Diffamation : décision du 17 octobre 2019 Cour de cassation Pourvoi n° 18-22.816

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Diffamation : décision du 17 octobre 2019 Cour de cassation Pourvoi n° 18-22.816
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CIV. 1

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 octobre 2019

Rejet non spécialement motivé

Mme BATUT, président

Décision n° 10552 F

Pourvoi n° X 18-22.816

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par M. Q… R…, domicilié chez Mme I… R…[…] ,

contre l’arrêt rendu le 27 juin 2018 par la cour d’appel de Grenoble (chambre des affaires familiales), dans le litige l’opposant à Mme P… F…, épouse R…, domiciliée […] ,

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 17 septembre 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Bozzi, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mme Berthomier, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. R…, de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de Mme F… ;

Sur le rapport de Mme Bozzi, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. R… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Mme F… la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. R…

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR prononcé le divorce de Monsieur Q… R… et de P… F… au torts exclusifs de Monsieur Q… R…, en confirmation du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Gap le 10 mai 2016 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur le principe du divorce et des torts, sur les torts du mari, que Madame F… réitère devant la cour les griefs qu’elle avait déjà formulés devant le premier juge à l’encontre de son époux ; grief d’adultère caractérisant un manquement au devoir de fidélité ; harcèlement moral et violence morales constituées par des menaces constituées de la tuer si elle persistait dans sa décision de divorcer ; introduction frauduleuse à son domicile le 11 octobre 2011, violences physiques sur sa personne commises le 15 octobre 2011, incurie, gestion hasardeuse et opaque du patrimoine indivis, détournement de fonds indivis à son préjudice pour un montant de 78 363 euros arrêté à la date de l’ordonnance de non-conciliation ; détournement de ses fonds propres au profit d’une SARL Gap Déco, caractérisant un manque de loyauté dans la conduite des affaires financières du couple ; qu’en premier lieu, le grief d’adultère n’est pas appuyé par la moindre pièce de nature à l’établir ; ce grief ne sera pas retenu ; qu’il en est de même des menaces de mort dont Madame F… accuse son mari qui ne sont établies par aucune pièce ; que s’agissant des faits de harcèlement tels qu’allégués, Madame F… a déposé une main courante le 12 janvier 2012 se plaignant qu’un véhicule n’appartenant pas à son mari la suivait régulièrement depuis plusieurs mois ; que cette main courante ne rapporte donc pas la preuve de faits de harcèlement imputables à Monsieur R… ; que dans cette même main courante, Madame F… fait état d’insultes commises par son mari mais ne les étaye par aucune pièce en justifiant ; que s’agissant de la gestion financière des époux, Madame F… reproche à son mari d’avoir laissé impayés des prélèvements qui devaient être opérés pour le remboursement des échéances de prêts contractés ensemble par les époux dans le cadre de leurs opérations immobilières ; que toutefois il ressort des tableaux d’amortissement des prêts que les époux s’étaient engagés solidairement envers la banque et que dès lors, le remboursement des échéances incombait aux deux époux ; que ce grief n’est donc pas fondé ; qu’il résulte en revanche, des investigations du notaire, Maître C… et du sapiteur, Monsieur T…, selon rapports versés aux débats par l’appelant, que des sommes importantes appartenant indivisément aux époux ont été placées et détournées à des fins personnelles par Monsieur R… ; que notamment il ressort du relevé de compte de Maître W…, notaire à Aspres-sur-Buëch en date du 1er mars 2013, que ce notaire a viré des sommes importantes sur le compte personnel de Monsieur Q… R… provenant de la vente de biens immobiliers indivis entre les époux alors que ces fonds revenaient à l’indivision ; or, Monsieur R… n’a jamais justifié auprès de Maître C… ni de Monsieur T… de la destination de ces fonds dont il a prétendu, sans jamais en rapporter la preuve, les avoir employés à la réalisation de travaux pour le compte de l’indivision ;que le sapiteur, Monsieur T…, a conclu ses investigations en indiquant que l’indivision avait disposé de fonds qu’elle n’avait pas affectés au remboursement des emprunts et que ces fonds avaient été placés et utilisés à des fins personnelles par Monsieur R… ; que ce dernier n’émet aucune contestation sur ces conclusions qui contredisent ses prétentions ;que les comptes entre époux sont à faire dans le cadre de la liquidation de leur régime matrimonial ; qu’il est ainsi démontré que le comportement du mari dans la gestion de l’indivision caractérise, comme le soutient l’épouse, un grave manque de loyauté dans les rapports financiers entre les époux qui constitue également un manquement aux devoir de respect dans les rapports conjugaux au sens de l’article 212 du code civil, qui justifie la confirmation du jugement en ce qu’il a prononcé le divorce des parties aux torts du mari ; sur les torts de l’épouse, Monsieur R… invoque les griefs suivants : son épouse l’a chassé du domicile conjugal sans lui permettre de reprendre possession de ses effets personnels et de ses documents administratifs, alors qu’il souffrait de graves ennuis de santé, enfreignant le devoir d’assistance et de respect résultant du mariage ; qu’elle a coupé le chauffage de son logement en période hivernale ; qu’elle a diffusé auprès de l’entourage du couple des accusations calomnieuses infondées relatives à une relation adultère et homosexuelle de sa part ; qu’elle n’a pas hésité à user de procédés dolosifs par le recours à un détective, lequel a usé de manoeuvres déloyales en vue de le discréditer ; que son épouse a systématiquement omis de l’aider à s’acquitter des emprunts contractés pour une opération immobilière engagée de concert entre les époux ; que Madame F… a usé de violences à son égard le 26 décembre 2011 ; que, sur le premier grief, il ressort d’un procès-verbal de constat d’huissier du 27 juillet 2011, établi à la demande de Monsieur R…, que ce dernier a quitté le domicile conjugal en mai 2011 à la demande de son épouse pour s’installer dans un appartement appartenant aux deux époux ; que cette dernière a fait changer les serrures du domicile conjugal mais il ressort des propres conclusions du mari devant le premier juge (la pièce n° 49 de Madame F…) que cette dernière lui a remis, peu après, le double des clés de la nouvelle serrure et que Monsieur R… est ensuite revenu au domicile conjugal pour occuper l’appartement au rez-de-chaussée ; que cette chronologie ne permet pas de considérer que l’épouse aurait « chassé » manu-militari son mari du domicile conjugal et encore moins que l’attitude de l’épouse aurait rendu intolérable le maintien de la vie commune ; sur l’interruption du chauffage du logement occupé par Monsieur R… ; que selon les échanges de correspondance entre avocats versée aux débats, Monsieur R… s’est plaint auprès de son épouse de ce que son appartement n’était plus chauffé en mars 2012 ; que cette dernière a répliqué à juste titre que les deux logements étant alimentés par le même système de chauffage, il appartenait à son mari de procéder à son tour au remplissage de la cuve de fioul ; que Madame F… justifie en effet avoir fait remplir la cuve de fioul à hauteur de 1000 litres en janvier 2012 et une seconde fois en février 2012 pour un coût total facturé de 1 961,44 euros ; qu’aucune faute ne lui est donc imputable sur ce point ; que s’agissant des propos calomnieux qu’aurait tenus l’épouse, Monsieur R… ne vise aux termes de ses conclusions aucune pièce au moyen de laquelle serait rapportée la preuve de ces faits, tels qu’allégués ; que s’agissant du recours de l’épouse à un détective privé chargé de rassembler les preuves de son adultère, lequel détective aurait usé de manoeuvres déloyales en vue de le discréditer, le rapport de ce détective n’est pas versé aux débats ce qui ne permet pas d’analyser son comportement, qui, en tout état de cause, par hypothèse, n’est pas imputable à son épouse ; que s’agissant du fait pour Madame F… de n’avoir pas suppléé son mari dans l’acquittement des mensualités des prêts contractés d’un commun accord entre époux, cette faute à l’obligation d’assistance réciproque visée à l’article 212 du code civil n’est pas démontrée par le mari, ainsi qu’il résulte des conclusions du sapiteur résumées ci-avant ; que le prononcé du divorce aux torts exclusifs du mari sera donc confirmé ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QU’en vertu de l’article 242 du code civil le divorce peut être demandé par l’un des époux lorsque des faits constitutifs d’une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ; qu’à l’appui de sa demande P… F… soutient que Q… R… aurait entretenu une relation adultère ; qu’hors les assertions de P… F… dans ses conclusions, il n’a été versé aux débats aucun élément de nature à accréditer cette thèse, contestée par Q… R… et dont celui-ci s’est toujours défendu ; qu’il n’est pas non plus établi que Q… R… aurait commis une voie de fait en s’introduisant au domicile conjugal au mois d’octobre 2011, soit antérieurement à l’ordonnance de non-conciliation, ni qu’il aurait « molesté et bousculé » son épouse le 15 octobre 2011 ; qu’en revanche il ressort de l’expertise comptable effectuée en 2013 à la demande de Maître C… que Q… R… s’est livré à une gestion hasardeuse et opaque du patrimoine indivis acquis par les époux et constitué d’un ensemble immobilier dont Q… R… assurait la gestion en qualité de marchand de biens ; que c’est ainsi que l’expert a pu caractériser que des fonds indivis ont été retirés sans qu’il soit possible d’en retracer la destination ; qu’à la date de l’ordonnance de non-conciliation, l’époux était redevable de 78 363 euros à l’indivision au titre de sommes placées et utilisées à des fins personnelles ; que par ailleurs il est établi que même après l’ordonnance de non-conciliation, et alors que la gestion de ce patrimoine indivis a été confié à Q… R…, celui-ci a disposé de fonds qu’il n’a pas affecté au remboursement des emprunts affectant le bien immobilier ; que cette incurie de l’époux dans la gestion du patrimoine indivis, dont chacun des époux continue à supporter les conséquences, P… F… ayant fait l’objet d’interdiction et d’inscription au FICP suite à l’inexécution par Q… R… de ses obligations judiciairement fixées, caractérise un manque de loyauté dans la conduite des affaires financières du couple ; que sur ce point, Q… R… n’est pas fondé à reprocher à P… F… de ne pas l’avoir aidé à prendre en charge les remboursements des prêts pour éviter la déconfiture et s’éviter les incidents qu’elle a connus en qualité de codébiteur solidaire ; que de même, Q… R… ne démontre pas que P… F… l’aurait chassé du domicile conjugal à compter de mai 2011, alors qu’il en possédait les clefs en octobre 2011 et indiquait dans sa déclaration auprès de la police en décembre 2011 « vivre sous le même toit que son épouse » ; qu’enfin et sauf à ressortir des seules déclarations de l’époux, les violences qu’il allègue avoir subies ne sont aucunement établies ; que Q… R… sera débouté de sa demande reconventionnelle et le divorce sera prononcé à ses torts exclusifs, l’incurie et le manque de loyauté dans la gestion du patrimoine indivis constituant une violation grave et ici renouvelée des obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ;

1°/ ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions est un défaut de motifs ; que, pour prononcer le divorce des époux aux torts exclusifs de Monsieur R…, la cour d’appel a retenu que l’incurie et le manque de loyauté dont ce dernier aurait fait preuve pendant le mariage dans la gestion du patrimoine acquis par les époux constituaient une violation grave et renouvelée des obligations du mariage ; qu’en s’abstenant de répondre au moyen opérant développé par Monsieur R… dans ses écritures, lequel faisait valoir que les biens en question constituaient un patrimoine immobilier géré en réalité par les deux membres du couple sur un pied d’égalité, lesquels exerçaient la même activité professionnelle de marchand de biens et avaient souscrit solidairement les crédits qui s’étaient révélés nécessaires, cosignaient les bilans comptables et participaient tous deux activement à la mise en valeur de ce patrimoine indivis (p. 6, 7 et 8 des conclusions d’appel de Monsieur R…), éléments dont il s’inférait, comme Monsieur R… le soutenait, que les difficultés financières rencontrées ultérieurement par le couple ne pouvaient lui être entièrement imputées, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile ;

2°/ ALORS QUE Monsieur R… a développé dans ses conclusions un moyen opérant selon lequel Madame F… était codébitrice de prêts bancaires contractés solidairement entre les époux pour les besoins de leur activité professionnelle commune de marchand de biens (§ 11, p. 6 des conclusions de Monsieur R…) ; qu’il a fait valoir le refus obstiné et irrationnel de Madame F… d’honorer les échéances de ces crédits en dépit de son engagement personnel, tout en démontrant le lien de causalité existant entre ce comportement et la dégradation rapide de la situation financière du couple (§ 10, p. 6 des conclusions ; § 1, § 3, § 4, et § 6 p. 7 des conclusions) ; que, si la cour d’appel de Grenoble a effectivement relevé qu’« il ressort[ait] des tableaux d’amortissement des prêts que les époux s’étaient engagés solidairement envers la banque et que dès lors, le remboursement des échéances incombait aux deux époux » (§. 14, p. 4 de l’arrêt d’appel), elle s’est néanmoins bornée à en déduire le caractère infondé du grief présenté par Madame F… laquelle pensait pouvoir reprocher à son époux « d’avoir laissé impayés des prélèvements » (§ 14, p. 4 de l’arrêt d’appel) ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, en violation de l’article 242 du code de procédure civile ;

3° / ALORS QUE, pour prononcer le divorce des époux aux torts exclusifs de Monsieur R…, la cour d’appel a retenu « qu’il résulte (
) des investigations du notaire, Maître C… et du sapiteur, Monsieur T…, selon rapports versés aux débats par l’appelant, que des sommes importantes appartenant indivisément aux époux ont été placées et détournées à des fins personnelles par Monsieur R… ; que notamment il ressort du relevé de compte de Maître W…, notaire à Aspres-sur-Buëch en date du 1er mars 2013, que ce notaire a viré des sommes importantes sur le compte personnel de Monsieur Q… R… provenant de la vente de biens immobiliers indivis entre les époux alors que ces fonds revenaient à l’indivision » (les deux derniers §, p. 4 ; §1, p. 5 du jugement) ; qu’en statuant ainsi, tandis que Monsieur R… n’a versé aux débats qu’un seul rapport en pièce n° 11, intitulée « Rapport de Monsieur T… », ainsi qu’un courrier de Maître W… en date du 14 novembre 2016, en pièce n° 61 et que, de son côté, Madame F… n’a versé aux débats qu’une seule pièce impliquant Maître W…, la pièce n° 72, intitulée « avis des virements de Maître W… à Monsieur R… sur vente », la cour d’appel s’est fondée sur des documents qu’il est impossible d’identifier avec précision ; que la motivation de sa décision ne permet pas à la Cour de cassation d’exercer son contrôle ; que la cour a ainsi méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile.

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR débouté Monsieur R… de sa demande de versement d’une prestation compensatoire, en confirmation du jugement rendu le 10 mai 2016 par le tribunal de grande instance de Gap ;

AUX MOTIS QU’« au regard des critères énumérés à l’article 271 du code civil : les deux époux sont âgés de 63 ans au jour du divorce, le mariage aura duré 32 ans ; l’époux, en mauvais état de santé, a interrompu toute activité professionnelle pour ce motif ; il est aujourd’hui retraité après avoir été placé en invalidité et perçoit une pension de 1 374 euros nets par mois, l’épouse a été gravement malade et a également été placée en invalidité en 2015 ; elle percevait alors une pension d’invalidité de 1 344 euros bruts par mois, selon sa déclaration sur l’honneur, Madame F… perçoit en 2017 une pension d’invalidité de 1 080 euros par mois ainsi que des loyers pour un total de 520 euros par mois ; elle est propriétaire de sa résidence principale et d’un studio, elle est lourdement endettée, selon sa déclaration sur l’honneur Monsieur R… perçoit une pension de retraite de 1 215 euros par mois, sur le plan patrimonial, Monsieur R… indique être propriétaire de six garages à Ancelles en indivision avec son épouse ainsi que des parts d’une SCI R… évaluées au total à 15 000 euros, d’une ferme en Auvergne dont la valeur n’est pas précisée et d’un terrain en indivision avec son épouse situé à Ancelles, évalué à 50 000 euros ; il est lourdement endetté au même titre que son épouse ; qu’il en résulte que le divorce ne crée aucune disparité dans les situations respectives des parties ; que le jugement sera confirmé en ce qu’il n’a pas mis à la charge de l’un des époux le paiement d’une prestation compensatoire au profit de l’autre » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE sur la prestation compensatoire par application de l’article 270 du code civil, « L’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respective des époux » ; que toutefois le juge peut refuser d’accorder une telle prestation si l’équité le commande ; que cette prestation est fixée selon l’article 271 du code civil, en tenant compte des « besoins de l’époux à qui elle est versée et des ressources de l’autre conjoint en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible » ; qu’en particulier le juge doit prendre en considération l’âge et l’état de santé des époux, la durée du mariage, le temps déjà consacré ou qu’il faudra consacrer à l’éducation des enfants, la qualification et la situation professionnelle de chaque époux au regard du marché du travail, leurs droits existants ou prévisibles, leur situation respective en matière de pension de retraite, leur patrimoine (tant en capital qu’en revenu, après la liquidation du régime matrimonial), les conséquences des choix professionnels faits par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants, et du temps qu’il faudra encore y consacrer, ou, pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ; qu’en application de l’article 270 du code civil, « la prestation compensatoire a un caractère forfaitaire » et elle prend « la forme d’un capital dont le montant est fixé par le juge » ; qu’en l’occurrence, les époux sont restés mariés pendant 29 ans, étant toutefois observé que toute communauté de vie a cessé dès novembre 2011, soit après 25 ans de vie commune ; qu’ils se sont mariés sous le régime de la séparation de biens ; que les deux époux sont âgés de 61 ans ; qu’il est à noter que les deux époux font état de problèmes de santé ; qu’ils ont eu deux enfants ensemble ; que les revenus et charges des époux sont les suivants : P… F… : salariée dans une banque, elle a été en arrêt maladie depuis mai 2014 ; son revenu déclaré pour l’année 2014 est de 14 454 euros soit un revenu mensuel de 1205 euros ; au titre de l’année 2014, ont été déclarés 3 078 euros de revenus fonciers ; Q… R… perçoit une pension d’invalidité de 1 290 euros par mois ; qu’il a déclaré des revenus 2014 pour 15 094 euros, soit un revenu mensuel de 1 257 euros ; qu’il justifie avoir cédé le fonds de commerce exploité par l’EURL GAP DECO dont il était le gérant et avoir affecté ce patrimoine au règlement de dettes, notamment d’arriérés d’échéances du prêt immobilier affecté à l’acquisition du bien indivis « Chalet des aviateurs » ; qu’il est propriétaire d’un garage qui ne serait plus loué ; que par ailleurs, aucune ressource ne serait tirée des biens indivis restant (garages) qu’il supportait la charge de remboursement des prêts indivis depuis l’ordonnance de non-conciliation, non entièrement réglés ; qu’en l’absence de production de la déclaration, visée à l’article 272 du code civil, certifiant sur l’honneur l’exactitude des ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie du demandeur à la prestation compensatoire, le tribunal ne dispose pas d’autres éléments ; que le code civil impose au juge, pour apprécier la disparité, de tenir également compte du patrimoine appartenant à chacun des époux ; que le patrimoine du mari se compose des éléments suivants : un garage, qu’il évalue à 20 000 euros, le patrimoine propre de l’épouse se compose des éléments suivants aux termes de sa déclaration sur l’honneur : un studio à Gap, loué, la propriété de sa résidence principale ; Q… R… indique qu’elle serait également propriétaire d’un appartement loué à Ancelle et d’un autre appartement loué à Gap ; qu’enfin il reste un faible patrimoine indivis, composé de garages, résidu de l’opération immobilière ; que cela étant, il sera rappelé que la situation actuelle de Q… R… résulte de son incurie et de sa mauvaise gestion de l’opération immobilière conduite du temps de la vie commune en sa qualité de marchand de biens ; que par ailleurs, et ce point est essentiel, la disparité que révèle la projection des patrimoines des époux au terme de la liquidation de leur régime matrimonial ne trouve pas sa cause dans la rupture du mariage et qu’en conséquence, elle ne saurait être compensée par le biais d’une prestation compensatoire qui ne saurait servir de rectificatif au régime de séparation de biens librement choisi par les époux ; que dès lors, tant en droit qu’en équité, il ne saurait être fait droit à la demande de Q… R… à ce titre ; que de même, en l’état d’une disparité éminemment favorable à P… F…, sa demande de prestation compensatoire est totalement infondée ;

1°/ ALORS QUE l’octroi d’une prestation compensatoire a pour finalité de combler une disparité de nature économique ; que le juge ne peut se fonder sur une faute commise par le demandeur en paiement d’une prestation compensatoire pour justifier le rejet de sa prétention ; que, pour rejeter la demande formée par Monsieur R… en paiement d’une prestation compensatoire à son profit, la cour d’appel de Grenoble a retenu sa mauvaise gestion d’une opération immobilière unique ; qu’en statuant ainsi, par des motifs tirés de l’existence de négligences prétendues et d’un manque de soin apporté par Monsieur R… dans la gestion du patrimoine indivis des époux, la cour d’appel a, d’une part, statué par des motifs inopérants, et, d’autre part, ajouté à la loi une condition qu’elle ne prévoit pas, en violation des articles 270 et 271 du code civil ;

2°/ ALORS QUE le juge du fond n’est pas autorisé à se fonder sur des circonstances antérieures au prononcé du divorce pour décider de l’octroi d’une prestation compensatoire au profit de l’un des ex-époux ; que pour rejeter la demande en versement d’une prestation compensatoire formée par Monsieur R…, la cour d’appel a retenu sa mauvaise gestion « du temps de la vie commune » d’une opération immobilière unique ; qu’en statuant ainsi, au vu d’événements survenus antérieurement au prononcé du divorce, la cour d’appel a violé les articles 270 et 271 du code civil ;

3°/ ALORS QUE le juge est tenu de trancher la contestation dont il constate l’existence entre les parties en litige ; qu’en l’espèce, Monsieur R… a soutenu devant la cour d’appel de Grenoble que son ex-épouse avait dissimulé à la procédure l’existence de biens immobiliers, manoeuvre ayant empêché le juge de se représenter de manière fidèle la réalité de son patrimoine ; que Monsieur R… a ainsi justifié auprès de la cour d’appel de la qualité de propriétaire de Madame F… de trois appartements, deux situés dans la ville de Gap et un troisième située à Ancelle (§ 8, p. 22 ; dernier §, p. 26 et § 1 et 2, p. 27 des conclusions de Monsieur R…) ; que Monsieur R… a précisé que cette stratégie judiciaire déloyale avait une incidence directe sur la reconnaissance, à son profit, d’une créance de prestation compensatoire ; que la cour d’appel de Grenoble s’est tout d’abord bornée à reprendre le contenu de la déclaration sur l’honneur versée aux débats par Madame F… en retenant que « Le patrimoine propre de l’épouse se compose des éléments suivants aux termes de sa déclaration sur l’honneur : un studio à Gap, loué, la propriété de sa résidence principale» (§ 5, p. 6 du jugement et § 13, p. 6 de l’arrêt d’appel) ; que la cour d’appel a ensuite constaté l’existence d’une contestation entre les époux par les motifs suivants : « Q… R… indique qu’elle serait également propriétaire d’un appartement loué à Ancelle et d’un autre appartement loué à Gap » (§ 6, p. 6 du jugement) ; qu’en omettant de trancher le litige dont elle avait néanmoins pris acte entre les parties adverses portant sur la teneur exacte du patrimoine immobilier constitué par Madame F… au cours du mariage, patrimoine dont la valeur était en mesure de révéler, d’une part, un enrichissement personnel de l’épouse, rendu possible par la prise en charge par Monsieur R… des dépenses quotidiennes du ménage (§ 5 et 6 p. 28 des conclusions d’appel de Monsieur R…), et, d’autre part, de manière corrélative, un abus du régime séparatiste choisi par les époux, la cour d’appel a violé l’article 4 du code de procédure civile ;

4°/ ALORS, subsidiairement, QUE le défaut de réponse à conclusion est un défaut de motifs ; que l’octroi d’une prestation compensatoire peut être justifié par le constat du juge d’une disparité injuste, anormale dans la situation actuelle ou prévisible des époux divorcés ; que ce déséquilibre peut résulter d’un investissement en sens unique de l’un des époux pendant le mariage, lequel s’est révélé constitutif d’une pure perte en raison du prononcé du divorce ; qu’en l’espèce, Monsieur R… a soutenu devant la cour d’appel un moyen aux termes duquel Madame F… s’est créée pendant le mariage un patrimoine immobilier personnel, constitué notamment de trois appartements (§ 8, p. 22 ; dernier §, p. 26 et § 1 et 2, p. 27 des conclusions de Monsieur R…) ; que Monsieur R… a encore expliqué que cet enrichissement n’avait été rendu possible qu’en raison de la prise en charge par ses soins des dépenses quotidiennes du ménage (§ 5 et 6 p. 28 des conclusions d’appel de Monsieur R…) ; que ce moyen est opérant en raison de l’abus du régime séparatiste qui y est ainsi dénoncé par Monsieur R… et parce qu’il tend à faire reconnaître en justice l’existence d’une disparité injuste et anormale en mesure de justifier le versement à son profit d’une prestation compensatoire, puisque postérieurement au prononcé du divorce il ne profitera plus d’un patrimoine qu’il a pourtant contribué à constituer ; que ce moyen n’a reçu aucune réponse de la cour d’appel en méconnaissance des exigences de l’article 455 du code de procédure civile.

TROISIÈME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR débouté Monsieur R… de sa demande en réparation de son préjudice formée sur le fondement de l’article 1240 du code civil ;

AUX MOTIFS QUE s’agissant des propos calomnieux qu’aurait tenus l’épouse, Monsieur R… ne vise aux termes de ses conclusions aucune pièce au moyen de laquelle serait rapportée la preuve de ces faits, tels qu’allégués ; que s’agissant du recours de l’épouse à un détective privé chargé de rassembler les preuves de son adultère, lequel détective aurait usé de manoeuvres déloyales en vue de le discréditer, le rapport de ce détective n’est pas versé aux débats, ce qui ne permet pas d’analyser son comportement, qui en tout état de cause, par hypothèse, n’est pas imputable à son épouse ; (
) ; que sur la demande de dommages-intérêts présentée par le mari sur le fondement de l’article 1382 (1240) du code civil, les griefs invoqués par le mari n’étant pas démontrés, le rejet de la demande sera confirmé ;

1°/ ALORS QUE le juge ne doit pas dénaturer les conclusions des parties ; que Monsieur R… a demandé réparation de son préjudice causé par le comportement vexatoire adopté par Madame F… au cours de la procédure de divorce ; qu’il a présenté à la cour d’appel les faits propres à fonder sa prétention en affirmant que : « Madame F… continue de prétendre en cause d’appel avoir découvert en 2011 que son mari aurait mené une double vie (
) que ce serait cette découverte qui l’aurait conduite à envisager la séparation et à chasser son époux du domicile conjugal (
) Monsieur R… n’a jamais commis d’adultère, Madame F… a beau jeu de produire en justice un « rapport d’enquête confidentiel » réalisé, sur sa demande, par un détective privé ; son contenu, particulièrement infamant et indécent, est indigne du prétoire (
) » ; que Monsieur R… indique alors la référence de cette pièce : « Pièce adverse n° 50 » (p. 10 des conclusions d’appel de Monsieur R…) ; que le bordereau des pièces versées aux débats par Madame F… indique bien une pièce n° 50 intitulée « Rapport d’enquête du 13 juin 2013 » ; que, pour débouter Monsieur R… de sa demande en réparation du préjudice subi la cour d’appel de Grenoble a cru pouvoir retenir que, « s’agissant du recours de l’épouse à un détective privé chargé de rassembler les preuves de son adultère, lequel détective aurait usé de manoeuvres déloyales en vue de le discréditer, le rapport de ce détective n’est pas versé aux débats, ce qui ne permet pas d’analyser son comportement » (§ 5, p. 6 de l’arrêt d’appel) ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a dénaturé les conclusions de Monsieur R…, en violation de l’article 4 du code de procédure civile ;

2°/ ALORS QUE hors les cas où la loi en dispose autrement, la preuve peut être rapportée par tous moyens ; que, pour débouter Monsieur R… de sa demande en réparation du préjudice subi en raison des pratiques déloyales du détective privé chargé par son ex-épouse de rassembler des preuves d’un adultère prétendu, la cour d’appel de Grenoble a retenu que le rapport de ce détective n’avait pas été versé aux débats, « ce qui ne permet[ait] pas d’analyser son comportement » (§ 5, p. 6 de l’arrêt d’appel) ; qu’en statuant ainsi, tandis que Monsieur R… avait précisé dans ses conclusions que le rapport litigieux avait déjà été versé aux débats par son adversaire (« Pièce adverse n° 50 », § 7, p. 10 des conclusions de Monsieur R…) et qu’il avait fourni les raisons pour lesquelles il ne produisait pas, lui-même, ce rapport, au regard de son « contenu particulièrement infamant et indécent, indigne du prétoire » (§ 7, p. 10 des conclusions de Monsieur R…), la cour d’appel a ajouté à la loi une condition qu’elle ne prévoit pas, en exigeant de Monsieur R… la production en justice de cet écrit pour faire la preuve de l’existence de son préjudice ; que la cour a ainsi violé l’article 1358 du code civil ;

3°/ ALORS, subsidiairement, QUE pour débouter Monsieur R… de sa demande en réparation du préjudice subi du fait des pratiques adoptées par le détective mandaté par son ex-épouse, la cour d’appel de Grenoble a retenu que « le rapport du détective n’était pas produit aux débats, ce qui ne permet[ait] pas d’analyser son comportement » ; qu’en statuant ainsi, tandis que dans ses conclusions, Monsieur R… avait décrit le comportement du détective privé, caractérisé par l’adoption de pratiques déloyales ayant abouti à l’écriture d’un rapport mensonger et diffamatoire (§ 5 et s., p. 29 des conclusions d’appel de Monsieur R…) et qu’il avait apporté la preuve de ses allégations en versant aux débats des attestations de personnes interrogées par ledit détective (pièces n° 7 et 8), lesquelles ont fait état de leur incrédulité face à la partialité des questions posées, supposant ab initio l’adoption par Monsieur R… d’un comportement coupable, la cour d’appel a entaché son arrêt d’un défaut de réponse à conclusions, en violation de l’article 455 du code de procédure civile.

 


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