Google Ads : 2.5 millions d’euros de campagne non remboursables

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Google Ads : 2.5 millions d’euros de campagne non remboursables
Ce point juridique est utile ?

Y compris pour les virements bancaires en faveur de Google Ads, l’annonceur n’a que 3 mois pour contester les prélèvements SEPA auprès de sa banque.

Il est de jurisprudence constante qu’en application de l’article L.133-3 du code monétaire et financier ‘un prélèvement peut être initié par le bénéficiaire, qui donne un ordre de paiement au prestataire de services de paiement du payeur, fondé sur le consentement donné par ce dernier au bénéficiaire ; sauf anomalie apparente, non alléguée en l’espèce, le prestataire de services de paiement n’est pas tenu de s’assurer de l’existence du mandat de prélèvement donné par le payeur au bénéficiaire, préalablement à l’exécution de l’ordre de prélèvement donné par celui-ci.’ (Com. 24 mai 2018, n° 17-11.710).

Il résulte de ces dispositions que les parties étaient convenues d’un délai de contestation non pas de treize mois, mais de trois mois, de sorte que c’est à juste titre que le tribunal a débouté la société Artibat de sa demande tendant à voir condamner la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France à lui payer la somme de 2 604 442,33 euros correspondant au montant des prélèvements opérés sur une période de treize mois, du 5 juin 2018 au 5 avril 2019.

Pour les Services de paiement (versements et retraits d’espèces, virements, prélèvements, TIPSEPA, télérèglements SEPA…), hormis les opérations effectuées par carte de paiement et/ou de retrait le client doit signaler les opérations non autorisées ou mal exécutées inscrites au compte, sans tarder et dans un délai maximum de trois (3) mois à compter de la date d’écriture en compte, par envoi d’un courrier adressé en recommandé avec avis de réception à la banque.

A défaut de contestation dans le délai ci-dessus, les opérations seront considérées comme définitivement approuvées par le client sauf preuve contraire apportée par ce dernier.’

Selon l’article L. 133-7 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur applicable au litige :

‘Le consentement est donné sous la forme convenue entre le payeur et son prestataire de services de paiement.

Le consentement peut être donné par l’intermédiaire du bénéficiaire ou d’un prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement mentionné au 7° du II de l’article L. 314-1.

En l’absence d’un tel consentement, l’opération ou la série d’opérations de paiement est réputée non autorisée.

Le consentement peut être retiré par le payeur tant que l’ordre de paiement n’a pas acquis un caractère d’irrévocabilité conformément aux dispositions de l’article L. 133-8.

Le consentement à l’exécution d’une série d’opérations de paiement peut aussi être retiré, avec pour effet que toute opération postérieure est réputée non autorisée.’

En application des dispositions de l’article L. 133-24 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur applicable au litige :

‘L’utilisateur de services de paiement signale, sans tarder, à son prestataire de services de paiement une opération de paiement non autorisée ou mal exécutée et au plus tard dans les treize mois suivant la date de débit sous peine de forclusion à moins que le prestataire de services de paiement ne lui ait pas fourni ou n’ait pas mis à sa disposition les informations relatives à cette opération de paiement conformément au chapitre IV du titre 1er du livre III.

Sauf dans les cas où l’utilisateur est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, les parties peuvent convenir d’un délai distinct de celui prévu au présent article.’

Résumé de l’affaire

La société Artibat a interjeté appel d’une décision du tribunal de commerce de Paris prononçant sa liquidation judiciaire. Dans le cadre de cet appel, la société Artibat et la SCP [D] demandent à la cour de condamner la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France à leur payer une somme importante, avec des intérêts et des astreintes. La Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France, de son côté, demande le rejet des demandes de la société Artibat et réclame une indemnité ainsi que le remboursement des dépens. L’affaire est en attente de jugement après l’ordonnance de clôture rendue le 7 novembre 2023.

Les points essentiels

Demande de remboursement de la société Artibat

La société Artibat a demandé à la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France le remboursement des prélèvements SEPA non autorisés. La banque a reconnu sa responsabilité pour les prélèvements des trois derniers mois précédant la contestation de la société Artibat.

Arguments de la société Artibat

La société Artibat affirme que la banque n’a pas respecté ses obligations contractuelles et légales en ne traitant pas ses réclamations dans les délais requis et en refusant de lui fournir les motifs du refus de remboursement des opérations non-autorisées. Elle conteste les opérations enregistrées après le 5 juin 2018 et réclame le remboursement de 2 604 442,33 euros.

Arguments de la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France

La banque soutient que la société Artibat a reçu et accepté les conditions générales de la convention de compte courant. Elle affirme que les prélèvements SEPA étaient autorisés dans le cadre d’un contrat avec Google Ireland LTD. La banque a remboursé les prélèvements des trois mois précédant la contestation de la société Artibat.

Décision du tribunal

Le tribunal a débouté la société Artibat de ses demandes de remboursement, car les parties avaient convenu d’un délai de contestation de trois mois et non de treize mois. Le tribunal a confirmé le jugement en faveur de la banque. Les dépens et les frais irrépétibles ont été mis à la charge de la société Artibat.

Les montants alloués dans cette affaire: – Somme allouée à la société Artibat: entiers dépens d’appel
– Somme allouée au demandeur: aucune
– Somme allouée à toute autre partie: aucune

Réglementation applicable

– Article L. 133-7 du code monétaire et financier
– Article L. 133-24 du code monétaire et financier
– Article 1119 du code civil
– Article 696 du code de procédure civile

Texte de l’article L. 133-7 du code monétaire et financier:
Le consentement est donné sous la forme convenue entre le payeur et son prestataire de services de paiement.
Le consentement peut être donné par l’intermédiaire du bénéficiaire ou d’un prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement mentionné au 7° du II de l’article L. 314-1.
En l’absence d’un tel consentement, l’opération ou la série d’opérations de paiement est réputée non autorisée.
Le consentement peut être retiré par le payeur tant que l’ordre de paiement n’a pas acquis un caractère d’irrévocabilité conformément aux dispositions de l’article L. 133-8.
Le consentement à l’exécution d’une série d’opérations de paiement peut aussi être retiré, avec pour effet que toute opération postérieure est réputée non autorisée.

Texte de l’article L. 133-24 du code monétaire et financier:
L’utilisateur de services de paiement signale, sans tarder, à son prestataire de services de paiement une opération de paiement non autorisée ou mal exécutée et au plus tard dans les treize mois suivant la date de débit sous peine de forclusion à moins que le prestataire de services de paiement ne lui ait pas fourni ou n’ait pas mis à sa disposition les informations relatives à cette opération de paiement conformément au chapitre IV du titre 1er du livre III.
Sauf dans les cas où l’utilisateur est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, les parties peuvent convenir d’un délai distinct de celui prévu au présent article.

Texte de l’article 1119 du code civil:
Les conditions générales invoquées par une partie n’ont effet à l’égard de l’autre que si elles ont été portées à la connaissance de celle-ci et si elle les a acceptées.

Texte de l’article 696 du code de procédure civile:
Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Delphine MENGEOT, avocat au barreau de PARIS
– Me Dominique PENIN du LLP KRAMER LEVIN NAFTALIS & FRANKEL LLP, avocat au barreau de PARIS
– Me Delphine MENGEOT, avocat au barreau de PARIS

Mots clefs associés & définitions

– Remboursement
– Société Artibat
– Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France
– Prélèvements SEPA
– Contestation
– Conditions générales
– Mandat de prélèvement
– Délai de contestation
– Opérations non autorisées
– Litige
– Code monétaire et financier
– Virements SEPA
– Consentement
– Forclusion
– Courrier recommandé
– Contrat de compte courant
– Relevés de compte
– Référencement par mots clés
– Irrecevabilité
– Dépens
– Frais irrépétibles
– Remboursement: action de rendre de l’argent à une personne ou une entité
– Société Artibat: entreprise spécialisée dans le secteur de la construction
– Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France: institution financière régionale
– Prélèvements SEPA: système de prélèvement bancaire européen
– Contestation: action de contester une décision ou une situation
– Conditions générales: ensemble des règles et des clauses régissant une relation contractuelle
– Mandat de prélèvement: autorisation donnée à un créancier pour prélever des sommes sur un compte bancaire
– Délai de contestation: période pendant laquelle il est possible de contester une opération
– Opérations non autorisées: transactions effectuées sans l’accord du titulaire du compte
– Litige: désaccord ou conflit entre deux parties
– Code monétaire et financier: ensemble des lois et règlements régissant les activités financières
– Virements SEPA: transferts d’argent réalisés dans l’espace SEPA
– Consentement: accord donné de manière libre et éclairée
– Forclusion: expiration d’un délai légal pour agir en justice
– Courrier recommandé: envoi postal avec accusé de réception pour garantir la réception du courrier
– Contrat de compte courant: contrat liant une banque et son client pour la gestion d’un compte bancaire
– Relevés de compte: documents récapitulant les opérations effectuées sur un compte bancaire
– Référencement par mots clés: technique de référencement sur internet basée sur des mots clés
– Irrecevabilité: caractère de ce qui ne peut être reçu ou accepté
– Dépens: frais engagés dans le cadre d’une procédure judiciaire
– Frais irrépétibles: frais non récupérables dans le cadre d’un litige

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

7 février 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
21/12922
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 6

ARRET DU 07 FEVRIER 2024

(n° , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/12922 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEAXU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2021 – tribunal de commerce de Paris – 6ème chambre – RG n° 2020033369

APPELANTE

S.A.R.L. ARTIBAT

[Adresse 3]

[Localité 7]

N° SIRET : B52 176 988 5

agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

représentée par Me Delphine MENGEOT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1878

INTIMÉE

S.A. CAISSE D’EPARGNE ILE-DE-FRANCE

[Adresse 4]

[Localité 6]

N° SIRET : 382 900 942

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par Me Dominique PENIN du LLP KRAMER LEVIN NAFTALIS & FRANKEL LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : J008 avocat postulant et plaidant

PARTIE INTERVENANTE

S.C.P. [D], mandataire judiciaire, prise en la personne de Maître [O] [D] et agissant en qualité de liquidateur de la S.A.R.L. ARTIBAT

siège social :[Adresse 2]

étude : [Adresse 5]

N° SIRET : 798 818 118

représentée par Me Delphine MENGEOT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1878

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Décembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant M. Marc BAILLY, Président de chambre, et MME Laurence CHAINTRON, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Marc BAILLY, président de chambre

MME Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère

MME Laurence CHAINTRON, conseillère chargée du rapport

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.

* * * * *

La société à responsabilité limitée Artibat, dont le siège social est situé [Adresse 3], exerce l’activité de prestations de services au bâtiment telles que la serrurerie, la plomberie, la vitrerie et les travaux d’installation d’équipement thermique et climatisation.

Par convention conclue le 23 septembre 2016, elle a ouvert, un compte courant n° [Numéro identifiant 1] intitulé ‘ouverture libre convergence PM’ dans les livres de la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France.

Dans le cadre de son développement, la société Artibat a souscrit auprès de la société Google Ireland LTD, régie publicitaire de Google, un contrat de référencement par mots clés à compter du mois de janvier 2015.

La société Artibat a constaté que de nombreux prélèvements sur son compte, en faveur de Google Ireland LTD avaient été effectués sans son autorisation et sans aucune contrepartie commerciale.

Elle a fait réaliser par ses gestionnaires en charge de la communication une analyse des clics suite au référencement, qui a mis en évidence des clics dits ‘incorrects’.

A compter du mois de juillet 2019, elle a fait opposition sur les prélèvements de Google Ireland LTD, et a demandé, par courrier du 5 juillet 2019, à la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France le remboursement des sommes prélevées, selon elle, à tort à compter du mois de juin 2018 et ce pour un montant de 3 071 930,33 euros, au motif que les prélèvements n’étaient pas autorisés. Ce courrier étant demeuré sans réponse, la société Artibat a réitéré sa demande par courrier du 7 août 2019, puis par courrier du 25 septembre 2019.

Le 28 janvier 2020, la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France a remboursé la société Artibat à hauteur de la somme de 467 488 euros.

La société Artibat a fait assigner en référé la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France devant le tribunal de commerce de Paris qui, par ordonnance du 26 février 2020, a dit n’y avoir lieu à référé.

Par exploit d’huissier du 5 août 2020, la société Artibat a fait assigner en paiement la société Caisse d’épargne et de prévoyance Ile-de-France devant le tribunal de commerce de Paris.

Par jugement rendu le 20 mai 2021, le tribunal de commerce de Paris a :

– débouté la société à responsabilité limitée Artibat de l’intégralité de ses demandes,

– condamné la société à responsabilité limitée Artibat à payer à la société Caisse d’épargne et de prévoyance Ile-de-France la somme de 10 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus,

– condamné la société à responsabilité limitée Artibat aux dépens de l’instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 74,50 euros dont 12,20 euros de TVA,

– rappelé que l’exécution provisoire est applicable,

– débouté les parties de toutes leurs demandes autres, plus amples ou contraires.

Par déclaration du 8 juillet 2021, la société Artibat a interjeté appel de cette décision.

Par jugement du 7 avril 2022, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Artibat et la SCP [D], prise en la personne de Me [O] [D], mandataire judiciaire, a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 janvier 2023, la société Artibat et la SCP [D], intervenante volontaire à l’instance, demandent, au visa des articles L.133-7 et L.133-24 du code monétaire et financier, à la cour de :

– infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 20 mai 2021 en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau,

A titre principal,

– déclarer recevables et bien fondées les demandes de la société Artibat et de la SCP [D],

En conséquence,

– condamner la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France à leur payer la somme de 2 604 442,33 euros, avec les intérêts au taux légal à compter du 5 juillet 2019 et ce, sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

A titre subsidiaire,

– condamner la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France à leur payer la somme de 613 224,15 euros, avec les intérêts au taux légal à compter du 5 juillet 2019 et ce, sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

En tout état de cause,

– condamner la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France à payer la somme de 10 000 euros à la société Artibat sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France aux entiers dépens de la présente instance.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 février 2022, la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France, demande à la cour de :

– débouter la société Artibat de l’intégralité de ses demandes à toutes fins qu’elles comportent,

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 20 mai 2021 par le tribunal de commerce de Paris ;

Y ajoutant,

– condamner la société Artibat à payer à la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France une indemnité de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé aux dernières conclusions écrites déposées en application de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 novembre 2023 et l’audience fixée au 4 décembre 2023.

MOTIFS

Sur la demande de remboursement de la société Artibat

La société Artibat expose, au visa des articles L. 133-7 et L. 133-24 du code monétaire et financier, que la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France a manqué à son obligation de faire, tant contractuelle que légale, en ne traitant pas ses réclamations dans les délais requis et en refusant de l’informer des motifs du refus de remboursement des opérations non-autorisées. Elle allègue avoir signalé à la banque par courrier du 5 juillet 2019 qu’elle remettait en cause le caractère régulier des prélèvements SEPA. Elle relève que la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France ne justifie pas avoir sollicité le mandat de prélèvement SEPA auprès de la société Google Ireland LTD. Elle expose que devant le juge des référés, la banque s’est reconnue débitrice du remboursement des prélèvements effectués pendant les trois derniers mois précédant sa correspondance du 5 juillet 2019 et a procédé le 28 janvier 2020 au remboursement des sommes correspondantes. Elle relève que la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France verse aux débats une convention de compte courant non signée, dont il n’est pas rapporté la preuve qu’elle ait été portée à sa connaissance, et que les conditions générales dont elle se prévaut ne lui ont pas été remises et ne correspondent pas à celles applicables au compte ouvert dans les livres de la banque. Elle en déduit que les conditions générales de la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France ne lui sont pas opposables, de sorte qu’elle est bien fondée à contester les opérations litigieuses enregistrées après le 5 juin 2018 et estime que la banque est redevable à son égard de la somme de 2 604 442,33 euros correspondant aux opérations enregistrées entre le 5 juin 2018 et le 5 avril 2019.

A titre subsidiaire, si la cour considérait que les conditions générales de banque lui sont opposables, elle expose que le délai qui y est fixé pour les prélèvements SEPA est de 8 semaines et 3 mois et sollicite le remboursement du montant des prélèvements effectués pendant les 5 derniers mois précédant la contestation, qui s’élèvent à la somme de 1 080 712,15 euros, dont il convient de déduire la somme réglée par la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France d’un montant de 467 488 euros, soit une somme restant due de 613 224,15 euros.

En réplique, la banque soutient qu’à l’occasion de la signature du contrat de compte courant, les conditions générales de convention de ce compte ont été remises à la société Artibat et cette dernière a reconnu les avoir reçues. Ces conditions générales ont été actualisées au mois de janvier 2018. Elle expose que la société Artibat a toujours pu prendre connaissance des relevés de son compte courant ouvert dans ses livres et a donc pu s’apercevoir des très nombreux prélèvements SEPA opérés par la régie publicitaire Google Irlande LTD. Elle rappelle que la société Artibat avait souscrit avec cette dernière un contrat de ‘référencement par mots clés’, à compter du mois de janvier 2015. Or, en matière de paiement par prélèvements SEPA, le banquier du payeur n’est jamais en possession du mandat de prélèvement signé par son client. Elle souligne que les parties étaient convenues d’un délai de contestation de trois mois et non de treize mois, la société Artibat a signé les conditions particulières d’ouverture de compte libre convergence aux termes desquelles elle a reconnu avoir reçu un exemplaire des conditions générales relatives au compte. Elle souligne que, contrairement à ce que soutient l’appelante, ses conditions générales produites sont bien celles qui avaient à l’époque été communiquées à la société Artibat, le délai de contestation de trois mois est clairement mentionnée en page 22 de ses conditions générales, elle a recrédité à la société Artibat la totalité des prélèvements opérés par SEPA lors des trois mois qui ont précédé sa contestation motivée, on ne peut lui reprocher de ne pas avoir eu en sa possession le mandat de prélèvement ayant permis les prélèvements en faveur de Google Irlande LTD car la technique de paiement par prélèvement SEPA a ceci d’original que ce n’est pas le banquier du payeur qui dispose de l’instruction de son client de réaliser un paiement, mais un prélèvement est réalisé par le banquier du bénéficiaire du prélèvement sur la base d’un consentement préalable du payeur et aucune anomalie apparente n’a été alléguée par la société Artibat.

Il est constant que le règlement des prestations de Google Ireland LTD, société située en zone Europe, a été effectué par virements SEPA et qu’entre l’année 2015 et le mois de mai 2018, les virements ont été autorisés par la société Artibat et validés.

Le présent litige est donc circonscrit aux virements non autorisés effectués entre le 5 juin 2018 et le 5 avril 2019.

Selon l’article L. 133-7 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur applicable au litige :

‘Le consentement est donné sous la forme convenue entre le payeur et son prestataire de services de paiement.

Le consentement peut être donné par l’intermédiaire du bénéficiaire ou d’un prestataire de services de paiement fournissant un service d’initiation de paiement mentionné au 7° du II de l’article L. 314-1.

En l’absence d’un tel consentement, l’opération ou la série d’opérations de paiement est réputée non autorisée.

Le consentement peut être retiré par le payeur tant que l’ordre de paiement n’a pas acquis un caractère d’irrévocabilité conformément aux dispositions de l’article L. 133-8.

Le consentement à l’exécution d’une série d’opérations de paiement peut aussi être retiré, avec pour effet que toute opération postérieure est réputée non autorisée.’

En application des dispositions de l’article L. 133-24 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur applicable au litige :

‘L’utilisateur de services de paiement signale, sans tarder, à son prestataire de services de paiement une opération de paiement non autorisée ou mal exécutée et au plus tard dans les treize mois suivant la date de débit sous peine de forclusion à moins que le prestataire de services de paiement ne lui ait pas fourni ou n’ait pas mis à sa disposition les informations relatives à cette opération de paiement conformément au chapitre IV du titre 1er du livre III.

Sauf dans les cas où l’utilisateur est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, les parties peuvent convenir d’un délai distinct de celui prévu au présent article.’

En l’espèce, par courrier recommandé avec demande d’avis de réception du 5 juillet 2019, dont la banque ne conteste pas la réception, la société Artibat a informé la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France que sa comptabilité avait constaté que l’intégralité des prélèvements SEPA au débit de son compte courant ° [Numéro identifiant 1] du créancier Google Ireland Limited n’était pas autorisé et sollicité le remboursement total des débits engendrés par cette dernière pour la période des 13 derniers mois (pièce de l’appelante n° 3).

La société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France ne conteste pas le caractère non autorisé des prélèvements, mais soutient qu’elle était tenue de rembourser à sa cliente le montant des prélèvements opérés sur le compte de la société Artibat au profit de Google Ireland LTD, non pas sur une période de 13 mois comme elle le sollicitait, mais sur une période de 3 mois précédant la contestation du 5 juillet 2019, soit du 5 avril au 5 juillet 2019, ainsi que les parties en étaient contractuellement convenues, ce qu’elle a fait à hauteur de la somme de 467 888 euros.

Le montant de la somme remboursée au titre de cette période n’est pas contesté par la société Artibat.

La banque produit :

– la convention d’ouverture de compte courant ‘Libre Convergence PM’, signé par la société Artibat le 23 septembre 2016 aux termes de laquelle cette dernière a reconnu ‘avoir reçu un exemplaire du présent document et des Conditions Générales relatives au compte ainsi que les conditions et tarifs des services bancaires de la Caisse d’Epargne’ et déclaré ‘accepter les dispositions desdits documents’ (pièce de l’intimée n° 1),

– les conditions générales de fonctionnement de ce compte mises à jour au 1er septembre 2016 (pièce de l’intimée n° 2),

– un avenant à la convention d’ouverture de compte ‘Libre Convergence PM’, signé par la société Artibat le 31 juillet 2018 aux termes de laquelle cette dernière a reconnu ‘avoir reçu un exemplaire du présent document et des Conditions Générales relatives au compte ainsi que les conditions et tarifs des services bancaires de la Caisse d’Epargne’ et déclaré ‘accepter les dispositions desdits documents’ (pièce de l’intimée n° 4),

– les conditions générales de fonctionnement de ce compte mises à jour au 13 janvier 2018 (pièce de l’intimée n° 3).

Selon l’article 1119 du code civil, les conditions générales invoquées par une partie n’ont effet à l’égard de l’autre que si elles ont été portées à la connaissance de celle-ci et si elle les a acceptées.

En l’espèce, l’appelante soutient vainement que les conditions générales de la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France, lui sont inopposables dès lors qu’elle a déclaré, tant lors de la signature de la convention de compte courant au mois de septembre 2016, que lors de celle de son avenant au mois de juillet 2018, en avoir reçu un exemplaire et les avoir acceptées.

Elle ne saurait par ailleurs se prévaloir des conditions générales de la Caisse d’Epargne Grand Est Europe qui concernent une autre banque (pièce de l’appelante n° 11).

Elle reproche tout aussi vainement à la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France, alors qu’elle n’invoque aucune anomalie apparente, ne pas avoir eu en sa possession le mandat de prélèvement ayant permis les prélèvements litigieux en faveur de Google Ireland LTD, dans la mesure où il est de jurisprudence, en application de l’article L.133-3 du code monétaire et financier ‘qu’un prélèvement peut être initié par le bénéficiaire, qui donne un ordre de paiement au prestataire de services de paiement du payeur, fondé sur le consentement donné par ce dernier au bénéficiaire ; que, sauf anomalie apparente, non alléguée en l’espèce, le prestataire de services de paiement n’est pas tenu de s’assurer de l’existence du mandat de prélèvement donné par le payeur au bénéficiaire, préalablement à l’exécution de l’ordre de prélèvement donné par celui-ci.’ (Com. 24 mai 2018, n° 17-11.710).

L’article 2.2.2 des conditions générales mises à jour au 13 janvier 2018 (applicables à la période litigieuse) intitulé ‘Délais et modalités de contestations des opérations’ stipule que  :

‘- Pour les Services de paiement (versements et retraits d’espèces, virements, prélèvements, TIPSEPA, télérèglements SEPA…), hormis les opérations effectuées par carte de paiement et/ou de retrait le client doit signaler les opérations non autorisées ou mal exécutées inscrites au compte, sans tarder et dans un délai maximum de trois (3) mois à compter de la date d’écriture en compte, par envoi d’un courrier adressé en recommandé avec avis de réception à la Caisse d’Epargne …

A défaut de contestation dans le délai ci-dessus, les opérations seront considérées comme définitivement approuvées par le client sauf preuve contraire apportée par ce dernier.’

Par ailleurs, le paragraphe f) de l’article 1.4.5.1 de ces conditions générales, spécifique au prélèvement SEPA, intitulé ‘Délai et modalités de contestation d’un ordre de prélèvement SEPA reçu’ prévoit que :

‘Après l’exécution d’un prélèvement SEPA, le client débiteur qui conteste l’opération de prélèvement, peut en demander son remboursement dans les délais décrits ci-après qu’il s’engage à respecter :

– Soit dans un délai de huit semaines à compter de la date du débit du compte, quel que soit le motif de sa contestation.

– soit passé ce délai de huit semaines à compter de la date du débit du compte ‘dans un délai maximum de trois mois, indiqué à l’article 2. 2. 2 a) de la partie ci dessus ‘Le compte courant’ de la présente Convention, lorsqu’il s’agit d’un prélèvement non autorisé (du fait de l’absence d’un mandat de prélèvement ou suite à la révocation du mandat de prélèvement).’

Il résulte de ces dispositions que les parties étaient convenues d’un délai de contestation non pas de treize mois, mais de trois mois, de sorte que c’est à juste titre que le tribunal a débouté la société Artibat de sa demande tendant à voir condamner la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France à lui payer la somme de 2 604 442,33 euros correspondant au montant des prélèvements opérés sur une période de treize mois, du 5 juin 2018 au 5 avril 2019.

C’est également à juste titre que le tribunal a débouté la société Artibat de sa demande subsidiaire tendant à voir condamner la société Caisse d’Epargne et de Prévoyance Ile-de-France à lui payer la somme de 1 080 712,15 euros correspondant au montant des prélèvements opérés sur une période de 8 semaines et 3 mois, alors qu’il ressort clairement de l’article 1.4.5.1 paragraphe f des conditions générales de la banque précité spécifique au prélèvement SEPA, que le délai de contestation en cas de prélèvement non autorisé est de 3 mois maximum, passé un délai de huit semaines à compter de la date du débit du compte, et non de 8 semaines et 3 mois, soit 5 mois, comme tente vainement de le soutenir la société appelante.

Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu’il a débouté la société Artibat de l’intégralité de ses demandes.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. L’appelante, prise en la personne de son liquidateur la SCP [D] prise en la personne de Me [O] [D], sera donc condamnée aux dépens.

Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles qu’elles ont été contraintes d’engager dans la présente instance pour assurer la défense de leurs intérêts. Elles seront par conséquent déboutées de leurs demandes respectives au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de Paris du 20 mai 2021 ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la société Artibat aux entiers dépens d’appel ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

REJETTE toute autre demande.

* * * * *

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


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