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République Française
Au nom du Peuple Français
C O U R D ‘ A P P E L D E D O U A I
RÉFÉRÉ DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 25 MAI 2023
N° de Minute : 70/23
N° RG 23/00049 – N° Portalis DBVT-V-B7H-U35B
DEMANDERESSE :
S.A.R.L. TRANSPORT LOCATION AMÉNAGEMENT
dont le siège social [Adresse 7]
[Localité 5]
ayant pour avocat postulant Me Loïc LE ROY, avocat au barreau de Douai et pour avocat plaidant la SELAS Simon & associés, avocat au barreau de Paris
DÉFENDEURS:
S.C.P. BAUVIN LEMOINE BERNAR
ayant son siège [Adresse 4]
[Localité 6]
non comparante ni représentée
S.A.S. ANCRE PARTICIPATION
ayant son siège [Adresse 2]
[Localité 8]
ayant pour avocat postulant Me Marie-Hélène LAURENT, avocate au barreau de Douai et pour avocat plaidant Me Philippe LEFEVRE, avocat au barreau de Lille
PRÉSIDENTE : Hélène CHÂTEAU, première présidente de chambre désignée par ordonnance du 21 décembre 2022 du premier président de la cour d’appel de Douai
GREFFIER : Christian BERQUET
DÉBATS : à l’audience publique du 2 mai 2023
Les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’ordonnance serait prononcée par sa mise à disposition au greffe
ORDONNANCE : réputée contradictoire, prononcée publiquement par mise à disposition au greffe le vingt cinq mai deux mille vingt-trois, date indiquée à l’issue des débats, par Hélène CHÂTEAU, Présidente, ayant signé la minute avec Christian BERQUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire
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Exposé de la cause :
Le 20 mai 2020, M. [W] [E] a cédé l’intégralité des actions de sa société TG TP et Location à la société Ancre Participation pour un prix provisoire de 1 400 000 euros.
Le contrat de cession d’actions comportait un engagement de non-concurrence que M. [W] [E] devait respecter, limité à la région Hauts-de-France pendant une durée de cinq années à compter du 20 mai 2020 et faisait obligation à M. [W] [E] de présenter la société à la clientèle jusqu’au 30 juin 2020.
Suivant deux autres contrats en date du 20 mai 2020, M. [W] [E] a signé avec la société Ancre Participation une convention de garantie d’actif et de passif et a donné à bail commercial de courte durée non-renouvelable, pour la période du 15 mai 2020 au 14 mai 2023, à la société TG TP et Location un ensemble immobilier situé au [Adresse 3].
Le 7 août 2020, la société Ancre Participation adressait un courrier à M. [W] [E] lui faisant part de ce que :
– M. [N] [E], fils de [W] [E], avait été vu chez des clients historiques de la société TG TP et Location, à savoir les sociétés Power Solutions, Bouyghes et Helfaut Travaux et que parallèlement, la société TG TP et Location ne réalisait plus ou quasiment plus de chiffre d’affaires avec ces trois sociétés,
– M. [N] [E] avait tenté de débaucher un salarié de la société TG TP et Location pour développer sa propre activité, ce salarié ayant donné sa démission le 26 juillet 2020,
– M. [W] [E] ne l’avait pas informée que son fils avait une entreprise attenante à la société TG TP et Location, et en concurrence directe avec celle-ci, ce qui constituait un dol par omission d’une information significative,
– elle s’interrogeait sur les conditions dans lesquelles M. [N] [E] avait pu avoir accès au fichier clients de la société TG TP et Location,
et lui demandant de faire cesser cette situation.
Le 2 mars 2022, la société Ancre Participation, alléguant une concurrence déloyale de la part de la société Transport Location Aménagement, dont le dirigeant est M. [N] [E], avec une complicité de M. [W] [E], présentait une requête au président du tribunal de commerce de Douai, afin d’autoriser un huissier de justice notamment à :
1° se rendre dans les locaux de la société Transport Location Aménagement [Adresse 7] et/ou d’accéder à distance aux serveurs informatiques de tout autre tiers hébergeant à distance et/ou messageries électroniques en ce compris de la société Transport Location Aménagement dans lesquels se trouveraient les documents, données, fichiers, et correspondances recherchés ci-après en relation avec les faits litigieux et en particulier tous documents, données, fichiers et correspondances appartenant à la société TG TP et Location et/ou en rapport direct ou indirect avec cette dernière et ce sur quelque support que ce soit, informatique ou autre,
2° procéder à des investigations et rechercher dans les ordinateurs fixes et/ou portables de M. [W] [E] et son fils M. [N] [E] des documents permettant de caractériser des procédés déloyaux de la part de la société S.A.R.L. transport location aménagement.
3° rechercher et/ou se faire désigner, décrire et réaliser des copies de tous les courriers électroniques émis ou reçus depuis une messagerie électronique; en ce compris les pièces jointes à caractère personnel en relation ou contenant les éléments recherchés, et conserver en séquestre les documents, données et fichiers appréhendés
4° rechercher et/ou se faire désigner, décrire et réaliser la liste des clients, prospects et partenaires de la société Transport Location Aménagement,
5° déterminer en comparaison avec les clients de la société TG TP et Location, lesquels sont en commun avec cette société.
6° rechercher et/ou se faire désigner, décrire et réaliser des copies de tous les courriers électroniques, documents, informations, fichiers commerciaux et comptables (tels que le grand livre clients, facturiers, factures, chiffres d’affaires) en relation avec les éléments recherchés,
7° rechercher sur le téléphone portable personnel de M. [N] [E] ([XXXXXXXX01]) des SMS sur sa messagerie ou l’application WhasApp entre son père, M. [W] [E] et son oncle M. [J] [E] et les sociétés Power Solutions, Bouyghes Construction Matériel, Helfaut Travaux, Sogea Caroni, Suez Hervé permettant de caractériser les procédés déloyaux de la société Transport Location Aménagement
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– se rendre chez l’expert-comptable Debeugny Conseils à [Localité 9] avec un expert et 8° et un membre de la société TG-TP afin de :
– consulter les livres de compte de la société TLA au titre des exercices 2019-2020 et 2020-2021,
– décrire l’évolution du chiffre d’affaires,
– vérifier si les sociétés Power Solutions, Bouyghes Construction Matériel, Helfaut Travaux, Sogea Caroni, Suez Hervé sont les clients de TLA,
– donner le montant du chiffres d’affaires facturé postérieurement à la cession du 20 mai 2020 au bénéfice d’Ancre Participation,
– indiquer les dates de factures et le volume des facturations,
– autoriser l’huissier à se faire accompagner d’un représentant de la société TP TG et Location, d’un technicien informatique de son choix, d’un représentant de la force publique, d’un serrurier,
…/…
8° dresser procès-verbal de ses constations et en remettre une copie à la requérante.
Il était fait droit à cette requête par ordonnance du président du tribunal de commerce de Douai en date du 2 mars 2022, la mission confiée à la SCP Bauvin, Lemoine et Bernar devant intervenir dans un délai de deux mois.
La mission n’ayant pu être exécutée dans ce délai, une nouvelle requête était déposée le 19 octobre 2022 et une nouvelle ordonnance était rendue le 30 novembre 2022, la mission confiée à la SCP Bauvin, Lemoine et Bernar devant intervenir dans un délai de quatre mois à compter de la décision.
Cette ordonnance étant rectifiée par ordonnance du 9 mars 2023, par l’ajout à l’ordonnance initiale en page 12 du bordereau des 15 pièces produites à l’appui de la requête, alors même que les opérations avaient été menées par le commissaire de justice assisté de M. [X] expert informatique le 24 janvier 2023, l’ordonnance sur requête du 30 novembre 2022 ayant été signifiée à la SARL LTA par acte du 24 janvier 2023 .
Le 22 février 2023, la société S.A.R.L. transport location aménagement a assigné en rétractation de l’ordonnance du 30 novembre 2022 la société Ancre Participation et la SCP Bauvin Lemoine Bernard devant le président du tribunal de commerce de Douai.
Suivant acte d’huissier de justice en date du 14 mars 2023, étaient signifiées à la SARL TLA la requête du 19 octobre 2022, l’ordonnance sur requête du 30 novembre 2022 et l’ordonnance rectificative du 9 mars 2023 du président du tribunal de commerce de Douai.
Par décision du 18 avril 2023, le président du tribunal de commerce de Douai statuant en référé a :
1. ordonné que les reproductions de documents saisis soient écartées du procès-verbal de constat, (pièce n°19 de la société Ancre Participation)
2. débouté la société S.A.R.L. transport location aménagement de sa demande de rétractation de l’ordonnance du 9 mars 2023,
3. déclaré la société Ancre Participation recevable à agir,
4. débouté la société S.A.R.L. transport location aménagement de sa demande de rétractation de l’ordonnance du 30 novembre 2022,
5. débouté la société S.A.R.L. transport location aménagement de sa demande de voir prononcer la nullité du procès-verbal de constat du 24 janvier 2023,
6. débouté la société S.A.R.L. transport location aménagement de sa demande de tri des informations saisies,
7. ordonné la levée du séquestre,
8. dit qu’il n’y a pas lieu de prononcer la condamnation au visa de l’article 700 du code de procédure civile,
9. condamné la société S.A.R.L. transport location aménagement à supporter la charge des dépens,
10. liquidé les dépens à la somme de 40,66 euros.
Procédure :
Par déclaration au greffe en date du 20 avril 2023, la société S.A.R.L. transport location aménagement a interjeté appel des dispositions 2 à 10 de cette décision.
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Par actes du 21 avril 2023, la société S.A.R.L. transport location aménagement a saisi le premier président de la cour d’appel de Douai, afin d’obtenir la suspension de l’exécution provisoire de l’ordonnance du 19 avril 2023, au visa :
de l’article 6§1 et 8§2 de la Convention européenne des droits de l’Homme,
des article L.153-1 et suivants et R.153-1 et suivants du code de commerce,
des articles 514-1 et suivants du code de procédure civile et de l’article 455 du même code.
Prétentions et moyens des parties à l’audience du 2 mai 2023 :
La société S.A.R.L. transport location aménagement demande de :
– ordonner l’arrêt de l’exécution provisoire attachée à l’ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Douai le 19 avril 2023,
– enjoindre à la SCP Bauvin Lemoine Bernar de produire l’inventaire des pièces saisies et une copie des pièces saisies des opérations menées en exécution de l’ordonnance du 30 novembre 2022, sous astreinte de 500 euros par jour à compter de la présentation de la minute de l’ordonnance,
– renvoyer l’affaire devant le président du tribunal de commerce de Douai ou devant le tribunal de commerce de Douai afin qu’il soit statué de façon contradictoire sur le tri des pièces saisies lors des mesures d’investigation menées le 24 janvier 2023 au siège de la société S.A.R.L. transport location aménagement,
– donner acte à la société S.A.R.L. transport location aménagement de ce qu’elle réserve ses droits quant à toute action contre toute personne qui aurait pris connaissance et/ou ferait usage des pièces saisies,
– condamner la société Ancre Participation à verser la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Ancre Participation aux entiers dépens.
Au soutien de ses prétentions, la société S.A.R.L. transport location aménagement fait valoir au titre des moyens sérieux d’annulation de l’ordonnance du 19 avril 2023 en ce que :
Le juge de la rétractation a excédé ses pouvoirs à plusieurs titres :
– il a refusé la mesure de tri alors que la société avait fourni des indications précises sur la procédure de tri qu’elle réclamait (R.153-3 code de commerce).
– une mesure d’instruction générale et sans la moindre limite a été autorisée alors que les pièces saisies relevaient du secret des affaires (L.1151-1 code de commerce).
– il a assorti l’ordonnance de l’exécution provisoire et ce en violation de l’article R.153-8 du code de commerce qui indique que : « Le délai d’appel et l’appel exercé dans ce délai sont suspensifs lorsque la décision fait droit à la demande de communication ou de production. L’exécution provisoire ne peut être ordonnée ».
Le président du tribunal de commerce de Douai motive l’intérêt personnel à agir de la société Ancre Participation à l’encontre de la S.A.R.L. transport location aménagement en évoquant une obligation de non-concurrence consentie par M. [W] [E] alors que les mesures n’étaient pas dirigées à l’encontre de celui-ci, que ce n’est pas ce qui a été développé dans la requête initiale de la société Ancre Participation, que cette dernière n’a jamais justifié d’un intérêt personnel à requérir les mesures d’instruction, qu’aucune explication n’est fournie sur le procès que pourrait diligenter la société Ancre Participation à l’encontre la S.A.R.L. transport location aménagement.
Le président du tribunal de commerce de Douai motive l’existence d’un intérêt légitime qu’a eu la société Ancre Participation à obtenir une perquisition civile au préjudice de la société S.A.R.L. transport location aménagement par la référence à une sommation interpellative faite à un des salariés de la société TG TP et location, que le président a mal comprise.
Le président du tribunal de commerce de Douai évoque une baisse du volume d’affaires de la société Ancre Participation à cause de prétendues actions déloyales de la société S.A.R.L. transport location aménagement alors qu’aucune attestation n’est produite par la société Ancre Participation, les comptes annuels des deux sociétés ne sont pas déposés au greffe, l’attestation de l’expert-comptable de la société TG TP et Location mentionne un chiffre d’affaires stable et qu’il n’existe aucun indice de démarchage des clients.
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Le président du tribunal de commerce de Douai évoque une baisse du volume d’affaires de la société Ancre Participation à cause de prétendues actions déloyales de la société S.A.R.L. transport location aménagement alors qu’aucune attestation n’est produite par la société Ancre Participation, les comptes annuels des deux sociétés ne sont pas déposés au greffe, l’attestation de l’expert-comptable de la société TG TP et Location mentionne un chiffre d’affaires stable et qu’il n’existe aucun indice de démarchage des clients.
Le président du tribunal de commerce de Douai motive la dérogation au principe du contradictoire en se basant sur la seule crainte de la disparition de preuves sans démonstration, ni prise en compte d’éléments de l’espèce. La requête initiale, l’ordonnance initiale et l’ordonnance du 19 avril 2023 ne font état d’aucunes circonstances particulières justifiant une dérogation au principe du contradictoire.
Le périmètre de la mesure d’investigation est général (assimilable à une perquisition civile) et disproportionné (recherches de messages personnels, privés, consultation des photos du téléphone de M. [N] [E], consultation tablette personnelle et boite mail personnelle de sa compagne, pénétration dans le domicile privé d’une personne tierce). De plus, l’huissier a directement remis à la requérante le procès-verbal de constat alors que la société S.A.R.L. transport location aménagement avait annoncé un recours en rétractation.
De plus, elle considère que l’exécution provisoire de l’ordonnance entraînerait des conséquences manifestement excessives en ce que :
– en cas de levée abusive du séquestre, un savoir-faire (et bien plus) risque d’être livré à un concurrent.
– l’ordonnance initiale a autorisé des mesures d’investigation générales permettant des recherches illimitées dans les affaires de la société S.A.R.L. transport location aménagement, dans la vie privée de M. [N] [E], de sa compagne et dans le domicile privé d’une tierce personne.
La société Ancre Participation demande, au visa de l’article 514-3 du code de procédure civile de :
– déclarer irrecevable la demande de suspension de l’exécution provisoire,
– débouter la société S.A.R.L. transport location aménagement de l’ensemble de ses demandes au motif de l’absence de moyens sérieux d’annulation ou de réformation et de conséquences manifestement excessives,
– débouter la société S.A.R.L. transport location aménagement de l’ensemble de ses demandes sur le rejet de la demande de tri et d’injonction faite au commissaire de justice de remettre les pièces saisies à la société S.A.R.L. transport location aménagement,
– condamner la société S.A.R.L. transport location aménagement à verser à la société Ancre Participation la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens
Au soutien de ses prétentions, la société Ancre Participation fait valoir le fait que :
– Il existe une irrecevabilité de la demande de suspension de l’exécution provisoire en ce que les pouvoirs du premier président sont liés à l’effet dévolutif de la déclaration d’appel (et indiqués clairement dans la déclaration d’appel).
– De plus, la société S.A.R.L. transport location aménagement n’a pas relevé de la disposition ordonnant l’exécution provisoire
– Il n’existe aucun moyen sérieux d’annulation ou de réformation de l’ordonnance du 19 avril 2023 : d’abord, il appartenait à la société S.A.R.L. transport location aménagement d’indiquer au juge de la rétractation en quoi les différents courriels présentés revêtaient le caractère d’un secret des affaires. Or, la société ne l’a pas justifié. Par conséquent, le juge vise l’article R. 153-3 du code de commerce et explique qu’il convient de rejeter sa demande de séquestre et du tri des informations. Ainsi, le non-respect de l’article R. 153-4 du code de commerce constitue une circonstance particulière justifiant qu’il soit dérogé à l’artcle R. 153-8 du Code de commerce.
– Les effets de la décision rectificative d’erreur matérielle du 9 mars 2023 rétroagissent à la date de la décision rectifiée soit le 30 novembre 2022. Ainsi l’erreur matérielle est régularisable en application de l’article 462 du code de procédure civile. De plus, le juge était fondé de tatuer sans audience conformément au même article.
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– La société Ancre Participation a intérêt et qualité à agir dans la présente procédure puisque la concurrence déloyale dont est victime la société TG TP et Location a une incidence sur ncre Participation. En effet, cette concurrence déloyale constitue une faute engageant la esponsabilité de la société Ancre Participation.
– La société Ancre Participation dispose d’un motif légitime puisqu’il y a l’existence d’un litige potentiel et d’un intérêt probatoire à la mesure demandée pour éclairer la partie sur l’éventuel litige au fond conformément à l’article 145 du code de procédure civile. En effet, les faits suggèrent que M. [W] [E], ancien président de la société TG TP et Location , a utilisé le fichier client de son ancienne entreprise pour faire profiter la société de son fils : S.A.R.L. transport location aménagement. Ainsi, les différents éléments apportés au dossier ontrent qu’une action en concurrence déloyale contre la société S.A.R.L. transport location aménagement et contre M. [W] [E] est plausible.
– La dérogation au principe du contradictoire est fondée en ce que cela aurait permis de créer un effet de surprise évitant la disparition ou l’effacement de fichiers permettant de caractériser l’existence d’une concurrence déloyale en application de l’article 493 du code de procédure civile.
– Elle ne dispose pas du contenu des propositions commerciales ou les tarifs pratiqués et les mesures ordonnées sont utiles et admissibles puisque sans elles, il aurait été matériellement impossible de caractériser un détournement de clientèle et, en conséquence, une concurrence déloyale. Ainsi, la mission et les éléments de recherche sont clairement définis
– Il n’existe aucune conséquence manifestement excessive. En effet, la société S.A.R.L. transport location aménagement avait une parfaite connaissance des pièces séquestrées à travers le constat de Maître [I] et le rapport de M. [X]. De plus, la même société n’a pas indiqué les motifs des courriels qui leur conféraient le caractère d’un secret des affaires. Ensuite, la même société n’a pas apporté de preuve concernant les données relatives à la vie privée ou les données comptables qui auraient été séquestrées par le commissaire de justice. Enfin, le secret des affaires ne constitue pas un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile.
– Le premier président n’est pas compétent pour aménager l’exécution provisoire et faire le tri des pièces séquestrées, ni pour faire injonction au commissaire de justice de remettre les pièces saisies en application de l’article 514-3 du code de procédure civile.
– Elle évoque qu’il serait inéquitable de laisse à la charge de la société Ancre Participation les sommes se fondant sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.
Motifs de la décision :
Sur la recevabilité de la demande d’arrêt de l’exécution provisoire
La société Ancre Participation est particulièrement mal fondée à opposer à la société TLA le fait qu’elle n’a pas relevé appel de la disposition de l’ordonnance du 19 avril 2023 ordonnant l’exécution provisoire, alors que cette ordonnance ne comporte aucune disposition relative à l’exécution provisoire.
Est donc recevable la demande d’arrêt de l’exécution provisoire de l’ordonnance de référé du 19 avril 2023 du président du tribunal de commerce de Douai.
Sur le caractère bien fondé de la demande d’arrêt de l’exécution provisoire
L’article 514 du code de procédure civile précise que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement, l’article 514-1 alinéa 1 précisant quant à lui que par exception, le juge ne peut écarter l’exécution provisoire de droit lorsqu’il statue en référé.
Toutefois, l’article R 153-1 du code de commerce précise que :
« Lorsqu’il est saisi sur requête sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ou au cours d’une mesure d’instruction ordonnée sur ce fondement, le juge peut ordonner d’office le placement sous séquestre provisoire des pièces demandées afin d’assurer la protection du secret des affaires.
Si le juge n’est pas saisi d’une demande de modification ou de rétractation de son ordonnance en application de l’article 497 du code de procédure civile dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision, la mesure de séquestre provisoire mentionnée à l’alinéa précédent est levée et les pièces sont transmises au requérant.
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Le juge saisi en référé d’une demande de modification ou de rétractation de l’ordonnance est compétent pour statuer sur la levée totale ou partielle de la mesure de séquestre dans les conditions prévues par les articles R. 153-3 à R. 153-10. »
L’article R 153-8 du code de commerce prévoit quant à lui que « lorsqu’elle intervient avant tout procès au fond, la décision statuant sur la demande de communication ou de production de la pièce est susceptible de recours dans les conditions prévues par l’article 490 ou l’article 496 du code de procédure civile.
Le délai d’appel et l’appel exercé dans ce délai sont suspensifs lorsque la décision fait droit à la demande de communication ou de production. L’exécution provisoire ne peut être ordonnée. »
Il résulte :
1° de la lecture de la requête déposée au greffe du tribunal de commerce de Douai le 19 octobre 2022 et de l’ordonnance du président du tribunal de commerce de Douai du 30 novembre 2022, que ce président avait bien été saisi le 19 octobre 2022 sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile et qu’il avait prévu dans sa décision du 30 novembre 2022 que l’ensemble des documents, données et fichiers appréhendés émanant de messages électroniques émis ou reçus devait être conservé en séquestre,
2° de la lecture de l’ordonnance du 19 avril 2023 que le président du tribunal de commerce a été saisi par la société TLA d’une demande de rétractation de ses ordonnances des 30 novembre 2022 et 9 mars 2023 et reconventionnellement par la société Ancre Participation d’une demande de levée du séquestre de l’ensemble des informations copiées sur les deux clés USB remises par M. [X] expert, assistant le commissaire de justice, et concernant la société TG TP Location, ainsi que les sociétés Power Solutions, Bouyghes Construction Matériel, Helfaut Travaux, Sogea Caroni, Suez Hervé, qu’il a rejeté les demandes d’annulation et fait droit à la demande de levée du séquestre, dans le cadre de la procédure visée à l’article R 153-1 du code de commerce, après avoir relevé que la société LTA ne justifiait pas de la nature du secret qui toucherait les informations prélevées et qu’elle n’avait pas respecté les modalités de l’article R 153-3 du code de commerce.
Au vu de ces dispositions, la présente juridiction en conclut que même si elle se trouve au sein d’une ordonnance de référé normalement exécutoire de plein droit, la disposition ordonnant la levée du séquestre n’est pas, par exception, exécutoire par provision dès lors qu’elle a trait à la communication de pièces séquestrées le 24 janvier 2023 au requérant à la mesure de saisie, alors même que la SARL LTA a formé appel de ce chef de l’ordonnance.
La demande d’arrêt de l’exécution provisoire de cette disposition apparaît sans objet, dès lors que cette disposition ne bénéficie pas de l’exécution provisoire, laquelle contrairement à ce que soutiennent les parties n’a d’ailleurs pas été ordonnée par le juge des référés.
Concernant les autres dispositions, la société TLA ne justifie nullement que le maintien de l’exécution provisoire de ces dispositions qui la déboute de ses demandes, qui déclare la société Ancre Participation recevable à agir, ou la condamne aux dépens liquidés à la somme de 40,66 euros entraînerait des circonstances manifestement excessives, de sorte qu’elle sera déboutée de sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire de plein droit relativement à ces autres dispositions.
3° Sur la demande de tri des informations saisies
Il est constant que ces demandes avaient été formées par la société LTA devant le président du tribunal de commerce de Douai, que l’ordonnance du 19 avril 2023 a débouté expressément la société LTA de sa demande de tri, que la société LTA a formé appel de cette disposition, que c’est donc à la chambre commerciale de la cour d’appel de Douai saisie de cet appel qu’il appartient de répondre à cette demande et non au premier président de la cour d’appel, saisi d’une demande d’arrêt d’exécution provisoire, ni au président du tribunal de commerce, ni au tribunal de commerce de Douai.
4° Sur la demande d’injonction faite au commissaire de justice de remettre l’inventaire des pièces saisies et la copie les pièces saisies
Le premier juge a considéré que la demande de communication du procès-verbal de constat du 24 janvier 2023 était sans objet dans sa motivation, dès lors qu’il avait été communiqué avant l’audience, même s’il n’a toutefois pas répondu à cette demande dans le dispositif de sa décision.
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En revanche, il n’apparaît pas avoir répondu à la demande de production d’un inventaire des pièces saisies et de la copie des pièces saisies et il appartiendra à la cour d’appel de statuer sur cette question.
5° Sur la demande de donné acte
En application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour rappelle qu’elle n’est pas tenue de statuer sur le donné acte sollicité par la société TLA qui ne constitue pas une prétention en ce qu’il ne confère pas de droit à la partie qui les requiert dès lors qu’il formule exclusivement des réserves alors que la partie qui les exprime n’est pas privée de la possibilité d’exercer ultérieurement les droits en faisant l’objet.
6° Sur les dépens et l’indemnité d’article 700 du code de procédure civile
Chaque partie conservera à sa charge les frais et dépens qu’elle a engagés dans le cadre de la présente instance et les parties seront en conséquence déboutées de leurs demandes réciproques d’indemnité d’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Déclare recevable la demande formée par la SARL Transport Location Aménagement de sa demande d’arrêt d’exécution provisoire des dispositions de l’ordonnance du président du tribunal de commerce de Douai du 19 avril 2023 frappées d’appel,
Constate que la disposition ordonnant la levée du séquestre n’est pas exécutoire par provision,
Dit dès lors sans objet la demande d’arrêt de l’exécution provisoire sur cette disposition,
Déboute la SARL Transports Location Aménagement de sa demande d’arrêt d’exécution provisoire portant sur les autres dispositions de l’ordonnance du 19 avril 2023 frappées d’appel,
Se déclare incompétent pour connaître de la demande de production de l’inventaire des pièces saisies et d’une copie des pièces saisies le 23 janvier 2023,
Dit n’y avoir lieu à renvoyer devant le président du tribunal de commerce de Douai ou le tribunal de commerce de Douai le tri des pièces saisies,
Déclare irrecevable la demande de donné acte formée par la SARL Transport Location Aménagement,
Dit que chaque partie conservera à sa charge les frais et dépens qu’elle a engagés dans le cadre de la présente instance,
Déboute la SARL Transport Location Aménagement et la SAS Ancre Participation de leurs demandes respectives d’indemnité d’article 700 du code de procédure civile.
Le greffier La présidente
C. BERQUET H. CHATEAU