Intérêt à agir et créance : déboutée de sa demande

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Intérêt à agir et créance : déboutée de sa demande
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Intérêt à agir et créance : déboutée de sa demande

Sur l’intérêt à agir de la société ML Conseils, ès qualités

La société ML Conseils, ès qualités, agit en tant que liquidateur judiciaire de la société Sotradis pour obtenir le paiement de prestations de transport de marchandises réalisées pour le compte de la société Urban Logistique. La société Urban Logistique conteste l’intérêt à agir de la société ML Conseils, soutenant qu’elle n’a pas la qualité d’expéditeur ou de destinataire des marchandises transportées. Cependant, la cour reconnaît que la société ML Conseils, ès qualités, justifie d’un intérêt à agir au sens des articles 31 et 32 du code de procédure civile.

Sur le bien-fondé de la demande en paiement

La société ML Conseils, ès qualités, réclame le paiement de 133.849,76 € à la société Urban Logistique pour des prestations de transport de marchandises effectuées par la société Sotradis. Elle se base sur des documents fournis par la société Proxidis Express pour prouver que la société Urban Logistique était bien l’expéditeur et le destinataire des marchandises transportées. Cependant, la société Urban Logistique conteste ces allégations, arguant que les créances sont prescrites et que les preuves fournies ne sont pas suffisantes pour établir sa responsabilité.

Sur la prescription

La cour constate que les actions en garantie du paiement du transport sont prescrites pour les prestations antérieures au 1er juillet 2018. Par conséquent, la société ML Conseils, ès qualités, ne peut réclamer le paiement que pour les prestations postérieures à cette date.

Sur la créance

Malgré les documents fournis par la société ML Conseils, ès qualités, la cour estime que les preuves ne sont pas suffisantes pour établir que la société Urban Logistique était l’expéditeur ou le destinataire des marchandises transportées. Aucun lien clair n’est établi entre les prestations de transport et la responsabilité de la société Urban Logistique.

En conséquence, la demande en paiement de la société ML Conseils, ès qualités, est rejetée par la cour, confirmant ainsi le jugement initial. Les dépens et frais irrépétibles seront à la charge de la liquidation de la société Sotradis.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 55A

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 08 DECEMBRE 2022

N° RG 21/02829 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UPF5

AFFAIRE :

Société ML CONSEILS

C/

S.A.S. URBAN LOGISTIQUE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Avril 2021 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° Chambre : 01

N° RG : 2019F0503

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Franck LAFON

Me Véronique BUQUET-ROUSSEL

TC VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE HUIT DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Société ML CONSEILS représentée par Maître [S] [H] en qualité de liquidateur judiciaire de la Société SOTRADIS fonction à laquelle elle a été désignée par jugement du Tribunal de commerce de Versailles en date du 22.11.2018.

RCS Versailles n° 818 851 925

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 et Me Marc LENOTRE de la SELARL CABINET FOURNIER LA TOURAILLE, Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 459

APPELANTE

****************

S.A.S. URBAN LOGISTIQUE

RCS Versailles n° 450 776 810

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 et Me CHAMPETTIER DE RIBES substituant à l’audience Me Alexia ESKINAZI de la SELAS LPA-CGR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0238

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 27 Octobre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur François THOMAS, Président,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS Urban Logistique exerce une activité de prestataire de services en logistique.

Elle a confié à la SA Proxidis Express des prestations de transport de nuit de marchandises.

Au cours de l’année 2018, la société Proxidis Express a sous-traité à la SAS Sotradis différentes missions de transport de marchandises mais de nombreuses factures sont demeurées impayées par la société Proxidis Express. Le 10 octobre 2018, la société Proxidis Express a résilié unilatéralement le contrat liant les deux sociétés.

Par jugement du 30 octobre 2018, le tribunal de commerce de Lyon a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la société Proxidis Express. Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire selon jugement du 17 décembre 2018.

Par jugement du 22 novembre 2018, le tribunal de commerce de Versailles a prononcé la liquidation judiciaire de la société Sotradis et a désigné la SELARL ML Conseil, représentée par Me [S] [H], en qualité de liquidateur.

Le 4 avril 2019, par l’intermédiaire de son conseil, la société ML Conseils, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Sotradis, a mis en demeure la société Urban Logistique de lui régler la somme de 133.849,76 € au titre des prestations de transport assurées par la société Sotradis, à la demande de la société Proxidis Express, pour le compte de la société Urban Logistique en qualité d’expéditeur.

La société Urban Logistique ayant refusé de s’acquitter de la somme réclamée, la société ML Conseils, ès qualités, l’a assignée en paiement de cette somme devant le tribunal de commerce de Versailles, par acte du 1er juillet 2019.

Par jugement contradictoire du 14 avril 2021, le tribunal de commerce de Versailles a:

– Dit que la SELARL ML Conseils, représentée par Me [S] [H], ès qualités de liquidateur de la SAS Sotradis, n’a pas d’intérêt à agir à l’encontre de la SAS Urban Logistique ;

– Débouté la SELARL ML Conseils, représentée par Me [S] [H], ès qualités de liquidateur de la SAS Sotradis, de ses demandes ;

– Fixé à la somme de 3.000 € le montant de la créance chirographaire de la société Urban Logistique au passif de la société Sotradis au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Ordonné l’exécution provisoire du jugement ;

– Condamné la SAS Sotradis aux entiers dépens de l’instance et dit que ces frais seront pris en frais privilégiés de procédure, dont les frais de greffe s’élèvent à la somme de 73,22 €.

Par déclaration du 30 avril 2021, la société ML Conseils, prise en la personne de Me [H], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Sotradis, a interjeté appel du jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 21 juillet 2021, la société ML Conseils, ès qualités, demande à la cour de :

– La déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

Y faisant droit,

– Infirmer la décision dont appel en toutes ses dispositions ;

– Débouter la société Urban Logistique de ses demandes, fins et conclusions et notamment de sa fin de non-recevoir fondée sur un prétendu défaut d’intérêt à agir ;

– Recevoir la société ML Conseils en ses demandes ;

En conséquence,

– Condamner la société Urban Logistique au paiement de la somme de 133.849,76 € avec intérêt au taux légal à compter de la date du 12 avril 2019, date de réception de la mise en demeure ;

– Condamner la société Urban Logistique au paiement d’une somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner la société Urban Logistique aux entiers dépens d’appel dont distraction au profit de Me Lafon, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 20 octobre 2021, la société Urban Logistique demande à la cour de :

– Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Versailles en date du 14 avril 2021 en l’ensemble de ses dispositions ;

En conséquence,

A titre principal,

– Débouter la société ML Conseils, représentée par Me [S] [H], agissant en qualité de liquidateur de la société Sotradis, en ce qu’elle ne justifie pas d’un intérêt à agir à l’encontre de la société Urban Logistique ;

A titre subsidiaire,

– Débouter la société ML Conseils, représentée par Me [S] [H], agissant en qualité de liquidateur la société Sotradis, en ce qu’elle ne démontre pas la réalité des transports effectués par la société Sotradis dont il est réclamé paiement et ne justifie pas du quantum des créances invoquées ;

– Débouter la société ML Conseils, représentée par Me [S] [H], agissant en qualité de liquidateur de la société Sotradis, en ce que les créances correspondant aux prestations de transport réalisées antérieurement au 1er juillet 2018 sont prescrites ;

En conséquence,

– Rejeter l’ensemble des demandes, fins et conclusions de la société ML Conseils, représentée par Me [S] [H], agissant en qualité de liquidateur de la société Sotradis ;

En tout état de cause,

– Condamner la société ML Conseils, représentée par Me [S] [H], agissant en qualité de liquidateur de la société Sotradis, à payer à la société Urban Logistique la somme de 10.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens qui seront recouvrés par Me Buquet-Roussel, avocat, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 15 septembre 2022.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur l’intérêt à agir de la société ML Conseils, ès qualités

La société Urban Logistique soutient à titre principal que la société ML Conseils, ès qualités, n’a pas d’intérêt à agir à son encontre sur le fondement de l’article L.132-8 du code de commerce, dès lors que la société Proxidis Express revêt seule la qualité d’expéditeur et de destinataire des marchandises pour le transport desquelles il est sollicité paiement.

La société ML Conseils, ès qualités, s’estime au contraire recevable à agir en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Sotradis, considérant que la société Urban Logistique avait tout autant la qualité d’expéditeur que de destinataire des marchandises transportées par la société Sotradis. Elle souligne la particulière mauvaise foi de la société Urban Logistique.

*****

Selon l’article 31 du code de procédure civile, « L’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé. »

En application de l’article 32 du même code, l’absence d’intérêt légitime est sanctionnée par l’irrecevabilité de la demande.

En l’espèce, il n’est pas discuté que la société Urban Logistique a confié à la société Proxidis Express des prestations de transport de nuit de marchandises et que, par ailleurs, courant 2018, la société Sotradis a réalisé à la demande de la société Proxidis Express différentes missions de transport de marchandises qui sont demeurées impayées.

Selon l’appelante, une partie de ces missions a été effectuée pour le compte de la société Urban Logistique.

La société Sotradis, qui est représentée à la présente instance par son liquidateur, invoque ainsi une créance dont elle entend obtenir le paiement par la société Urban Logistique sur le fondement de l’article L.132-8 du code de commerce, selon lequel le voiturier a une action directe en paiement de ses prestations à l’encontre de l’expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport.

La société ML Conseils, ès qualités, prétend en effet que la société Urban Logistique a la qualité d’expéditeur et de destinataire des marchandises transportées par la société Sotradis.

Alors que l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action, il doit être retenu que, contrairement à ce soutient la société Urban Logistique, la société ML Conseils, ès qualités, justifie d’un intérêt à agir au sens des articles 31 et 32 précités, de sorte que, par infirmation du jugement entrepris, le moyen d’irrecevabilité doit être rejeté.

L’ensemble des moyens développés par la société Urban Logistique au soutien de la fin de non-recevoir sera en conséquence examiné sous l’angle du bien-fondé de la demande en paiement de la société Sotradis.

Sur le bien-fondé de la demande en paiement

La société ML Conseils, ès qualités, sollicite, au visa de l’article L.132-8 du code de commerce, la condamnation de la société Urban Logistique au paiement de la somme de 133.849,76 €, correspondant aux prestations de transport de marchandises effectuées par la société Sotradis d’avril à octobre 2018, avec intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2019.

Elle expose que la société Proxidis Express a confié à la société Sotradis des missions de transport de nuit entre son site de [Localité 5] et ses sites de [Localité 4], [Localité 6] et [Localité 3], pour lesquelles elle a été mandatée par des expéditeurs donneurs d’ordre tels que la société Urban Logistique ; qu’en sous-traitant ces missions, la société Proxidis Express a agi pour le compte de ses propres clients ; que 16 sociétés donneuses d’ordre, dont la société Urban Logistique, ont été mises en demeure de régler les sommes dues, sur le fondement de l’article L.132-8 du code de commerce, et qu’à ce jour 12 d’entre elles se sont exécutées, reconnaissant la réalité des prestations fournies par la société Sotradis sur la base de pièces identiques à celles qui sont versées aux débats

Elle prétend que la qualité d’expéditeur et de destinataire de la société Urban Logistique apparait clairement à la lecture des relevés ‘Colix’ transmis par la société Proxidis Express et détaillant chacun des milliers de colis transportés par cette dernière ou un de ses sous-traitants à la demande de la société Urban Logistique.

Elle indique avoir calculé, à partir de ces tableaux fournis par la société Proxidis Express, le nombre de colis transportés par la société Sotradis, mois par mois, client par client, puis avoir établi un récapitulatif des sommes dues au prorata du nombre de colis transportés pour chaque client.

Elle considère que la totalité des sommes réclamées à la société Urban Logistique sont dues dès lors que les prestations réalisées par la société Sotradis en avril, mai et juin 2018 ont fait l’objet de factures datées du 30 juin 2018 qui arrivaient à échéance le 31 juillet de la même année, de sorte qu’en saisissant le tribunal de commerce de Versailles le 1er juillet 2019, elle a agi dans le délai d’un an prévu par l’article L.133-6 alinéa 2 du code de commerce.

La société Urban Logistique s’oppose à la demande en paiement, ne se reconnaissant ni expéditeur, ni destinataire des marchandises transportées par la société Sotradis sur des axes [Localité 4]/[Localité 6]/[Localité 3] entre les hubs régionaux de la société Proxidis Express, sur ordre de cette dernière, qui n’a jamais mentionné « agir pour le compte de ». Elle considère que la signature de protocoles d’accord avec d’autres sociétés prétendument donneuses d’ordres ne peut en aucun cas justifier le bien-fondé de l’action de la société ML Conseils, ès qualités.

Elle prétend que les créances dont il lui est réclamé paiement, relatives aux prestations de transport antérieures au 1er juillet 2018, sont prescrites, indépendamment de la date d’échéance des factures correspondantes.

Elle critique les pièces produites au soutien de la demande en paiement, soutenant qu’elles ne revêtent aucun caractère probatoire et que la société ML Conseils, ès qualités, échoue à démontrer que la société Sotradis a personnellement transporté l’ensemble des colis pour lesquels elle demande un paiement direct.

Elle indique que la méthode de calcul retenue par la société ML Conseils, ès qualités, n’est pas pertinente et ne peut être accueillie dans la mesure où elle repose uniquement sur le nombre de colis transportés sans prendre en compte les critères de taille, de poids et de nature du colis, notamment lorsqu’il est fragile.

Elle fait ensuite observer qu’il n’est pas exclu que la société Sotradis ait procédé à un groupage de marchandises en provenance de divers expéditeurs, pour lequel elle réclame à la société Urban Logistique l’intégralité du paiement, ce qui est prohibé.

Elle souligne enfin que l’appelante fonde sa demande sur la facturation adressée par la société Sotradis à la société Proxidis Express mais qu’elle ne démontre pas le prix convenu entre cette dernière et la société Urban Logistique, ce dernier prix étant le seul dont elle pourrait éventuellement obtenir réparation.

*****

– sur la prescription

Aux termes de l’article L.133-6 du code de commerce :

« Les actions pour avaries, pertes ou retards, auxquelles peut donner lieu contre le voiturier le contrat de transport, sont prescrites dans le délai d’un an, sans préjudice des cas de fraude ou d’infidélité.

Toutes les autres actions auxquelles ce contrat peut donner lieu, tant contre le voiturier ou le commissionnaire que contre l’expéditeur ou le destinataire, aussi bien que celles qui naissent des dispositions de l’article 1269 du code de procédure civile, sont prescrites dans le délai d’un an.

Le délai de ces prescriptions est compté, dans le cas de perte totale, du jour où la remise de la marchandise aurait dû être effectuée, et, dans tous les autres cas, du jour où la marchandise aura été remise ou offerte au destinataire. (…) ».

La société ML Conseils, ès qualités, sollicite le paiement de créances pour des prestations de transport de marchandises réalisées entre les mois d’avril et octobre 2018.

Conformément aux dispositions susvisées de l’alinéa 3 de l’article L.133-6, le point de départ du délai de prescription d’un an est la remise des marchandises au destinataire.

La société ML Conseils, ès qualités, ayant saisi le tribunal de commerce de Versailles par assignation délivrée le 1er juillet 2019, elle peut revendiquer le paiement des seules prestations de transport réalisées après le 1er juillet 2018.

Il en résulte que l’action en garantie du paiement du prix du transport est prescrite pour toutes les factures correspondant à des prestations de transport antérieures au 1er juillet 2018, peu important la date à laquelle ces prestations ont été facturées.

– sur la créance

L’article L.132-8 du code de commerce dispose : « La lettre de voiture forme un contrat entre l’expéditeur, le voiturier et le destinataire ou entre l’expéditeur, le destinataire, le commissionnaire et le voiturier. Le voiturier a ainsi une action directe en paiement de ses prestations à l’encontre de l’expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport. Toute clause contraire est réputée non écrite ».

Il appartient à la société ML Conseils, ès qualités, de rapporter la preuve que les prestations de transport accomplies par la société Sotradis et restées impayées concernaient la société Urban Logistique en qualité d’expéditeur ou de destinataire.

La société ML Conseils, ès qualités, verse aux débats :

– La proposition commerciale adressée le 6 mai 2018 par la société Sotradis à la société Proxidis Express, à laquelle sont annexées les conditions générales de transport de marchandises Sotradis : cette proposition commerciale, qui a été signée le 16 mai 2018 par la société Proxidis Express en même temps que les conditions générales, vise plusieurs tarifs selon des axes de transport (axe [Localité 5] -> [Localité 4], axe [Localité 5] -> [Localité 6]) et ne fait aucunement référence aux clients de la société Proxidis Express et notamment pas à la société Urban Logistique (pièce Sotradis n°1) ;

– Les bons de commande émis par la société Proxidis Express et les factures correspondantes établies par la société Sotradis, sur la base d’un nombre de jours travaillés multiplié par le tarif applicable à l’axe de transport (ville de destination) : il n’y est aucunement fait mention de la société Urban Logistique (pièces Sotradis n°6 à 12);

– Des tableaux récapitulatifs adressés par la société Proxidis Express à la société Sotradis et récapitulant, par numéro d’axe et par client, le nombre de colis transportés en janvier 2018 et de juin à octobre 2018, sans aucune explication, relative notamment au prestataire ayant réalisé le transport (pièce Sotradis n°13) ;

– Des tableaux récapitulatifs adressés par la société Proxidis Express à la société Sotradis et récapitulant, par numéro d’axe et par client, le nombre de colis transportés par la société Sotradis en avril et mai 2018, sans aucune autre précision (pièce Sotradis n°14) ;

– Des tableaux récapitulatifs par axe et par client, d’origine indéterminée, comportant des données chiffrées non explicitées (pièces Sotradis n°15, 16 et 33) ;

– Un tableau récapitulatif de sommes en euros par client, d’origine indéterminée, ainsi qu’un tableau récapitulatif des bons de commande établis entre mai 2017 et octobre 2018 (pièces Sotradis n°17 et 18) ;

– Des tableaux Excel de plusieurs milliers de lignes, dont la société ML Conseils indique qu’il s’agit de relevés ‘Colix’ dressés par la société Proxidis Express pour les mois de mai à octobre 2018 afin d’assurer la traçabilité de chacun des colis transportés pour le compte de la société Urban Logistique, de leur point de départ jusqu’à leur point d’arrivée (pièces Sotradis n°26 à 31 produites sur clé USB) : outre qu’il n’est pas possible de déterminer l’auteur de ces relevés, faute de précisions, il apparait que les informations figurant dans ce listing ainsi que la seule mention ‘Urban Still’ ou ‘Urban Fenwick’ dans la colonne intitulée ‘prestation’ ne permettent pas de déterminer quels colis ont effectivement été tranportés par la société Sotradis et donc d’établir un lien avec les prestations de transport de marchandises que la société Sotradis a réalisées à la demande de la société Proxidis Express ;

– Des factures établies par la société Proxidis Express à l’attention de la société Urban Logistique pour les mois de juin à octobre 2018, qui mentionnent uniquement un prix global de transport, sans aucun détail, et ne font référence à aucun axe de transport.

Aucun de ces éléments ne fait mention de la société Urban Logistique en qualité d’expéditeur ou de destinataire, ni ne permet d’établir que les prestations qui y sont désignées correspondent à des prestations de transport réalisées par la société Sotradis entre le mois de juillet et le mois d’octobre 2018 pour le compte de la société Urban Logistique en tant qu’expéditeur ou destinataire des marchandises transportées.

Comme le fait en outre justement observer la société Urban Logistique, la société Proxidis Express a expédié et reçu les marchandises sur ses plateformes sans jamais mentionner « agir pour le compte de ».

La cour dira que les pièces produites par la société ML Conseils, ès qualités, sont impropres à justifier de l’existence d’une créance à l’encontre de la société Urban Logistique, et ce sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens invoqués.

La société ML Conseils, ès qualités, sera en conséquence déboutée de sa demande, par confirmation du jugement entrepris.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile seront confirmées.

Les dépens d’appel seront fixés au passif de la liquidation de la société Sotradis.

Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement rendu le 14 avril 2021 par le tribunal de commerce de Versailles, sauf en celles de ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

REJETTE le moyen d’irrecevabilité tiré du défaut d’intérêt à agir opposé à la société ML Conseils, prise en la personne de Me [S] [H], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Sotradis ;

DÉCLARE irrecevable comme étant prescrite l’action de la société ML Conseils, prise en la personne de Me [S] [H], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Sotradis, en garantie du paiement du prix du transport s’agissant des créances relatives aux prestations de transport réalisées antérieurement au 1er juillet 2018 ;

DÉBOUTE la société ML Conseils, prise en la personne de Me [S] [H], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Sotradis, de sa demande en paiement ;

FIXE au passif de la liquidation de la société Sotradis les dépens d’appel ;

DÉBOUTE les parties de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur François THOMAS, Président et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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