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Un droit reconnu au niveau européen
Outre la Recommandation sur la protection des mineurs et de la dignité humaine et sur le droit de réponse du 20 décembre 2006, la directive européenne “Services de médias audiovisuels” (n°2007/65/CE du 11 décembre 2007) encadre le droit de réponse en matière audiovisuelle (article 28). Ainsi,, toute personne physique ou morale, sans distinction de nationalité, dont les droits légitimes, en ce qui concerne notamment son honneur et sa réputation, ont été lésés à la suite d’une allégation incorrecte faite au cours d’une émission télévisée, doit pouvoir bénéficier d’un droit de réponse ou de mesures équivalentes.
L’exercice du droit de réponse ne doit pas être entravé par l’imposition de conditions déraisonnables. La réponse est transmise dans un délai raisonnable après justification de la demande, à un moment et d’une manière appropriés en fonction de l’émission à laquelle la demande se rapporte.
Le droit de réponse peut être exercé à l’égard de tous les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de la compétence de l’Etat ou il est établi.
Le délai pour l’exercice du droit de réponse doit être suffisant et ses modalités doivent être acessibles aux personnes physiques ou morales résidant ou établies dans d’autres États membres de l’Union européenne.
La demande d’exercice du droit de réponse peut être rejetée lorsqu’elle n’est pas justifiée (exemple : les allégation sont vraies), qu’elle impliquerait un acte punissable, que sa diffusion engagerait la responsabilité civile de l’organisme de radiodiffusion télévisuelle ou qu’elle serait contraire aux bonnes moeurs.
Dans tous les cas, la personne lésée a la faculté de saisir les tribunaux soit pour obtenir une insertion forcée, soit pour être indemnisée de son préjudice (injure / diffamation).
Les dispositions nationales
En droit français, le droit de réponse en matière audiovisuelle est réglementé par l’article 6 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle ( modifiée par la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, LCEN) et le Décret n° 87-246 du 6 avril 1987.
Les conditions d’exercice du droit de réponse audiovisuel
Toute personne physique ou morale dispose d’un droit de réponse dans le cas où des imputations susceptibles de porter atteinte à son honneur ou à sa réputation (délit de diffamation ou d’injure) auraient été diffusées dans le cadre d’une activité de communication audiovisuelle.
Pour constituer une diffamation, l’allégation ou l’imputation qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la victime doit se présenter sous la forme d’une articulation précise de faits de nature à être sans difficulté l’objet d’une preuve ou d’un débat contradictoire. Par ailleurs, les propos incriminés, pour faire l’objet d’un droit de réponse ne doivent pas être généraux mais comporter l’évocation de faits suffisamment précis pour justifier un droit de réponse (Cour de cassation, ch. civ., 3 juin 2004).
La demande d’exercice d’un droit de réponse audiovisuel
Le droit de réponse audiovisuel bénéficie aussi bien aux personnes physiques qu’aux personnes morales (aux associations sous certaines conditions et aux sociétés à raison de leurs activités). Ce droit est transmissible aux héritiers en ligne directe, aux légataires universels et au conjoint.
Pour exercer son droit de réponse, le demandeur doit préciser les imputations sur lesquelles il souhaite répondre et la teneur de la réponse qu’il souhaite faire. Cette demande doit être présentée dans le délai de trois mois suivant celui de la diffusion du message contenant l’imputation qui la fonde. Dans le cadre d’imputations diffusée dans le cadre de l’exercice de poursuites pénales, ce délai de trois mois est “réouvert” à la victime pour trois mois à compter du jour où la décision de non-lieu dont elle fait l’objet est intervenue ou celle de relaxe ou d’acquittement la mettant expressément ou non hors de cause est devenue définitive.
En application de l’article 6 de la loi, toute personne morale qui assure un service de communication audiovisuelle, doit désigner un responsable chargé d’assurer l’exécution des obligations se rattachant à l’exercice du droit de réponse. Ce droit de réponse s’exerce en adressant une demande par lettre recommandée
avec accusé de réception au Directeur de l’organisme de radiodiffusion (chaîne de télévision, radio) qui, juridiquement, assume la responsabilité des contenus.
L’action en insertion forcée
En cas de refus ou de silence gardé sur la demande d’exercice du droit de réponse, au delà de huit jours à partir de la réception de la demande, la personne lésée peut saisir le président du tribunal de grande instance, statuant en matière de référés (ce délai est ramené à vingt-quatre heures pendant une campagne électorale, lorsqu’un candidat est mis en cause). Le président du tribunal peut ordonner sous astreinte la diffusion de la réponse et l’assortir de l’exécution provisoire. Si l’exercice du droit de réponse, resté infructueux, ne relève pas de la compétence du CSA mais du tribunal de grande instance, le CSA pourra néanmoins intervenir, si le respect des principes de la loi du 30 septembre 1986 est en cause.
Le CSA a eu l’occasion de préciser, mais cela ne préjuge en rien de l’appréciation des tribunaux, que la responsabilité du directeur de l’organisme de radioduffusion doit être appréhendée plus souplement dans deux hypothèses :
1. Dans le cadre des propos exprimés en direct. Logiquement la chaîne n’a qu’un pouvoir de contrôle limité. Cependant“le journaliste ou l’animateur doit conserver la maîtrise de l’antenne et réagir de manière éventuellement critique aux propos d’un auditeur, voire d’un invité.” ;
2. Au cours des émissions de campagne électorale officielle relative à un scrutin, les propos des candidats n’engagent que leur auteur, le CSA exercant un contrôle a priori par la signature d’un “bon à diffuser”.
Les modalités d’insertion du droit de réponse audiovisuel
Concernant les modalités de diffusion du droit de réponse et à l’image de ce qui existe en matière de presse écrite, des conditions sont fixées par la loi :
– la réponse doit être diffusée dans des conditions techniques équivalentes à celles dans lesquelles a été diffusé le message contenant l’imputation invoquée ;
– la réponse doit être diffusée de manière que lui soit assurée une audience équivalente à celle du message précité.
Précisons que l’exercice du droit de réponse s’applique également aux service de communication mis à la disposition du public sous forme de phonogrammes ou de vidéogrammes paraissant à intervalles réguliers.
Un rôle important est également reconnu aux associations. Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant, par ses statuts, de défendre la mémoire des esclaves et l’honneur de leurs descendants, de combattre le racisme ou d’assister les victimes de discrimination fondée sur leur origine nationale, ethnique, raciale ou religieuse, peut exercer le droit de réponse dans le cas où des imputations susceptibles de porter atteinte à l’honneur ou à la réputation d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine, de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée seraient diffusées par un moyen audiovisuel. La loi précise néanmoins que lorsque les imputations concerneront des personnes considérées individuellement, l’association ne pourra exercer le droit de réponse que si elle justifie avoir reçu accord de ces personnes.
L’exercice du droit de réponse sur Internet
Le droit de réponse s’applique également à l’environnement en ligne.
Un certain flou a entouré cette question avant l’entrée en vigueur de la LCEN. Le Tribunal de grande instance de Paris par une ordonnance de référé du 5 juin 2002 avait jugé que les dispositions de la loi du 29 juillet 1982, et du décret du 6 avril 1987 relatives au droit de réponse en matière audiovisuelle, n’apparaissaient pas appropriées aux sites internet, au regard tant des mesures matérielles prescrites pour la diffusion de la réponse, inadaptées à un service de communication en ligne “qui par la forme de sa diffusion, est, alors plus proche du support écrit qu’audiovisuel, qu’aux difficultés tenant à la détermination des dates précises, prévues par ces textes, notamment pour l’insertion de la réponse” (Tribunal de Grande Instance de Paris, Ordonnance de référé du 5 juin 2002, M. Paul de H. c/ M. Stéphane B..)
Le Tribunal avait alors utilisé les ressources de l’article 809 du Code de procédure civile, pour prescrire toute mesure propre à faire cesser un trouble manifestement illicite et avait ainsi ordonné l’insertion d’un texte de jugement sur la page d’accueil du site (cela constituait une alternative à l’exercice du droit de réponse sur Internet).
Depuis l’entrée en vigueur de la LCEN, le droit de réponse appliqué à Internet est soumis à des dispositions spécifiques.
L’article 6 de la LCEN dispose que “toute personne nommée ou désignée dans un service de communication au public en ligne dispose d’un droit de réponse, sans préjudice des demandes de correction ou de suppression du message qu’elle peut adresser au service”.
Concernant les modalités d’exercice de ce droit, la demande doit être adressée au directeur de la publication ou, lorsque la personne éditant à titre non professionnel a conservé l’anonymat, au prestataire d’hébergement qui a l’obligation de transmettre cette demande sans délai au directeur de la publication.
Le directeur de la publication est tenu d’insérer dans les trois jours de leur réception les réponses de toute personne nommée ou désignée dans le service de communication au public en ligne sous peine d’une amende de 3 750 euros, sans préjudice des autres peines et dommages-intérêts auxquels l’article litigieux pourrait donner lieu.
Les conditions d’insertion de la réponse sont celles prévues par l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881. Le directeur de la publication a l’obligation d’insérer la réponse dans les trois jours de sa réception sous peine d’une amende de 3750 euros.
L’insertion devra être faite à la même place et en mêmes caractères que l’article qui l’aura provoquée, et sans aucune intercalation. La réponse sera néanmoins limitée à la longueur de l’article qui l’aura provoquée. Par exception, elle pourra atteindre cinquante lignes, alors même que cet article serait d’une longueur moindre, et elle ne pourra dépasser deux cents lignes, alors même que cet article serait d’une longueur supérieure dans le cas d’une réplique du journaliste. Enfin, la réponse doit toujours gratuite. En cas de refus d’insertion, l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881 organise une procédure de plainte en refus d’insertion.
Concernant le point de départ de l’exercice du droit de réponse, rappelons que dans sa décision du 10 juin 2004 (Décision du Conseil constitutionnel n° 2004-496 du 10 juin 2004), le Conseil constitutionnel a censuré la LCEN qui permettait d’exercer le droit de réponse tant que le message était accessible au public et au plus tard dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle cessait la mise à disposition du public du message.
Mise en perspective avec le point de départ de la prescription en matière de presse écrite qui est celui de la première communication au public, la loi ouvrait l’action civile et pénale pendant des durées manifestement trop différentes selon le support utilisé : “Considérant que, par elle-même, la prise en compte de différences dans les conditions d’accessibilité d’un message dans le temps, selon qu’il est publié sur un support papier ou qu’il est disponible sur un support informatique, n’est pas contraire au principe d’égalité ; que, toutefois, la différence de régime instaurée, en matière de droit de réponse et de prescription, par les dispositions critiquées dépasse manifestement ce qui serait nécessaire pour prendre en compte la situation particulière des messages exclusivement disponibles sur un support informatique.” A ce titre, la LCEN a été censurée pour rupture du principe d’égalité.