Marchand de Biens : décision du 23 janvier 2024 Cour d’appel de Poitiers RG n° 23/01852

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Marchand de Biens : décision du 23 janvier 2024 Cour d’appel de Poitiers RG n° 23/01852
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ARRÊT N° 28

N° RG 23/01852 – N° Portalis DBV5-V-B7H-G3NZ

S.A.R.L. ADAR IMMO

C/

[Y]

[C]

S.D.C. DE LA RÉSIDENCE

‘LE B OCAGE’

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU23 JANVIER 2024

Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référé du 26 juin 2023 rendue par le Tribunal Judiciaire des SABLES D’OLONNE

APPELANTE :

S.A.R.L. ADAR IMMO

N° SIRET : 839 411 394

[Adresse 1]

ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me David LAYANI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉS :

Madame [L] [Y] épouse [V]

[Adresse 2]

Monsieur [J] [C]

[Adresse 4]

ayant tous deux pour avocat postulant et plaidant Me Thomas ROUBERT de la SELARL GAUVIN ROUBERT & ASSOCIES, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE LA RÉSIDENCE

[3]

[Adresse 5]

défaillant bien que régulièrement assigné

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 07 Décembre 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Madame Anne VERRIER, Conseiller qui a présenté son rapport

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

– RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS

L’ ensemble immobilier soumis au statut de la copropriété dénommé Le Bocage comprend :

78 maisons, un bâtiment A composé de 3 locaux commerciaux ou d’habitation, un local poubelles, des parcs de stationnement, des aires de circulation, des espaces libres et aménagés, une piscine figurant au cadastre sous les références 228 section DK n° 42,12,11,13.

Les lots 1 à 78 sont des maisons, les lots 79 à 81 constituent le bâtiment A, le lot 82 est la piscine.

Le 8 mars 2021, une assemblée générale spéciale était convoquée pour voter notamment sur les résolutions suivantes:

‘-modification de la destination de la résidence actuellement classée en résidence de tourisme vers une destination à usage d’habitation principale.

Après avoir pris connaissance du rapport d’activités du conseil syndical et suite à la fin de gestion des logements par l’exploitant unique, l’assemblée générale approuve la modification de la destination de la résidence [3] actuellement classée en résidence de tourisme vers une destination à usage d’habitation principale.’

La résolution était rejetée.

Les résolutions relative à la suppression d’un élément d’équipement commun relatif à la desserte électrique commune de la résidence et à la validation du principe d’une fourniture individuelle d’électricité étaient également rejetées.

Par acte du 18 novembre 2021, la société Adar Immo a acquis de la société PV Exploitation France 4 immeubles, et notamment dans l’immeuble I les lots 79, 80, 81 correspondant à trois locaux commerciaux ou d’habitation.

L’acquéreur déclarait avoir pris connaissance de l’ensemble des documents relatifs au règlement de copropriété et à l’état descriptif de division.

Il s’engageait à exécuter toutes les charges, clauses et conditions contenues au règlement de copropriété sus-énoncé et dans ses modificatifs éventuels.

L’acte précisait que la dernière assemblée générale avait eu lieu le 8 mars 2021.

Par mail du 20 juin 2022, le conseil syndical demandait au syndic ‘de toute urgence’ de mettre en demeure la société Adam Immo de rétablir l’accès au bâtiment A renfermant les sanitaires collectifs de la piscine et le compteur électrique alimentant les équipements du local technique.

Par courrier recommandé du 21 juin 2022, la société Sogire, syndic, mettait en demeure la société Adam Immo de rétablir l’ accès au bâtiment A, annonçait à défaut un référé.

Par courrier du 27 juin 2022, la société Adar Immo répondait au syndic, lui rappelait qu’il disposait des clés lui permettant d’accéder à ses locaux privés, que les locaux ‘sont des parties privatives tenant évidemment compte des servitudes de bon père de famille qui peuvent les grever.

Elle indiquait que les sanitaires que vous pensez être une partie commune, sont depuis toujours des parties privatives.’

Elle se disait non opposée à laisser l’accès aux installations communes qui sont encore situées dans notre partie privative, mais le priait de faire déplacer les installations électriques pour des raisons évidentes de sécurité.

Le 7 juillet 2022, l’huissier requis à la demande du syndic constatait que l’ accès aux toilettes communes était fermé.

Le 1er août 2022, Mme [V], copropriétaire écrivait au syndic, le mettait en demeure d’engager immédiatement toute mesure visant à faire restituer l’accès régulier du bâtiment A à la copropriété et l’engageait à saisir le juge des référés.

Le 22 août 2023, l’huissier requis à la demande des consorts [C]-[V] constatait que la porte des toilettes était ouverte.

Par courrier du 29 septembre 2022, le syndic écrivait à la société Adar Immo:

‘En notre qualité de syndic de la résidence Le Bocage et à la demande du conseil syndical, nous vous confirmons par la présente l’accord de la copropriété suite à vos propositions du 23 septembre dernier, à savoir :

-La société Adar Immo s’engage à déplacer le compteur électrique et le compteur d’eau en extérieur afin d’avoir un accès permanent sur les réseaux.

-Elle accepte une servitude d’égouts sur les sanitaires existants au profit d’une création d’un WC pour la piscine

-Elle propose une somme de 6000 euros sans contrepartie pour faciliter la construction et la création de ce WC.

Par actes des 27 janvier et 14 février 2023, les consorts [C]-[V] ont assigné la société Adar Immo, le syndicat des copropriétaires pris en la personne du syndic la société Sogire devant le juge des référés aux fins de voir:

-condamner la société Adar Immo à rétablir un accès libre aux sanitaires de la piscine, au local technique sous astreinte,

-dire la décision opposable au syndic.

A l’audience, ils ont formé une demande additionnelle de cessation des travaux, de remise en état.

La société Adar Immo a conclu au rejet des demandes et demandé reconventionnellement la condamnation des demandeurs à lui verser une provision de 25 000 euros.

Le syndic s’est rapporté à prudence de justice.

Selon constats des 2 et 16 mars 2023, l’huissier de justice requis par les consorts [C]- [V] a constaté la réalisation de travaux de déplacement et de raccordement d’un coffret électrique.

Par ordonnance du 28 juillet 2023, la Présidente du tribunal judiciaire des Sables d’Olonne a statué comme suit :

-Fait injonction à la société ADAR IMMO de stopper immédiatement tous travaux relatifs aux WC et locaux techniques litigieux du bâtiment A de la Résidence [3], de libérer l’accès à ceux-ci pour l’ensemble des copropriétaires et de réaliser tous travaux de remise en état nécessaires pour restituer aux lieux leur affectation et état d’origine sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai de 7 jours après signification de l’assignation (pour commencer la mise en ‘uvre des travaux ‘ le délai de l’astreinte étant interrompu pour permettre la bonne réalisation de ces travaux dans le délai de 15 jours suivant et reprenant ensuite).

-Condamne la société ADAR IMMO à verser à Mr [C] et Mme [V] la somme de 500 euros chacun à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de leur préjudice

-Condamne la société ADAR IMMO à verser la somme de 3.000€ sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

-Déclare la décision commune et opposable au syndicat des copropriétaires de la résidence le BOCAGE prise en la personne de son syndic SOGIRE

-Déboute la société ADAR IMMO de toutes ses autres demandes

-Condamne la société ADAR IMMO aux entiers dépens, comprenant le coût des constats d’huissiers des 7 juillet 2022 et 2 mars 2023 ‘

Le premier juge a notamment retenu que :

La qualification parties communes, parties privatives relève du juge du fond.

Selon l’article 11 du règlement, le bâtiment A ne peut retrouver une affectation à usage d’habitation que sous réserve de l’accord de l’assemblée générale.

Cet accord n’a été ni sollicité, ni donné.

Les transformations réalisées privent l’ ensemble des copropriétaires de l’usage de certaines parties qui leur étaient auparavant ouvertes.

Elles doivent être considérées comme potentiellement illicites.

Les travaux sont entachés d’une apparence d’illicéité.

Les préjudices de jouissance de Mme [V] et de M. [C] seront évalués chacun à 500 euros.

La société Adar Immo succombe. Ses demandes provisionnelles seront rejetées.

LA COUR

Vu l’appel en date du 28 juillet 2023 interjeté par la société Adar Immo

Vu l’article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 29 septembre 2023, la société Adar Immo a présenté les demandes suivantes :

Vu l’article 1240 du Code Civil,

Vu l’article 32-1 du Code de Procédure Civile,

Vu les pièces versées au débat

DECLARER la SARL ADAR IMMO bien fondée en son appel,

Y faisant droit,

-INFIRMER la décision rendue par ordonnance de référé le 26 juin 2023 en ce qu’elle a :

– fait injonction à la société ADAR IMMO de stopper immédiatement tous travaux relatifs aux WC et locaux techniques litigieux du bâtiment A de la Résidence [3], de libérer l’accès à ceux-ci pour l’ensemble des copropriétaires et de réaliser tous travaux de remise en état nécessaires pour restituer aux lieux leur affectation et état d’origine sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai de 7 jours après signification de l’assignation

-l’ a condamnée à verser à Mr [C] et Mme [V] la somme de 500 euros chacun à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de leur préjudice

-l’a condamnée à verser la somme de 3.000€ sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

-a déclaré la décision commune et opposable au syndicat des copropriétaires de la résidence le BOCAGE prise en la personne de son syndic SOGIRE

-débouté la société ADAR IMMO de toutes ses autres demandes

-condamné la société ADAR IMMO aux entiers dépens, comprenant le coût des constats d’huissiers des 7 juillet 2022 et 2 mars 2023

Par conséquent,

-DEBOUTER les intimés de l’ensemble de leur demande,

JUGER Madame [V] et Monsieur [C] de mauvaise foi,

-CONDAMNER solidairement Madame [V] et Monsieur [C] à l’allocation d’une provision à valoir le versement de dommages et intérêts pour l’exercice d’une procédure dilatoire et abusive à l’encontre de la société ADAR IMMO d’un montant de 25.000 €,

JUGER l’existence de contestations sérieuses quant à l’exploitation du local technique, des installations électriques au sein des lots 79, 80 et 81 dont est propriétaire la SARL ADAR IMMO,

-RENVOYER les parties à se pourvoir au fond,

-CONDAMNER solidairement Madame [V] et Monsieur [C] au paiement de la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, outre entiers dépens.

A l’appui de ses prétentions, la société Adar Immo soutient en substance que:

-Le juge des référés après avoir rappelé qu’il n’avait pas compétence pour déterminer si les parties étaient communes ou privatives, n’a pas tiré les conséquences de ses constatations et a tranché hors de sa compétence.

-Le règlement de copropriété a été interprété de manière erronée.

-Les lots 79,80,81 peuvent recevoir au choix de leur propriétaire une affectation commerciale ou d’habitation.

-Seule la modification globale de l’immeuble suppose une obligation de vote.

-Seul le retour à un mode d’habitat traditionnel de l’immeuble implique un vote.

-Elle se prévaut de contestations sérieuses.

-Les lots qu’elle a acquis servaient d’accueil lorsque la société Pierre & Vacances était propriétaire.

-Elle est marchand de biens, n’a jamais entendu maintenir l’activité de tourisme.

-Elle a fait établir des plans qui démontrent que les WC et le local technique sont situés à l’intérieur des parties privatives.

-L’ accès au local technique et aux sanitaires passe par ses locaux.

-Elle a discuté avec le syndic. Un protocole d’accord a été signé.

-Les travaux de déplacement qu’elle finançait avaient pour objectif de faciliter l’ accès, devaient être achevés avant l’été.

-L’ action exercée est dilatoire et abusive.

-Mme [V] et M. [C] voulaient racheter ses lots, ont fait des offres insuffisantes.

-M. [C] était président du conseil syndical. Il a fait une offre le 19 juillet 2021.

-Après qu’elle a refusé leurs offres, ils lui ont fait du chantage.

-Les acheteurs potentiels ont été dissuadés. Elle ne peut ni louer, ni vendre.

-Elle produit une attestation en ce sens rédigée par un agent immobilier.

-Elle subit un préjudice, demande une provision de 25 000 euros correspondant au quart du préjudice qu’elle subit.

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 27 octobre 2023, les consorts [C]-[V] ont présenté les demandes suivantes :

-Vu l’article 835 du Code de procédure civile,

-Vu la loi du 10 juillet 1965 et de son décret d’application,

-Vu le règlement de copropriété,

-Vu les pièces produites aux débats suivant bordereau de pièces annexé aux présentes.

IL EST DEMANDE A LA COUR D’APPEL DE POITIERS DE:

– DIRE ET JUGER mal fondé l’appel interjeté par l’appelante à l’encontre de l’ordonnance de Madame le Président du tribunal judiciaire des SABLES D’OLONNE du 26 juin 2023,

EN CONSEQUENCE,

-CONFIRMER l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions,

Y AJOUTANT

-CONDAMNER l’appelante à verser à Monsieur [C] et Madame [V] une somme de 6.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

-CONDAMNER l’appelante aux entiers dépens de l’instance.

A l’appui de leurs prétentions, M. [C] et Mme [V] soutiennent en substance que :

-Le bâtiment A abrite notamment le local électrique, les sanitaires collectifs de la piscine.

-La société Adar Immo a décidé de transformer les 3 lots acquis en lots à usage d’habitation.

-L’article 11 du règlement prévoit que certains locaux peuvent recevoir au choix de leur propriétaire une affectation commerciale ou d’habitation .

-Les copropriétaires n’ont pas donné leur accord pour un retour à un mode d’habitat traditionnel.

-Ce retour est subordonné à une décision des copropriétaires réunis en assemblée générale extraordinaire et statuant à la majorité de l’article 26 de la loi.

-En modifiant la destination des 3 lots, la société Adar Immo a supprimé l’ accès aux sanitaires communs et au local technique rendant impossible et dangereuse l’utilisation de la piscine.

-La demande est fondée sur l’article 835 du code de procédure civile.

-Les travaux entrepris visaient à transformer le local commercial en local à usage d’habitation.

-Ils affectent des parties communes, n’ont pas été autorisés.

-Le refus d’accès est une atteinte au droit de propriété, constitue une voie de fait, un trouble manifestement illicite.

-L’existence d’une contestation sérieuse n’empêche pas de prendre les mesures prévues à l’article 835 du code de procédure civile.

-Seuls des travaux régulièrement décidés par l’assemblée générale peuvent être ordonnés.

-Le local technique et les toilettes bien que situés dans des lots privatifs constituent des parties communes.

-Il existe une servitude de passage général permettant l’accès à la piscine et ses équipements.

-La jouissance paisible de la piscine, son entretien ou sa réparation sont impossibles faute d’accès au local technique.

-Les lots litigieux sont attachés au caractère touristique de la résidence.

-Les lots acquis ont un caractère privatif mais ont une affectation particulière aux termes du règlement de copropriété.

-Le local technique de la piscine comprend le coffret et l’alimentation électrique de la piscine qui sont des éléments d’équipements communs, comme les sanitaires.

-Le syndicat règle les factures de consommation électrique.

-La suppression de l’accès aux sanitaires et au local technique caractérise le trouble manifeste.

-En rachetant, la société Adar Immo aurait dû reprendre l’exploitation des locaux à destination touristique. La société Pierre&Vacances exploite toujours une partie de la résidence sous l’enseigne Maeva. La destination touristique n’est pas terminée.

-L’article 11 du règlement précise que l’activité touristique forme un tout homogène

-Les annonces de vente diffusées par Internet attestent que la société Adar Immo souhaite vendre ses lots à usage d’habitation.

-L’attestation rédigée par le syndic le 8 novembre 2023 est de pure complaisance, contredit la lettre recommandée du 21 juin 2022.

Le syndic mettait alors la société Adar Immo en demeure de restituer au syndicat les sanitaires collectifs, le compteur électrique alimentant les équipements du local technique.

-Le syndic protège la société Adar Immo et son vendeur, est une filiale de la société Pierre&Vacances.

-sur la provision

-Le fait de se baigner dans une piscine sans pouvoir disposer des toilettes à proximité immédiate est un préjudice de jouissance. L’ordonnance sera confirmée.

-Les installations électriques communes n’ont pas été remises à leur emplacement d’origine.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Le syndic, la société Sogire n’a pas constitué avocat.

La déclaration d’appel a été signifiée à sa personne le 31 août 2023.

Vu l’ordonnance de clôture en date du 9 novembre 2023 .

SUR CE

– sur l’existence d’un trouble manifestement illicite

L’article 873 du code de procédure civile dispose que le Président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d’une contestation sérieuse prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

La société Adar Immo considère que les demandes de cessation des travaux, de remise en état des locaux dans leur état antérieur se heurtent à des contestations sérieuses, que le juge des référés a excédé sa compétence.

Elle soutient qu’elle est en droit de faire des travaux dans ses parties privatives, n’a nul besoin d’autorisation, que cette autorisation n’est requise que dans l’hypothèse d’une modification globale de l’immeuble.

Elle se prévaut en outre de l’accord du syndic.

Elle soutient que les travaux projetés avaient pour objectif de maintenir les accès des copropriétaires.

Les consorts [C]-[V] demandent la confirmation de l’ordonnance, estiment que les travaux réalisés sont manifestement irréguliers au regard de la qualité de résidence de tourisme de la copropriété, du vote intervenu le 8 mars 2021.

Ils assurent que les travaux privent les copropriétaires d’accès aux toilettes communes, à des équipements communs dont dépendent l’utilisation, l’entretien de la piscine.

Ils considèrent que le courrier du syndic du 29 septembre 2022 est sans aucune valeur, révélateur d’une collusion entre le syndic et l’appelante.

Il ressort des productions les éléments suivants:

L’article 11 du règlement de copropriété auquel le premier juge s’est référé prévoit :

I. L’immeuble, objet des présentes a une destination principale d’habitation mais il constitue une résidence de tourisme au sens des arrêtés ministériels du 14 février 1986.

Il pourra comprendre néanmoins des locaux commerciaux au rez-de-chaussée et au premier étage du bâtiment A.

Certains locaux peuvent recevoir au choix de leur propriétaire une affectation commerciale ou à usage d’habitation (lots 79, 80 et 81) ;

Le présent règlement prévoit en conséquence :

1° – Une destination et des conditions de jouissance des parties tant privatives que communes, conformes au mode d’utilisation défini audit arrêté pour ce type de logement ;

2° – une gestion assurée pour l’ensemble de la résidence de tourisme par une seule personne physique ou morale, appelé « l’exploitant » lié aux copropriétaires par contrat d’apport en jouissance. La gestion des locaux et équipements sous-entendus par cette activité touristique, lesquels forment un tout homogène, sera confié obligatoirement à l’exploitant, sans aucune indemnité.

II. Après la perte d’exploitation sous forme de résidence de tourisme ou en hébergement de loisir gestion intégrée, l’immeuble pourra être destiné à usage principal d’habitation (avec éventuellement des locaux commerciaux au rez-de chaussée au premier étage du bâtiment A comme il est dit ci-dessus).

Le retour à un mode d’habitat traditionnel sous réserve des autorisations administratives éventuellement nécessaires, est subordonné à la décision des copropriétaires réunis en assemblée générale extraordinaire et statuant à la majorité de l’article 26 de la loi.

Dans cette hypothèse, les modalités d’usage des parties privatives et des parties communes résulteront des articles 12 à 14 ci-après, lesquels, par voie de conséquence, ne s’appliqueront pas pendant la période d’exploitation en tant que résidence de tourisme ou en hébergement de loisir gestion intégrée, à l’exception des dispositions d’ intérêt général qui s’appliqueront de manière continuelle. »

Le règlement de copropriété prévoit aussi en page 67 : (h modification):

Après l’exploitation sous forme de résidence de tourisme, chaque copropriétaire pourra réaliser sur ses ouvrages ou locaux tous travaux

quelconques à la condition expresse qu’ils n’affectent en rien l’usage des éléments appartenant ou nécessaires à d’autres propriétaires et l’aspect extérieur.

Lorsque les travaux envisagés affectent l’usage d’éléments de l’ensemble immobilier appartenant ou nécessaires à d’autres propriétaires, ils ne pourront être entrepris qu’avec l’accord préalable et écrit de l’assemblée générale des copropriétaires.

Le règlement de copropriété fait aussi référence à des servitudes temporaires d’usage limitées à l’accueil et à ses locaux annexes situés dans le bâtiment collectif au profit des propriétaires et résidents des résidences de tourisme (page 10), servitudes qui existeront tant que l’une des copropriétés sera exploitée en résidence de tourisme .

Il définit enfin les parties communes spéciales aux copropriétaires du bâtiment A, indique qu’elles comprennent notamment (page 21) tous les accessoires des parties communes ainsi que les objets mobiliers, matériels et ustensiles affectés à l’usage commun, les canalisations et branchements généraux d’eau et d’électricité, les descentes de WC .

Il n’est pas démontré, ni prétendu que la destination de la résidence a été modifiée.

Les consorts [C]-[V] indiquent que la société Pierre &Vacances exploite toujours une partie de la résidence sous l’enseigne Maeva .

La société Adar Immo souhaite déplacer le compteur électrique et le compteur d’eau qui se trouvent dans le local technique, le WC commun à l’extérieur de ses lots.

Elle soutient que ses travaux ne méconnaissent pas le règlement de copropriété.

Il résulte des constats d’huissier produits que l’accès aux toilettes a été fermé courant juillet , rétabli le 22 août, que des travaux de déplacement et de raccordement d’un coffret électrique ont été réalisés courant mars 2023.

La société Adar Immo a admis le 27 juin 2022 que ses lots privatifs étaient grevés de servitudes d’accès qu’elle devait respecter.

Les travaux entrepris affectent à l’ évidence la jouissance des autres copropriétaires dès lors que l’ usage des sanitaires communs se trouvant à proximité immédiate de la piscine a été empêché, que l’accès au local technique et donc aux équipements nécessaires à l’alimentation et à l’entretien de la piscine est compromis.

L’accord du syndic, syndic qui est partie à l’instance et qui , après s’en être rapporté, atteste en faveur d’une partie sans conclure ne saurait valoir validation-régularisation des travaux litigieux.

L’ordonnance sera donc confirmée en ce qu’elle a enjoint à la société Adar Immo de cesser les travaux litigieux , rétablir l’accès aux toilettes et au local technique, remettre les locaux dans leur état antérieur sous astreinte.

– sur la demande de provision

La perte d’accès au local technique et aux toilettes communes constitue pour les demandeurs un préjudice de jouissance.

L’ordonnance sera confirmée en ce qu’elle a condamné la société Adar Immo à payer à M. [C] et à Mme [V] la somme de 500 euros chacun correspondant à la part non sérieusement contestable de l’indemnisation du préjudice.

– sur les autres demandes

Il résulte de l’article 696 du code de procédure civile que ‘ La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. (…).’

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d’appel seront fixés à la charge de la société Adar Immo.

Il est équitable de la condamner à payer aux intimés la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS :

statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort

-confirme l’ordonnance entreprise

Y ajoutant :

-déboute les parties de leurs autres demandes

-condamne la société Adar Immo aux dépens d’appel

-condamne la société Adar Immo à payer aux consorts [C]-[V] la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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