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23 octobre 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/02031
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 10
ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2023
(n° , 11 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/02031 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFD4Y
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Novembre 2021 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2020022399
APPELANTE
S.A.S.U. LEASECOM
agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS – AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055
INTIMEE
S.A.R.L. PRESTIGE AUTO SPORT
Ayant son siège [Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Xavier DE RYCK de l’AARPI A.S.A. – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R018
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 26 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Edouard LOOS, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente
Monsieur Jacques LE VAILLANT, Conseiller
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signée par Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Président pour Edouard LOOS, Président empêché et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte sous seing privé en date du 16 janvier 2018, la société Prestige Auto Sport a conclu avec la société Lease Pro Finance un contrat de location portant sur divers matériels de vidéo-surveillance avec paiement de 21 loyers trimestriels de 594 euros TTC chacun. Le procès-verbal de réception a été signé le 7 février 2018. La société Leasecom est intervenue au contrat en qualité de cessionnaire de celui-ci.
A l’exception de la facture de loyers intercalaire émise par la société Leasecom le 16 février 2018, aucune échéance n’a été réglée, la société Prestige Auto Sport alléguant que le procès-verbal de réception en possession duquel la société Leasecom était entré était un faux (courriel adressé par le locataire au bailleur le 3 mai 2018).
Par acte en date du 11 juin 2020, la société Leasecom a fait assigner la société Prestige Auto Sport devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de voir constater la résiliation de plein droit du contrat de location conclu entre les parties le 16 janvier 2018 aux torts de la défenderesse, en restitution des matériels loués et en paiement.
Par jugement rendu le 29 novembre 2021, le tribunal de commerce de Paris a :
– constaté la résiliation anticipée du contrat, aux torts exclusifs de la société Prestige Auto Sport à compter du 28 juin 2018,
– condamné la société Prestige Auto Sport à verser à la société Lesacom la somme de 594 euros au titre des loyers impayés au jour de la résiliation avec intérêts au taux légal à compter du 19 juin 2018, avec capitalisation des intérêts et celle de 3 500 euros au titre de l’indemnité contractuelle de résiliation, déboutant pour sa demande d’intérêts,
– ordonné la restitution du matériel, objet du contrat de location, sous astreinte de 20 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du présent jugement et pendant un délai de 30 jours, passé lequel il sera à nouveau fait droit, déboutant pour le surplus ;
– débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
– condamné la société Prestige Auto Sport à payer la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus,
– condamné la société Prestige Auto Sport aux dépens de l’instance dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 74,50 euros dont 12,20 euros de TVA.
La société Leasecom a relevé appel de ce jugement le 24 janvier 2022.
Par conclusions signifiées le 13 juillet 2022 , la société Leasecom demande à la cour de débouter la société Prestige Auto Sport de l’ensemble de ses prétentions et, au visa des dispositions des articles 1103 et 1231-5 du code civil, de réformer le jugement prononcé par le tribunal de commerce de Paris le 29 novembre 2021, en ce qu’il a réduit au taux légal les intérêts réclamés par la société Leasecom au titre de l’échéance de loyer laissée arriérée avant résiliation du contrat ; réduit à hauteur de la somme de 3.500 euros la réclamation de la société Leasecom au titre de l’indemnité contractuelle de résiliation et débouté la société Leasecom de sa demande tendant à ce que cette condamnation soit assortie des intérêts au taux conventionnel.
Statuant à nouveau de ces seuls chefs ,
Condamner la société Prestige Auto Sport à lui payer les intérêts au taux conventionnel égal au taux d’intérêts légal majoré de 1,50 % par mois à compter du 1er avril 2018, et ce sur la somme de 594 euros TTC, correspondant à l’échéance trimestrielle de loyer laissée arriérée avant résiliation du 1er avril 2018, la somme de 10 890 euros au titre de l’indemnité contractuelle de résiliation, et ce avec intérêts au taux d’intérêts légal majoré de 1,50 % par mois, à compter du 28 juin 2018, date de résiliation du contrat, ordonner la capitalisation des intérêts en application de l’article 1343-2 du code civil.
Condamner la société Prestige Auto Sport à lui payer la 25 00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.
Par conclusions signifiées le 17 mai 2022, la société Prestige Auto Sport demande à la cour de réformer le jugement en ce qu’il a :
-constaté la résiliation anticipée du contrat, aux torts exclusifs de la société Prestige Auto Sport à compter du 28 juin 2018,
-condamné la société Prestige Auto Sport à verser à la société Lesacom la somme de 594 euros au titre des loyers impayés au jour de la résiliation avec intérêts au taux légal à compter du 19 juin 2018, avec capitalisation des intérêts et celle de 3 500 euros au titre de l’indemnité contractuelle de résiliation, déboutant pour sa demande d’intérêts,
-ordonné la restitution du matériel, objet du contrat de location, sous astreinte de 20 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du présent jugement et pendant un délai de 30 jours, passé lequel il sera à nouveau fait droit, déboutant pour le surplus ;
-débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
-condamné la société Prestige Auto Sport à payer la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus,
-condamné la société Prestige Auto Sport aux dépens de l’instance dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 74,50 euros dont 12,20 euros de TVA.
statuant à nouveau en cause d’appel,
à titre principal,
– déclarer la société Leasecom mal fondée en toutes ses demandes, et l’en débouter,
-constater que la société Lease Protect France n’a pas respecté le contrat liant les parties, en ne délivrant pas la prestation essentielle dudit contrat, à savoir une installation de vidéosurveillance fonctionnelle ;
-prononcer la résiliation du contrat liant les parties, aux torts exclusifs de la société Lease Protect France,
-par voie de conséquence, prononcer la résiliation du contrat cédé à la société Leasecom,
-condamner la société Leasecom à payer à la société Prestige Auto Sport la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, nuisible et injustifiée, celle de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
à titre subsidiaire, confirmer le jugement du 29 novembre 2021 sauf en ce qu’il a ordonné la restitution du matériel sous astreinte et condamner la société Leasecom à verser la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
SUR CE,
Sur la validité du contrat de location financière et les demandes de résiliation du contrat
La société Prestige Auto Sport expose que le bon de commande versé aux débats par la partie adverse ne comporte pas de date, que la première page n’est pas paraphée, que ce contrat n’a aucune référence alors que le bon de livraison produit fait référence à un numéro de contrat ; que le procès-verbal de livraison est daté du 7 février 2018 et comporte exactement la même écriture que le bon de commande qui semble en outre coupé au-dessus du titre « demande de location ».
Elle soutient que le procès-verbal de réception est par conséquent un faux et sollicite la production par la société Leasecom des originaux de pièces contractuelles.
La société Prestige Auto Sport soutient que le fait que le matériel de vidéo surveillance aurait été cédé à Leasecom par la société Lease Pro Finance contrevient aux dispositions de l’article 8 du contrat communiqué, lequel stipule que le cessionnaire du contrat d’origine n’intervient qu’à titre purement financier.
Elle soutient que les clauses 8 et 9 du contrat produit sont manifestement abusives puisqu’elle stipule que le locataire sera tenu de verser les loyers quand bien même la prestation ne serait pas réalisée correctement et alors qu’en l’espèce, le matériel de vidéo surveillance installé n’a jamais fonctionné ; que l’installation du système de vidéo surveillance n’est pas conforme. Elle fait valoir l’échange de mails du 19 avril 2018 entre plusieurs employés de la société Leasecom indiquant que : « le client a fait opposition car l’installation de vidéosurveillance n’a pas été faite correctement et elle rencontre toujours des problèmes » et indique que le 10 avril 2018, soit 8 jours avant ce mail, la société Lease Protect était intervenue une deuxième fois après la première installation de février 2018. en vain puis n’est jamais revenue pour réparer le problème et qu’il est établi que Leasecom n’a pas respecté le contrat. Elle indique verser aux débats un constat de Me [O], huissier de justice à [Localité 3], daté du 31 mars 2021 duquel il ressort que :
– 6 caméras ont été installés par la société Lease Protect France, aux droits de laquelle vient la société Lesasecom,
– a caméra identifiée « D1 », qui donne sur la cour et qui est donc la caméra principale, ne fonctionne pas,
– la société Lease Protect France a laissé plusieurs trous dans le mur de la société Prestige Auto Sport lorsqu’elle a déplacé la caméra défaillante.
Elle reproche également à la société Lease Protect aux droits de laquelle vient la société Leasecom de ne lui avoir jamais fourni l’autorisation préfectorale prévue par les articles L 252-1 et suivants du code de la sécurité intérieure. autorisant à filmer le domaine public, rendant par la même son système sans aucun intérêt.
Elle soutient que l’annulation du contrat principal de la société Lease Protect France, pour défaut d’exécution, entraînera la résolution du contrat de la société Leasecom.
La société Leasecom expose qu’il résulte de la consultation des courriels échangés que le matériel a été effectivement mis à la disposition du locataire qui a signé, le 10 avril 2018, un bon d’intervention aux termes duquel était acté la réalisation d’une prestation d’ordre technique, outre l’ajout de deux caméras complémentaires. Elle ajoute qu’elle a mis le locataire en demeure par lettre recommandée AR en date du 19 juin 2018 qui précisait qu’à défaut pour le locataire de déférer à cette semonce sous huitaine, le contrat devrait être considéré comme résilié de plein droit conformément aux dispositions de ses conditions générales ; que cette lettre lui a été retournée revêtue de la mention « pli avisé et non réclamé ».
Elle soutient que l’affirmation selon laquelle ce document serait constitutif d’un faux n’est étayée par aucun commencement de démonstration. Elle expose que le bon de commande est en réalité le contrat de location régularisé par la société Prestige Auto Sport, laquelle y a apposé, outre sa signature, son cachet humide. Elle ajoute que, dans le cadre des débats de première instance, elle avait pris le soin de verser aux débats la copie certifiée conforme de la convention et montré, le jour de l’audience des plaidoiries, les originaux tant du contrat que du procès-verbal de réception. Le procès-verbal de réception est daté du 7 février 2018 et est également revêtu de la signature et du cachet humide du locataire, mais également du fournisseur, la société Lease Pro Finance et est produite aux débats en copie certifiée conforme et sera montrée le jour de l’audience des plaidoiries en original.
Elle souligne que l’intimée confond la société Leaseom, bailleresse substituée à la société Lease Pro Finance, qui était la bailleresse initiale de la société Prestige Auto Sport et le fournisseur des matériels et que la bailleresse, qui n’a fait que ratifier les choix de sa cocontractante, ne saurait être jugée responsable des difficultés d’ordre technique, lesquelles du reste ne sont absolument pas démontrées, que le locataire aurait pu rencontrer dans le cadre de l’utilisation des matériels ; que le locataire n’est néanmoins pas dépourvu de tout moyen d’action, dans la mesure où il dispose de la faculté d’exercer ses droits à l’encontre du fournisseur, lesquels lui ont été transférés par le bailleur, comme cela est l’usage en la matière.
Elle invoque l’article 6 des conditions générales de la convention qui indique :
« Le locataire ne peut prétendre à aucune remise, prorogation ou diminution de loyers, ni à résiliation ou à dommages et intérêts de la part du loueur, en cas de défaut de rendement ou d’insuffisance technique de l’équipement, ainsi qu’en cas de non utilisation de l’équipement pour quelque cause que ce soit. »
« Il doit accomplir au lieu et place du loueur toute formalité imposée au propriétaire ou aux utilisateurs de l’équipement, le loueur lui ayant transféré les droits nécessaires qu’il détient en sa qualité de propriétaire de l’équipement loué’ »
et l’article 8 des conditions générales du contrat qui précise :
« Le cessionnaire intervenant à titre purement financier, le locataire, en acceptant cette intervention, renonce à effectuer toute compensation, déduction, demande reconventionnelle en raison du droit qu’il pourrait faire valoir à l’encontre du loueur d’origine, ainsi qu’à tout recours contre le cessionnaire du fait, notamment, de défaillance ou de vice caché ou du fait de l’assurance, prestations de services, construction, livraison ou installation de l’équipement ; le locataire conservant sur ces points tous les recours contre le fournisseur et le loueur d’origine. » 10
Elle soutient qu’elle a exercé son obligation de délivrance puisqu’un procès-verbal de livraison-réception sans réserves a été régularisé le 7 février 2018, avant même que la société Leasecom ne devienne cessionnaire du contrat et propriétaire du matériel loué.
Elle souligne que le procès-verbal de constat que la société Prestige Auto Sport a très tardivement pris l’initiative de faire dresser par la SAS Lex 26, huissiers de justice à [Localité 3], le 31 mars 2021, se contente, en réalité, de reprendre les propos tenus par son client et dont les termes sont assez difficiles à interpréter, tant il est vrai que, pour l’essentiel, ce document fait référence, outre aux caméras, dont la présence n’est pas contestée, mais également à l’apparition de certains écrans dits « noirs » au sujet desquels il est difficile, à ce stade et à défaut de contradiction, de porter une appréciation.
Elle ajoute que l’intimée semble vouloir lui imputer le fait que, prétendument, aucune autorisation préfectorale n’aurait été sollicitée afin « d’autoriser à filmer le domaine public » alors qu’en application du code de la sécurité intérieure et des conditions générales de la convention, il appartient à l’exploitant d’un système de vidéo-surveillance et non pas au bailleur de ces équipements ni au bailleur substitué, de solliciter les autorisations administratives éventuellement nécessaires
Ceci étant exposé, il convient, à titre liminaire de souligner qu’il existe une confusion entre la société Lease Pro Finance et la société Lease Protect France alors que le contrat a été conclu entre la société Prestige Auto et la société Lease Pro finance. Il convient de noter cependant que la fiche d’intervention pour le rajout de deux caméras (pièce Lesacom n° 7) est au nom de la société Lease Protect France.
Il ressort des pièces versées aux débats, que par contrat du 16 janvier 2018 référencé V1801094, la société Prestige Auto Sport a conclu avec la société Lease Pro Finance un contrat de location portant sur divers matériels de vidéo-surveillance avec paiement de 21 loyers trimestriels de 594 euros TTC chacun. Le contrat mentionne l’intervention de la société Leasecom en qualité de cessionnaire de celui-ci. Il est d’ailleurs produit la facture de cession du matériel de la société Lease Pro Finance à la société Leasecom, datée du 15 février 2018, pour un montant de 10 614,86 euros TTC et portant le même numéro de contrat, à savoir V1801094. La société Leasecom peut donc être considérée comme le bailleur et le fournisseur du matériel, en l’absence de toute information quant à l’existence d’un autre fournisseur.
Le procès-verbal de réception a été signé le 7 février 2018 .
La société Prestige Auto ne justifie pas que les pièces contractuelles qui comportent sa signature et son cachet seraient des faux.
En tout état de cause, la société Prestige Auto a fait dresser procès-verbal d’huissier aux fins de faire constater que le matériel ne fonctionnait pas et invoque une livraison non conforme, ce qui implique que le matériel a bien été livré.
Elle est par ailleurs mal fondée à contester la réalité de la cession du contrat à la société Leasecom, celle-ci étant intervenue au contrat en qualité de cessionnaire. Il est par ailleurs précisé, aux termes de l’article 8 du contrat, que le locataire reconnaît comme loueur le cessionnaire.
La société Prestige Auto soutient que les clauses 8 et 9 du contrat sont manifestement abusives puisqu’elle stipule que « le locataire sera tenu de verser les loyers quand bien même la prestation ne serait pas réalisée correctement » et alors que « le matériel de vidéo-surveillance installé n’a jamais fonctionné » (article 9), sans toutefois indiquer le fondement de son moyen et sans en tirer des conséquences juridiques.
En tout état de cause, l’article 1171 du code civil, issu de la loi du 20 avril 2018, qui vise à prohiber les clauses abusives dans les contrats d’adhésion qui créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat et qui est applicable au contrat de location financière, n’est entré en vigueur qu’à compter du 1er octobre 2018 de sorte que ces dispositions ne sont pas applicables en l’espèce, la contrat datant du 16 janvier 2018.
La société Auto Prestige est mal fondée à reprocher à la société Leasecom de n’avoir pas sollicité une autorisation préfectorale de filmer le domaine public, prévue par les articles L 252-1 et suivants du code de la sécurité intérieure ou de lui avoir indiqué qu’il incombait à son client de le faire, dans la mesure où il lui appartenait, en sa qualité d’exploitante du système de vidéo-surveillance, de faire la démarche.
Il ressort des pièces versées aux débats et notamment les pièces 7 et 8 de la société Leasecom, que le 10 avril 2018, la société Lease Protect France est intervenue pour le « rajout de deux caméras + modification emplacement de la caméra donnant sur le parking », intervention confirmé par mail de la société intervenante à la société Leasecom du 19 juin 2018.
Par mail du 19 avril 2018 échangé entre employés de la société Leasecom, le service de recouvrement sollicite une intervention pour « favoriser la résolution rapide du dossier », « le client ayant fait opposition car l’installation de vidéosurveillance n’a pas été faite correctement et elle rencontre toujours des problèmes. Un courrier de constatation lui a été réclamé. »
Ce mail ne peut être analysé comme la reconnaissance par la société Leasecom de défaut de fonctionnement de l’installation mais comme la demande du service de recouvrement de vérifier si les allégations du locataire sont fondées. Il est d’ailleurs souligné que la société Auto Prestige ne produit aucun courrier de contestation et n’invoque ni ne justifie de réclamations ultérieures.
Le procès-verbal d’huissier dressé le 31 mars 2021, soit trois ans après l’installation du matériel, à la demande de la société Prestige Auto, mentionne que la caméra extérieure principale située au-dessus de l’entrée du magasin affiche un écran noir et que les autres caméras fonctionnent.
Le cliché photographique de la vue depuis la porte d’entrée du magasin-accueil donne sur la rue et permet donc de constater que la caméra principale permet de filmer la voie publique. Aucun élément ne permet cependant de dire si cette caméra principale ne fonctionne pas ou bien si elle n’est pas en fonction du fait de l’absence d’autorisation préfectorale pour filmer la voie publique, la société Prestige Auto reprochant à la société Leasecom de ne pas lui avoir indiqué qu’il lui incombait de solliciter l’autorisation.
Ainsi la société Auto Prestige ne rapporte pas la preuve d’un manquement de la société Lesacom à son obligation de fournir un matériel en état de fonctionnement.
La lettre de mise en demeure adressée le 19 juin 2018 et présentée le 20 juin suivant mais non réclamée par la société Auto Prestige est restée sans réponse.
Le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu’il a constaté la résiliation du contrat de location de matériel aux torts de la société Auto-Prestige à compter du 28 juin 2018.
La décision déférée sera également confirmée en ce qu’il a condamné la société Auto Prestige à payer la somme de 594 euros TTC au titre de l’échéance impayée, outre intérêts au taux légal à majorée de 1,50 % en application de l’article 5 du contrat, à compter du 1er avril 2018, date d’éligibilité de la créance.
Sur le quantum de l’indemnité de résiliation
La société Lesacom expose que l’article 10 des conditions générales de la convention indique : « Dans tous les cas de résiliation, le locataire devra’ verser en application des articles 1231-3 et 1231-5 du Code civil, la totalité des loyers échus non-payés et restant à courir à la date de résiliation. La somme ainsi obtenue est augmentée d’une indemnité forfaitaire égale à 10 % du montant des loyers TTC restant à courir au titre du présent contrat à compter du jour de la résiliation’»
Elle fait valoir que les matériels loués sont des matériels de vidéo-surveillance, dont l’obsolescence est particulièrement rapide et que la convention a été conclue le 16 janvier 2018, soit il y a maintenant plus de 4 ans. ; qu’elle ne pourra prétendre minorer partiellement le préjudice par elle subi dans le cadre de la revente des matériels que sous réserve que ces derniers lui soient effectivement restitués, ce qui n’est pas le cas, en dépit du prononcé du jugement ; que l’indemnité de résiliation est la stricte indemnisation du préjudice subi par la bailleresse du fait de la rupture anticipée du contrat qui, avait été conclu pour une durée déterminée. Si les 10 % de pénalités constituent un dépassement par rapport au préjudice subi, ce qui est consubstantiel à la notion même de pénalité, une pénalité aussi classique et modeste d’un montant de 990 euros HT ne peut pas constituer l’excès manifeste stigmatisé par le législateur ; qu’ainsi, le compte s’établit comme suit :
. loyers restant à échoir, savoir échéances trimestrielles des 01/07/2018 au 01/04/2023 incluse, soit 20 x 495 euros HT = 9 900 euros HT
.pénalité de 10 % : 9 900 euros HT x 10 % = 990 euros HT
. total :10 890 euros HT,
outre intérêts au taux conventionnel égal au taux d’intérêt légal en vigueur majoré de 1,50 % par mois, à compter de la date d’exigibilité de la créance concernée, à savoir du 28 juin 2018, date de résiliation du contrat.
La société Prestige Auto Sport souligne que le tribunal a jugé que la clause pénale était excessive puisque la restitution du matériel était ordonnée sans prendre en compte que le matériel avait déjà été restitué, ce qui ne peut que conforter encore sa position quant à la diminution de l’indemnité ; qu’il a justifié la minoration par l’absence de justificatifs fournis quant à la valeur de marché des équipements loués, justificatifs que l’appelante ne produit pas plus en appel ; qu’il a pu prendre en considération le fait que le système de vidéo surveillance installé dans les locaux de la société Prestige Auto Sport n’avait jamais fonctionné.
Elle soutient que la société Leasecom est mal fondée à soutenir que son préjudice correspond au montant des loyers non perçus, sachant que l’indemnité qu’elle va percevoir est nette de toute charge, ce qui n’aurait pas été le cas si elle avait perçu des loyers et qu’elle ne peut pas dissocier la pénalité de 10% du reste de somme réclamée.
Ceci étant exposé, constitue une clause pénale, la clause par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d’avance l’indemnité à laquelle donnera lieu l’inexécution de l’obligation contractée, la clause ayant également pour objet de faire assurer par l’une des parties l’exécution de son obligation.
En l’espèce, l’indemnité de résiliation visée à l’article 10 du contrat est une indemnité stipulée comme un moyen de contraindre le locataire à l’exécution spontanée du contrat et comme l’évaluation conventionnelle et forfaitaire du préjudice subi par le bailleur du fait de l’inexécution par le locataire de son obligation de paiement. Elle constitue donc une clause pénale susceptible de modération par le juge dans l’hypothèse où elle est manifestement excessive, en application de l’article 1231-5 du code civil.
En l’espèce force est de constater que le locataire n’a réglé aucune des échéances trimestrielles mais seulement, comme l’indique le bailleur l’indemnité intercalaire dont le montant est inconnu. Le locataire ne justifie pas que le matériel a été restitué.
L’appréciation de l’indemnité de résiliation sera dès lors fixé à la somme de 495 euros HT x 20 (nombre d’échéances trimestrielles non échues) = 9 900 euros. La somme complémentaire de 900 euros représentant 10 % de ce montant sera rejetée comme conférant à l’indemnité de résiliation sollicitée un caractère excessif. La somme ainsi allouée n’est donc pas inférieure au préjudice subi par le bailleur. Cette somme n’est pas soumise à la TVA car elle constitue l’indemnisation d’un préjudice. Elle portera, en tant qu’indemnisation d’un préjudice, intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Sur la restitution des matériels
La société Prestige Auto Sport fait valoir que le matériel a été récupéré par la société Lease Protect France en mai 2021.
La société Leasecom soutient que la société Prestige Auto Sport n’a jamais fait le nécessaire pour remettre les matériels en la possession de leur légitime propriétaire.
Ceci étant exposé la déclaration de la dirigeante de la société Auto Prestige aux termes de laquelle la société Lease Protect France a récupéré le matériel ne suffit pas à établir que le matériel a été effectivement restitué et alors même que cette dernière n’était plus investie du pouvoir pour reprendre possession des matériels.
Le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu’il a condamné la société Auto Prestige à restituer à la société Leasecom le matériel sans qu’il y ait lieu au prononcé d’une astreinte.
La décision déférée sera également confirmée en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.
La société Auto Prestige, partie perdante, sera condamnée aux dépens d’appel et déboutée de sa demande d’indemnité de procédure. Elle sera condamnée à payer à la société Leasecom, la somme de 1 500 euros.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
CONFIRME le jugement entrepris en ce qu’il a constaté la résiliation anticipée du contrat, aux torts exclusifs de la société Prestige Auto Sport à compter du 28 juin 2018, condamné la société Prestige Auto Sport à verser à la société Lesacom la somme de 594 euros TTC au titre des loyers impayés et à restituer le matériel, objet du contrat ainsi que sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile,
L’INFIRME pour le surplus de ses dispositions ;
Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées ;
DIT que la somme de 594 euros TTC portera intérêt aux taux légal majoré de 1,50 % à compter du 1er avril 20218 ;
CONDAMNE la société Auto Prestige à payer à la société Leasecome la somme de 9 900 euros au titre de l’indemnité de résiliation outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, outre capitalisation de ceux-ci conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;
DIT n’y avoir lieu à prononcer une astreinte concernant la restitution du matériel, objet du contrat de location ;
Y ajoutant,
CONDAMNE la société Auto Prestige aux dépens d’appel ;
DÉBOUTE la société Auto Prestige de sa demande d’indemnité de procédure ;
CONDAMNE la société Auto Prestige à payer à la société Leasecom la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.