Droit de rétractation : décision du 5 janvier 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/01329
Droit de rétractation : décision du 5 janvier 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/01329
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MM/ND

Numéro 23/54

COUR D’APPEL DE PAU

2ème CH – Section 1

ARRET DU 05/01/2023

Dossier : N° RG 21/01329 – N° Portalis DBVV-V-B7F-H274

Nature affaire :

Prêt – Demande en nullité du contrat ou d’une clause du contrat

Affaire :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

C/

[F] [X]

S.E.L.A.R.L. DE BOIS-[Z]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 05 janvier 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 07 Novembre 2022, devant :

Monsieur Marc MAGNON, magistrat chargé du rapport,

assisté de Madame SAYOUS, Greffière présente à l’appel des causes,

Marc MAGNON, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Philippe DARRACQ et en a rendu compte à la Cour composée de :

Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller faisant fonction de Président

Monsieur Marc MAGNON, Conseiller

Madame Joëlle GUIROY, Conseillère

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

immatriculée au RCS de Paris sous le n° SIREN 542 097 902, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par Me Dominique DE GINESTET DE PUIVERT de la SELARL DE GINESTET DE PUIVERT, avocat au barreau de DAX

Assistée de la SCP RAMAHANDRIARIVELO – DUBOIS -DEETJEN ‘RED’, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Monsieur [F] [X]

né le [Date naissance 5] 1954 à [Localité 10] (40)

de nationalité française

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Gilbert GARRETA de la SCP GARRETA ET ASSOCIES, avocat au barreau de PAU

S.E.L.A.R.L. DE BOIS-[Z] devenue la SELARL [Z]-PÉCOU

représentée par Me [S] [Z], ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de la « SARL FORCE ENERGIE », immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° 509 808 473, ayant son siège social sis [Adresse 4], demeurant ès qualités

[Adresse 2]

[Adresse 9]

[Localité 8]

assignée

sur appel de la décision

en date du 31 DECEMBRE 2020

rendue par le JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE DAX

EXPOSÉ DES FAITS ET PROCÉDURE :

Suivant bon de commande signé le 30 juillet 2014, Monsieur [F] [X] a commandé auprès de la SARL FORCE ENERGIE, ayant pour appellation commerciale FRANCE ENERGIE, la fourniture, la livraison et la pose d’une centrale photovoltaïque pour un prix de 39 900 € financé par un crédit affecté souscrit le même jour auprès de la SA Sygma Banque.

Par actes du 4 juillet 20l8, Monsieur [X] a fait assigner devant le tribunal d’instance de Dax la SA BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la SA Sygma Banque, et la SELARL DE BOIS-[Z], en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL FORCE ENERGIE, ayant pour appellation commerciale FRANCE ENERGIE, aux ‘ns de voir annuler les contrats de vente et de crédit affecté.

En l’état de ses dernières écritures, Monsieur [X] a demandé an juge des contentieux de la protection de :

– Dire que le contrat de vente du 30 juillet 2014 n’est pas conforme aux dispositions

d’ordre public du Code de la consommation,

– En toute hypothèse ou subsidiairement, dire et juger que le silence gardé par la société prestataire de service FORCE ENERGIE sur des éléments déterminants du consentement est constitutif de man’uvres dolosives,

– Dire que les actes postérieurs de Monsieur [X] ne sont pas de nature à couvrir la nullité du bon de commande et en tout cas ne le privent pas du droit de faire état de ces irrégularités,

– Constater que la société FORCE ENERGIE a procédé à la pose des panneaux photovoltaïques sans autorisation administrative préalable et sans avoir attendu l’expiration du délai de 30 jours suivant le dépôt de la déclaration préalable en mairie,

– Constater que le certificat de livraison est irrégulier et imprécis pour ne faire référence ni au contrat de rachat, ni au raccordement, ni à la déclaration d’achèvement des travaux qui font parties intégrantes de la prestation de service à la charge de la société FORCE ENERGIE,

– Constater qu’en l’absence de contrat de rachat, de raccordement et de dépôt de déclaration d’achèvement des travaux en mairie au moment du certificat de livraison, l’installation n’est pas conforme aux engagements contractuels,

– Dire que la SA SYGMA BANQUE a manqué à ses obligations en finançant une opération objet d’un contrat de vente non conforme aux exigences légales d’ordre public de protection du droit de la consommation,

– Dire que la SA SYGMA BANQUE a encore manqué à ses devoirs en décaissant les

fonds au pro’t de la société FORCE ENERGIE avant le contrat de rachat, le raccordement et la déclaration d’achèvement des travaux.

En conséquence :

– Déclarer nul et non avenu le contrat de vente du 30 juillet. 2014,

– Donner acte a Monsieur [X] de ce qu’il tient à la disposition de la SELARL DE BOIS-[Z], ès qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL FORCE ENERGIE, l’installation photovoltaïque litigieuse,

– Dire que 1’annulation du contrat de vente a pour conséquence l’annulation de plein droit du contrat de crédit affecté,

– Déclarer en conséquence nul et non avenu le contrat de crédit intervenu entre la SA SYGMA BANQUE et Monsieur [X],

– Constater que la SA SYGMA BANQUE, aux droits de laquelle intervient la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, a commis une faute en procédant au déblocage de l’intégralité des fonds prêtés sans autorisation administrative préalable avant tout raccordement de l’insta1lation au réseau ERDF et avant la signature du contrat de rachat avec EDF,

– Dire en conséquence que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sera privée de sa créance de restitution au titre du capital prêté et de tous frais annexes,

– Condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant au droit de la SA SYGMA BANQUE, à rembourser à Monsieur [X] toutes les sommes par lui d’ores et déjà versées, soit la somme de 26 799,60 €, soit 60 mensualités au 26/09/2020,

– Rappeler que l’exécution provisoire du jugement est de droit,

– Condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à verser à Monsieur [X] la somme de 2 800 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La SA BNP Paribas Personal Finance s’est opposée à ces prétentions et a demandé de :

– Lui donner acte qu’elle vient aux droits de la SA LASER, venant elle-même aux droits de la SA LASER COFINOGA, venant elle-même aux droits de la SA SYGMA BANQUE,

– Vu les articles 122 du Code de procédure civile et L 622-21 du Code de commerce, dire et juger Monsieur [X] irrecevable en sa demande dirigée contre FORCE ENERGIE et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a défaut de déclaration de créance préalable et en temps utile,

A titre subsidiaire :

Vu les articles 9 du Code de procédure civile et 1315, 1134, 1147, et 1184 du Code civil,

– Dire et juger qu’il n’est rapporté la preuve d’aucune irrégularité formelle du bon de commande souscrit auprès de la SARL FORCE ENERGIE, qui emporterait nullité du contrat principal,

– Dire et juger qu’à supposer démontrées les causes de nullité du contrat de prestation et fourniture, Monsieur [X] a couvert ces nullités en exécutant volontairement et spontanément le contrat de prestation de service, en réceptionnant sans réserve ni grief les travaux et prestations accomplis qu’il a déclarés comme pleinement achevés au prêteur, en faisant procéder an raccordement après installation puis en souscrivant le contrat de rachat d’électricité, en exécutant le contrat de prêt pendant près de 5 ans sans aucune contestation ni contre le prestataire, ni contre le prêteur,

– Dire et juger qu’il n’est rapporté la preuve d’aucun dol qui justi’erait de même l’annulation de l’opération économique,

En conséquence

– Débouter Monsieur [X] de l’intégralité de ses moyens et demandes,

Et à titre subsidiaire,

– Dire et juger que la SA SYGMA BANQUE n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité civile contractuelle ou à la priver de son droit de restitution du capital mis à disposition, dès lors que Monsieur [X] l’a déterminée à libérer les fonds entre les mains de la société FORCE ENERGIE en signant deux ‘ches de réception des travaux attestant de la bonne exécution dans des termes précis et dépourvus d’ambiguïté et en donnant ordre au prêteur de libérer les fonds,

– Dire et juger qu’il ne pesait sur la SA SYGMA BANQUE aucune obligation légale ou contractuelle de contrôler l’exécution du contrat principal au vu de cette attestation de ‘n de travaux très précise en son objet ni d’effectuer de véri’cations supplémentaires relativement aux autres prestations du bon de commande à la charge de la société FORCE ENERGIE quand bien même ces démarches étaient nécessaires au fonctionnement du matériel livré et posé,

– Dire et juger que la SA SYGMA BANQUE, aux droits de laquelle vient la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, n’est pas partie au contrat principal par application de l’article 1165 du Code civil alors qu’il lui est fait interdiction de s’immiscer dans la gestion des emprunteurs et d’apprécier l’utilité ou l’opportunité de la prestation objet du ‘nancement pas plus qu’elle ne doit rendre compte de l’exécution par 1e prestataire ni n’est tenue d’une obligation contractuelle de contrôle des prestations accomplies ou d’assistance du maître de l’ouvrage à la réception,

– Dire et juger qu’i1 n’est rapporté la preuve d’aucune faute de la SA SYGMA BANQUE ni d’aucun préjudice en corrélation à une prétendue irrégularité formelle du contrat principal alors que Monsieur [X] n’a jamais contesté la prestation fournie dont la qualité est sans lien avec cette prétendue irrégularité,

– Dire et juger que toute privation du droit à restitution du capital mis à disposition en application de l’article L 311-31 du Code de la consommation implique que la prestation principale ne fut pas fournie, ce qui n’est pas le cas de Monsieur [X] dont les obligations à l’égard du prêteur ont bien pris effet au sens de l’article L 311~31,

– Dire et. juger que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ne saurait être tenue aux remises en l’état antérieur d’un contrat auquel elle n’est pas partie,

En conséquence,

Débouter Monsieur [X] de l’intégralité de ses demandes,

Le condamner à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE au titre des remises en état et restitution du capital mis à disposition la somme de 39 900 € avec déduction des échéances déjà versées le cas échéant à hauteur de 22 333 € au jour de l’audience,

Dire et juger que la SARL FORCE ENERGIE garantira Monsieur [X] de cette condamnation au profit de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en application de l’article L 311-3 du Code de la consommation,

Et dans l’hypothèse infiniment subsidiaire d’une perte du prêteur de son droit a restitution envers l’emprunteur :

– Fixer au passif de la société FORCE ENERGIE la somme de 39 900 € au bénéfice de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE au titre des remises en état antérieur sur résolution ou annulation des contrats interdépendants,

– Condamner Monsieur [X] à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 1 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La SELARL DE BOIS-[Z], en qualité de liquidateur de la société FORCE ENERGIE, régulièrement citée à personne morale, n’a pas comparu. Elle a écrit au tribunal le 5 juillet 2018 pour indiquer «  ce dossier étant impécunieux, je ne serai ni présent ni représenté dans le cadre de cette instance ».

Après plusieurs renvois, l’affaire a été plaidée à l’audience du 6 octobre 2020.

Par jugement du31 décembre 2020 le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Dax a :

Prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 30 juillet 2014 entre la SARL FORCE ENERGIE et Monsieur [X],

Constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté conclu le 30 juillet 2014 entre la SA SYGMA BANQUE et Monsieur [X],

Dit que la SELARL DE BOIS-[Z], ès qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL FORCE ENERGIE, devra reprendre l’ensemble des matériels posés au domicile de Monsieur [X], [Adresse 3], dans les deux mois suivant la signification du présent jugement après avoir prévenu ce dernier quinze jours à l’avance,

Autorisé Monsieur [X], à défaut d’enlèvement, à disposer desdits biens comme bon lui semblera,

Condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droit de la SA SYGMA BANQUE, à rembourser à Monsieur [X] l’intégralité des sommes déjà perçues au titre du remboursement du crédit, soit la somme de 26 799,60 € arrêtée au 26 septembre 2020, à parfaire,

Débouté la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de l’ensemble de ses demandes,

Condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Monsieur [X] la somme de 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux entiers dépens de la présente instance,

Ordonné l’exécution provisoire.

Par déclaration en date du 16 avril 2021, La SA BNP Paribas Personal Finance a relevé appel de cette décision.

L’ordonnance de clôture a été rendue 26 octobre 2022, l’affaire étant fixée au 7 novembre 2022.

La déclaration d’appel et les conclusions de l’appelant ont été signifiées à la SELARL De Bois-[Z], ès qualités, par acte du 17 juin 2021 signifié à personne morale, contenant assignation. Puis de nouveau le 28 décembre 2021.

Les conclusions de M [X] ont été signifiées au mandataire liquidateur par acte d’huissier délivré le 4 octobre 2021 à personne morale.

Au-delà de ce qui sera repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l’espèce des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, la cour entend se référer pour l’exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessous.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Vu les conclusions en date du 14 octobre 2022 de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, qui demande de :

Infirmer le jugement déféré en toute ses dispositions, et statuant à nouveau,

Dire et juger qu’il n’est rapporté la preuve d’aucune irrégularité formelle du bon de commande souscrit près la SARL FORCE ENERGIE qui emporterait nullité du contrat principal,

Dire et juger qu’à supposer démontrées des causes de nullité du contrat de prestation et fourniture conclu avec la société FORCE ENERGIE, Monsieur [X] a couvert ces nullités en exécutant volontairement et spontanément le contrat de prestation de service, en réceptionnant sans réserve ni grief les travaux et prestations accomplis qu’il a déclaré comme pleinement achevés au prêteur, en faisant procéder au raccordement après installation puis en souscrivant le contrat de rachat d’électricité, en exécutant le contrat de prêt pendant près de 5 ans sans aucune contestation ni contre le prestataire ni contre le prêteur,

En conséquence,

Débouter Monsieur [F] [X] de l’intégralité de ses moyens et demandes,

A titre subsidiaire, dans l’hypothèse d’une résolution ou annulation du contrat de prêt par accessoire,

Dire et juger que la SA SYGMA BANQUE n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité civile contractuelle ou à la priver de son droit à restitution du capital mis à disposition, dès lors que Monsieur [X] l’a déterminée à libérer les fonds entre les mains de la société FORCE ENERGIE, en signant deux fiches de réception des travaux attestant de leur exécution, dans des termes précis et dépourvus d’ambiguïté, et donnant ordre au prêteur de libérer les fonds,

Dire et juger qu’il ne pèse sur l’établissement de crédit aucune obligation de contrôle de la conformité du contrat principal aux dispositions impératives du code de la consommation, ni aucun devoir de conseil quant à l’opération économique envisagée par le maître d’ouvrage,

Dire et juger qu’il ne pesait sur la SA SYGMA BANQUE aucune obligation légale ou contractuelle de contrôler l’exécution du contrat principal au vu de cette attestation de fin de travaux très précise en son objet, ni d’effectuer des vérifications supplémentaires relativement aux autres prestations du bon de commande à la charge de la société FORCE ENERGIE, quand bien même ces démarches étaient nécessaires au fonctionnement du matériel livré et posé,

Dire et juger qu’il n’est rapporté la preuve d’aucune faute de la SA SYGMA BANQUE ni d’aucun préjudice en corrélation lié à une prétendue irrégularité formelle du contrat principal, alors que Monsieur [X] n’a jamais contesté la prestation fournie dont la qualité est sans lien avec cette prétendue irrégularité,

Dire et juger que toute privation du droit à restitution du capital mis à disposition en application de l’article L311-31 du code de la consommation implique que la prestation principale ne fut pas fournie, ce qui n’est pas le cas de Monsieur [X] dont les obligations à l’égard du prêteur ont bien pris effet au sens de l’article L311-31,

Dire et juger que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE ne saurait être tenue aux remises en état antérieur d’un contrat auquel elle n’est pas partie,

En conséquence,

Débouter Monsieur [F] [X] de l’intégralité de ses moyens et demandes,

Condamner Monsieur [F] [X] à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, au titre des remises en état et restitution du capital mis à disposition, la somme de 39.900 € avec déduction des échéances déjà versées,

Dans l’hypothèse infiniment subsidiaire d’une perte du prêteur de son droit à restitution envers l’emprunteur,

Fixer au passif de la société FORCE ENERGIE « à payer la somme de 39.900 € au bénéfice de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE » au titre des remises en état antérieur sur résolution ou annulation des contrats interdépendants,

En toute hypothèse,

Condamner Monsieur [X] à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

*

Vu les conclusions en date du 10 octobre 2022 de [F] [X], qui demande de :

Déclarer mal fondé l’appel interjeté par la SA BNP PARIBAS PF, à l’encontre du Jugement rendu par le Juge des Contentieux de la Protection près le Tribunal Judiciaire de DAX (RG n° 11-18-000415) en date du 31 décembre 2020.

‘ Confirmer le Jugement en toutes ses dispositions.

1 – Sur le contrat de vente :

‘ Dire que le contrat de vente du 30 juillet 2014 n’est pas conforme aux dispositions d’ordre public du Code de la consommation,

‘ Dire et juger que les dispositions des articles L121-17 et suivants et L111-1 et suivants du Code de la Consommation ne sont pas reproduits dans les Conditions Générales de Vente au verso du bon de commande et que par conséquent, Monsieur [X] n’a pas été en mesure d’avoir connaissance, ni conscience des vices affectant le contrat principal

‘ Rappeler que la renonciation d’une partie à se prévaloir de la nullité relative

d’un contrat par son exécution doit être caractérisée par sa connaissance préalable de la violation des dispositions destinées à la protéger.

‘ Dire et juger qu’à aucun moment, dans les actes accomplis postérieurement au bon de commande, Monsieur [X] ne fait référence aux dites dispositions du Code de la Consommation

‘ Dire que les actes postérieurs du concluant ne constituent pas une réitération de la volonté et ne sont pas de nature à couvrir la nullité du bon de commande

2 – Sur les fautes de la banque :

‘ Dire que la SA SYGMA BANQUE a manqué à ses obligations en finançant une opération objet d’un contrat de vente non conforme aux exigences légales d’ordre public de protection du droit de la consommation

‘ Dire que la SA SYGMA BANQUE a encore manqué à ses devoirs en décaissant les fonds au profit de la société FORCE ENERGIE avant l’exécution complète des prestations prévues au bon de commande sur la base d’un certificat de livraison incomplet et ambigu.

3 – Sur le préjudice subi par Monsieur [X] :

‘ Dire et juger qu’au jour du déblocage les fonds par la SA SYGMA BANQUE, le 17 septembre 2014, à défaut d’exécution complète de toutes les prestations indivisibles prévues au bon de commande par l’installateur, les obligations de Monsieur [X], emprunteur, n’avaient pu prendre effet.

‘ Rappeler que l’appréciation par le concluant de la rentabilité des panneaux solaires ne pouvait se faire que postérieurement à l’exécution complète de toutes les prestations prévues au bon de commande jusqu’à la mise en service effective de l’installation.

‘ Dire et juger qu’en débloquant les fonds dès le 17 septembre 2014, sans procéder à de plus amples vérifications sur l’accomplissement de son obligation de délivrance par la société FORCE ENERGIE, la SA BNP PARIBAS PF a commis une faute directement en lien avec le préjudice subi par le concluant, de devoir rembourser un crédit destiné au financement d’une installation ne répondant pas à l’objet pour lequel elle a été souscrite, et sur laquelle aucune somme ne pourra plus jamais être récupérée contre l’installateur en liquidation judiciaire.

‘ Dire et juger que l’acquéreur-emprunteur aura perdu la propriété de cette installation par l’effet de l’anéantissement du contrat principal de vente.

‘ Dire et juger en conséquence que n’est pas éventuel le préjudice subi par Monsieur [X] à raison de la conservation de l’installation dont il ne sera alors plus propriétaire, mais bien la réparation de ce préjudice né et actuel qui dépend d’une décision d’attribution de l’installation en sa faveur par le Tribunal de Commerce l’autorisant à conserver les biens et les fruits qu’il génère, objet du contrat de vente.

‘ Dire et juger par conséquent que le capital qu’il doit rembourser devient dès lors pour lui, un préjudice et que celui-ci est directement lié aux manquements fautifs de la banque lors du déblocage des fonds.

EN CONSEQUENCE :

‘ Déclarer nul et non avenu le contrat de vente souscrit le 30 Juillet 2014

‘ Dire et juger que Monsieur [F] [X] devra tenir à la disposition de la SELARL DE BOIS-[Z] représentée par Maître [S] [Z], ès qualité de Mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la société SARL FORCE ENERGIE, l’installation photovoltaïque litigieuse

‘ Dire et juger qu’à défaut de réaction de la part du mandataire liquidateur dans le délai de deux mois à compter de la signification de l’Arrêt à intervenir et après avoir prévenu le concluant 15 jours à l’avance, passé ce délai, Monsieur [X] pourra faire son affaire de l’installation litigieuse.

‘ Dire que l’annulation du contrat de vente a pour conséquence l’annulation de plein droit du contrat de crédit affecté

‘ Déclarer en conséquence nul et non avenu le contrat de crédit intervenu entre la SA SYGMA BANQUE et Monsieur [F] [X] en date du 30 juillet 2014.

‘ Dire en conséquence des manquements fautifs ci-dessus énoncés que la SA BNP PARIBAS PF, venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE, sera privée de sa créance de restitution au titre du capital prêté et de tous frais annexes

‘ Condamner la SA BNP PARIBAS PF venant aux droits de la SA SYGMA BANQUE, à rembourser à Monsieur [F] [X] toutes les sommes par lui d’ores et déjà versées, soit la somme de 29 479,56 €.

‘ Dire enfin que la SA BNP PARIBAS PF fera son affaire personnelle des sommes indûment perçues par la société FORCE ENERGIE, actuellement en liquidation

judiciaire.

En tout état de cause :

‘ Condamner la SA BNP PARIBAS PF à verser à Monsieur [X] la somme de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

MOTIVATION :

Sur la nullité du contrat de vente :

La BNP Paribas Personal Finance conteste en premier lieu l’annulation du contrat principal, au motif notamment que le comportement de Monsieur [X], l’exécution globale du contrat, postérieurement à l’attestation de fourniture des prestations, la signature du contrat de rachat d’électricité, la perception des revenus tirés de la production d’électricité et le règlement sans contestation des échéances du crédit révèlent de sa part une exécution volontaire de l’ensemble contractuel et une ratification des causes de nullité du bon de commande.

Monsieur [X] conteste cette analyse, en faisant valoir notamment qu’ il n’a signé aucune attestation de réception conforme, ni procès-verbal de réception sans réserve, mais un simple certificat de livraison et une attestation de fin de travaux, documents types pré-imprimés ne comportant aucun espace libre pour permettre à l’acheteur emprunteur de formuler des observations ou réserves.

Il ajoute que la confirmation d’un acte nul exige à la fois la connaissance du vice l’affectant et l’intention de le réparer, comme l’a rappelé encore récemment la cour de cassation dans un arrêt du 15 juin 2022 ; alors qu’au cas d’espèce, les articles L. 121-17 et suivants et L. 111-1 et suivants du code de la consommation applicables au contrat du 30 juillet 2014, n’étaient pas reproduits dans les conditions générales du bon de commande, seuls les anciens articles L. 121-21à L. 121-26 étant visés.

Monsieur [X] soutient également qu’il ne découle pas des actes postérieurs à la conclusion du contrat de vente et notamment de la signature figurant sur le certificat de livraison qu’il aurait eu la volonté de renoncer à se prévaloir des vices affectant le bon de commande et à invoquer sa nullité.

A cet égard, il rappelle que ni le certificat de livraison, ni l’attestation de fin de travaux, ni le contrat de rachat de l’énergie produite ne contiennent la substance de l’obligation, c’est-à-dire les mentions obligatoires exigées par le code de la consommation quant à la validité du bon de commande.

En droit, à la date du 30 juillet 2014, le bon de commande était soumis aux dispositions d’ordre public des articles L. 111-1, L. 111-2 et L. 121-17 et suivants du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014.

Selon l’article L. 121-18 du code de la consommation, « dans le cas d’un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l’accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues au I de l’article L. 121-17. Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible ».

Selon l’article L. 121-18-1, «  le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend, à peine de nullité , toutes les informations mentionnées au I de l’article L. 121-17. »

Selon l’article L. 121-17,

«  I. – Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’État ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L. 121-21-5 ;

5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L. 121-21-8, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;

6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l’utilisation de la technique de communication à distance, à l’existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’État…»

Selon l’article L. 111-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au cas d’espèce,

« Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;

3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s’il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’État.. »

Selon l’article L. 111-2 du même code ,

« I. – Outre les mentions prévues à l’article L. 111-1, tout professionnel, avant la conclusion d’un contrat de fourniture de services et, lorsqu’il n’y a pas de contrat écrit, avant l’exécution de la prestation de services, met à la disposition du consommateur ou lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’État. Ce décret précise celles des informations complémentaires qui ne sont communiquées qu’à la demande du consommateur.

II. – Le I du présent article ne s’applique ni aux services mentionnés aux livres Ier à III et au titre V du livre V du code monétaire et financier, ni aux opérations pratiquées par les entreprises régies par le code des assurances, par les mutuelles et unions régies par le livre II du code de la mutualité et par les institutions de prévoyance et unions régies par le titre III du livre IX du code de la sécurité sociale.

Selon l’article R. 111-2

I. – Pour l’application du I de l’article L. 111-2, outre les informations prévues à l’article R. 111-1, le professionnel communique au consommateur ou met à sa disposition les informations suivantes :

a) Le statut et la forme juridique de l’entreprise ;

b) Les coordonnées permettant d’entrer en contact rapidement et de communiquer directement avec lui ;

c) Le cas échéant, le numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ;

d) Si son activité est soumise à un régime d’autorisation, le nom et l’adresse de l’autorité ayant délivré l’autorisation ;

e) S’il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée et identifié par un numéro individuel en application de l’article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d’identification ;

f) S’il est membre d’une profession réglementée, son titre professionnel, l’État membre dans lequel il a été octroyé ainsi que, le cas échéant, le nom de l’ordre ou de l’organisme professionnel auprès duquel il est inscrit ;

g) Les conditions générales, s’il en utilise ;

h) Le cas échéant, les clauses contractuelles relatives à la législation applicable et la juridiction compétente ;

i) L’éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l’engagement.

En l’espèce, il ressort du bon de commande que Monsieur [X] a fait l’acquisition «  d’un kit photovoltaïque 250Kw type monocristalin marque Thomson ou équivalent, onduleur marque SVA ou équivalent, démarches administratives , pose + fourniture+ installation, frais de raccordement pris en charge à hauteur de 1500 euros » .

Au regard de la « mention kit photovoltaïque », figure la quantité 24 qui se rattache au nombre de panneaux photovoltaïques, comme permet de le vérifier la facture éditée par la société France Energie.

D’ores et déjà, il apparaît que les renseignements portés sur le bon de commande, concernant les caractéristiques essentielles de l’installation photovoltaïque commandée, sont erronés ou imprécis. En effet, la puissance de 250 kw (littéralement 250 000 Watt) ne correspond pas à la puissance de l’installation qui selon la facture précitée est de 6000 Wc (Watt crête). Elle ne correspond pas non plus à la puissance nominale de chaque panneau qui est de 250 Wc (Watt crête).

En outre, les mentions « Thomson ou équivalent » et « SVA ou équivalent » laissent planer une incertitude sur l’une des qualités essentielles d’un bien d’équipement, que constitue la marque, laquelle permet de vérifier la réputation du fournisseur/fabricant, la fiabilité de ses matériels et la qualité de son service après-vente.

De fait, la facture éditée par le vendeur mentionne des panneaux de marque Synexium et deux onduleurs (au lieu d’un sur le bon de commande) de marque Duralux.

En second lieu, les démarches administratives à la charge du vendeur ne sont pas détaillées.

Ensuite, le délai d ‘exécution maximum de six mois ne permet pas de répondre aux exigences de l’article L. 111-1, 3°, du code de la consommation, dès lors qu’il n’ est pas distingué entre le délai de pose des modules photovoltaïques et celui de réalisation des prestations à caractère administratif, à la charge de la société FRANCE ENERGIE, et qu’un tel délai global ne permet pas à l’acquéreur de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aura exécuté ses différentes obligations.

Enfin, le délai de rétractation figurant au bon de commande est erroné.

En effet, le délai de rétractation indiqué dans les conditions générales de vente figurant au dos du bon de commande est de sept jours à compter de la commande ou de l’engagement d’achat, par référence aux dispositions de l’article L. 121-25 du code de la consommation abrogé par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014.

En réalité, à la date du contrat, Monsieur [X] bénéficiait du délai de rétractation de 14 jours partant de la livraison des biens, prévu par l’article L. 121-21 du code de la consommation dans sa rédaction alors applicable.

Il ressort ainsi des pièces soumises à l’appréciation de la cour que le bon de commande était entaché de multiples irrégularités de nature à justifier l’annulation du contrat de vente.

Contrairement à la thèse de l’appelant, il ne peut être raisonnablement soutenu que Monsieur [X] a confirmé l’acte nul par l’exécution du contrat de vente, la signature du contrat de rachat d’électricité, la perception des revenus tirés de la production d’électricité et l’exécution du contrat de crédit.

En droit, par application des dispositions de l’article 1338 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la confirmation d’un acte nul procède notamment de son exécution volontaire en connaissance du vice qui l’affecte.

Et s’il a été jugé que la reproduction lisible, dans un contrat de démarchage, de l’article L. 121-23 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, permet au souscripteur de prendre connaissance du vice résultant de l’inobservation de cette disposition et si une telle connaissance, jointe à l’exécution volontaire du contrat par l’acheteur, emporte la confirmation de l’acte nul, tel n’est pas le cas en l’espèce.

En effet, l’article L. 121-23 ancien du code de la consommation n’était pas applicable au contrat, qui était soumis aux dispositions précédemment rappelées, absentes du bon de commande. En outre et surtout, le texte de l’article L. 121-25 ancien mentionné dans les conditions générales du contrat de vente, relatif au délai de rétractation de sept jours, avait été abrogé et remplacé par l’article L. 121-21 nouveau offrant au consommateur la possibilité de renoncer au contrat dans un délai de 14 jours à compter de la livraison des biens. Monsieur [X] n’était ainsi pas en mesure de prendre connaissance des vices affectant le bon de commande faute d’une reproduction lisible et exacte des textes d’ordre public régissant l’information du consommateur à la date du contrat.

Le moyen tiré de la confirmation, en connaissance de cause, par Monsieur [X], du bon de commande entaché de nullité doit en conséquence être écarté.

Le jugement est ainsi confirmé sur la nullité du contrat de vente et la nullité subséquente du contrat de crédit affecté.

Sur les fautes du prêteur et son droit à restitution du capital emprunté :

La BNP Paribas Personal Finance fait valoir en premier lieu que toute faute du prêteur ne peut, en soi, emporter privation du droit à restitution du capital emprunté dès lors que la prestation convenue est en définitive bien exécutée, ce qu’a consacré la cour de cassation par une décision du 24 octobre 2019 (cassation civile 1ère, 24 octobre 2019 pourvoi n° 18-19481).

Elle conteste être tenue à une obligation de contrôle de la régularité formelle du bon de commande, au motif qu’il n’existe aucune obligation du prêteur, légale ou contractuelle, de contrôler par soi-même le prestataire, du seul fait que le contrat de crédit serait un accessoire du contrat principal. Elle ajoute que le prêteur, qui n’est pas partie au contrat d’entreprise signé par FORCE ENERGIE, n’est tenu envers l’emprunteur d’aucune obligation de conseil et ne peut s’immiscer dans les affaires de ce dernier.

S’agissant du déblocage des fonds avant l’exécution complète des prestations prévues au contrat de vente, elle considère qu’elle ne peut être recherchée pour un déblocage prématuré des fonds alors qu’il n’est strictement justifié d’aucun préjudice en lien avec cette faute, que FORCE ENERGIE a bien fourni la prestation convenue, que la centrale photovoltaïque est raccordée et fonctionnelle, que le contrat de revente d’électricité a été signé et que Monsieur [X] perçoit des revenus depuis le 10 mars 2015, date d’effet du contrat de vente d’électricité, l’obligation de l’emprunteur de rembourser les échéances du crédit ayant pris effet à compter de cette mise en service, la première échéance appelée étant prélevée le 26 octobre 2015.

Elle réfute ainsi l’existence d’un quelconque préjudice en lien avec les fautes invoquées, à supposer ces dernières caractérisées.

[F] [X] conteste cette analyse. Il soutient notamment qu’en application des articles L. 311-31 et L. 311-32 du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et selon une jurisprudence constante de la cour de cassation. commet une faute, de nature à engager sa responsabilité et à le priver de son droit à restitution du capital emprunté, le prêteur qui libère les fonds sans :

‘ s’assurer de la régularité du contrat principal conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile, au regard du formalisme d’ordre public imposé par les articles L. 121-17 et suivants, et L. 111-1 et suivants du code de la consommation, relatifs aux mentions obligatoires et au formulaire de rétractation,

‘ vérifier que le contrat principal a été totalement exécuté, les obligations de l’emprunteur ne prenant effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation.

Le prêteur devait selon lui exercer un double contrôle :

‘ contrôle de la régularité du contrat de vente au moment de l’octroi du crédit

‘ avant de débloquer les fonds entre les mains du vendeur, vérification que l’attestation de travaux ne contient pas une mention ou une omission incompatible avec les obligations portées sur le contrat de fourniture de biens et services.

A cet égard, Monsieur [X] rappelle qu’il existe une interdépendance entre le contrat principal de vente et le contrat de crédit affecté qui forment une opération économique globale de sorte que le dispensateur de crédit ne peut s’abriter derrière le fait qu’il n ‘est pas partie au contrat principal.

Il souligne qu’au cas d’espèce l’établissement de crédit n’a pas vérifié le bon de commande, auquel cas il aurait pu constater aisément que ce contrat était affecté de plusieurs irrégularités, concernant notamment le délai de rétractation, présentant ainsi un risque d’annulation, ce qui aurait dû le conduire à refuser de financer l’opération.

Il ajoute que le prêteur a commis une faute en débloquant les fonds sur la base d’un certificat de livraison et d’une attestation de fin de travaux trop imprécis pour rendre compte de la complexité de l’opération financée et de l’exécution pleine et entière du contrat principal, alors qu’à la date du 17 septembre 2014, date de paiement de la société prestataire, le raccordement au réseau n’avait pas été effectué, le contrat de rachat d’électricité n’avait pas été signé et l’attestation d’achèvement des travaux n’avait pas été déposée en mairie, étant observé qu’elle ne le sera jamais.

Or, les démarches administratives et le raccordement étaient bien compris dans les prestations contractuellement prises en charge par le vendeur.

Sur le préjudice, Monsieur [X] invoque en premier lieu l’impossibilité dans laquelle il s’est trouvé d’exercer son droit de rétractation dans le délai de 14 jours, pour avoir été induit en erreur sur la portée de ce droit par l’indication d’un délai de rétractation erroné. Il considère qu’il a ainsi été privé de la possibilité de vérifier auprès de la concurrence, dans le délai dont il aurait dû bénéficier, si les produits proposés à la vente étaient susceptibles d’être acquis et installés à des conditions économiques meilleures.

Il considère également qu’en débloquant les fonds prématurément, le prêteur est directement à l’origine d’un second type de préjudice , le concluant étant contraint de rembourser un prêt pour une installation qui ne lui donne pas satisfaction, à défaut d’être rentable, car l’appréciation de la rentabilité des panneaux solaires ne pouvait se faire que postérieurement à l’exécution complète de toutes les prestations prévues au bon de commande, après raccordement et mise en service effective de l’installation. Il souligne en effet que l’installation ne rapporte qu’un revenu annuel moyen de 1325 euros, bien loin de couvrir le coût du crédit souscrit pour son acquisition.

Il estime que son préjudice est aussi constitué par l’existence d’un capital à rembourser à la banque, pour une installation dont il ne sera plus propriétaire par suite de l’annulation du contrat de vente, en dehors de toute faute de sa part, et pour laquelle aucune somme ne pourra jamais être récupérée auprès du vendeur en liquidation judiciaire, ni aucun recours exercé contre ce dernier.

En réplique aux arguments de la banque, il soutient que ce préjudice n’est nullement éventuel, malgré la conservation de l’installation, dont il ne serait plus propriétaire en tout état de cause, par l’effet de l’anéantissement du contrat principal, la procédure collective, devenue propriétaire, pouvant décider d’attribuer l’installation à un tiers intéressé ou à la banque qui viendrait démonter l’installation, sauf pour le concluant à saisir le juge consulaire pour obtenir cette attribution et redevenir propriétaire de l’installation, ce qui reste éventuel.

De même, il fait valoir que les revenus générés par la conservation de l’installation après anéantissement du contrat principal reviendraient à la liquidation judiciaire de la société FORCE ENERGIE.

[F] [X] considère ainsi que la privation pour la banque de son droit d’obtenir le remboursement du capital emprunté constitue « la réparation exacte et intégrale du préjudice subi, lequel réside dans l’annulation du contrat de prêt en dehors de toute faute de sa part et au surplus sans perspective d’obtenir la restitution du prix par le fournisseur en liquidation judiciaire et sans pouvoir assurément conserver en contrepartie une installation fournissant les qualités attendues ».

En droit, aux termes de l’article L. 311-31 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au contrat, les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation (…).

Le contrat de crédit se trouvant annulé en application de l’article L. 311-32 du code de la consommation, le jeu des restitutions veut que l’emprunteur rembourse à la banque le capital emprunté, alors que les fonds ont pu être versés directement au vendeur ou au prestataire de service.

Cependant, peut être privé de sa créance de restitution, en tout ou en partie, le prêteur qui verse les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu en application de ces textes, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

En l’espèce, les fonds ont été libérés par la banque sur la base d’un « certificat de livraison de bien ou de fourniture de services » et d’une « attestation de fin de travaux » datés du 16 août 2014, signés par Monsieur [X] et le représentant du vendeur, pour le premier, et par Monsieur [X], seul, pour la seconde. Toutefois, ces formulaires pré-imprimés, ne laissant à l’acheteur aucune possibilité d’émettre des réserves sur l’exécution complète du contrat principal, ne pouvaient rendre compte de la complexité de l’opération financée et de l’exécution par le vendeur de tous ses engagements : livraison et installation du matériel, mise en service, démarches administratives, prise en charge des frais de raccordement dans la limite de 1500 euros, ce qui aurait dû conduire le prêteur à s’assurer de l’accord éclairé de l’emprunteur pour le déblocage des fonds, avant l’ exécution de toutes les prestations prévues au contrat.

En effet, le délai de 17 jours séparant la signature du bon de commande de la signature du certificat de livraison et de l’attestation de fin de travaux était incompatible avec la réalisation complète d’une telle opération, impliquant des démarches administratives de déclaration en mairie de travaux non soumis à permis de construire, en vue d’obtenir un certificat de non opposition, et la saisine du gestionnaire du réseau de distribution d’électricité, pour obtenir le raccordement de l’installation photovoltaïque, préalable à la signature du contrat de vente d’électricité à EDF. Ces démarches ont en effet nécessité un délai de plusieurs mois, l’installation étant raccordée le 10 mars 2015 et le contrat de rachat d’électricité signé le 20 mai 2015.

En ne procédant pas à cette vérification, la société Sygma Banque, spécialisée dans le financement d’installations photovoltaïques, a commis une première faute.

Avant de débloquer les fonds, le prêteur aurait dû également vérifier la régularité du bon de commande affecté d’imprécisions manifestes sur les caractéristiques des biens et prestations fournies, et sur les modalités d’exécution du contrat principal, outre une erreur grossière sur le délai de rétractation dont bénéficiait l’acheteur.

En ne le faisant pas, le prêteur a commis une seconde faute.

Toutefois, l’emprunteur doit établir un préjudice en lien avec les fautes du dispensateur de crédit. Or, Monsieur [X], s’il invoque l’obligation dans laquelle il se trouve, par suite de l’annulation du contrat de vente, de restituer le matériel au vendeur, sans recours effectif contre ce dernier qui n’est plus in bonis, n’établit pas un préjudice en lien avec les fautes retenues.

En effet, il conservera l’installation photovoltaïque qui est intégrée à la toiture de sa maison et ne peut être enlevée sans travaux de remise du support dans son état préexistant, travaux qui incomberaient nécessairement au vendeur qui est impécunieux. A cet égard, la BNP Paribas Personal Finance produit un courriel du mandataire liquidateur de la société FORCE ENERGIE, Maître [S] [Z], lequel a confirmé ne pas prétendre à la dépose du matériel en cas d’annulation du contrat de vente.

Par ailleurs, seul titulaire du contrat d’achat de l’énergie électrique produite par l’installation photovoltaïque, Monsieur [X] continuera de percevoir les revenus tirés de la vente d’électricité à EDF. A cet égard, il ne conteste pas que l’installation est fonctionnelle et génère un revenu annuel qui était de 1528,60 euros sur l’exercice 2021-2022.

S’agissant de l’absence de rentabilité financière de l’installation photovoltaïque, contrairement à ce que soutient Monsieur [X], il n’est pas démontré que l’auto financement de l’installation, par la revente de l’électricité produite, ou une rentabilité financière donnée soient entrés dans le champ de la négociation contractuelle avec la société FORCE ENERGIE et ont déterminé son consentement.

A supposer que tel fût le cas, le préjudice résultant d’une production vendue moindre que celle escomptée serait sans lien de causalité avec les fautes du prêteur, puisque la première facture d’électricité produite est de loin postérieure à la date à laquelle les obligations de l’emprunteur envers le prêteur ont pris naissance, ce dernier n’étant au demeurant tenu d’aucune obligation de conseil quant à la rentabilité de l’opération financée.

De même, les dysfonctionnements allégués de l’installation, qui ne ressortent que de l’attestation établie par un voisin de Monsieur [X], à la date du 4 octobre 2022, document sans valeur technique qui plus est rédigé sept ans après la mise en service de la centrale photovoltaïque, seraient sans lien de causalité avec les fautes du prêteur.

Monsieur [X] échoue par conséquent à démontrer l’existence d’un préjudice directement causé par les fautes du prêteur. Il doit ainsi être débouté de sa demande tendant à voir priver la BNP Paribas Personal Finance de sa créance de restitution du capital prêté et de tous les frais annexes, ainsi que de celle tendant à la condamnation de la banque à lui rembourser la somme de 29 479,56 euros.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

Compte tenu de la créance de restitution du capital emprunté à laquelle la banque peut prétendre, Monsieur [X] est condamné à payer à la BNP Paribas Personal Finance la somme de 39900,00 euros, sous déduction des échéances d’amortissement perçues par le prêteur.

Par suite de l’infirmation du jugement, sur la créance de restitution du prêteur, la demande subsidiaire de la BNP PARIBAS PF tendant à voir fixer sa créance de restitution au passif de la société FORCE ENERGIE devient sans objet.

Sur les demandes annexes :

Compte tenu de l’issue du litige, Monsieur [X] est condamné aux dépens de première instance et d’appel.

Au regard des circonstances de la cause et de la position respective des parties, l’équité ne justifie pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, réputé contradictoire, en dernier ressort,

Confirme le jugement en ce qu’il a :

‘ prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 30 juillet 2014 entre la SARL FORCE ENERGIE et Monsieur [F] [X],

‘ constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté conclu le 30 juillet 2014 entre la SA Sygma Banque et Monsieur [F],[X]

L’infirme pour le surplus,

statuant à nouveau des chefs infirmés,

Constate que la SELARL DE BOIS-[Z] devenue la SELARL [Z]-PÉCOU, représentée par Maître [S] [Z], mandataire judiciaire, liquidateur de la société FORCE ENERGIE, a fait savoir qu’elle ne prétendait pas à la dépose du matériel photovoltaïque en cas d’annulation du contrat de vente,

Autorise Monsieur [F] [X] à disposer de ladite installation comme bon lui semblera,

Déboute Monsieur [F] [X] de ses demandes de privation de la créance de restitution du capital emprunté et de remboursement des échéances d’amortissement versées, dirigées contre la SA BNP Paribas Personal Finance,

Condamne Monsieur [F] [X] à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance, la somme de 39 900,00 euros, sous déduction des échéances d’amortissement déjà versées, au titre de la restitution du capital emprunté, suite à l’annulation du contrat de crédit affecté,

Condamne Monsieur [F] [X] aux dépens de première instance et d’appel,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Marc MAGNON, conseiller, suite à l’empêchement de Monsieur Philippe DARRACQ, conseiller faisant fonction de Président et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.

La Greffière, Le Président,

 


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