Licenciement économique déguisé : décision du 18 janvier 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 15-27.513

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Licenciement économique déguisé : décision du 18 janvier 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 15-27.513
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SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 janvier 2017

Rejet non spécialement motivé

M. HUGLO, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président

Décision n° 10087 F

Pourvoi n° R 15-27.513

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par M. [G] [R], domicilié chez Mme [S] [R], [Adresse 1],

contre l’arrêt rendu le 17 décembre 2014 par la cour d’appel de Lyon (chambre sociale), dans le litige l’opposant à la société Renault trucks, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 7 décembre 2016, où étaient présents : M. Huglo, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Slove, conseiller rapporteur, M. Maron, conseiller, Mme Becker, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de M. [R], de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Renault trucks ;

Sur le rapport de Mme Slove, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [R] aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. [R]

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’AVOIR rejeté les demandes de M. [R] tendant à voir juger que son licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse, obtenir le paiement de dommages et intérêts, d’une indemnité de préavis et des congés payés sur préavis et d’une indemnité conventionnelle de licenciement ;

AUX MOTIFS QU’aux termes de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, [G] [R] a été licencié pour avoir modifié le réglage du régulateur de vitesse équipant son engin de travail, identifié sous l’appellation “AMLIFT 8909″ ; que [G] [R] dénie être l’auteur des faits qui lui sont reprochés ; que selon lui, il n’était pas le seul à utiliser l’engin litigieux, qui avait déjà fait à plusieurs reprises l’objet d’un débridage, il y avait deux caristes par équipe, et il était facile, pendant le travail ou les temps de pause, de procéder à un débridage manuel de l’engin ; qu’il affirme aussi avoir utilisé principalement l’autre engin identifié sous le n° 8910 et il met en doute les allégations de la société Renault Trucks, selon lesquelles un technicien de la société Fenwik, chargé de la maintenance des chariots automoteurs de l’entreprise, est intervenu à trois reprises sur le chariot n° 8909 entre le 1er et le 5 juillet 2011 ; qu’il soutient en réalité avoir été licencié en raison de la suppression de son poste liée à la réorganisation du travail de son service ; qu’il estime en tout état de cause que le doute soit lui profiter, conformément aux dispositions de l’article L. 1235-1 du code du travail ; mais attendu que le conseil de prud’homme, par des motifs pertinents que la cour approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause en énonçant que le licenciement repose sur une faute grave imputable à [G] [R] ; qu’en effet, il ressort des attestations produites par l’employeur (attestations rédigées par Mrs [L], [J], [V], cadres dans l’entreprise et de M.[I], supérieur hiérarchique de [G] [R]), d’un courriel de M.[P], technicien employé par la société Fenwic, de l’attestation rédigée par son chef d’agence. M.[D], que le vendredi 1er juillet 2011 M.[P] est intervenu sur le chariot n° 8909 pour réinstaller le régulateur de vitesse qui avait été déplombé ; que le lundi suivant, il a été constaté à nouveau le débridage de l’engin, et le technicien de la société [G], qui est intervenu le même jour pour réinstaller le régulateur de vitesse et son plombage, a estimé que ce débridage provenait d’une intervention humaine ; que dans l’après midi du 4 juillet 2011, le chariot automoteur n° 8910 n’a pas été conduit par [G] [R] et l’un des salariés de la société Renault Trucks a pu constater, à la fin de cette journée, que le régulateur de vitesse n’avait pas été débridé ; que le lendemain matin, avant l’utilisation dans la matinée de ce chariot par [G] [R], un autre salarié a pu constater que le plombage du régulateur de vitesse était toujours en place ; que le même jour, à 12 h 35 après la fin de la période de travail de [G] [R], il a été relevé que l’appareil avait été de nouveau déplombé, et la société [G] a confirmé que cette modification était forcément due à une intervention humaine ; qu’il résulte de ces éléments des présomptions graves, précises et concordantes permettant de considérer que [G] [R] est l’auteur des faits reprochés dans la lettre de licenciement ; et attendu que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; qu’en l’espèce, le règlement intérieur de la société Renault Trucks contient des consignes générales et particulières de sécurité, notamment l’interdiction faite au personnel d’intervenir de sa propre initiative sur tout équipement de travail dont l’entretien est confié à un personnel spécialisé ; qu’il rappelle aussi les dispositions de l’article L4122-1 du code du travail selon lesquelles il incombe à chaque travailleur de prendre soin de sa santé et de sa sécurité ainsi que celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail ; que [G] [R], outre le fait qu’il a manqué à son obligation d’exécution de bonne foi du contrat de travail en procédant à plusieurs reprises et à l’insu de son employeur, au débridage de son chariot automoteur, ce qui lui permettait de rouler à une vitesse supérieure à la vitesse limite autorisée, a aussi manqué à son obligation de sécurité et mis ainsi en danger les autres salariés de l’entreprise, comportements qui rendaient impossible son maintien dans la société Renault Trucks, même pendant la période de préavis ; attendu ensuite qu’à supposer même que le poste de [G] [R] ait été supprimé après son licenciement, les éléments du dossier ne permettent pas de constater que cette suppression serait la cause exacte de la rupture du contrat de travail ; attendu dans ces conditions qu’il convient de confirmer le jugement en ce qu’il déboute [G] [R] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que de ses demandes en paiement d’indemnités de rupture ;

ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les termes et les limites du litige ; que la cour d’appel a considéré que le licenciement de M. [R] était fondé aux motifs que le déplombage de l’appareil n°8910 avait été constaté après la fin de la période de travail de M. [R] ; qu’en statuant comme elle l’a fait quand, dans la lettre de licenciement, il était reproché au salarié des manipulations sur l’engin de travail n° 8909 – et non pas sur l’engin n° 8910, la cour d’appel a violé les articles L1232-6 et L1235-1 du code du travail ;

Et ALORS QUE la charge de la preuve de la faute grave incombe exclusivement à l’employeur lequel doit apporter la preuve des faits et de leur imputabilité, tandis que le doute doit profiter au salarié ; qu’alors que, dans la lettre de licenciement, l’employeur indiquait expressément qu’aucune personne n’avait vu le salarié procéder au déplombage du régulateur de l’engin de travail, la cour d’appel a considéré que le licenciement était fondé en retenant qu’il existait « des présomptions graves, précises et concordantes permettant de considérer que [G] [R] est l’auteur des faits reprochés dans la lettre de licenciement » ; qu’en se fondant non pas sur une preuve, mais sur des présomptions, quand la charge de la preuve incombait à l’employeur et que le doute devait profiter au salarié, la cour d’appel a violé les articles 1315 du code civil, L1234-1, L1234-5, L1234-9 et L1235-1 du code du travail ;

Et AUX MOTIFS partiellement adoptés QUE la juridiction prud’homale, saisie d’un litige relatif aux motifs d’un licenciement, doit apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par 1′ employeur au vu des éléments fournis par les parties, étant précisé que les limites du litige sont fixées par la lettre de licenciement, et qu’en cas de faute grave la charge de la preuve incombe à l’employeur ; la faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis ; en l’espèce la lettre de licenciement du 18 juillet 2011 est ainsi libellée : « Nous faisons suite à notre entretien préalable en vue d’une éventuelle sanction pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave, qui s’est tenu en date du 13 juillet 20111 à 08H45, en présence de M. [C] [N], RRH, M. [P] [I], responsable d’UP et M. [A] [X], salarié de l’entreprise, vous accompagnant. Les faits qui vous ont été reprochés sont les suivants, à savoir la modification du réglage du régulateur de vitesse de votre engin de travail AML1FT 8909, ce qui constitue un manquement grave aux règles de sécurité. Notre conviction est étayée par les faits suivants : * Au cours de la semaine du 27 juin au 1er juillet 2011, le technicien de la société [G] a constaté des interventions de modification de réglage sur le régulateur de vitesse, à la suite de quoi ils ont décidé de plomber la vis de réglage. * Le 1er juillet 2011, il constate que le plombage mis en place a été cassé à nouveau et l’a remis en état . * II nous confirme que cette dégradation ne peut s’expliquer que par une intervention humaine volontaire et non par des incidents dans un usage normal de l’engin (exemple de vibrations éventuelles). * Le 4 juillet, à l’issue de votre séance de travail (équipe E1) le régulateur était encore une fois déréglé. La société [G] a donc fait la réparation nécessaire pendant la séance de travail suivante (équipe E2), soit en début d’après midi. L’engin a été remis en circulation au cours de cette séance de travail, l’après-midi du 4 juillet 2011. * A l’issue de cette séance (le soir du 4) un contrôle a été opéré par l’encadrement, le régulateur était toujours en état normal. * Le lendemain matin, en début de poste, vous avez pris l’engin pour effectuer votre propre séance de travail. * Un contrôle a été effectué à la fin de votre poste par l’encadrement et par le technicien en charge de la gestion du parc d’engins. Ils ont constaté que le régulateur de votre engin était à nouveau déréglé (fil de plombage entortillé autour de la vis de réglage et cette dernière serrée à fond). * L’organisation du travail nous donne la certitude que personne d’autre que vous n ‘a pu utiliser cet engin ou intervenir dessus. Nous avons précisé lors de l’entretien que nous n’avions aucun témoin attestant vous avoir vu procéder au déplombage du régulateur de votre engin, mais que les circonstances rappelées ci-dessus était suffisantes pour étayer notre conviction sur votre responsabilité. Lors de cet entretien, après ces précisions, nous vous avons par deux fois demandé si vous étiez effectivement intervenu pour faire ces modifications de réglage, et le cas échéant, vos explications. Vous nous avez alors répondu que non, sans explication complémentaire….depuis quelques temps nous avions… eu à vous rappeler des règles de sécurité et de respect des modes opératoires y compris à travers plusieurs procédures disciplinaires :* 17 septembre 2010 : rappel des règles élémentaires de conduite suite à propos injurieux envers un salarié de l’entreprise * 7 mars 2011 : avertissement pour non respect du mode opératoire lié à la manipulation des longerons (qui avait entraîné un accident pour vous). Considérant votre comportement comme incompatible avec des règles essentielles en matière de sécurité, et mettant de côté le soupçon d’une volonté délibérée de sabotage de l’engin, nous vous notifions, par le présent courrier, votre licenciement pour faute grave. Compte tenu de la gravité des faits rapportés, la poursuite de nos relations contractuelles s’avère impossible, ne serait-ce pour la durée de votre préavis. Votre licenciement prend donc effet à la date du présent courrier sans préavis, ni indemnité…” ; la société Renault Trucks produit le règlement intérieur de l’établissement (pièce 27) dont l’article 12.1 relatif aux moyens de protection dispose qu’il est “formellement interdit au personnel d’intervenir de sa propre initiative sur tout équipement de travail dont l’entretien est confié à un personnel spécialisé..” ; à l’appui de ses allégations à l’encontre de M. [R], la défenderesse verse au dossier les pièces suivantes : – un document intitulé “relevé de fait” du 5 juillet 2011 (pièce 16) signé de trois salariés, Messieurs [V], [L] et [J] qui évoquent la découverte du déplombage et du déréglage du régulateur de l’AMLIFT 8909 le 4 juillet 2011, la remise en état du régulateur et son plombage par la société [G] le jour même et le constat opéré le 5 juillet à 12h35 du fil de plombage entortillé autour de la vis, laquelle était serrée à fond de sorte que le moteur avait une vitesse anormale ; – une attestation du avril 2012 de [B] [L] (pièce 17), manager au sein de l’entreprise, qui explique que par suite d’interventions de la société [G] sur le chariot 8909 son chef l’avait chargé de contrôler l’état de l’engin durant la semaine 27 tous les matins avant le début de poste et avant le début de l’équipe de l’après-midi et que le 5 mai 2011 à 4h45 il a constaté la présence du plombage et le bridage du véhicule alors qu ‘à la fin du poste de l’équipe E1 à 12h35 “le plomb était dégradé et l’engin avait été débridé”, ce contrôlé ayant été fait en présence de Messieurs [V] et [J] ; – une attestation du 2 avril 2012 d'[M] [J] (pièce 18), responsable technique d’affaires et délégué du personnel au sein du collège cadre, selon lequel il avait d’une part demandé la mise en place d’un contrôle du plombage en début et fin de poste de chaque équipe après avoir été alerté par la société [G] du déplombage de l’AMLIFT 8909 et d’autre part constaté le 5 juillet 2011 en fin de matinée “une nouvelle fois ce problème… le plombage a été enlevé donc limiteur modifié mais cette fois-ci le capot du VI a été volontairement passé sous la baie de pare-brise de l’engin dans le but de ralentir l’intervention des techniciens [G]… depuis les sanctions prises à l’encontre d’une personne nous n’avons plus de problème de cette nature” ; – un mail du 12 juillet 2011 (pièce 19) par lequel [D] [P], de la société [G], confirme à Messieurs [J] et [I] les interventions des 1er, 4 et 5 juillet 2011 sur l’AMLIFT 8909 pour remettre en conformité le réglage de vitesse et son plombage ; – une attestation du 2 avril 2012 de [K] [V] (pièce 20), manager logistique, dont la teneur est la même que celles des témoignages de Messieurs [J] et [L] et qui souligne que selon le technicien de [G] les modification observées relevaient d’une dégradation volontaire (pièce 19); – une attestation du 2 avril 2012 de [P] [I] (pièce 21), responsable hiérarchique de la société défenderesse, qui précise que l’engin déplombé et débridé “est utilisé pour la livraison des longerons en ligne de montage CD : il est donc affecté à une seule personne par équipe. Dans l’équipe l, il s’agissait de M. [G] [R]”, rappelle les contrôles effectués par Messieurs [V], [L] et [J] et indique que l’engin “n’a pas pu être utilisé par une autre personne pendant le temps de l’équipe pour les raisons suivantes : * Une paire de longerons devait être livrée toutes les 9 mn en ligne sous peine d’arrêt de ligne : cela ne laisse pas suffisamment de temps à quelqu’un de prendre l’engin sans que M. [R] ne s ‘en rende compte * Le positionnement de cet engin est relativememt isolé… et ce n ‘est pas un endroit de passage : chaque personne qui vient à cet endroit le fait de manière délibérée et est forcément vue par le cariste qui travaille dans la zone (en l’occurrence M. [R]) * … il faut une connaissance très spécifique de cet engin pour l’utiliser… il est également nécessaire de très bien connaître ces engins pour savoir quelle manipulation doit être pratiquée pour augmenter la vitesse. C’est le cas de M. [R] qui travaille sur ce type de chariot depuis plusieurs années.” ; Monsieur [I] dément en outre les allégations selon lesquelles la sanction prise à l’encontre du salarié serait un licenciement économique déguisé, son poste n’ayant pas été supprimé, explique qu’en tout état de cause il aurait pu être reclassé sur un autre poste, et relève que depuis son renvoi il n’a pas eu à déplorer de faits similaires sur les engins de manutention ; – une attestation du 23 avril 2012 de [T] [D] (pièce 25), directeur d’agence [G], déclarant “le 05/07/2011 à la demande de M. [J] notre technicien est de nouveau intervenu pour le même problème. De plus lors de cette intervention notre technicien a dû décoincer le capot principal qui était sous la baie du pare-brise. L’ensemble de ces problèmes constatés et récurrents ne sont en aucun cas liés à une utilisation normale des chariots et ne proviennent pas de phénomènes de vibration” ; la défenderesse explique également que les équipes El et E2 employaient chacune deux caristes longerons, lesquels utilisaient chacun un engin différent de sorte qu’il n’y avait pas d’échange d’engin au sein d’une même équipe, et que seules deux personnes étaient amenées à utiliser l’engin sur lequel ont été constatées les dégradations : Monsieur [R] (E1 ) et un second salarié appartenant à l’équipe E2, les contrôles effectués avant et après les prises de postes des équipes E1 et E2 ayant révélé que les modifications sur le régulateur s’étaient produites durant le temps de travail du demandeur ; elle ajoute qu’en vertu d’un contrat de maintenance la liant à la société [G] les interventions de celle-ci qui ne nécessitent pas une immobilisation du véhicule ne font pas automatiquement l’objet d’un rapport ; lors de l’enquête Monsieur [V] a confirmé les constatations faites avec Messieurs [L] et [J] sur le chariot 8909 utilisé par Monsieur [R], indiqué avoir été alerté sur la vitesse anormale du véhicule par le cariste de l’équipe E2, que le moteur dudit chariot n’avait pas un régime normal et qu’il n’était pas possible qu’une autre personne ait eu accès à cet engin ; Monsieur [L] a confirmé la teneur de son attestation mais indiqué être incertain de la date mentionnée du 5 mai 2011 ; il a souligné que le débridage du régulateur, non constaté à la fin du travail de l’équipe E2, l’avait été après le service de l’équipe El sur le chariot de Monsieur [R] et que seul le conducteur pouvait avoir fait cette manipulation ; selon lui il parait très difficile qu’un tiers ait pu intervenir sur l’engin pendant les cinq à dix minutes de pauses ou entre la fin du travail de Monsieur [R] et les constatations ; Monsieur [J] a expliqué que la surveillance mise en place avait permis d’identifier l’engin et l’équipe concernés par le problème du déplombage ainsi que l’utilisateur du chariot modifié dont l’identité ne lui a pas été communiquée ; il a assuré que depuis les sanctions prises contre cet utilisateur le problème n’était plus survenu ; Monsieur [I] a repris les déclarations faites dans le cadre de son attestation, reconnu que personne n’avait observé Monsieur [R] procéder au débridage du moteur de son chariot mais qu’il aurait pu être vu sans éveiller de soupçons et considéré qu’une collusion entre les personnes chargées de constater les faits n’était pas imaginable ; Monsieur [A] [X], qui avait assisté Monsieur [R] lors de l’entretien préalable, a expliqué que lors de celui-ci le salarié avait répondu “non” à deux reprises aux imputations qui lui étaient adressées sur le débridage du moteur et qu’il n’avait dès lors pas à donner d’explication alors que ses interlocuteurs s’acharnaient à le faire avouer en contrepartie d’une décision clémente ; il précise qu’après son départ de l’entreprise Monsieur [R] n’a pas été remplacé et que c’était son ancien coéquipier qui effectuait son travail ;

Et encore AUX MOTIFS partiellement adoptés QU’il ressort de l’examen des attestations et des déclarations recueillies le 13 mars 2013 que l’entreprise n’est pas en mesure d’étayer ses allégations par une preuve directe d’une manipulation du moteur de l’AMLIFT 8909 par Monsieur [R] ; pas davantage le comportement de ce dernier lors de l’entretien préalable du 13 juillet 2031 ne peut-il être interprété comme constitutif d’une quelconque reconnaissance des faits qui lui sont reprochés ; pour autant le relevé de fait du 5 juillet 2011, les attestations de Messieurs [L], [J], [P], [V] et [I] ainsi que les témoignages oraux détaillés et circonstanciés précisant les déclarations écrites de ces derniers, sauf en ce qui concerne Monsieur [P], constituent un faisceau d’indices concordants corroborant les affirmations de la société Renault Trucks tout à la fois quant à l’existence d’un débridage du régulateur de vitesse de l’AMLIFT 8909 et à son imputation à l’un de ses deux conducteurs, Monsieur [R] ; de plus ce dernier ne fournit aucun élément étayant ses dires ou ses suggestions concernant l’intervention d’un tiers sur son véhicule pendant l’une de ses pauses ou entre la fin de son service et les constatations opérées sur l’engin ou encore l’existence d’une cabale dont il serait la victime ; si les éléments versés au dossier relatifs au non remplacement de Monsieur [R] après son licenciement (attestations de [I] [O], [H] [C], [R] [B] et [I] [M]) ainsi que l’audition de Monsieur [X] laissent présumer l’existence d’une volonté de l’employeur de réduire les effectifs de l’entreprise il ne sauraient en aucun cas exonérer un salarié du respect de ses obligations notamment celles relatives aux règles de sécurité ; il s’ensuit que les faits ayant motivé le licenciement de Monsieur [R] – le déplombage du régulateur de vitesse du chariot AMLIFT 8909 les 4 et 5 juillet 2011 – sont matériellement établis ; par ailleurs le rapport d’entretien individuel et de développement professionnel du 14 avril 2010 insistait sur la nécessité, pour Monsieur [R], de respecter les consignes des modes opératoires et règles de sécurité ; une nouvelle fois ce salarié a manqué à ses engagements dans ce domaine et par la lourdeur des conséquences que recelait son comportement pour l’intégrité physique de ses collègues il a incontestablement commis des faits constitutifs d’une faute grave justifiant son licenciement et rendant impossible son maintien dans l’entreprise pendant la durée du préavis ;

ALORS QUE la charge de la preuve incombe à l’employeur et les juges du fond ne peuvent considérer qu’un fait est établi en se fondant sur les affirmations de la partie sur laquelle repose la charge de la preuve ;qu’alors que, dans la lettre de licenciement, l’employeur indiquait expressément qu’aucune personne n’avait vu le salarié procéder au déplombage du régulateur de l’engin de travail et que les premiers juges ont expressément relevé que « l’entreprise n’est pas en mesure d’étayer ses allégations par une preuve directe d’une manipulation du moteur de l’AMLIFT 8909 par Monsieur [R] », le conseil de prud’hommes a néanmoins considéré que le licenciement était fondé en se référant à un « faisceau d’indices concordants corroborant les affirmations de » l’employeur ; qu’en se fondant non pas sur une preuve, mais sur un « faisceau d’indices » confirmant les affirmations de l’employeur, la cour d’appel a violé les articles 1315 du code civil, L1234-1, L1234-5, L1234-9 et L1235-1 du code du travail ;

Et ALORS QUE la charge de la faute grave incombe exclusivement à l’employeur ; le salarié n’a rien à démontrer et n’a pas à établir que les faits incombe à une autre personne ; que la cour d’appel a retenu que le salarié « ne fournit aucun élément étayant ses dires ou ses suggestions concernant l’intervention d’un tiers sur son véhicule pendant l’une de ses pauses ou entre la fin de son service et les constatations opérées sur l’engin ou encore l’existence d’une cabale dont il serait la victime… » ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé les articles 1315 du code civil, L1234-1, L1234-5, L1234-9 et L1235-1 du code du travail.

 


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