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20 mai 2010
Cour d’appel de Grenoble
RG n°
08/02050
RG N° 08/02050
D.M.
N° Minute :
Grosse délivrée
le :
S.C.P. CALAS
S.C.P. GRIMAUD
Me RAMILLON
S.C.P. POUGNAND
S.E.LA.R.L. DAUPHIN
& MIHAJLOVIC
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
STATUANT EN MATIERE DE BAUX COMMERCIAUX
ARRET DU JEUDI 20 MAI 2010
Appel d’une décision (N° RG 06/00013)
rendue par le Tribunal de Grande Instance de VALENCE
en date du 18 mars 2008
suivant déclaration d’appel du 13 Mai 2008
APPELANTE :
Madame [T] [V] épouse [E]
née le [Date naissance 1] 1936 à [Localité 3] ([Localité 3])
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 3]
représentée par la SCP Jean & Charles CALAS, avoués à la Cour
assistée de Me DELOCH E de la SCP BOUTHIER-PERRIER, avocats au barreau de VALENCE
INTIMEE :
S.A.R.L. TMD ETABLISSEMENTS [V] prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant en cette qualité audit siège
[Adresse 8]
[Localité 3]
représentée par Me Marie-France RAMILLON, avoué à la Cour
assistée de Me Eric Louis LEVY, avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur Daniel MULLER, Président de Chambre,
Monsieur Jean-Louis BERNAUD, Conseiller,
Mme Françoise CUNY, Conseiller,
Assistés lors des débats de Mme Nadine LEICKNER, Greffier.
DEBATS :
A l’audience publique du 18 Mars 2010, Monsieur MULLER, Président a été entendu en son rapport
Les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,
Puis l’affaire a été mise en délibéré au jeudi 6 mai 2010 ledit délibéré ayant été prorogé au mercredi 12 mai 2010 puis à ce jour, ce dont les parties ont été avisées.
——0——
Aux termes d’un acte reçu par Me [U], notaire, le 3 avril 1968, les époux [W] [V] ont donné à bail à la SARL SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS [V] , pour une durée de 9 années :
un tènement de bâtiments industriels,sis à [Localité 3], [Adresse 8], comprenant : un magasin avec vitrine sur ladite rue, un arrière magasin à usage de dépôt, un chantier à grumes, des bâtiments à usage de scierie et de dépôt de bois, un poste de transformateur, deux bureaux, un silo à sciure avec aspirateur, un garage et un dépôt attenant, des terrains entre bâtiments et entre le chantier et la voie ferrée pour dépôts divers,
Une parcelle de terrain à usage de dépôt, avec hangar, sis à [Localité 3], rue Jules Nadi, n° 80,
un fond de commerce et d’industrie de scierie menuiserie, commerce de bois, matériau de toute nature et dérivés, exploité dans les immeubles susdésignés.
L’acteur précise que le bail est consenti et accepté moyennant une redevance mensuelle de 1000 fr. s’appliquant au fond de commerce à concurrence de 400 fr. et aux locaux à concurrence de 600 fr.
Par acte reçu par Me [L], notaire, le 17 avril 1981, les époux [W] [V] ont fait donation, à titre de partage anticipé, au profit de leurs quatre enfants de la nue-propriété de leurs biens meubles et immeubles.
M [Z] [V] s’est vu attribuer le premier lot composé notamment du fond de commerce et d’industrie et d’une partie du traitement immobilier,, sis [Adresse 8].
Mme [E] s’est, quant à elle, vue attribuer le quatrième lot comprenant notamment la parcelle sise [Adresse 10] visée dans le bail du 3 avril 1968.
M [W] [V] est décédé le [Date décès 2] 1991 et son épouse, Mme [I] [V], le [Date décès 4] 1994.
Le 31 août 1995, Mme [E] a fait signifier à la société TMD ETABLISSEMENTS [V] un congé avec offre de renouvellement de bail commercial pour le 29 février 1996, sollicitant dans le même temps que le loyer du bail renouvelé soit fixé à la somme de 144 000 fr. soit 21 952,66 euros.
La société TMD ETABLISSEMENTS [V] a accepté cette offre de renouvellement mais a contesté le montant du nouveau loyer.
Par acte du 4 février 1997, la société TMD ETABLISSEMENTS [V] a saisi le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Valence aux fins de voir fixer le montant du loyer du bail renouvelé à compter du 29 février 1996.
Le 5 février 1997, Mme [E] a fait délivrer à la société TMD ETABLISSEMENTS [V] un second congé pour le cinq août 1997 mais sans offre de renouvellement ni indemnité d’éviction et, par acte du 27 mai 1997, elle a assigné la société TMD ETABLISSEMENTS [V] pour voir dire et juger que cette dernière ne pouvait bénéficier du droit au renouvellement du bail consenti le 3 avril 1968 et voir déclarer régulier en la forme et valable au fond le congé du 5 février 1997.
Par décision du 14 octobre 1997, le juge des loyers commerciaux a sursis à statuer.
Par jugement du 27 juillet 1999, le tribunal de grande instance de Valence a dit que la société TMD ETABLISSEMENTS [V] bénéficiait bien d’un bail commercial sur le tènement immobilier sis [Adresse 10], dit qu’il convenait, à défaut d’accord sur le premier congé donné par Mme [E], de faire droit à la demande de deuxième congé signifié le 5 février 1997 sans offre de renouvellement et a renvoyé l’affaire à la mise en état pour que les parties s’expliquent sur le montant de l’indemnité d’éviction.
Par arrêt du 30 avril 2001, la cour d’appel de Grenoble a réformé ce jugement et, statuant à nouveau, a notamment dit invalide au fond le congé sans offre de renouvellement et sans offre d’indemnité d’éviction délivré le 5 février 1997 par Mme [E], dit que les parties étaient en l’état du congé avec offre de renouvellement délivré le 31 août 1995 et dit qu’il n’y avait pas lieu à renvoi de l’affaire et des parties devant le tribunal.
Par jugement du 12 novembre 2002, le juge des loyers commerciaux a ordonné avant dire droit une mesure d’expertise confiée à Mme [B] et a fixé un loyer provisionnel de 243,92 euros par mois en principal jusqu’à la fixation du loyer définitif.
Le 1er octobre 2003, Mme [E] a fait signifier à la société TMD ETABLISSEMENTS [V] un nouveau congé sans offre de renouvellement ni indemnité d’éviction, avec effet au 3 avril 2004, pour les motifs suivants : non-paiement du loyer, actes de violences morales, transformation des lieux, changement de destination et non-respect des clauses contractuelles.
Par jugement du 16 décembre 2003, le juge des loyers commerciaux a fixé à hauteur de la somme de 3811 € par an le loyer dû par la société TMD ETABLISSEMENTS [V] à Mme [E], et ce à compter du 29 février 1996.
Par acte du 23 mars 2004, la société TMD ETABLISSEMENTS [V] a saisi le tribunal de grande instance de Valence d’une action visant à ce que le congé du 1er octobre 2003 soit invalidé, en l’absence de motif grave et légitime.
Le 30 août 2004, Mme [E] a fait signifier à la société TMD ETABLISSEMENTS [V] un nouveau congé sans offre de renouvellement ni indemnité d’éviction, avec effet au 28 février 2005, pour les motifs déjà évoqués par le congé délivré le 1er octobre 2003, ainsi que pour l’occupation de locaux non compris dans le bail.
Par acte du 5 octobre 2004, la société TMD ETABLISSEMENTS [V] a contesté ce nouveau congé pour défaut de motif grave et légitime.
Par jugement du 22 mars 2005, le tribunal de grande instance de Valence, joignant les deux procédures en contestation des congés, a déclaré nuls les congés délivrés par Mme [E] le 1er octobre 2003 et 30 août 2004 faute pour celle-ci d’avoir préalablement mis en demeure la société TMD ETABLISSEMENTS [V] de cesser les infractions alléguées résultant d’une inexécution des obligations figurant au bail et a déclaré Mme [E] irrecevable en ses demandes reconventionnelles tenant notamment à la reconnaissance de la responsabilité professionnelle de M° [L].
Par arrêt du 29 juin 2005, la cour d’appel de Grenoble a confirmé en toutes ses dispositions le jugement du 16 décembre 2003.
Mme [E] a formé un pourvoi en cassation à l’encontre de cet arrêt pour ensuite s’en désister.
Le 8 juillet 2005, Mme [E] a fait délivrer à la société TMD ETABLISSEMENTS [V] une mise en demeure d’avoir à cesser les infractions alléguées, sur le fondement des dispositions de l’article L 145-17-I-1° du code de commerce puis, par acte du 24 août 2005, Mme [E] a fait signifier à la société TMD ETABLISSEMENTS [V] un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail ainsi que les dispositions susvisées.
Le même jour, soit le 24 août 2005, Mme [E] a fait délivrer à la société TMD ETABLISSEMENTS [V] un congé sans offre de renouvellement ni indemnité d’éviction reprenant les motifs précédemment invoqués.
Par acte de 12 janvier 2006, Mme [E] a fait assigner devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Valence la société TMD ETABLISSEMENTS [V] pour voir notamment constater la résiliation de plein droit du bail et obtenir l’expulsion de cette dernière.
Par ordonnance du 29 mars 2006, le juge des référés du tribunal de grande instance de Valence a dit qu’il n’y avait pas lieu à référé sur les demandes relatives à la résiliation du bail, à l’expulsion de la société TMD ETABLISSEMENTS [V] et à la fixation d’une indemnité d’occupation, a renvoyé les parties à mieux se pourvoir de ces chefs, a condamné la société TMD ETABLISSEMENTS [V] à payer à Mme [E] la somme de 27 947,04 € TTC à titre de provision sur les loyers échus entre le 29 février 1996 et le 30 novembre 2002 et a donné acte à la société TMD ETABLISSEMENTS [V] de ce que la somme effectivement due sur cette période s’élevait en réalité à hauteur de la somme de 30 766,23 euros TTC, somme qu’elle pourrait régler spontanément à Mme [E] notamment par déconsignation des sommes détenues par Me [L], notaire.
Par arrêt du 30 mai 2007, la cour d’appel de Grenoble a confirmé cette décision.
Mme [E] a formé un pourvoi en cassation à l’encontre de cet arrêt.
Par arrêt du 13 novembre 2008, la Cour de Cassation a rendu une décision de non-admission.
Par acte du 6 décembre 2005, la société TMD ETABLISSEMENTS [V] a fait assigner Mme [E] devant le tribunal de grande instance de Valence aux fins de contestation du congé sans offre de renouvellement ni offre d’indemnité d’éviction qui lui a été signifié le 24 août 2005.
Par jugement du 18 mars 2008, le tribunal de grande instance de Valence a :
‘rappelé que par un acte extrajudiciaire du 24 août 2005 Mme [E] a fait signifier à la société TMD ETABLISSEMENTS [V] un congé sans offre de renouvellement ni offre d’indemnité d’éviction,
‘dit que Mme [E] ne justifie aucun motif grave est légitime de nature à exclure le versement d’une indemnité d’éviction,
‘dit en conséquence que la société TMD ETABLISSEMENTS [V] est en droit de prétendre à une indemnité d’éviction,
‘rappelé que le locataire a droit à, en application de l’article L 145-28 du code de commerce, au maintien dans les lieux tant qu’il n’a pas reçu l’indemnité d’éviction à laquelle il peut prétendre,
‘débouté en conséquence Mme [E] de sa demande d’expulsion sous astreinte,
‘débouté en outre Mme [E] de sa demande visant à ce que l’indemnité d’éviction soit ramenée à la somme de zéro euro,
‘ordonné avant dire droit une mesure d’expertise et commis à cet effet M. [F],
‘dit Mme [E] irrecevable en ses demandes reconventionnelles tendant au paiement d’une indemnité d’occupation au profit de l’indivision successorale et au paiement de dommages et intérêts pour la privation d’héritage,
‘débouté Mme [E] de ses demandes reconventionnelles tendant au paiement de la somme de 8700 € et au paiement de loyers,
‘condamné Mme [E] à payer à la société TMD ETABLISSEMENTS [V] la somme de 2000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
‘dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.
Mme [E] a interjeté appel de ce jugement.
Vu les conclusions signifiées le 9 mars 2010 par Mme [E], laquelle demande à la cour de :
‘réformer la décision entreprise,
‘dire et juger valable dans le fond et dans la forme le congé sans offre de renouvellement ni indemnité d’éviction signifié à la société TMD ETABLISSEMENTS [V] à sa demande par acte du 24 août 2005,
‘le valider avec toute conséquences de droit et, par conséquent :
‘dire et juger que les locaux cadastrés section H n° [Cadastre 6] sis [Adresse 10] ne peuvent bénéficier d’une indemnité d’éviction,
‘ordonner l’expulsion de la société TMD ETABLISSEMENTS [V] et de tout occupant de son chef de ces locaux dans le mois de la signification de la décision à intervenir et sous astreinte définitive de 300 € par jour de retard,
‘constater que, dans l’hypothèse où la société TMD ETABLISSEMENTS [V] pourrait prétendre à une indemnité d’éviction, le montant des redevances payées par la société TMD ETABLISSEMENTS [V] s’est élevé à zéro euros pour la période écoulée du 17 avril 1981 au 1er décembre 2002,
‘dire et juger, dans l’hypothèse où la société TMD ETABLISSEMENTS [V] pourrait prétendre à une indemnité d’éviction, que celle-ci sera égale à zéro euro,
‘dire et juger qu’il n’est pas nécessaire de nommer un expert pour déterminer le préjudice subi par la société TMD ETABLISSEMENTS [V],
‘dire et juger qu’il lui est alloué une indemnité pour usage gratuit et abusif de support publicitaire sur toute sa propriété du [Adresse 10] et que cette indemnité doit être fixée à 8700 €,
‘en conséquence condamner la société TMD ETABLISSEMENTS [V] à lui payer la somme de 8700 €,
‘dire et juger qu’il est alloué à la succession, dont Mme [E] est propriétaire pour un quart, une indemnité d’occupation ou loyer pour le terrain avec hangar sis [Adresse 10] pour la période de 1981 à 1994 ([Date décès 4] 1994),
‘entendre constater, dire et juger que pour l’occupation par la société TMD ETABLISSEMENTS [V] de la parcelle de terrain avec hangar cadastrée section H n° [Cadastre 6] sise [Adresse 10], cette indemnité d’occupation ou loyer est soumise à la variation de l’indice INSEE,
‘entendre constater, dire et juger que, dès la première année, cette indemnité d’occupation ou loyer peut être fixé à, au moins, 5700 € par an, et versé à la succession, jusqu’à la date du décès du dernier survivant usufruitier, à savoir le [Date décès 4] 1994,
‘entendre constater, dire et juger que le total des indemnités d’occupation ou loyers dus par la société TMD ETABLISSEMENTS [V] à l’indivision successorale est de 89 256,69 euros,
‘entendre constater, dire et juger que la société TMD ETABLISSEMENTS [V] lui doit les loyers pour le terrain avec hangar sis [Adresse 10] pour la période du 1er novembre 1994 au 29 février 1996, soit 10 165,75 euros,
‘entendre constater, dire et juger que la société TMD ETABLISSEMENTS [V] lui doit les loyers pour le terrain avec hangar sis [Adresse 10] pour la période du 1er février 1996 au 1er décembre 2002, soit 30 766,23 euros,
‘en conséquence,
‘condamner la société TMD ETABLISSEMENTS [V] à lui payer la somme de 40 931,98 euros au titre des loyers, outre intérêts calculés au taux légal pour chaque échéance mensuelle due depuis le 1er novembre 1994 à compter de la date de chaque échéance,
‘condamner la société TMD ETABLISSEMENTS [V] à lui payer des dommages et intérêts de 55 000 € pour la privation de sa part d’héritage constituée notamment par la parcelle H [Cadastre 6] sise [Adresse 10],
‘rejeter toute prétention contraire,
‘débouter en conséquence la société TMD ETABLISSEMENTS [V] de l’intégralité de ses prétentions et de la condamner à lui payer la somme de 3000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Vu les conclusions signifiées le 16 mars 2010 par la société TMD [V] MATERIAUX, par lequelles elle demande à la cour de :
‘dire et juger recevable mais non fondé l’appel interjeté par Mme [E] à l’encontre du jugement du tribunal de grande instance de Valence du 18 mars 2008,
‘dire et juger que Mme [E] ne justifie d’aucun motif grave et légitime de nature à exclure le versement d’une indemnité d’éviction,
‘dire et juger en conséquence qu’elle est en droit de prétendre à une indemnité d’éviction,
‘dire et juger qu’elle a droit en application de l’article L 145-28 du code de commerce au maintien dans les lieux tant qu’elle n’a pas reçu une indemnité d’éviction à laquelle elle peut prétendre,
‘dire et juger qu’une expertise judiciaire se justifie aux fins de déterminer le préjudice subi par elle en raison de son éviction,
‘dire et juger non fondées la totalité des fins et prétentions d’appel de Mme [E] et l’en débouter,
‘en conséquence,
‘confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
‘y ajoutant,
‘condamner Mme [E] à lui payer une somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour appel abusif,
‘condamner Mme [E] à lui payer une somme de 10 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile en sus de celle octroyée par les premiers juges.
MOTIFS
Sur l’application du statut des baux commerciaux
Mme [E] soutient que le statut des baux commerciaux n’a pas vocation à s’appliquer sur la parcelle en cause alors, d’une part que le contrat liant les parties n’est pas protégé par ce statut et, d’autre part, que la parcelle n’est qu’un terrain nu avec un simple hangar.
Il sera observé :
Que le contrat de bail du 3 avril 1968, qui comporte en outre des dispositions relatives à la location gérance du fonds, vise expressément la location au locataire-gérant d’un tènement de bâtiments industriels sis [Adresse 8] et « une parcelle de terrain à usage de dépôt, avec hangar, sis à [Localité 3], rue Jules Nadi, n°80 »,
Que le bail a été consenti et accepté moyennant un loyer, dénommé également redevance, de 1.000 Francs s’appliquant pour partie à la location du fonds, à hauteur de la somme de 400 Francs, et aux locaux, à hauteur de la somme de 600 Francs.
Qu’il s’en déduit, alors que la destination de la parcelle en cause correspond à la destination du fonds de commerce exploité ou qu’elle en est au moins l’accessoire alors qu’elle est utilisée aux fins de dépôt conformément aux prévisions du bail et qu’un loyer a été convenu dès l’origine pour l’ensemble immobilier loué, loyer qui a ultérieurement fait l’objet d’une instance en fixation judiciaire pour cette seule parcelle alors que du fait de la donation l’ensemble immobilier s’est trouvé divisé entre plusieurs propriétaires, que le statut des baux commerciaux a bien vocation à s’appliquer sur cette parcelle, ce que Mme [E] ne peut ignorer alors que le congé qu’elle a fait délivrer le 24 août 2005 mentionne expréssément : « qu’à défaut de congé ce bail commercial dont l’existence a été reconnue par le tribunal de grande instance de Valence et la cour d’appel de Grenoble s’est trouvé renouvelé par tacite reconduction en 1977, 1986, 1995 » (pièce 15) et qu’elle ne peut, sans se contredire, contester l’existence d’un bail commercial et conclure, sous le visa des dispositions relatives aux baux commerciaux, au bien fondé de son congé sans offre de renouvellement ni indemnité d’éviction.
Qu’au surplus, Mme [E] ne saurait désormais contester l’application du statut en raison de l’existence d’une location-gérance alors que le caractère commercial du bail a été consacré par cette cour dans son arrêt du 29 juin 2005, qui lui est opposable.
Il convient par voie de conséquence, alors que le bien en cause est bien soumis au statut des baux commerciaux, d’examiner les griefs énoncés par Mme [E] au soutien de son congé délivré sans offre de renouvellement ni indemnité d’éviction.
Sur le non paiement des loyers
Mme [E], persiste dans sa contestation du montant du loyer fixé par jugement du 16 décembre 2003 pourtant confirmé par arrêt de cette cour du 29 juin 2005, arrêt qui a fait l’objet d’un pourvoi en cassation dont Mme [E] s’est désistée.
Au surplus, il convient de relever que, contrairement à ce qu’affirme Mme [E], la location de la parcelle en cause n’a jamais été consentie à titre gratuit alors que le loyer prévu par le bail originaire s’appliquait à l’ensemble des locaux et parcelles loués, dont la parcelle située [Adresse 10].
Au demeurant, il sera observé que le prix du bail ainsi fixé s’impose, nonobstant cette contestation.
Mme [E] estime que la société TMD n’a pas réglé les loyers pour la période du 17 avril 1981 au 29 février 1996, période pour laquelle elle estime avoir subi un préjudice de 99.422,44 €, et que pour la période écoulée depuis mars 1996 la société TMD ne lui a pas réglé les loyers qui ont été irrégulièrement consignés entre les mains d’un notaire, M° [L], loyers qu’elle estime au demeurant ne concerner que les locaux sis au [Adresse 8], et qu’ainsi à la date du congé délivré le 24 août 2005 les loyers étaient impayés.
Il convient en premier lieu d’observer que Mme [E] n’avait vocation, selon les termes de l’acte de donation-partage (page 7), à percevoir les loyers qu’à compter du décès du survivant des donataires, soit le 29 novembre 1994, et qu’elle ne saurait donc, indépendamment des contestations portant sur sa part d’héritage qui ne peuvent être examinées dans le cadre de la présente instance, se prévaloir du défaut de paiement des loyers qu’elle invoque pour la période antérieure à cette date.
Il est par ailleurs constant que la société TMD s’acquitte régulièrement entre les mains de Mme [E] depuis le mois de décembre 2002 du loyer fixé par jugements des 12 novembre 2002 et 16 décembre 2003 nonobstant les affirmations contradictoires de Mme [E] sur ce point (pages 23 et 25 de ses conclusions).
Pour la période intermédiaire, les premiers juges ont relevé avec pertinence, par des motifs que la cour adopte, que les établissements TMD ont versé depuis le 6 décembre 1994, en la comptabilité de l’étude de M° [L], les loyers dus pour l’ensemble immobilier, 63 et [Adresse 10], et que ces versements ont été poursuivis jusqu’à la décision du juge des loyers commerciaux sans que cette circonstance puisse être de nature à caractériser un motif de congé sans offre d’indemnité d’éviction alors, d’une part, qu’il a été procédé ainsi en raison des contestations élevées par Mme [E] sur la répartition résultant de l’acte de donation-partage et, d’autre part, que la somme de 30.766,23 € a été acquittée le 22 janvier 2007, directement par la société TMD et non par voie de déconsignation, en exécution de l’ordonnance de référé du 29
mars 2006, confirmée par arrêt de cette cour le 30 mai 2007, lequel a fait l’objet d’une décision de non-admission rendue par la cour de cassation le 13 novembre 2008.
Il convient par voie de conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
Sur les actes de violences morales
Les premiers juges ont, par des motifs pertinents que la cour adopte, relevé que le climat de violences morales dénoncé par Mme [E] tenait pour l’essentiel à la multiplication de procédures dont elle est elle-même à l’origine.
Elle ne saurait par ailleurs invoquer des faits étrangers aux rapports bailleur/locataire tels que l’annexion d’une parcelle [Cadastre 9] en 1992, avant même qu’elle qu’elle puisse se prévaloir de sa qualité de bailleresse, la signature d’une attestation par sa mère, dont il n’est pas démontré qu’elle ait été extorquée par suite de pressions, les modalités de règlement des condamnations relatives à l’occupation de la parcelle [Cadastre 9], le différent l’ayant opposé, également en 1992, à la société TMD au sujet d’un droit de passage toujours relatif à cette parcelle [Cadastre 9], ou encore la spoliation de ses droits d’héritière qui fait l’objet, par ailleurs, d’un abondant contentieux ou enfin la contestation d’opérations financières concernant la société TMD et ses parents.
Enfin, l’empiètement allégué et les nuisances tenant au passage de camions, sujets au demeurant brièvement évoqués par Mme [E], ne sauraient être retenus alors qu’ils feraient, ce qui n’est pas contesté par Mme [E], l’objet d’une proposition de médiation acceptée par les parties et qu’ils ne sont pas suffisamment justifiés à ce stade de la procédure pour caractériser un motif de congé sans offre d’indemnité d’éviction.
Il convient par voie de conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
Sur la transformation des lieux
Mme [E] invoque à ce titre la pose de panneaux publicitaires sur le toit du hangar.
Les premiers juges ont exactement relevé que la mère de Mme [E] avait autorisé la pose de ces panneaux publicitaires en contrepartie de travaux d’entretien, ce dont elle a attesté le 20 juillet 1993, et il convient par voie de conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
Sur le changement de destination de la chose louée
Mme [E] soutient que la société TMD n’exerce plus dans les lieux la profession prévue par le bail alors que l’activité de « scierie et commerce de bois » a été transformée en « commerce de gros de matériaux de construction ».
Elle estime ainsi qu’il y a bien changement de destination par les matériaux déposés, différents de ceux prévus à l’origine, et affirme au surplus que la parcelle est également utilisée comme parking privé à l’usage des clients.
C’est par des motifs pertinents, que la cour adopte, que les premiers juges relevant que la parcelle en cause avait été initialement louée pour un usage de dépôt et qu’elle était toujours utilisée aux mêmes fins et que le fonds de commerce donné en location concernait également, selon le même acte, le commerce de matériaux de toute nature et dérivés et qu’ils en ont ainsi déduit que la destination de la chose louée n’avait pas été modifiée.
La circonstance qu’au fil du temps les activités de la société aient pu évoluer, au point de supprimer certaines activités, en particulier l’activité de scierie, au bénéfice d’autres activités, prévues dès l’origine, mais dont l’importance s’est accrue ne caractérise pas le changement de destination allégué.
Par ailleurs, l’expert judiciaire a, dans son rapport du 22 août 2003, constaté que la parcelle n’avait pas été aménagée en parking et la circonstance que certains clients de la société TMD pénètrent sur la parcelle pour permettre le chargement des matériaux n’a pas pour effet de transformer la parcelle objet du bail en parking.
Enfin, il n’est pas démontré que la parcelle en cause accueille une nouvelle activité de transport routier de marchandises et de location de véhicules de transports routiers de marchandises, activités désormais prévues par les statuts de la société TMD, et Mme [E] ne saurait se prévaloir de cette diversification, étrangère à l’utilisation de la parcelle dont elle est la propriétaire, pour affirmer que la société TMD a modifié la destination de la chose louée.
Il convient par voie de conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
Sur le non respect des clauses contractuelles.
Mme [E] soutient que la société TMD n’a pas respecté les clauses du bail originel en changeant de dénomination et en changeant d’associés et en modifiant ses activités.
Les premiers juges ont, par des motifs pertinents que la cour adopte, relevé que Mme [E] ne pouvait pas invoquer ce motif alors qu’elle n’avait pas satisfait aux prescriptions de l’article L 145-17 I- 1° en ne mettant pas en demeure la société TMD de régulariser la situation qu’elle invoque, étant observé que contrairement à ce qu’affirme Mme [E] une régularisation était, dans la mesure où l’infraction alléguée pouvait paraître fondée, possible.
Au demeurant, la cession partielle des parts de Mme [A] et de M [P] [V], désormais associés minoritaires au sein de la société TMD, à une société JCM n’est pas de nature
à caractériser la cession de bail visée par l’article « cession de bail » du bail du 3 avril 1968 et cette cession n’a pas eu pour effet, comme le soutient Mme [E], de lui « imposer un nouveau prétendu locataire » alors que la société TMD est toujours titulaire du bail et que la cession partielle de parts à un associé majoritaire à compter du 1er janvier 2006 n’a pas eu pour effet de faire disparaître le fonds de commerce dès lors qu’il reste la propriété de la société TMD titulaire du bail et du groupe dont elle fait partie et qu’il n’est au surplus pas démontré que le fonds de commerce ait fait l’objet d’une « vente » et que le contrat de location-gérance ait été « résilié » alors que, comme le font remarquer à juste titre les premiers juges, une telle résiliation serait dépourvue de sens.
Par ailleurs, la circonstance que des locaux étrangers à la parcelle sise [Adresse 10] aient fait l’objet d’un nouveau bail, ce qui paraît logique alors que les biens immobiliers ont été partagés par l’effet de la donation-partage, au bénéfice d’une SCI familiale (pièce 78, page 2) ne saurait caractériser un manquement grave aux obligations du preneur dont Mme [E] pourrait se prévaloir alors que ce bail ne concerne pas le tènement immobilier dont elle est propriétaire.
Mme [E] qui évalue son préjudice en considération de sa « privation de sa part d’héritage » (page 38 de ses conclusions) montre d’ailleurs que ces griefs ne sont en réalité pas invoqués en sa qualité de bailleresse.
Mme [E] vise également l’adjonction d’une activité de transport dont il n’est pas démontré qu’elle soit effectivement exercée alors que le rapport de gestion cité par elle ne fait mention que de l’acquisition limitée de matériel de transport pour la somme de 14.000 €.
Enfin, c’est par des motifs pertinents, que la cour adopte, que les premiers juges ont relevé qu’il avait été définitivement jugé, par jugement du 1er juillet 1998 non infirmé de ce chef par l’arrêt de cette cour du 20 novembre 2000, que pendant la période d’usufruit il n’appartenait pas à la société TMD de s’acquitter des impôts et assurances et, pour la période postérieure, à savoir depuis le décès de Mme [V], la société TMD s’acquittait régulièrement de ses charges.
Au demeurant Mme [E] ne saurait, alors qu’elle ne conteste pas avoir reçu paiement de ces impôts, soutenir, en sa qualité de bailleresse, que « le paiement des impôts et autres taxes avec les deniers du de cujus constitue donc une inexécution des clauses du bail ».
Il convient par voie de conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
Sur l’occupation de locaux non compris dans le bail
C’est par des motifs pertinents, que la cour adopte, que les premiers juges, observant que l’occupation de la parcelle [Cadastre 9] avait cessé depuis 1993 et que les travaux de remise en état
avaient été exécutés le 26 mars 1993, ont estimé que ce grief ne pouvait constituer à ce jour un motif grave et légitime justifiant l’absence de toute offre d’indemnité d’éviction.
Par ailleurs, le constat d’huissier du 2 octobre 2009 ne saurait à lui seul, en l’absence de tout autre élément établissant l’empiètement allégué par Mme [E] et alors que cet empiètement est contesté pat la société TMD, caractériser l’occupation irrégulière de la parcelle [Cadastre 9] alléguée par mme [E].
Il convient par voie de conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
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Mme [E] ne justifie d’aucun motif grave et légitme de nature à justifier que le congé sans offre de renouvellement qu’elle a fait signifier le 24 août 2005 à la société TMD puisse intervenir sans indemnité d’éviction.
Mme [E] ne saurait s’opposer au principe de la demande d’une indemnité d’éviction en soutenant que le statut des baux commerciaux ne trouve pas à s’appliquer alors que, pour les motifs précedemment exprimés, ce statut est bien applicable aux locaux en cause et que la parcelle en cause ne peut être considérée comme un terrain nu exempt de constructions qui ne pourrait bénéficier d’une indemnité dès lors qu’il n’est pas contestable que cette parcelle est elle même comprise dans l’occupation d’un ensemble immobilier plus vaste dans lequel un fonds de commerce est exploité et qu’elle en est l’accessoire. Au demeurant Mme [E] a elle-même observé, puisqu’elle en fait le reproche à la société TMD, que la clientèle se rend sur cette parcelle pour charger les marchandises achetées.
Il convient par voie de conséquence de confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a ordonné une mesure d’expertise et débouté Mme [E] de sa demande d’expulsion alors que le locataire a droit, en vertu des dispositions de l’article L 145-28 du code de commerce au maintien dans les lieux tant qu’il n’a pas reçu l’indemnité d’éviction à laquelle il peut prétendre.
Sur les demandes reconventionnelles de Mme [E]
Sur la demande en paiement de la somme de 8.700 €
Mme [E] ne développe aucun moyen à l’encontre de la décision qui l’a déboutée de ce chef de demande et la cour ne peut que confirmer au fond sur ce point le jugement entrepris.
sur l’indemnité d’occupation
Mme [E] estime que la société TMD doit, pour la parcelle H [Cadastre 5] sise [Adresse 10], des loyers à la succession du 17 avril 1981 au 29 février 1996 et qu’elle lui doit des loyers du 1er novembre 1994 au 29 février 1996 ainsi que pour la période du 1er mars 1996 au 1er décembre 2002.
Sur les loyers dus à la succession, les premiers juges ont exactement estimé que cette demande est irrecevable alors qu’elle ne se rattache pas par un lien suffisant au litige principal sur le congé sans offre de renouvellement et qu’il concerne les rapports entre la société TMD et l’indivision successorale.
C’est de façon tout aussi pertinente que les premiers juges ont observé s’agissant de la demande portant sur la période du 1er novembre 1994 au 29 février 1996 qu’il appartiendra au notaire selon les termes de l’arrêt rendu par cette cour le 21 novembre 2001, dans le cadre du règlement des opérations de compte, liquidation et partage, de procéder à la répartition des fonds détenus par lui, et versés à sa comptabilité par la société TMD depuis le 6 décembre 1994, entre les attributaires alors que la fixation du loyer par le juge des loyers commerciaux n’est intervenue qu’avec effet au 21 février 1996.
Enfin, c’est à juste titre que les premiers juges ont relevé que la demande portant sur les loyers postérieurs était sans objet alors que la société TMD a réglé la somme due le 22 janvier 2007.
Il convient par voie de conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
sur la demande en paiement de la somme de 55.000 € à titre de dommages et intérêts
C’est à juste titre que les premiers juges ont estimé cette demande irrecevable alors qu’elle ne se rattache pas par un lien suffisant au litige principal sur le congé sans offre de renouvellement et qu’il concerne le règlement de l’indivision successorale et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Enfin, Mme [E] ne saurait s’opposer au principe d’une indemnité d’éviction au motif qu’elle prétend subir une éviction de fait par la société TMD, alors que ses griefs visent à cet égard non la société TMD, mais le gérant de la société et la garantie de ce dernier lui devrait en sa qualité de copartageant ce qui concerne le règlement de l’indivision successorale et ne saerattache pas davantage au litige principal.
Sur la demande de dommages et intérêts formée par la société TMD
Il n’est pas démontré que Mme [E] ait agi de mauvaise foi en interjetant appel et il n’y a dès lors pas lieu de faire droit à cette demande dont la société TMD sera déboutée.
Sur l’article 700 du code de procédure civile
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société TMD partie des frais irrépétibles qu’elle a pu exposer, et il convient de lui allouer à ce titre la somme de 2.000 €.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Déboute la société TMD [V] MATERIAUX de sa demande de dommages et intérêts,
Condamne Mme [E] à payer à la société TMD [V] MATERIAUX, en sus de la somme allouée à ce titre par les premiers juges, la somme de 2.000 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [E] aux dépens, dont distraction au profit de Maître RAMILLON, Avoué.
SIGNE par Monsieur MULLER, Président et par Madame LEICKNER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.