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Contexte de l’affaireMonsieur [W] [U] a signé un bon de commande le 18 avril 2018 pour l’achat et l’installation de 16 panneaux photovoltaïques auprès de la société SOLECO, pour un montant de 28 900 €. Le financement de cette opération a été réalisé par un prêt souscrit auprès de la société DOMOFINANCE, remboursable en 140 mensualités. Procédures judiciaires initialesEn avril 2021, Monsieur [W] [U] et Madame [P] [U] ont assigné la société SOLECO et DOMOFINANCE pour obtenir la nullité du contrat de commande et réclamer des dommages-intérêts. Ils ont également demandé l’annulation du contrat de crédit et le remboursement des sommes versées. Jugement du tribunal de proximitéLe 7 juin 2022, le tribunal a prononcé la nullité du bon de commande et du contrat de crédit, constatant des irrégularités dans le bon de commande. La société DOMOFINANCE a été condamnée à restituer les mensualités payées et a été privée de son droit à remboursement. Appel de la société DOMOFINANCELa société DOMOFINANCE a interjeté appel du jugement, demandant la confirmation de certaines décisions et l’infirmation d’autres, notamment concernant la nullité des contrats et la restitution des fonds. Arguments des époux [U]Les époux [U] ont soutenu que l’installation ne leur permettait pas de revendre l’électricité produite, en raison de l’absence d’attestation de conformité. Ils ont également contesté la validité du bon de commande, arguant qu’il manquait des informations essentielles. Motivations du jugementLe tribunal a confirmé la nullité du bon de commande en raison de violations des articles du code de la consommation. Il a également statué que la société DOMOFINANCE avait commis une faute en ne vérifiant pas la régularité du contrat avant de verser les fonds. Décisions finalesLa cour a confirmé la nullité des contrats et a ordonné aux époux [U] de restituer le capital emprunté à DOMOFINANCE, sous déduction des échéances déjà payées. Les demandes de dommages-intérêts et de frais irrépétibles ont été rejetées, et les époux ont été condamnés aux dépens. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Chambre 1-7
ARRÊT AU FOND
DU 24 OCTOBRE 2024
N° 2024/ 375
Rôle N° RG 22/10086 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJXWU
S.A. DOMOFINANCE
C/
[W] [U]
[P] [U] [T] épouse [U]
[C] [D]
S.A.S. SOLUTION ECO ENERGIE (SOLECO)
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Daniel LAMBERT
Me Clara LEGER-ROUSTAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de proximité de MARTIGUES en date du 07 Juin 2022 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 11-21-0530.
APPELANTE
S.A. DOMOFINANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège social, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Daniel LAMBERT, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Pierre-jean LAMBERT, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Bernard BOULLOUD, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMES
Monsieur [W] [U]
né le 22 Janvier 1984 à [Localité 5], demeurant [Adresse 2] / FRANCE
Madame [P] [T] épouse [U]
née le 28 Janvier 1988 à [Localité 5], demeurant [Adresse 2] / FRANCE
Tous deux représentés par Me Clara LEGER-ROUSTAN, avocat au barreau de GRASSE
assistés de Me Océanne AUFFRET DE PEYRELONGUE de la SELARL AUFFRET DE PEYRELONGUE, avocat au barreau de BORDEAUX,
Maître [C] [D] Prise en sa qualité de liquidateur de la STE SOLUTION ECO ENERGIE, demeurant [Adresse 3]
Assignée à domicile le 06 Septembre 2022
défaillant
S.A.S. SOLUTION ECO ENERGIE (SOLECO) prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège social, demeurant [Adresse 4]
défaillante
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 17 Janvier 2024 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre
Madame Carole MENDOZA, Conseillère
Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2024 puis les parties ont été avisées que le délibéré était prorogé au 18 avril 2024 par mise à disposition au greffe puis au 04 juillet 2024 puis les parties ont été avisées que le délibéré était prorogé au 24 octobre 2024 par mise à disposition au greffe.
ARRÊT
Défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2024
Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Faisant suite à un démarchage à domicile, Monsieur [W] [U] a signé, le 18 avril 2018, un bon de commande portant sur l’achat et l’installation de 16 panneaux photovoltaïques et micro-onduleurs auprès de la société SOLECO moyennant le prix de 28900 €.
L’opération était financée en totalité au moyen d’un prêt souscrit par Monsieur et Madame [U] auprès de la société DOMOFINANCE remboursable en 140 mensualités d’un montant de 294,61 euros, avec assurance, au taux nominal fixe de 4,54%.
Par ordonnance du président du tribunal de commerce de Bobigny du 19 mai 2021 était désignée, en qualité de mandataire judiciaire avec pour mission de représenter la société SOLUTION ECO ENERGIE SAS, Maître [C] [D].
Suivant exploit d’huissier du 14 avril 2021, Monsieur [W] [U] et Madame [P] [U] née [T] ont assigné respectivement la Société SOLUTION ECO ENERGIE, société ayant pour nom commercial SOLECO, et la société DOMOFINANCE, aux fins de voir prononcer la nullité du contrat principal de commande d’une installation photovoltaïque conclu entre Monsieur [U] et la société SOLECO, voir condamner la société SOLECO à payer à Monsieur [U] la somme de 5000 euros en réparation de son préjudice au titre de remboursement de l’excès de prix; subsidiairement de voir condamner la société SOLECO à restituer à Monsieur [U] l’intégralité du prix de vente, soit la somme de 28900 euros et de voir enjoindre ladite société de récupérer l’ensemble du matériel vendu, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement; en conséquence, de voir prononcer la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre Madame et Monsieur [U] et la société DOMOFINANCE, condamner la société DOMOFINANCE à rembourser aux époux [U] les échéances payées jusqu’à l’annulation de la vente et du prêt soit la somme de 8547,28 euros, le solde devant être actualisé au jour du jugement, condamner au titre de la perte de chance subie du fait de la négligence du prêteur, à payer à Monsieur [U] la somme de 5000 euros, condamner solidairement la société SOLECO et la société DOMOFINANCE à payer aux demandeurs la somme de 3000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Suivant exploit d’huissier du 28 octobre 2021, Monsieur [W] [U] et Madame [P] [U] ont assigné Maître [C] [D] prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société SOLUTION ECO ENERGIE aux fins de la voir appeler en la cause, ordonner la jonction avec la procédure précédente, de voir constater la créance des époux [U] et fixer son montant ; sur le fond, prononcer la nullité du contrat principal et voir condamner Maître [D] à leur payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement réputé contradictoire du 7 juin 2022, le juge des contentieux du tribunal de proximité de Martigues a statué ainsi :
– PRONONCE la nullité du bon de commande signé le 18 avril 2018 par Monsieur [W] [U] avec la société SOLUTION ECO ENERGIE SAS (SOLECO) ;
– ANNULE également le contrat accessoire de crédit conclu le 18 avril 2018 entre Monsieur [W] [U] et Madame [P] [U] et la société DOMOFINANCE ;
– CONSTATE que la société DOMOFINANCE a commis une faute la privant de sa créance de restitution des fonds empruntés par Monsieur [W] [U] et Madame [U] ;
– DEBOUTE la société DOMOFINANCE de sa demande en restitution des fonds prêtés à Monsieur [W] [U] et madame [P] [U] ;
– CONDAMNE la société DOMOFINANCE à restituer aux époux [U] les mensualités payées jusqu’à l’annulation de la vente et du prêt soit la somme de 10636,55 euros à parfaire à la date du présent jugement ;
– PRIVE la société DOMOFINANCE de fait de tout droit à remboursement contre les époux [U] s’agissant du capital, des frais et accessoires versés entre les mains de la société SOLUTION ECO ENERGIE SAS (SOLECO) ;
– FIXE la créance de la Société DOMOFINANCE au passif de la société SOLUTION ECO ENERGIE SAS (SOLECO) à la somme de 28900 € correspondant au coût du contrat de credit;
– CONSTATE que Monsieur et Madame [U] mettent à disposition du liquidateur judiciaire de la société l’ensemble du matériel objets du bon de commande n°5380 du 18 avril 2018 pour reprise aux frais de la société SOLUTION ECO ENERGIE SAS (SOLECO), que faute pour le mandataire judiciaire de la société de reprendre l’ensemble du matériel installé dans les deux mois de la signification du présent jugement, les époux [U] pourront en disposer comme ils le voudront;
– DEBOUTE Monsieur et Madame [U] de leur demande de dommages et intérêts pour perte de chance ;
– DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;
– CONDAMNE in solidum Maître [C] [D] es qualité de liquidateur judciaire de la société SOLUTION ECO ENERGIE SAS et la société DOMOFINANCE à payer à Monsieur et Mme [U] la somme de 1000 euros sur le fondemetn de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Le jugement susvisé retient pour l’essentiel que le bon de commande du 18 avril 2018 présente un cerain nombre d’irrégularités au regard des articles L. 111-1 et suivants du code de la consommation; qu’il ne présente aucune description succinte des biens, ne mentionne pas la date de livraison; ne présente pas de description des constatations de faisabilité ou des démarches administratives à effectuer ; que les demandeurs étant profanes, les éléments mentionnés sur le bon de commande sont insuffisants pour leur permettre de mesurer l’étendue de leur engagement et les caractéristiques réelles de la prestation convenue ; que la société SOLECO n’a pas transmis l’attestation de conformité, ce qui ne leur pas permis de revendre l’électricité produite à EDF ; que le contrat de crédit est donc nul de plein droit ; que la renonciation à se prévaloir des dispositions du code de la consommation ne peut revêtir qu’une forme expresse et ne pas résulter de la seule exécution du contrat de crédit ; que le prêteur a commis une faute en versant les fonds au prestataire de services sans avoir vérifié la régularité du contrat principal, ce qui le prive de sa créance de restitution de ces fonds ; que de plus la preuve de l’exécution complète de la prestation ne lui était pas rapportée.
Selon déclaration du 13 juillet 2022, la société DOMOFINANCE a relevé appel de cette décision en toutes les dispositions la concernant.
Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 19 décembre 2023, auxquelles il sera plus amplement référé, la société DOMOFINANCE demande de voir :
Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,
S’entendre la Cour,
1) CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande indemnitaire des époux [U] ;
2) INFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a :
o prononcé la nullité du bon de commande signé le 18 avril 2018 par Monsieur [W] [U] avec la société SOLUTION ECO ENERGIE SAS (SOLECO) ;
o annulé également le contrat accessoire de crédit conclu le 18 avril 2018 entre Monsieur [W] [U] et Madame [P] [U] et la société DOMOFINANCE ;
° constaté que la société DOMOFINANCE a commis une faute, la privant de sa créance de restitution des fonds empruntés par Monsieur [W] [U] et Madame [P] [U];
° débouté la société DOMOFINANCE de sa demande en restitution des fonds prêtés à Monsieur [W] [U] et Madame [P] [U] ;
° condamné la société DOMOFINANCE à restituer aux époux [U] les mensualités payées jusqu’à l’annulation dela vente et du prêt soit la somme de 10 636,55 euros à parfaire à la date du présent jugement ;
o privé la société DOMOFINANCE de fait de tout droit à remboursement contre les époux [U] s’agissant du capital, des frais et accessoires versés entre les mains dela société SOLUTION ECO ENERGIE SAS;
o fixé la créance de la société DOMOFINANCE au passif de la société SOLUTION ECO ENERGNIE à la somme de 28900 € correspondant au coût du contrat de crédit;
0 débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;
o Condamné in solidum Maître [D] ès qualité de liquidateur judicaire de la société SOLLUT/ON ECO ENERGIE SAS et la société DOMOFINANCE à payer à Monsieur et Madame [U] la somme de 1000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;
o Condamné in solidum Maître [D] ès qualités de liquidateur de la société SOLUTION ECO ENERGIE SAS et la SA DOMOFINANCE aux dépens ;
– STATUANT A NOUVEAU,
– A titre principal
3) DEBOUTER Monsieur [W] [U] et Madame [P] [U] en toutes leurs demandes en ce qu’elIes sont infondées ;
4) CONDAMNER solidairement les époux [W] et [P] [U] à poursuivre l’exécution du contrat de crédit aux clauses et conditions initiales et en conséquence,
5) CONDAMNER solidairement les époux [W] et [P] [U] à payer à la société DOMOFINANCE la somme de 13555,65 € se décomposant au jour des présentes écritures comme suit,
– 12671,82 € au titre du remboursement effectué auprès des clients suite au jugement querellé ;
– 883,83 € de mensualités échues non réglées du 05/08/2022 au 05/10/2022 (294,61€ X 3) somme à parfaire au jour de l”arrêt sur les mensualités futures.
– A titre subsidiaire, si le contrat unissant Monsieur [W] [U] et Madame [P] [U] avec la société DOMOFINANCE était annulé ;
– 6) REMETTRE les parties dans l’état où elles se trouvaient antérieurement à la conclusion du contrat et en conséquence,
6.1) CONDAMNER, solidairement Monsieur [W] [U] et Madame [P] [U] à rembourser à la société DOMOFINANCE le capital financé, outre les intérêts au taux légal à compter du déblocage des fonds, déduction faite des échéances déjà payées.
6.2) ASSORTIR le montant de ce remboursement d’un intérêt au taux légal avec capitalisation dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil;
6.3) FIXER au passif de la liquidation judiciaire de la société SOLUTION ECO ENERGIE sa condamnation à garantir Monsieur [W] [U] et Madame [P] [U] de la condamnation prononcée au remboursement du capital prêté;
– A titre encore plus subsidiaire, si la société DOMOFINANCE venait à être privée de son droit à restitution du capital ;
7) CONDAMNER la société SOLUTION ECO ENERGIE au paiement de la somme correspondant au montant de la restitution du capital financé outre les intérêts au taux légal à compter du déblocage des fonds, déduction faite des échéances déjà payées, à titre de dommages et intérêts ;
8 ) FIXER la créance de la société DOMOFINANCE au passif de la liquidation de la société SOLUTION ECO ENERGIE à hauteur du montant de la restitution du capital financé outre les intérêts au taux légal à compter du déblocage des fonds, déduction faite des échéances déjà payées.
– En tout état de cause,
9) CONDAMNER solidairement Monsieur [W] [U] et Madame [P] [U] à payer à la société DOMOFINANCE la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d’appel.
La société DOMOFINANCE fait valoir pour l’essentiel que le bon de commande présente les références de la société, les composantes de la centrale photovoltaïque, la puissance du kit, le nombre de panneaux et la puissance de la batterie ; qu’aucun texte n’exige la mention du prix unitaire de chaque élément constitutif du bien ou du service proposé ; que les emprunteurs ne démontrent pas la réticence dolosive de la société SOLECO ; que seule l’omission de la mention prévue par le texte pourrait le cas échéant conduire à la nullité du contrat ; que M. [U] a accepté la réception des travaux le 11 mai 2018 et qu’ils ont exécuté sans réserve le contrat principal comme le contrat de crédit ; qu’ils ont donc confirmé le bon de commande ligieux ; que par conséquent le contrat de crédit ne peut être annulé ; que la banque n’a pas commis de faute d’abstention en l’absence de norme imposant une obligation d’agir ; qu’il n’appartient pas au prêteur d’apprécier et de conseiller son client sur les contrats qu’il entend conclure dans son intérêt propre ; que les fonds ont été versés sur la base d’une attestation de réception sans réserve ; que les époux [U] ne subissent aucun préjudice puisque l’installation est conforme, fonctionne et est raccordée ; que la réparation doit être intégrale et ne peut permettre d’indemniser deux fois le même chef de préjudice ; qu’aucun engagement de rentabilité n’a été contractualisé dans le bon de commande.
Selon leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 décembre 2023, auxquelles il sera plus amplement référé, les époux [U] demandent de voir :
– DIRE et JUGER la société DOMOFINANCE recevable en son appel mais mal fondée ;
– CONFIRMER le jugement du Tribunal de proximité de MARTIGUES du 7 juin 2022 en toutes ses dispositions ;
– En tout état de cause :
– DEBOUTER la société DOMOFINANCE de toutes ses demandes fins et conclusions ;
– CONFIRMER la condamnation de la société DOMOFINANCE au paiement à Monsieur et Madame [U] de la somme de 15025,11 €, au titre des échéances réglées et du capital remboursé, sans compensation avec la restitution du capital prêté, le solde devant être actualisé au jour de l’arrêt, et emportera intérêts au taux légal à compter de la décision prononçant l’annulation du prêt ;
– CONDAMNER SOLIDAIREMENT Maître [C] [D], es qualité de liquidateur judiciaire de la société SOLECO et la société DOMOFINANCE à payer aux époux [U] la somme de 3000 € chacun au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– CONDAMNER SOLIDAIREMENT Maître [C] [D], es qualité de liquidateur judiciaire de la société SOLECO et DOMOFINANCE aux entiers dépens.
Les époux [U] font valoir pour l’essentiel que si l’installation est en marche, elle ne leur permet pas de retirer le moindre centime de la revente du surplus de leur production électrique, la société SOLECO n’ayant jamais retourné l’attestation de conformité à EDF ; que les informations sur les caractéristiques essentielles du bien ne sont pas fournies par le bon de commande ; que ne sont pas précisés le poids, la dimension, le modèle et l’inclinaison des panneaux ; que les démarches administratives ne sont pas précisées ; qu’aucun détail n’est donné sur la nature exacte des travaux de pose et d’installation ; que les conditions d’exécution du contrat ne sont pas indiquées ; que de plus aucune information précontractuelle n’a été fournie aux époux [U] ; que la production est consubstantielle au produit lui-même ; que la reproduction des dispositions du code de la consommation n’est pas suffisante pour prouver la confirmation du vice ; qu’ils n’ont pas eu, après la conclusion du contrat, connaissance de la violation du formalisme imposé par ledit code ; que la banque a une obligation de vérification de la validité du bon de commande et elle doit s’assurer que le contrat de vente a été correctement exécuté ; que la banque est alors privée de sa créance de restitution ; que les acquéreurs se sont trouvés engagés dans une relation contractuelle pesant sur leur budget et pour de nombreuses années ; que de plus la société prestataire est en liquidation judiciaire; que la livraison complète de la prestation conditionne la naissance de l’obligation de restitution par l’emprunteur du capital emprunté ; qu’ainsi leur obligation de rembourser le prêt n’a pas pris effet et ils n’ont donc pas à démontrer leur préjudice ; que l’installation a connu d’importants désordres alors que la société SOLECO n’a pas été en mesure de procéder à sa mise en service pour leur permettre de revendre de l’électricité ; qu’ils sont endettés pour la somme de 3535,32 euros (coût du crédit) par an qu’ils payent en pure perte depuis trois ans.
Par acte du 6 septembre 2022 remis à domicile, Maître [C] [D], es qualité de mandataire liquidateur de la société SOLUTION ECO ENERGIE, s’est vue signifier la déclaration d’appel et les conclusions de l’appelante.
Par acte remis à domicile le 2 janvier 2024, elle s’est vue également signifier les conclusions de M et Mme [U].
Maître [C] [D], es qualité de mandataire liquidateur de la société SOLUTION ECO ENERGIE, n’a pas constitué avocat.
Sur la nullité du bon de commande
La nullité du bon de commande pour violation des dispositions des l’articles L221-5, L 111-1 et L 111-2 du code de la consommation est une nullité relative.
Aux termes des dispositions de l’article L 221-5 du code de la consommation, dans sa version applicable à un contrat souscrit le 18 avril 2018, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ;
3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;
4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L. 221-25 ;
5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L. 221-28, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;
6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l’utilisation de la technique de communication à distance, à l’existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’Etat (…).
Selon l’article L 111-1 du code de la consommation, dans sa version applicable à un contrat souscrit le 18 avril 2018, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;
3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;
5° S’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI (…)
Selon l’article L 111-2 du même code, applicable à un contrat souscrit le 18 avril 2018, outre les mentions prévues à l’article L. 111-1, tout professionnel, avant la conclusion d’un contrat de fourniture de services et, lorsqu’il n’y a pas de contrat écrit, avant l’exécution de la prestation de services, met à la disposition du consommateur ou lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’Etat (…).
Le bon de commande mentionne la fourniture et l’installation d’une centrale photovoltaïque en auto-consommation totale, avec 16 panneaux photovoltaïques de 300 watts RECOM ou équivalent avec micro-onduleurs et une batterie de stockage ENPHASE, les démarches administratives et la mise en conformité CONSUELpour un prix de 20900 euros TTC ainsi qu’un compteur régulateur FHE d’un montant de 6000 euros TTC.
La facture du 11 mai 2018, remise postérieurement, évoque une centrale photovoltaïque LA FRANCILIENNE et une batterie AC ENPHASE, ainsi qu’un système de micros onduleurs Enphase Energy de 250 watts et un compteur FHE SENSOR PILOTE.
Il apparaît ainsi que la marque de la centrale mentionnée sur le bon de commande diffère de ce qui est notée sur la facture. De même, le bon de commande ne précise pas les caractéristiques essentielles des micros-onduleurs. Or, ces éléments constituent des caractéristiques essentielles au sens des textes précédemment évoqués et il n’est pas démontré que les époux [U] auraient été avisés du changement de marque.
Le bon de commande ne mentionne pas la date prévue de livraison ni le délai d’exécution alors que les conditions générales du contrat ne sont pas versées aux débats, ce qui ne permet pas à la Cour de vérifier si l’ensemble des mentions prévues par les articles précités y figure.
Pour l’ensemble de ces éléments, le bon de commande encourt donc la nullité.
Selon l’article L. 221-9 du code de la consommation, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L. 221-5. A peine de nullité prévue à l’article L. 242-1 du même code, il est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5.
Or, aucun des exemplaires produits par les deux parties ne comporte un formulaire de rétractation Ainsi, le bon de commande encourt également de ce fait la nullité.
Sur la confirmation du contrat
Selon l’article 1182 du code civil, la confirmation est l’acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Cet acte mentionne l’objet de l’obligation et le vice affectant le contrat.
La confirmation ne peut intervenir qu’après la conclusion du contrat.
L’exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation.
Aucune pièce du dossier ne permet d’indiquer que M. [U], consommateur profane, savait que l’absence de mention du délai d’exécution de la prestation ou que l’absence du formulaire de rétractation entachaient le bon de commande d’une nullité et que la différence entre la marque mentionnée au bon de commande et la marque des produits qui lui ont été livrés et posés faisaient encourir la nullité du bon de commande.
De même, il n’est pas démontré qu’il connaissait les possibles causes de nullité du bon de commande lorsqu’il a signé la fiche de réception des travaux le 11 mai 2018.
Le bon de commande qu’il a signé ne reprend aucune mention des dispositions du code de la consommation lui permettant de savoir ce que doit contenir un bon de commande, sous peine de nullité.
L’acceptation de la livraison, la pose et l’installation du matériel, sans réserve, l’absence d’usage de son droit à rétractation et le délai dans lequel M. [U] a agi pour solliciter la nullité des contrat, ne suffisent pas à caractériser qu’il aurait eu connaissance de l’irrégularité du bon de commande et entendu renoncer à cette nullité.
Dès lors, le fait que M et Mme [U] aient accepté la livraison du matériel et payé le crédit ne vaut pas confirmation du contrat.
Il convient en conséquence d’ordonner l’annulation du contrat principal et du contrat accessoire de prêt en application de l’article L 312-55 du code de la consommation qui dispose que le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Sur les conséquences de l’annulation du contrat principal et du contrat accessoire de prêt
L’annulation d’une vente entraînant de plein droit la remise des parties en l’état où elles se trouvaient antérieurement à sa conclusion.
Par conséquent, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a constaté que Monsieur et Madame [U] mettent à disposition du liquidateur judiciaire de la société l’ensemble du matériel objets du bon de commande n°5380 du 18 avril 2018 pour reprise aux frais de la société SOLUTION ECO ENERGIE SAS (SOLECO), que faute pour le mandataire judiciaire de la société de reprendre l’ensemble du matériel installé dans les deux mois de la signification du présent jugement, les époux [U] pourront en disposer comme ils le voudront.
En outre, l’annulation d’un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu’il finance, emporte pour l’emprunteur l’obligation de restituer au prêteur le capital prêté.
Sur la faute de la société DOMOFINANCE
Il appartenait à la banque de vérifier la régularité du bon de commande avant de verser les fonds, puisque cette dernière est tenue à une obligation de vigilance.
En n’y procédant pas, alors que le bon de commande comportait des irrégularités manifestes, la banque a commis une faute.
S’agissant d’une responsabilité contractuelle, les époux [U] ne peuvent solliciter des dommages et intérêts que s’ils démontrent un préjudice lié à la faute commise par son co-contractant, en application des dispositions 1231 et suivants du code civil.
Si les époux [U] invoquent avoir subi des désordres du fait de l’installation faite par la société SOLECO (leur lettre du 16 août 2018), ils ne produisent pas d’élément pouvant en justifier, n’étant versé aux débats que la fiche d’intervention SAV signée des deux parties, le 28 septembre 2018, qui mentionne ‘reprise de toutes les réserves, à ce jour satisfait des travaux de reprise sous réserve de fuite au prochaine pluie’.
De même, si l’installation photovoltaïque avait pour objectif l’auto-consommation, les époux [U] ne démontrent pas que l’objectif prévu par le bon de commande n’est pas atteint depuis les réparations des désordres du 28 septembre 2018.
En outre, ils ne prouvent pas supporter un coût annuel de 3535,32 euros de crédit sans aucune contrepartie et ce, alors que la revente d’électricité n’était pas prévue contractuellement entre les parties.
Enfin, les intimés ne démontrent aucun préjudice en lien avec la faute de la banque, tenant à l’absence de vérification de la régularité formelle du contrat principal, si bien que les époux [U] seront condamnés in solidum à restituer le capital emprunté, sous déduction des échéances déjà payées, outre intérêts au taux légal à compter de la date du présent arrêt.
Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.
Il sera également fait droit à la demande d’anatocisme de la société DOMOFINANCE sous les conditions prévues par l’article 1343-2 du code civil qui prévoit que les intérêts échus, qui sont dus au moins pour une année entière, produisent intérêt.
La société DOMOFINANCE ne démontre pas le préjudice économique subi du fait des agissements de la société SOLECO, avec laquelle elle n’a pas contracté, et alors que le présent arrêt prévoit que les époux [U] ont à restituer le capital emprunté déduction fait des échéances déjà payées.
Il n’y a donc pas lieu de fixer la créance de l’appelante au passif de la liquidation de la société SOLECO, ni de fixer sa condamnation à garantir les emprunteurs de leur condamnation au remboursement du capital emprunté
Ainsi, le jugement déféré sera infirmé sur ce point.
Sur les dépens et sur les frais irrépétibles
M et Mme [U] sont essentiellement succombants. Ils seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d’appel et seront déboutés de leurs demandes au titre des frais irrépétibles.
Le jugement déféré sera infirmé sur les dépens de première instance.
Pour des raisons tirées de l’équité, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. La société DOMOFINANCE sera déboutée en conséquence des demandes qu’elle a formées sur ce fondement.
Le jugement déféré sera également infirmé sur les frais irrépitibles de première instance.
La cour, statuant par arrêt de défaut, par mise à disposition au greffe :
CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a :
– prononcé la nullité du bon de commande signé le 18 avril 2018 par M. [W] [U] avec la société SOLUTION ECO ENERGIE SAS (SOLECO),
– annulé également le contrat accessoire de crédit conclu le 18 avril 2018 entre M. [W] [U] et Mme [P] [U] et la société DOMOFINANCE,
– constaté que Monsieur et Madame [U] mettent à disposition du liquidateur judiciaire de la société l’ensemble du matériel objets du bon de commande n°5380 du 18 avril 2018 pour reprise aux frais de la société SOLUTION ECO ENERGIE SAS (SOLECO), que faute pour le mandataire judiciaire de la société de reprendre l’ensemble du matériel installé dans les deux mois de la signification du présent jugement, les époux [U] pourront en disposer comme ils le voudront;
L’INFIRME pour le surplus ;
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT ;
CONDAMNE in solidum M. [W] [U] et Mme [P] [U] née [T] à restituer à la société DOMOFINANCE le capital emprunté, sous déduction des échéances déjà payées, outre intérêts au taux légal à compter de la date du présent arrêt ;
DIT qu’il sera fait application de l’article 1343-2 du code civil qui prévoit que les intérêts échus, qui sont dus au moins pour une année entière, produisent intérêt ;
REJETTE toute demande de la société DOMOFINANCE de voix fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société SOLECO la créance de l’appelante ou sa condamnation à garantir les époux [U] de leur condamnation au remboursement du capital emprunté, sous déduction des échéances déjà payées ;
REJETTE les demandes de M. [W] [U] et Mme [P] [U] née [T] tendant à voir priver la société DOMOFINANCE de sa créance à restitution et de la voir condamner en paiement des échéances réglées et du capital remboursé ;
REJETTE les demandes des parties faites au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel ;
CONDAMNE in solidum M. [W] [U] et Mme [P] [U] née [T] aux dépens de première instance et d’appel ;
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,