Congé de fin d’activité non éligible

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Congé de fin d’activité non éligible
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Congé de fin d’activité non éligible

Sur la demande de résiliation judiciaire

La cour observe que M. [R] [I] ne remet pas en cause en appel le rejet de sa demande de condamnation solidaire à l’égard des gérants de la SARL Transport Crignon.

M. [R] [I] sollicite la résiliation judiciaire du contrat de travail aux motifs que l’employeur a manqué à ses obligations en ne souscrivant pas les contrats de prévoyance sans régulariser cette situation en dépit de la décision de référé le lui ordonnant, le privant ainsi de la possibilité de bénéficier du congé de fin d’activité alors qu’il disposait de 26 années de conduite.

La résiliation judiciaire du contrat de travail peut être prononcée si l’employeur n’exécute pas ses obligations contractuelles et que les manquements sont d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Sur le congé de fin d’activité

Le congé de fin d’activité a été créé pour les conducteurs des entreprises des transports de marchandises ou de déménagement relevant du champ d’application de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport.

Ses conditions d’accès sont au nombre de trois et sont cumulatives : occuper à la date de cessation effective de l’activité un emploi de conducteur routier de transport de marchandises ou de déménagement, être âgé d’au moins 57 ans, justifier avoir exercé pendant 26 ans, de façon continue ou discontinue, un emploi de conduite d’un véhicule de plus de 3,5 tonnes de PTAC affecté au transport de marchandises ou de déménagement dans une entreprise relevant du champ d’application de la convention collective.

En l’espèce, M. [R] [I] n’était pas éligible au congé de fin d’activité en raison de son nombre d’années d’exercice insuffisant.

Sur la prime d’ancienneté

M. [R] [I] sollicite paiement d’un rappel de prime d’ancienneté pendant 27 mois et les congés payés afférents.

L’employeur s’oppose à cette demande en l’absence de disposition conventionnelle relative à l’existence d’une prime d’ancienneté.

La cour infirme le jugement et déboute le salarié de sa demande.

Sur la liquidation de l’astreinte

M. [R] [I] sollicite la liquidation de l’astreinte à hauteur de 124 800 euros en raison du non-respect d’une décision de référé.

La cour condamne l’employeur à verser une somme de 10 000 euros au titre de la liquidation de l’astreinte.

Sur les dépens et frais irrépétibles

La SARL Transport Crignon est condamnée aux entiers dépens et à payer des frais irrépétibles à M. [R] [I].

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 21/02686 – N° Portalis DBV2-V-B7F-I2EX

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 08 JUIN 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE ROUEN du 07 Juin 2021

APPELANTE :

S.A.R.L. TRANSPORT CRIGNON

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Matthieu ROUSSINEAU de l’AARPI ROUSSINEAU AVOCATS, avocat au barreau de ROUEN

INTIME :

Monsieur [R] [I]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Caroline VELLY de la SELARL VD & ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 02 Mai 2023 sans opposition des parties devant Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Madame BACHELET, Conseillère

Madame BERGERE, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme WERNER, Greffière

DEBATS :

A l’audience publique du 02 Mai 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 08 Juin 2023

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 08 Juin 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [R] [I] a été engagé par la SARL Transport Crignon en qualité de conducteur poids lourds par contrat de travail à durée indéterminée du 1er août 2011.

Les relations contractuelles des parties étaient soumises à la convention collective des entreprises des transports routiers et activités auxiliaires du transport.

Par requête du 8 juin 2020, M. [R] [I] a saisi le conseil de prud’hommes de Rouen en résiliation judiciaire du contrat de travail et paiement de rappels de salaire et d’indemnités.

A la suite d’un accident du travail du 14 avril 2017 et d’un avis d’inaptitude à son poste du 25 mai 2020, le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement a été notifié au salarié le 3 juillet 2020.

Par jugement du 7 juin 2021, le conseil de prud’hommes a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à effet au 15 juillet 2020, produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamné la SARL Transport Crignon à verser à M. [R] [I] les sommes suivantes :

dommages et intérêts : 22’000 euros,

indemnité compensatrice de préavis : 5’176,58 euros,

congés payés y afférent : 517,65 euros,

indemnité légale de licenciement : 5’877,58 euros,

rappel de prime d’ancienneté : 2’129,49 euros,

congés payés y afférent : 212,95 euros,

indemnité au titre de la liquidation d’astreinte ordonnée par la formation de référé du 20 février 2020 : 68’400 euros,

indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 2’000 euros,

dit n’y avoir lieu à exécution provisoire au-delà des chefs de condamnation pour lesquels elle est de droit, débouté M. [R] [I] du surplus de ses demandes, débouté la SARL Transport Crignon de l’intégralité de ses demandes, condamné la SARL Transport Crignon aux entiers dépens.

La SARL Transport Crignon a interjeté un appel limité le 30 juin 2021.

Par conclusions remises le 24 septembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, la SARL Transport Crignon demande à la cour de :

– la dire recevable et bien fondée en ses demandes,

– l’y recevant,

– infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté M. [R] [I] de sa demande de condamnation solidaire,

statuant à nouveau,

– débouter M. [R] [I] de toutes ses demandes à toutes fins qu’elles procèdent,

– condamner M. [R] [I] à lui verser la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– le condamner aux dépens.

Par conclusions remises le 20 décembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, M. [R] [I] demande à la cour de :

– le recevoir en ses conclusions d’intimé et l’y déclarer bien fondé,

– débouter la SARL transports Crignon de son appel, de ses demandes, fins et conclusions,

– confirmer le jugement rendu sauf sur le montant des dommages et intérêts, sollicitant 62 000 euros et sur celui de la liquidation de l’astreinte, sollicitant 124 800 euros

– y ajoutant, condamner la SARL transports Crignon à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 13 avril 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La cour observe que M. [R] [I] ne remet pas en cause en appel le rejet de sa demande de condamnation solidaire à l’égard des gérants de la SARL Transport Crignon.

I – Sur la demande de résiliation judiciaire

M. [R] [I] sollicite la résiliation judiciaire du contrat de travail aux motifs que l’employeur a manqué à ses obligations en ne souscrivant pas les contrats de prévoyance sans régulariser cette situation en dépit de la décision de référé le lui ordonnant, le privant ainsi de la possibilité de bénéficier du congé de fin d’activité alors qu’il disposait de 26 années de conduite.

L’employeur fait valoir qu’en application des dispositions conventionnelles, le salarié ne réunissait pas les conditions lui permettant de bénéficier du congé de fin d’activité, de sorte que le motif fondant la résiliation judiciaire n’est pas établi, quand bien même le contrat obligatoire de prévoyance n’aurait pas été souscrit.

La résiliation judiciaire du contrat de travail peut être prononcée si l’employeur n’exécute pas ses obligations contractuelles et que les manquements sont d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Le congé de fin d’activité a été créé pour les conducteurs des entreprises des transports de marchandises ou de déménagement relevant du champ d’application de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport.

Ses conditions d’accès sont au nombre de trois et sont cumulatives :

– occuper à la date de cessation effective de l’activité un emploi de conducteur routier de transport de marchandises ou de déménagement,

– être âgé d’au moins 57 ans,

– justifier avoir exercé pendant 26 ans, de façon continue ou discontinue, un emploi de conduite d’un véhicule de plus de 3,5 tonnes de PTAC affecté au transport de marchandises ou de déménagement dans une entreprise relevant du champ d’application de la convention collective.

Pour l’appréciation des années de conduite, les périodes de suspension du contrat de travail pour accident du travail survenu dans l’exercice du métier de conducteur sont validées, comme pour les congés payés, dans la limite maximale d’une année continue.

En l’espèce, il résulte du relevé de carrière établi par la Carcept que M. [R] [I] a été conducteur routier dans le transport de marchandises sans discontinuer du 16 mai 1989 au 29 août 2001, puis du 1er avril 2005 au 22 juillet 2011, enfin à compter du 1er août 2011.

Il n’est pas discuté qu’il a été victime d’un accident du travail le 14 avril 2017.

Aussi, en application des dispositions relatives au congé de cessation d’activité, la durée de service s’apprécie jusqu’au 14 avril 2018. Or, à cette date, le salarié comptait 25 ans 3 mois et 24 jours d’exercice, de sorte qu’il n’était pas éligible à ce dispositif.

Par conséquent, même si le manquement de l’employeur est établi en ce qu’il s’est abstenu de souscrire aux contrats de prévoyance obligatoires, en tout état de cause, alors qu’il n’est invoqué aucune autre conséquence que celle afférente au congé de cessation d’activité, ce manquement n’était pas de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail et par arrêt infirmatif, la cour rejette la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, et celles subséquentes.

II – Sur la prime d’ancienneté

M. [R] [I] sollicite paiement d’un rappel de prime d’ancienneté pendant 27 mois et les congés payés afférents.

L’employeur s’y oppose en faisant valoir qu’en l’absence de disposition conventionnelle relative à l’existence d’une prime d’ancienneté et dès lors qu’il ne versait plus de rémunération au salarié à compter de novembre 2017, il n’était plus tenu du versement d’une prime d’ancienneté, la poursuite de son paiement pendant quelques mois n’étant pas constitutive d’une obligation à laquelle il serait tenu.

Il résulte de l’examen des bulletins de paie que M. [R] [I] a perçu la prime d’ancienneté, en dernier lieu d’un montant de 78,87 euros par mois, jusqu’en novembre 2017 inclus.

Alors que le salarié n’explicite pas le fondement de sa demande, qu’au cours de la période de maintien de salaire telle que prévue par les articles L.1226-1 et D.1226-1 et suivants du code du travail, l’employeur lui a maintenu le versement de cette prime, à défaut de justifier de l’obligation de l’employeur au-delà de cette période, et en l’absence de dispositions conventionnelles plus favorables que les dispositions légales, il convient de l’en débouter.

La cour infirme ainsi le jugement entrepris.

III – Sur la liquidation de l’astreinte

Faute pour l’employeur d’avoir régularisé sa situation comme ordonné en référé, M. [R] [I] sollicite la liquidation de l’astreinte à hauteur de 124 800 euros.

La SARL Transport Crignon s’y oppose au motif que dès qu’il a pris connaissance de son obligation conventionnelle et de ses modalités, il a donné mission à son cabinet comptable de procéder à la régularisation et malgré les démarches entreprises, l’administration ne lui a fait aucun retour.

En vertu de l’article L.131-4 du code des procédures civiles d’exécution, le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter.

L’astreinte est supprimée en tout ou en partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient, en tout ou en partie d’une cause étrangère.

Par ordonnance du 25 février 2020, le conseil de prud’hommes de Rouen a, en référé, condamné l’employeur à souscrire le contrat d’adhésion Fongecfa et à régulariser les cotisations sur la période courant du 1er août 2011 à ce jour, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du délai d’un mois suivant la notification de l’ordonnance

Pour justifier de ses démarches, la SARL Transport Crignon verse au débat des échanges de courriels établissant avoir pris attache avec Klésio pour adhérer au FONGECFA, organisme qui, le 30 mars 2020, a répondu que le contrat FONGECFA avait bien été enregistré pour l’entreprise qui recevrait alors le certificat d’adhésion.

Néanmoins, alors que l’obligation de l’employeur portait sur une régularisation depuis le 1er août 2011, ses éléments sont insuffisants pour établir qu’elle a été réalisée en ce sens.

Aussi, il n’a que partiellement satisfait aux termes de l’ordonnance de référé, ce qui justifie qu’il soit condamné à verser la somme de 10 000 euros au titre de la liquidation de l’astreinte, infirmant sur le montant la décision entreprise.

III – Sur les dépens et frais irrépétibles

En qualité de partie pour partie succombante, la SARL Transport Crignon est condamnée aux entiers dépens, déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à M. [R] [I] la somme de 1 000 euros en cause d’appel, en sus de la somme allouée en première instance pour les frais générés par l’instance et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant dans les limites de l’appel, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a statué sur les frais irrépétibles et les dépens ;

L’infirme en ses autres dispositions soumises à la cour ;

Statuant à nouveau,

Déboute M. [R] [I] de sa demande de résiliation judiciaire ;

Rejette les demandes au titre des conséquences de la résiliation judiciaire et de la prime d’ancienneté ;

Condamne la SARL Transport Crignon à payer à M. [R] [I] la somme de 10 000 euros au titre de la liquidation de l’astreinte prononcée par ordonnance du 25 février 2020 ;

Y ajoutant,

Condamne la SARL Transport Crignon aux entiers dépens d’appel ;

Condamne la SARL Transport Crignon à payer à M. [R] [I] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en appel ;

Déboute la SARL Transport Crignon de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile en appel.

La greffière La présidente

 


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