun abus de majorité et aucune fraude, la société Athos sera déboutée de ses demandes et le jugement confirmé sur ce point.

Sur les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive

Les intimés sollicitent la condamnation de la société Athos à des dommages-intérêts pour procédure abusive.

Cependant, elles ne démontrent pas l’existence de légéreté blamâble ou de volonté de nuire de la société Athos qui a pu se méprendre sur l’étendue de ses droits.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il les a déboutés de leurs demandes de dommages-intérêts.

Sur les dépens et frais hors dépens.

La société Athos sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’à payer en application de l’article 700 du code de procédure civile, une somme de 3.000 euros à la société Ouest Croissance, une somme de 3.000 euros à la société Quartus Residentiel et une somme de 10.000 euros aux sociétés BPD, Naxicap Partners, Naxicap Rendement 2018 et à M. [C], ensemble , pour les frais hors dépens exposés tant en première instance qu’ en appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement uniquement en ce qu’il a dit non prescrite les actions en nullité,

Statuant à nouveau,

Déclare prescrites les actions en nullité sur le fondement de l’abus de majorité et sur le fondement de la fraude les opérations de réduction et d’augmentation de capital adoptées en assemblée générale extraordinaire du 3 mai 2016 de la société Quartus Résidentiel (ex Ardissa), objet des résolutions 5 à 14, réalisées le 24 mai 2016 et celles qui en sont la suite ou la conséquence,

Confirme le jugement en ce qu’il a débouté la société Athos de l’intégralité de ses demandes,

Confirme le jugement en ce qu’il a débouté les sociétés BPD, Naxicap Partners, Naxicap Rendement 2018 et M. [C] de leurs demandes de dommages-intérêts,

Condamne la société Athos aux dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’à payer en application de l’article 700 du code de procédure civile, une somme de 3.000 euros à la société Ouest Croissance, une somme de 3.000 euros à la société Quartus Residentiel et une somme de 10.000 euros aux sociétés BPD, Naxicap Partners, Naxicap Rendement 2018 et à M. [C], ensemble, pour les frais hors dépens exposés tant en première instance qu’ en appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

 


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