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nsionnés par rapport à sa conservation.
Dans la mesure où la seule rentabilité de la société ne suffit pas à consolider les fonds propres, les associés ont été contraints de procéder à une augmentation de capital par des apports d’actifs, afin de respecter les normes de notre organe de tutelle (ANIE).
Par conséquent, la trésorerie, qui connaissait habituellement des fluctuations périodiques, diminue désormais continuellement, de manière inquiétante et dangereuse. Elle est ainsi passée de 422 KE en décembre 2015 à 205 KE (soit la moitié moins) en décembre 2016.
De
* * *
AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE
N° RG 19/07830 – N° Portalis DBVX-V-B7D-MWFE
[P]
C/
Société AESOPE GESTION DE PORTEFEUILLES
APPEL D’UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de LYON
du 24 Octobre 2019
RG : F 17/02748
COUR D’APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 08 MARS 2023
APPELANT :
[I] [P]
né le 14 Février 1961 à [Localité 4]
[Adresse 5]
[Localité 3]
représenté par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON
et ayant pour avocat plaidant Me Pascale REVEL de la SCP REVEL MAHUSSIER & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substituée par Me Alexis PERRIN, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
Société AESOPE GESTION DE PORTEFEUILLES
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Gérald POCHON de la SELARL CABINET LEX-PART AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE substitué par Me Olivier DUBOST, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 10 Janvier 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Joëlle DOAT, Présidente
Nathalie ROCCI, Conseiller
Anne BRUNNER, Conseiller
Assistés pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 08 Mars 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Joëlle DOAT, Présidente, et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Suivant contrat à durée indéterminée du 1er mars 2001, la SAS AESOPE Gestion de portefeuilles a embauché M. [I] [P] en qualité de directeur administratif, statut cadre.
Par lettre remise en mains propres le 13 juin 2017, la SAS AESOPE Gestion de Portefeuilles a convoqué M. [P] à un entretien préalable en vue d’un licenciement économique, prévu pour le 21 juin 2017.
Par courrier remis le 21 juin 2017, la SAS AESOPE Gestion de Portefeuilles a informé le salarié sur le motif économique du licenciement.
M. [P] a accepté le contrat de sécurisation professionnelle le 4 juillet 2017.
Par lettre du 13 juillet 2017, la SAS AESOPE Gestion de Portefeuilles a confirmé à M. [P] la rupture du contrat de travail.
Le 18 septembre 2017, M. [P] a saisi le conseil de prud’hommes de LYON de demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, pour licenciement frauduleux, subsidiairement, pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et très subsidiairement, pour non-respect de l’ordre des licenciements.
Le 15 novembre 2018, le conseil de prud’hommes s’est déclaré en partage de voix.
Par jugement du 24 octobre 2019, le conseil de prud’hommes, présidé par le juge départiteur a condamné la SAS AESOPE Gestion de Portefeuilles à payer à M. [P] la somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, l’a débouté du surplus de ses demandes, a condamné la SAS AESOPE Gestion de Portefeuilles à payer à M. [P] la somme de 1 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Le 15 novembre 2019, M. [P] a fait appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières écritures, notifiées le 14 octobre 2020, M. [P] demande à la cour de :
A titre principal,
1 / Sur l’exécution
CONFIRMER le jugement en ce qu’il a jugé déloyale l’exécution du contrat de travail par la modification unilatérale de celui-ci et l’infirmer quant au montant des dommages-intérêts
CONDAMNER la société AESOPE à lui payer la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts
2/ Sur la rupture
INFIRMER le jugement rendu et juger mal fondé le licenciement intervenu et à titre subsidiaire, JUGER qu’il a subi une perte injustifiée de son emploi par violation des critères d’ordre de licenciement
En conséquence,
CONDAMNER la société AESOPE GESTION DE PORTEFELIILLE à lui payer la somme de 200 000 euros nets a titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et subsidiairement pour perte injustifiée de l’emploi
3/ Sur l’article 700 du code de procédure civile
CONFIRMER le jugement en ce qu’il lui a alloué la somme de 1 600 euros
CONDAMNER la société AESOPE GESTION DE PORTEFEUILLES à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile
CONDAMNER la SAS AESOPE GESTION DE PORTEFEUILLES aux dépens
A titre subsidiaire,
– CONFIRMER le jugement dans son intégralité
– CONDAMNER la société AESOPE à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile
– CONDAMNER la société AESOPE GESTION DE PORTEFEUILLE aux entiers dépens de l’instance.
Par conclusions notifiées le 29 novembre 2022, la SAS AESOPE GESTION DE PORTEFEUILLES demande à la cour de :
CONFIRMER le jugement en ce qu’il a débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
CONFIRMER le jugement en ce qu’il a débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêt pour non-respect des critères d’ordre,
INFIRMER le jugement pour le surplus,
DIRE que M. [P] n’est pas fondé à se prévaloir de la moindre modification de son contrat de travail,
LE DÉBOUTER de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
CONDAMNER M. [P] à rembourser la somme de 16 600,00 euros versée dans le cadre de l’exécution provisoire,
Accueillant sa demande reconventionnelle,
CONDAMNER M. [P] à lui verser la somme de 3 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 décembre 2022.
Sur l’exécution déloyale du contrat de travail :
M. [P] relate qu’il s’est vu progressivement retirer ses responsabilités qui ont été transférées au fils du président, M. [A] [D].
Il compare les fonctions qui lui étaient confiées jusqu’à l’arrivée de M. [A] [D] avec celles confiées postérieurement et souligne que lui ont été retirées les dossiers du personnel, la centralisation des sujets et la rédaction des PV de CODIR, les relations avec le site internet, la gestion des relations avec la mutuelle et les relations avec le Responsable de la conformité et du contrôle interne (RCCI) par délégation.
Il souligne que le rapprochement entre ses fiches de postes 2012 et 2016 confirme la perte de responsabilité.
Il conteste que la fiche de poste 2016 ait été établie, de manière synthétique, pour les besoins du dossier d’agrément auprès de l’AMF.
Il fait valoir qu’il n’a pas été averti du changement de mutuelle, alors qu’il était en charge des relations avec cet organisme depuis 2001.
Il ajoute qu’il a cessé d’être l’interlocuteur privilégié du RCCI, ce que met en évidence la comparaison des destinataires des mails entre 2013 et 2017.
Estimant que la société AESOPE Gestion de portefeuilles échoue à démontrer l’absence de retrait de responsabilité, il demande la confirmation du jugement sauf sur le montant des dommages-intérêts. Il considère que le préjudice doit être apprécié au regard de la durée d’exercice de ses responsabilités et de l’importance du retrait de celles-ci.
La SAS AESOPE Gestion des Portefeuilles objecte :
que M. [P] ne s’est jamais plaint d’une perte de ses responsabilités ;
qu’au contraire, lors de son entretien professionnel en 2015, il signalait que la charge de travail administrative était devenue importante
que M. [A] [D] est titulaire d’un DESS en gestion de patrimoine et avait occupé des fonctions d’ingénieur financier auprès de la société HSBC avant son embauche ;
qu’il avait des compétences pour occuper n’importe quelle fonction en lien avec la gestion du patrimoine ;
qu’en 2016, il a été décidé que M. [A] [D] superviserait seul l’organisation administrative et ce pour éviter les divergences entre les trois dirigeants ;
que M. [P] n’a jamais été en charge de la gestion du personnel mais a réalisé, avant et après l’arrivée de M. [D], les entretiens professionnels des membres de son service ;
que M. [P] a toujours participé aux réunions du CODIR et que le retrait de la rédaction des compte rendus n’est pas une diminution des responsabilités, s’agissant d’une tâche de secrétariat
que le changement de prestataire pour la délégation de RCCI n’a pas fait perdre de responsabilités à M. [P], qui est demeuré l’interlocuteur habituel.
***
En vertu de l’article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
Selon le contrat de travail du 1er mars 2001, les fonctions de M. [P] sont :
L’organisation et la réalisation de la gestion administrative de la société dans le respect des directives et des réglementations imposées par les autorités de tutelle et la COB, le contrôle de toutes les opérations boursières, par rapport aux procédures mises en place dans la société et de leur conformité avec les directives et réglementation édictées par la COB, le suivi des opérations patrimoniales réalisées pour le compte des clients, les relations avec les différents intervenants extérieurs : banques, notaires, compagnies d’assurance-vie.
Le bilan individuel 2007/2008 rappelle la mission individuelle de M. [P] «assurer l’ensemble du suivi administratif et du contrôle des opérations financières de la société, tant pour la clientèle que pour la SAS AESOPE gestion de portefeuille ; la dimension contrôle revêt dans cette activité une importance primordiale en raison des exigences des autorités de tutelle».
L’entretien d’appréciation pour l’année 2014 mentionne que la mission du salarié est la direction administrative de la société AESOPE et de sa filiale tant au niveau des opérations financières que de la clientèle. Il est précisé que la société AESOPE Analyse et solutions patrimoniales est devenus filiale de la SAS au 31/12/2014.
L’appréciation du responsable hiérarchique ([W] [D]) est ainsi libellée «[I] est un véritable pilier de l’histoire d’AESOPE et de son développement. Son implication se traduit dans tous les aspects de la gestion administrative, réglementaire et financière de la société. Ses qualités lui permettent de prendre les décisions stratégiques qui lui incombent en s’appuyant sur la confiance des dirigeants.».
M. [P] verse aux débats :
un mail du 12 mars 2015 dont l’objet « Classeur bilan entretien individuel et personnel » et le contenu « [A]’Je te remets le classeur avec les originaux des appréciations du personnel. Une copie est scannée dans le répertoire RH pour chaque salarié.[‘] » établit qu’il était chargé de faire les évaluations d’au moins 5 salariés. (dont les prénoms sont [G], [U] [L], [M] et [X]) ;
un document « organisation 2016 AESOPE » comportant la répartition des rôles de chacun, le rôle de [I] étant « direction administrative, responsable hiérarchique de [S] et [K] et suivi de la conformité avec Agama et [B] [H] » tandis que celui d'[A] est la gestion opérationnelle des pôles gestion, patrimoine et administratif, gestion des nouveaux clients issus de rachats de cabinet et/ou recommandés par les apporteurs en binôme avec [U] et [L], communication extérieure, gestion des projets de développement, gestion des ressources humaines
Il ressort de ces éléments que M. [P] a perdu des responsabilités (communication extérieure, gestion réglementaire et financière) en raison de leur transfert à M. [A] [D].
Le jugement sera confirmé par adoption de motif en ce qu’il a dit que la société AESOPE a manqué à son obligation d’exécuter loyalement le contrat de travail.
Le conseil de prud’hommes a fait une exacte appréciation du préjudice subi par M. [P] eu égard à la durée et l’ampleur des responsabilités qui lui ont été ôtées.
Sur le licenciement :
Sur le licenciement verbal :
M. [P] fait valoir que, le 12 juin 2017, lors d’une réunion, son équipe a été avisée de son licenciement alors même que lui-même n’en était pas informé ; qu’il a reçu des mails de soutien de ses collègues, ce dont il résulte que l’annonce s’est faite antérieurement au 12 juin 2017. Il soutient que l’annonce de la suppression du poste de DAF équivaut à l’annonce la suppression de son poste.
L’employeur réplique que lors de la réunion du 12 juin 2017, seule la décision de supprimer le poste de Directeur administratif et la mise en place d’une procédure pour licenciement économique ont été annoncées ; qu’il n’a pas été notifié verbalement de licenciement à M. [P].
***
Il incombe au salarié qui invoque un licenciement verbal d’en rapporter la preuve.
M. [P] produit un mail de M. [A] [D] en date du 1er juin 2017, ayant pour objet « réunion bilan 2016 et organisation » et pour contenu « Merci de noter dans vos agenda la réunion bilan 2016 et organisation le lundi 12 juin à 15H30 » et les mails de ses collègues, postérieurs à la réunion, de soutien, certains du jour même (Mme [Z]) d’autres quelques jours après. Tous ces collègues se disent choqués d’avoir appris le licenciement de M. [P] lors de cette réunion ou son départ.
Ces manifestations de sympathie n’établissent pas que l’employeur a notifié à M. [P] son licenciement verbal.
Le jugement sera confirmé.
Sur le motif économique
M. [P] fait valoir que, malgré la baisse du chiffre d’affaire entre 2015 et 2017, les deux associés fondateurs ont prélevé sur leur compte courant d’associé ; que le choix de recruter M. [A] [D] en tant que deuxième directeur général a alourdi la structure, d’autant que [W] [D], qui devait prendre sa retraite, est finalement resté.
Il ajoute que toute entités confondues, AESOPE affichait au 17 juillet 2017, une trésorerie de 762 000 euros et que la perte d’un client en décembre 2017 est inopérante à justifier un licenciement prononcé au visa de motifs relatifs aux années 2015 et 2016.
Il soutient qu’il a été licencié au profit du fils du président de la structure ; que son poste n’a pas disparu mais a été transféré à M. [A] [D], sous couvert du qualificatif de directeur général.
Il souligne :
que les recherches de reclassement ont débuté le jour de la convocation à l’entretien préalable
que la société ne peut tout à la fois démarrer sa recherche de reclassement et considérer cette recherche vouée à l’échec en menant la procédure de licenciement
Que Mme [Z] gérante de portefeuille a quitté la société le 13 juillet 2017, dans le cadre d’une rupture conventionnelle et a été remplacée par M. [R] embauché le 7 août 2017, or ce poste ne lui a pas été proposé ;
L’employeur répond
que le chiffre d’affaire de la société est passé de 2 244 734 euros au 31 décembre 2015 à 1 897 452 euros au 31 décembre 2016 ;
que le résultat, bénéficiaire en 2015, était déficitaire fin 2016 ;
qu’également, la trésorerie s’est dégradée, diminuant de moitié ;
que, dans le même temps le chiffre d’affaire de la société AESOPE analyse et solutions patrimoniale a progressé tandis que celui de la société AESOPE Conseils a diminué
que les trois sociétés réunies ont connu une chute du chiffre d’affaire, des résultats et la trésorerie
que le poste de directeur administratif a bien été supprimé
que M. [P] n’avait pas les compétences pour que lui soit proposé le poste de gestionnaire de patrimoine de Mme [Z] ;
qu’aucune embauche n’ayant été réalisée au sein des sociétés AESOPE Conseil et AESOPE Analyses et Solution Patrimoniales, aucun manquement à son obligation de reclassement ne peut lui être reproché ;
qu’elle est allée au-delà de ses obligations en terme de recherche de reclassement puisqu’elle a interrogé des sociétés travaillant dans le même domaine d’activité.
***
Aux termes de l’article L1233-3 du code du travail dans sa version postérieure à l’entrée en vigueur de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, « constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :
1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.
Une baisse significative des commandes ou du chiffre d’affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l’année précédente, au moins égale à :
a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;
b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;
c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;
d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;
2° A des mutations technologiques ;
3° A une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;
4° A la cessation d’activité de l’entreprise.
La matérialité de la suppression, de la transformation d’emploi ou de la modification d’un élément essentiel du contrat de travail s’apprécie au niveau de l’entreprise.
Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail à l’exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants, résultant de l’une des causes énoncées au présent article. »
Le motif économique est ainsi libellé :
« Comme vous le savez, notre société est spécialisée dans la gestion de portefeuilles et apporte un service complet à ses clients (particuliers, institutionnels ou conseillers en gestion de patrimoine) dans le but de proposer une stratégie d’investissement adaptée à leurs besoins.
Or, les derniers résultats de notre société ont fait apparaître des déséquilibres de plus en plus prononcés, et une fragilité économique certaine avant donné lieu à une alerte de notre expert-comptable.
Voici les chiffres de nos trois derniers exercices :
2014
2015
2016
Chiffre d’affaires
2
194
4318
2
244
734
1 897
452
Marge brute de production
1
525
5494
1
538
036
1 294
436
Salaires &charges sociales du
personnel
886
776
950
280
880
763
Excédent brut d’exploitation
228
271
155
683
– 35
661
Résultat d’exploitation
203
973
116
741
– 73
771
Résultat net
55
331
102
689
– 55
234
Dont
commission
exceptionnelle
sur
performance
128
575
Ainsi, nos résultats d’exploitation se dégradent depuis 2014 et sont à ce jour dans une situation de grande fragilité.
Comme vous le savez, nous avons un chiffre d’affaires basé sur une activité récurrente (la conservation) et un chiffre d’affaires fluctuant dépendant des conditions de marchés (commissions de mouvement, etc).
Or, nous avons subi une grave diminution de notre chiffre d’affaires total sur l’exercice 2016, avec :
– une baisse du CA récurrent, suite à la perte de 10 millions d’actifs sous gestion (- 150 KE).
– une baisse du CA variable, et notamment des commissions de mouvement (-150 KE)
Ces dégradations, pour le moins significatives, caractérisent l’état de nos difficultés.
Aujourd’hui, la société ne maîtrise plus les amplitudes de ses revenus, qui sont liés à la volatilité des marchés financiers.
Le résultat d’exploitation ne permet pas de conforter les fonds propres et la trésorerie de la société pour faire face à ces fluctuations de revenus.
Par ailleurs, notre seuil de rentabilité peine à être atteint, car les frais de fonctionnement de la société sont surdimensionnés par rapport à sa conservation.
Dans la mesure où la seule rentabilité de la société ne suffit pas à consolider les fonds propres, les associés ont été contraints de procéder à une augmentation de capital par des apports d’actifs, afin de respecter les normes de notre organe de tutelle (ANIE).
Par conséquent, la trésorerie, qui connaissait habituellement des fluctuations périodiques, diminue désormais continuellement, de manière inquiétante et dangereuse. Elle est ainsi passée de 422 KE en décembre 2015 à 205 KE (soit la moitié moins) en décembre 2016.
De plus, l’évolution réglementaire que vous connaissez nous conduit à une plus grande prudence puisque nous risquons de ne plus pouvoir toucher certaines commissions récurrentes, avec en parallèle la nécessité de s’adapter à ces évolutions par de nouveaux investissements et le recours à de nouvelles prestations externes. La situation prévisionnelle n’est pas encourageante puisqu’aucune amélioration n’est à prévoir pour l’avenir.
Il apparaît donc indispensable de nous restructurer pendant que nous disposons encore des moyens nécessaires pour résister aux contraintes économiques et réglementaires de notre activité, et par là même assurer notre pérennité pour protéger les patrimoines de nos clients, et maintenir la majorité des emplois de notre société.
Ainsi, nous nous devons de réagir rapidement dans le but d’anticiper de plus importantes difficultés (qui sont prévisibles, et qui s’annoncent à terme inévitables) et assurer la sauvegarde de notre compétitivité.
La situation telle que décrite précédemment nous contraint à prendre des mesures de nature à rationaliser nos coûts et charges, notamment en matière de personnel.
Or, nous remarquons que votre emploi est aujourd’hui disproportionné par rapport aux besoins de notre activité.
Nous sommes donc contraints de procéder à la suppression du seul poste de Directeur Administratif tel qu’il se trouve dimensionné et tel que vous l’exerciez jusqu’à présent.
Vos missions seront en effet, à titre principal, reprises par les dirigeants de la société.
Etant le seul salarié affecté sur cette catégorie d’emploi, et n’ayant pas à appliquer les critères légaux habituellement retenus pour déterminer l’ordre des licenciements, nous sommes amenés à envisager votre licenciement pour motif économique.
Comme vous l’imaginez, il n’a pas été possible de trouver des mesures de reclassement en interne, du fait de la taille de notre structure et de l’absence d’emploi disponible.
Nous avons également tenté des recherches de reclassement en externe, auprès des sociétés suivantes :
· AESOPE ANALYSES ET SOLUTIONS PATRIMONIALES
· AESOPE CONSEILS
· BANQUE MARTIN MAUREL
· SPPI FINANCE
· AXIOM Alternative Investments »
Les bilans et comptes de résultats au 31 décembre 2015 et au 31 décembre 2016 confirment la baisse du chiffre d’affaire entre 2015 et 2016, ainsi que celle du résultat d’exploitation et de l’excédent brut d’exploitation. Ainsi la réalité des difficultés économiques de la société AESOPE GESTION DE PORTEFEUILLES est établie.
Une partie des responsabilités de M. [P] a été confiée à M. [A] [D].
Il apparaît, sur le registre du personnel, que M. [W] [D] (président) a quitté l’entreprise au 30 juin 2017. Il est justifié de son départ à la retraite au 1er juillet 2017.
Il demeure actionnaire mais n’est plus salarié.
M. [A] [D] figure sur le registre du personnel comme étant directeur général.
Au 2 octobre 2017, il ne figurait plus sur le registre du personnel de directeur administratif. Le poste a bien été supprimé.
Même s’il est justifié par une cause économique avérée, le licenciement d’un salarié ne peut être légitimement prononcé que si l’employeur a préalablement satisfait à son obligation générale de reclassement. En l’état des dispositions applicables à la présente espèce, le périmètre de cette obligation s’étend, non seulement à l’entreprise mais aussi à toutes les sociétés du groupe auquel elle appartient, même situées à l’étranger dont l’activité, l’organisation et le lieu d’exploitation permettent d’effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, sous réserve, s’agissant des sociétés situées à l’étranger, que la législation locale ne s’oppose pas à l’engagement de salariés étrangers.
L’obligation de reclassement étant individuelle à chaque salarié, l’employeur est tenu de rechercher, pour chacun des salariés dont le licenciement est envisagé, en considération de sa situation particulière, avant la notification du licenciement, toutes les possibilités de reclassement envisageables au sein de l’entreprise ou du périmètre de reclassement, et il lui appartient de justifier, par des éléments objectifs, des recherches qu’il a effectuées en ce sens et de l’impossibilité dans laquelle il s’est trouvé de procéder au reclassement du salarié dans un emploi équivalent, de même catégorie, voire de catégorie inférieure.
La recherche de reclassement doit être antérieure au licenciement, lorsque cette mesure est envisagée, et elle peut être concomitante à la procédure de licenciement.
La SAS AESOPE GESTION DE PORTFEUILLES justifie des recherches de reclassement qu’elle a effectuées par des courriers datés du 13 juin 2017 et d’une réponse négative qu’elle a reçue de la banque Martin Maurel.
Un salarié a été embauché suite au départ, le 13 juillet 2017, de Mme [Z]. Il s’agit de M. [R], dont le curriculum vitae fait apparaître une formation en finance et technique financière et le parcours professionnel une expérience de gérant de portefeuille, poste libéré par Mme [Z], et pour lequel M. [P] n’avait pas les compétences.
L’employeur a respecté son obligation de reclassement.
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a retenu que le licenciement de M. [P] reposait sur une cause réelle et sérieuse.
Sur les critères d’ordre
M. [P] fait valoir que la société le classait dans la catégorie des responsables de pôle au même titre que M. [G] [E] et Mme [Y], laquelle figure sur l’organigramme 2016.
L’employeur réplique que Mme [Y] est salariée de la société AESOPE Analyses et Solutions Patrimoniales ; que ces deux salariés occupent des fonctions sans rapport avec le poste de Directeur administratif
***
Aux termes de l’article L 1233-5 du code du travail dans sa rédaction applicable à l’espèce,
«Lorsque l’employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l’absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut des délégués du personnel.
Ces critères prennent notamment en compte :
1° Les charges de famille, en particulier celle des parents isolés ;
2° L’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise ;
3° La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celles des personnes handicapées ou des salariés âgés ;
4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie .»
En application de l’article L1233-7 du code du travail, lorsque l’employeur procède à un licenciement individuel pour motif économique, il prend en compte dans le choix du salarié concerné les critères prévus à l’article L1233-5.
M. [P] verse aux débats un document de plusieurs pages intitulé «organisation 2016 AESOPE» et dont chaque bas de page mentionne «AESOPE Gestion de portefeuille Ingénierie Patrimoniale».
A la rubrique «rôle des responsables de pôle», il est indiqué, pour [G] : direction technique de la gestion, pour [I] : direction administrative et pour [U] Direction Patrimoniale.
Il ne s’agit pas de l’organigramme de la société AESOPE GESTION DE PATRIMOINE puisqu’il mêle des salariés de cette société avec ceux de la société AESOPE ANLYSES ET SOLUTONS PATRIMONIALES.
M. [G] [E] est directeur de la gestion au sein de la société AESOPE GESTION DE PORTEFEUILLE ; il n’appartient donc pas à la même catégorie et n’exerce pas les mêmes fonctions que M. [P].
Mme [U] [Y] épouse [E] figure sur le registre du personnel de la société AESOPE Gestion de Portefeuilles du 19 mai 2003 au 29 août 2003 en qualité d’ingénieur Patrimonial puis du 2 mai 2006 au 31 décembre 2011 en cette même qualité.
A compter du 1er janvier 2012, elle figure sur le registre du personnel de la société AESOPE ANALYSES ET SOLUTIONS PATRIMONIALES en qualité de « directrice gestion patrimoine ».
Elle n’est donc pas salariée de la société AESOPE GESTION DE PORTEFEUILLE.
Ainsi, M. [P] était le seul salarié de la catégorie à laquelle appartenait le poste supprimé.
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de ses demandes au titre de la violation des critères d’ordre.
Sur les autres demandes :
Chacune des parties succombant respectivement en son appel conservera la charge de ses dépens d’appel et de ses frais irrépétibles d’appel.
,
La cour statuant publiquement, par arrêt mis à disposition et contradictoirement
Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d’appel
Rejette les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE