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ARRÊT DU
11 Janvier 2023
DB/CR
———————
N° RG 21/00759
N° Portalis
DBVO-V-B7F-C5KT
———————
S.A.S. IDELEC
C/
[N] [D]
[L] [F],
[C] [U] épouse [F],
S.A. COFIDIS
——————
GROSSES le
à
ARRÊT n°
COUR D’APPEL D’AGEN
Chambre Civile
LA COUR D’APPEL D’AGEN, 1ère chambre dans l’affaire,
ENTRE :
S.A.S. IDELEC
RCS n°795 352 285
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Laurence BOUTITIE, avocate postulante inscrite au barreau d’AGEN et par Me Marinne ERHARD, avocate plaidante inscrite au barreau de LIMOGES
APPELANTE d’un Jugement du Juge des contentieux de la protection d’AGEN en date du 01 Juin 2021, RG 20/00025
D’une part,
ET :
Monsieur [N] [D] [L] [F]
né le 16 Septembre 1939 à [Localité 5] (25)
de nationalité Française
Madame [C] [U] épouse [F]
née le 19 Décembre 1943 à [Localité 7] (71)
de nationalité Française
Domiciliés :
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentés par Me Nathalie PICCIN, avocate postulante inscrite au barreau du GERS et par Me Samuel HABIB, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS
S.A. COFIDIS
RCS de Lille Métropole n°325 307 106
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représentée par Me Jean-Pierre HAUSSMANN de la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOET, avocat plaidant inscrit au barreau de l’ESSONNE et par Me Hélène GUILHOT, avocate postulante inscrite au barreau d’AGEN
INTIMÉS
D’autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 10 Octobre 2022, sans opposition des parties, devant la cour composée de :
Cyril VIDALIE, Conseiller qui a fait un rapport oral à l’audience
qui en a rendu compte dans le délibéré de la cour composée outre lui-même de Claude GATE, présidente de chambre et Dominique BENON, Conseiller
en application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, et après qu’il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés,
Greffières : Lors des débats : Nathalie CAILHETON, greffière
Lors de la mise à disposition : Charlotte ROSA, adjointe administrative faisant fonction de greffière
ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
‘ ‘
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FAITS :
Selon bon de commande signé le 12 septembre 2017 dans le cadre d’un démarchage à domicile, [N] [F] et [C] [U] épouse [F] (les époux [F]) ont passé commande auprès de la SARL Idelec de la fourniture et de l’installation, sur la maison dont ils sont propriétaires à [Localité 6] (47), d’une installation solaire de production d’électricité d’une puissance de 3 000 wc comprenant 10 panneaux solaires, ainsi qu’une isolation thermique de 20 m² placée sous les panneaux solaires, pour un prix total de 24 900 Euros TTC.
L’électricité produite par la centrale était destinée à être vendue intégralement à EDF.
Le bon de commande dispose que les démarches administratives (mairie, ‘Consuel’, ERDF), l’obtention du contrat de rachat de l’électricité produite, les démarches de raccordement au réseau public de distribution de l’électricité, et le raccordement à ce réseau, sont inclus dans la prestation.
Pour financer cette installation, le même jour, [N] [F] et [C] [U] épouse [F] (les époux [F]) ont souscrit un emprunt affecté d’une somme de 24 900 Euros auprès de la SA Cofidis, remboursable après différé d’amortissement de 6 mois en 48 mensualités de 597,32 Euros, hors assurance, au taux débiteur annuel fixe de 5,23 %.
La centrale a été livrée et installée.
Le 26 septembre 2017, la commune de [Localité 6] a indiqué ne pas s’opposer à la réalisation des travaux.
Le certificat de conformité a été établi le 29 septembre 2017.
L’installation a été raccordée au réseau public de distribution de l’électricité et mise en service le 28 février 2018.
Le 15 mars 2018, Mme [F] a signé un document intitulé ‘attestation de mise en service de panneaux photovoltaïques et demandes de financement’ dans lequel elle a écrit de sa main la formule suivante :
‘Je constate que les travaux et prestations prévues au bon de commande au titre de l’installation des panneaux photovoltaïques ont été réalisés par la société le 28 février 2018.
Je reconnais et confirme que la société a procédé au contrôle de la mise en service de l’installation des panneaux photovoltaïques.
En conséquence je demande à Cofidis dès réception de la présente attestation de bien vouloir procéder au déblocage du montant du crédit directement entre les mains de la société.’
Le 6 mais 2019, M. [F] a signé avec EDF le contrat de vente de l’électricité produite à effet du 28 février 2018 jusqu’au 27 février 2038.
Par actes délivrés les 1er et 3 juillet 2020, les époux [F] ont fait assigner la SARL Idelec (devenue la SAS Idelec), ainsi que la SA Cofidis devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d’Agen afin, pour l’essentiel, de voir prononcer l’annulation du contrat principal, l’annulation subséquente du contrat de crédit affecté, avec toutes leurs conséquences, et privation de la banque du droit à restitution du capital emprunté, au motif essentiel que le bon de commande n’est pas conforme au code de la consommation et que leur consentement a été vicié par des agissements dolosifs commis par la SAS Idelec.
Par jugement rendu le 1er juin 2021, le tribunal judiciaire d’Agen a :
– annulé le contrat d’installation de panneaux photovoltaïques conclu le mardi 12 septembre 2017 entre la société Idelec et M. [N] [F] et Mme [C] [U] épouse [F],
– condamné la société Idelec à rembourser à M. [N] [F] et Mme [C] [U] épouse [F] la somme de 24 900 Euros reçue en exécution du contrat d’installation de panneaux photovoltaïques conclu le mardi 12 septembre 2017, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,
– condamné M. [N] [F] et Mme [C] [U] épouse [F] à restituer à la société Idelec le matériel reçu en exécution du contrat d’installation de panneaux photovoltaïques conclu le mardi 12 septembre 2017, à leurs frais,
– annulé le contrat de crédit du mardi 12 septembre 2017 conclu entre M. [N] [F] et Mme [C] [U] épouse [F] et la société Cofidis SA,
– condamné M. [N] [F] et Mme [C] [U] épouse [F] à rembourser à la société Cofidis SA la somme de 24 900 Euros avec déduction des sommes déjà réglées depuis la conclusion du prêt et intérêts au taux légal à compter de la date de signification du jugement,
– débouté les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires,
– dit n’y avoir lieu de prononcer une condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné solidairement M. [N] [F] et Mme [C] [U] épouse [F] aux dépens de l’instance.
Le tribunal a considéré que le contrat conclu avec la SARL Idelec n’est pas conforme au code de la consommation du fait qu’étant imprimé au recto des conditions générales de vente, son utilisation aurait pour effet d’amputer celles-ci ; qu’il fait référence aux articles L. 121-23 à L. 121-28 du code de la consommation alors abrogés ; que toutefois la SA Cofidis a régulièrement versé les fonds au vu de l’instruction précise qui lui a été donnée par Mme [F] ; et qu’en conséquence, les époux [F] sont tenus de restituer le capital emprunté.
Par acte du 20 juillet 2021, la SAS Idelec a déclaré former appel du jugement en désignant [N] et [C] [F] ainsi que la SA Cofidis en qualité de parties intimées et en indiquant que l’appel porte sur la totalité du dispositif du jugement, à l’exception de la mise des dépens à la charge des époux [F].
La clôture a été prononcée le 14 septembre 2022 et l’affaire fixée à l’audience de la Cour du 10 octobre 2022.
PRETENTIONS ET MOYENS :
Par conclusions d’appelante notifiées le 15 octobre 2021, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, la SAS Idelec présente l’argumentation suivante :
– Le bon de commande est conforme au code de la consommation :
* elle a communiqué à ses clients, de manière lisible, toutes les informations relatives au droit de rétractation conformément à l’article L. 221-5 du code de la consommation.
* les articles L. 121-17 à L. 121-21-8 de ce code sont reproduits au contrat et même si ces textes avaient effectivement été abrogés par ordonnance du 14 mars 2016, ils n’ont fait l’objet que d’une simple nouvelle numération, le contenu de la législation applicable n’ayant pas changé.
* l’argumentation qui lui est opposée est superficielle.
* le bordereau de rétractation est en tous points conforme à l’article R. 221-1 du même code et est aisément détachable.
* la sanction de l’absence de délivrance des informations relatives au délai de rétractation n’est pas la nullité du contrat mais la prolongation du délai.
* toutes les mentions obligatoires sont présentes sur le bon de commande.
– Toute éventuelle nullité a été confirmée :
* les nullités invoquées sont relatives.
* les articles retranscrivant les obligations sont cités dans le contrat.
* les époux [F] ont exécuté le contrat sans réserve et n’ont pas mis en oeuvre la faculté de rétractation.
– Il n’existe aucun vice du consentement :
* ils ont prétendu que son employé s’est présenté comme mandaté par EDF, ce qui relève d’allégations calomnieuses.
* elle fait figurer des logos sur sa documentation en vertu de la qualification Qualité ENR qui lui a été attribuée.
* aucune rentabilité particulière n’a été promise.
* elle ne peut indiquer un délai de raccordement qui dépend d’ERDF.
Au terme de ses conclusions, (abstraction faite des multiples ‘juger’ qui constituent un rappel des moyens et non des prétentions) elle demande à la Cour de :
– la déclarer recevable et bien fondée dans ses demandes,
– infirmer le jugement,
– débouter les époux [F] de toutes leurs demandes,
– débouter la SA Cofidis de ses demandes,
– condamner les époux [F] à lui payer la somme de 3 000 Euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
*
* *
Par dernières conclusions notifiées le 21 juillet 2022, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, [N] [F] et [C] [U] épouse [F] présentent l’argumentation suivante :
– Le contrat conclu avec la SARL Idelec n’est pas conforme au code de la consommation :
* il ne contient pas, contrairement à ce qu’impose l’article L. 111-1 : les caractéristiques essentielles du bien (absence de fiche technique, de plan de réalisation, modèle, références, dimensions, poids, aspect, couleur des panneaux, types de cellules, marques, modèle et référence) ; délai dans lequel le professionnel s’engage à exécuter le service (livraison, installation, raccordement, mise en service) ; détail du coût de l’installation (prix de chaque composant).
* le contrat ne respecte pas le délai de rétractation : il reproduit des articles abrogés ; mentionne un point de départ du délai de rétractation à compter de la signature du bon de commande, alors que le délai expire 14 jours après la livraison du bien ; le bordereau est intitulé ‘annulation de la commande’
* le contrat ne peut valablement stipuler une date indicative de réalisation de la prestation.
– Aucune confirmation des nullités ne peut leur être opposée :
* ils n’ont pas déclaré avoir pris connaissance des dispositions de l’article L. 111-1 du code de la consommation.
* le bon de commande ne reproduit pas les articles L.111-1 à L. 121-17 de ce code.
* ils ont sollicité l’annulation de la commande dès 2019.
– Le contrat de crédit affecté doit être subséquemment annulé.
– La banque a commis des fautes :
* la SA Cofidis a accepté de financer une opération nulle alors qu’elle se devait d’examiner la régularité formelle du bon de commande.
* elle a manqué à son obligation de conseil et à son devoir de mise en garde en accordant un crédit pour financer une opération à caractère ruineux.
* en vertu des articles L. 546-1 du code monétaire et financier, L. 512-1 du code des assurances, et L. 311-8 du code de la consommation, la banque doit prouver que le crédit a été accordé par un intermédiaire qualifié et formé, avoir étudié leur solvabilité et consulté le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers.
– Ils subissent des préjudices :
* ils vont devoir remettre leur toiture en état.
* ils subissent également un préjudice financier, un trouble de jouissance et un préjudice moral.
Au terme de leurs conclusions, ils demandent à la Cour de :
– confirmer le jugement sauf à :
– condamner in solidum les sociétés Cofidis et Idelec à leur payer la somme de 3 000 Euros en réparation de leur trouble de jouissance et la même somme en réparation de leur préjudice moral,
– condamner la société Idelec à leur payer la somme de 1 705,80 Euros au titre de leur préjudice financier,
– subsidiairement :
– ordonner à la société Idelec que soit effectuée à sa charge la dépose des panneaux et la remise en état de leur toiture, dans un délai de deux mois et sous astreinte,
– en tout état de cause :
– condamner in solidum les sociétés Cofidis et Idelec à leur payer la somme de 3 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, et mettre les dépens à leur charge,
– très subsidiairement :
– prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la société Cofidis,
– encore plus subsidiairement :
– dire qu’ils reprendront le paiement des échéances mensuelles telles que prévues dans le prêt souscrit initialement.
*
* *
Par conclusions d’intimée notifiées le 13 janvier 2022, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, la SA Cofidis présente l’argumentation suivante :
– Le bon de commande n’est pas nul :
* il contient toutes les mentions prévues par le code de la consommation et, ainsi, est très précis sur les caractéristiques du matériel.
* le vendeur ne peut s’engager sur des délais de raccordement qui ne dépendent pas de lui.
* les époux [F] ont été informés des modalités d’exercice du droit de rétractation.
– Les époux [F] ont réitéré leur consentement :
* ils ont accepté l’installation qui a été mise en service et fonctionne.
* tous les articles relatifs au démarchage à domicile sont cités sur le bon de commande.
– Il n’existe aucune preuve de manoeuvres dolosives.
– Elle n’a commis aucune faute :
* elle n’avait pas à vérifier la mise en service de l’installation, aucune clause du contrat ne le prévoyant.
* elle a versé les fonds au vu d’un ordre exprès, de la communication d’un RIB, du ‘Consuel’ et d’une lettre d’Enedis indiquant que l’installation avait été mise en service.
* elle ne peut répondre d’irrégularités du contrat principal qui ne seraient pas manifestes.
– Les époux [F] ne subissent aucun préjudice :
* en cas d’annulation du contrat, ils pourront récupérer le prix de la prestation auprès de la SAS Idelec.
* il n’existe aucun lien de causalité entre le financement et les problèmes de rentabilité invoqués.
* elle n’a pas manqué à son devoir de mise en garde et a vérifié la solvabilité des emprunteurs.
* elle a passé une convention avec la SAS Idelec.
* subsidiairement, cette société doit la relever indemne de toute condamnation.
Au terme de ses conclusions, elle demande à la Cour de :
– réformer le jugement,
– rejeter les demandes des époux [F],
– les condamner à poursuivre l’exécution du contrat de crédit,
– subsidiairement :
– confirmer le jugement,
– très subsidiairement :
– condamner la SAS Idelec à lui payer la somme de 28 784,14 Euros avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir, ou à défaut la somme de 24 900 Euros avec les mêmes intérêts,
– en tout état de cause :
– condamner la SAS Idelec à la garantir de toute condamnation pouvant être mise à sa charge aux profit des époux [F],
– condamner toute partie succombante à lui payer la somme de 3 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, et mettre les dépens à sa charge.
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MOTIFS :
1) Sur la régularité du bon de commande conclu avec la SARL Idelec au regard du code de la consommation :
Selon les articles L. 221-8 et L. 221-5 du code de la consommation, applicables au contrat signé le 12 septembre 2017 (lequel est daté contrairement aux allégations des époux [F]), préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, dans le cas d’un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l’accord du consommateur, sur un autre support durable, rédigées de manière lisible et compréhensible :
1° Les informations suivantes :
– les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné,
– le prix du bien ou du service, en application des articles L.112-1 à L. 112-4,
– en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
– les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;
– les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son inter-opérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;
– la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ;
3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;
4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L. 221-25 ;
5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L. 221-28, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;
6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l’utilisation de la technique de communication à distance, à l’existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’Etat.
Selon l’article L. 221-9 du même code, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties ; et ce contrat reprend toutes les informations mentionnées ci-dessus et est accompagné du formulaire type de rétractation.
Enfin, l’article L. 242-1 du code de la consommation prévoit que les dispositions de l’article L. 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
En l’espèce, les époux [F] mettent en cause les éléments suivants :
– caractéristiques essentielles des biens ou du service :
Le bon de commande mentionne qu’il porte sur une :
‘Centrale photovoltaïque, installation solaire de production d’électricité d’une puissance de 3 000 wc comprenant :
– 10 panneaux solaires de marque La Francilienne ou équivalent, plaques d’intégration GSE, onduleur 6 abergements latéraux, 2 abergements gauche/droite, 3 abergements centraux, 4 abergements de jonction, 20 mètres de Wakaflex, 6 mètres de mousse expansive, 50 m d’écran sous toiture, 150 m de câble mm2, 15 connecteurs mâle/femelle, 5 clips de sécurité, connectique, boîtier AC/DC, 50 crochets doubles, 20 crochets simples, 98 joints 98 vis,
– démarches administratives (mairie, Consuel, ERDF),
– les démarches d’obtention du contrat de rachat de l’électricité produite (le passage des câbles entre le compteur et l’onduleur est inclus),
– engagement des démarches de raccordement au réseau électrique,
– le raccordement au réseau ERDF est pris en charge par Idelec tn totalité.
Isolation thermique de marque Rockwool ou équivalent d’une surface de 20 m², placée sous panneaux solaires.’
Cette désignation est conforme aux textes ci-dessus cités qui n’imposent en rien les précisions invoquées par les époux [F], comme par exemple le poids des panneaux.
Aucune nullité n’est encourue.
– date de livraison et délai de réalisation de l’installation :
Le bon de commande mentionne ‘date de livraison 12/11/2017 (maximum)’.
Il est exact que cette indication est insuffisante pour répondre aux exigences de l’article L. 111-1-3° du code de la consommation dès lors qu’il n’est pas distingué entre le délai de pose des modules et celui de la réalisation des prestations à caractère administratif et qu’un tel délai global ne permet pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aura exécuté ses différentes obligations.
La nullité du contrat est encourue.
– prix du bien ou du service :
Le bon de commande mentionne que le prix inclut ‘forfait installation’ et ‘matériel’, et que le prix global de la prestation est de 24 900 Euros.
Cette indication est conforme aux textes ci-dessus cités qui n’imposent pas de détailler le prix unitaire de chacun des éléments installés, étant rappelé qu’il s’agit d’une prestation globale.
La nullité du contrat n’est pas encourue.
– information erronée sur le point de départ du délai de rétractation :
Les conditions générales de vente qui figurent au verso du bon de commande et le bordereau de rétractation mentionnent exactement, en application de l’ancien article L. 221-18 du code de la consommation que, s’agissant d’une prestation de service et non de la seule commande d’un bien, le délai de rétractation dont dispose le consommateur court à compter de sa conclusion, et non de l’exécution de la prestation, peu important que la numération de l’article cité soit erronée, son contenu étant identique.
Aucune nullité n’est encourue.
– conformité du bordereau de rétractation :
Les époux [F] prétendent que le bordereau de rétractation n’est pas conforme à celui figurant en annexe de l’ancien article R. 221-1 du code de la consommation dans sa version applicable au bon de commande en litige.
Il s’avère effectivement que le bordereau de rétractation qui figure au dos du bon de commande n’est pas rédigé dans les termes du bordereau type de sorte que le contrat est effectivement affecté d’une cause de nullité sur ce point.
La nullité est encourue.
2) Sur la renonciation a invoquer les nullités formelles du contrat :
La méconnaissance des textes mentionnés ci-dessus, édictés dans l’intérêt des personnes démarchées à domicile que ces textes ont vocation à protéger, est sanctionnée par une nullité relative de sorte que les époux [F] pouvaient renoncer au droit d’invoquer cette nullité.
Ensuite, les époux [F] ont, chacun, apposé leur signature sur le bon de commande après la mention suivante :
‘CONDITIONS GENERALES DE VENTE
Je déclare être d’accord avec les conditions générales de vente et reconnais avoir pris connaissance des articles L. 121-21 à L. 121-28 du code de la consommation (au verso) applicable lors de la vente à domicile, ainsi que d’avoir reçu l’exemplaire de ce présent contrat, doté d’un formulaire détachable de rétractation, et le cas échéant, avoir reçu un exemplaire de l’offre de crédit. (…)’.
L’examen du verso de l’original du bon de commande en leur possession permet de constater que, même si les articles du code cités ne sont pas correctement numérotés, les règles de fond suivantes applicables à un contrat conclu suite à un démarchage à domicile y sont indiquées :
– par renvoi aux articles L. 111-1 et L. 111-2 (sans erreur sur la numérotation de ces textes) : l’indication que le contrat doit préciser le délai dans lequel le professionnel s’engage à livrer le bien ou exécuter le service,
– la nécessité de contenir un formulaire détachable destiné à faciliter l’exercice de la faculté de renonciation,
– les mentions que doit contenir ce formulaire par renvoi à un décret en Conseil d’Etat.
Or, les époux [F], qui ont eu, ou ont pu avoir, connaissance de ces dispositions légales en détail ont poursuivi l’exécution du contrat en :
– acceptant la livraison et l’installation de la centrale photovoltaïque et du matériau d’isolation,
– attestant de façon manuscrite sous la signature de Mme [F], le 28 septembre 2017 ‘être très satisfait des prestations fournies par votre entreprise (Idelec), les prestations et fournitures correspondent à la nature du bon de commande signé par moi-même’
– signant l’attestation de mise en service donnant pour instruction à la SA Cofidis de verser les fonds empruntés à la SARL Idelec,
– faisant raccorder la centrale au réseau public de distribution de l’électricité,
– signant le contrat de revente de l’électricité à EDF,
– produisant et vendant l’électricité produite et exécutant tant le contrat principal que le contrat de crédit affecté sans aucune réserve jusqu’à la date de l’assignation qu’ils ont fait délivrer.
Ils n’ont à aucun moment voulu exercer leur droit de rétractation, étant rappelé qu’il peut être exercé sur papier libre, sans utilisation du bordereau du contrat.
Dès lors, ils ont exécuté volontairement le contrat en connaissance des vices mentionnés ci-dessus, ce qui en vaut confirmation, et les prive de la possibilité de se prévaloir des nullités, purement formelles, invoquées.
La demande d’annulation du contrat conclu avec la SAS Idelec doit être rejetée.
Le jugement qui a prononcé l’annulation du contrat principal au motif qu’il n’est pas conforme au code de la consommation, puis celle du contrat de crédit affecté, et qui s’est prononcé sur les conséquences de ces annulations, doit être infirmé et ces demandes rejetées, ce qui rend sans objet le débat sur l’éventuelle privation de la banque d’obtenir restitution du capital prêté.
3) Sur les manquements imputés à la SA Cofidis :
En premier lieu, s’agissant d’un manquement à une obligation de conseil, la banque dispensatrice de crédit, qui n’a pas à s’immiscer dans les affaires de son client pour apprécier l’opportunité des opérations auxquelles il procède, n’est tenue, en cette seule qualité, d’aucune obligation de conseil envers les emprunteurs sauf si elle en a pris l’engagement, et seulement d’une obligation d’information sur les caractéristiques du prêt qu’elle leur propose de souscrire afin de leur permettre de s’engager en toute connaissance de cause.
Il s’ensuit en l’espèce que dès lors que la banque a précisément informé les emprunteurs des caractéristiques de l’emprunt sollicité, elle n’était tenue à aucun devoir de conseil envers eux et n’avait pas à s’immiscer dans leur choix de faire l’acquisition d’une centrale photovoltaïque ni, a fortiori, de s’interroger sur le rendement de cette centrale.
En deuxième lieu, l’obligation de mise en garde à laquelle le banquier est tenu envers son client consiste seulement à vérifier que, lors de la conclusion du contrat, le crédit est adapté au regard des capacités financières de l’emprunteur et du risque de l’endettement né de l’octroi du prêt sollicité.
En l’absence d’un tel risque, le banquier n’est tenu d’aucune obligation de mise en garde.
En l’espèce, avant d’accorder l’emprunt en litige, la SA Cofidis a remis aux époux [F] une fiche ‘d’informations précontractuelles européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs’ précisant ‘un crédit vous engage et doit être remboursé, vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager’ détaillant clairement et précisément les caractéristiques l’emprunt, et elle a consulté le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers qui ne fait mention d’aucun incident de paiement de chacun des époux [F].
Elle leur a également fait remplir et signer une ‘fiche de dialogue, revenus et charges’ dans laquelle ils ont déclaré leur situation de retraités, avoir des ressources mensuelles totales de 3 233 Euros, et être propriétaires de leur maison sans aucun emprunt en cours.
La SA Cofidis s’est également fait communiquer copie de leurs pièces d’identité, leur avis d’imposition relatif à l’année 2016 mentionnant des revenus totaux de 38 792 Euros, et un avis de taxes foncières de 736 Euros.
Cette situation patrimoniale et financière permettait de souscrire sans risque d’endettement un emprunt générant, sur une durée de 48 mois, des mensualités de 597,32 Euros.
Au surplus, l’installation permettait aux emprunteurs de se procurer des revenus complémentaires liés à la vente de l’électricité produite.
Par conséquent, l’emprunt souscrit était en adéquation avec la situation des emprunteurs et la SA Cofidis n’était tenue à aucun devoir de mise en garde.
La demande de dommages et intérêts doit être rejetée.
4) Sur la demande de déchéance du droit aux intérêts :
En premier lieu, les époux [F] invoquent un défaut d’inscription de l’intermédiaire en opération de banque à son obligation d’immatriculation, en invoquant les articles L. 519-1 du code monétaire et financier et L. 512-1 du code des assurances.
Mais la SAS Idelec, dont l’activité est la pose de centrales photovoltaïque, n’est pas un intermédiaire de crédit au sens de l’article L. 519-1 ci-dessus mentionné.
En outre, l’article R. 519-2 du même code exclut de ce champ d’application les crédits fournis en complément de prestations principales.
En deuxième lieu, la SAS Idelec n’est pas, non plus, un intermédiaire en opérations d’assurances tel que défini à l’article L. 511-1 du code des assurances de sorte que la référence à l’article L. 512-1 du même code est inopérante.
En tout état de cause, les manquements à ces réglementations ne sont pas sanctionnés par la déchéance du droit à des intérêts.
Ils invoquent également l’obligation de formation prévue aux articles L. 311-8 et D. 311-4-3 du code de la consommation.
Mais ces textes ont été abrogés par l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et le décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.
En réalité, la sanction à laquelle ils font référence est celle de l’ancien article L. 311-48 du code de la consommation qui a fait l’objet de la même abrogation.
Cette sanction ne peut donc être prononcée.
La demande de déchéance du droit aux intérêts sera rejetée de sorte que le contrat de crédit doit se poursuivre sans qu’il ne soit besoin de le préciser expressément dans le dispositif de la présente décision.
Enfin, l’équité nécessite d’allouer, en cause d’appel, à la SAS Idelec et à la SA Cofidis, chacune, la somme de 2 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
– la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
– INFIRME le jugement SAUF en ce qu’il a condamné solidairement M. [N] [F] et Mme [C] [U] épouse [F] aux dépens de l’instance ;
– Statuant à nouveau,
– REJETTE la demande d’annulation du contrat souscrit le 12 septembre 2017 entre [C] [U] épouse [F] le et la SARL Idelec ;
– REJETTE la demande d’annulation du contrat de crédit affecté souscrit à la même date avec la SA Cofidis ;
– REJETTE les demandes de dommages et intérêts et de déchéance du droit aux intérêts présentées par [N] [F] et [C] [U] épouse [F] ;
– CONDAMNE solidairement [N] [F] et [C] [U] épouse [F] à payer à la SAS Idelec et à la SA Cofidis, chacune, la somme de 2 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– CONDAMNE solidairement [N] [F] et [C] [U] épouse [F] aux dépens de l’appel.
Vu l’article 456 du code de procédure civile, le présent arrêt a été signé par Dominique Benon, conseiller ayant participé au délibéré en l’absence de Madame la présidente de chambre empêchée, et par Charlotte ROSA, adjointe administrative faisant fonction de greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE CONSEILLER