Clause de médiation : 23 mars 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 20/03323

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Clause de médiation : 23 mars 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 20/03323
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République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 23/03/2023

N° de MINUTE : 23/309

N° RG 20/03323 – N° Portalis DBVT-V-B7E-TFCY

Jugement (N° 19-004840) rendu le 06 Juillet 2020 par le Tribunal Judiciaire de Lille

APPELANTE

SA Cofidis agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

Représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assisté de Me Xavier Hélain, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant

INTIMÉS

Madame [W] [T]

née le [Date naissance 2] 1983 à [Localité 7] – de nationalité Française

[Adresse 3]

Monsieur [H] [T]

né le [Date naissance 1] 1983 à [Localité 5] (Belgique) – de nationalité Française

[Adresse 3]

Représentés par Me Jérémie Boulaire, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

SELARL Jérôme Allais es qualité de liquidateur judiciaire de la société Andrea Energy

[Adresse 4]

Défaillante, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 9 novembre 2020 par acte remis à personne

DÉBATS à l’audience publique du 11 janvier 2023 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 16 décembre 2022

EXPOSE DU LITIGE

Le 6 juin 2017, M. [H] [T] a contracté auprès de la société Andrea Energy une prestation relative à l’installation d’un système photovoltaïque, d’un kit d’étanchéité et de travaux relatifs à la réfection de la toiture pour un montant TTC de 21’900 euros, dans le cadre d’un démarchage à domicile, suivant bon de commande n°4406.

Le même jour M. [H] [T] et Mme [W] [T] ont accepté une offre préalable de crédit auprès de la société Cofidis exerçant sous l’enseigne ‘Projectio by Cofidis’, affecté à la réalisation d’une prestation de ‘photovoltaïque’ d’un montant de 21’900 euros, remboursable en 120 mensualités, précédées d’un différé de paiement de six mois, incluant les intérêts au taux nominal annuel de 4,55 %.

Par acte d’huissier en date des 31 octobre et 5 novembre 2019, les époux [T] ont fait assigner en justice la Selarl Jérôme Allais ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Andrea Energy et la société Cofidis aux fins notamment de voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.

Par jugement réputé contradictoire en date du 6 juillet 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille a :

– prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 6 juin 2017 entre M. [T] et la société Andrea Energy suivant bon de commande n°4406,

– constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société Cofidis et les époux [T] en date du 6 juin 2017,

– condamné la société Cofidis à restituer à M. [T] et Mme [T] l’ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 6 juin 2017,

– débouté M. [T] et Mme [T] du surplus de leurs demandes,

– débouté la société Cofidis de ses demandes,

– condamné la société Cofidis à payer à M. [T] et Mme [T] une somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 26 août 2020, signifiée aux époux [T] par acte d’huissier délivré le 2 novembre 2020 à personne, et à Selarl Jérôme Allais ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Andrea Energy par acte huissier délivré le 9 novembre 2020 à personne morale, la société Cofidis a relevé appel de l’ensemble des chefs de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 25 novembre 2020, elle demande à la cour de :

– infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

– dire et juger que M. [T] et Mme [T] sont mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter,

– dire et juger qu’elle est recevable et bien fondée en ses demandes fins et conclusions,

y faisant droit,

– condamner solidairement M. [T] et Mme [T] à lui payer la somme de 22’893,49 euros au taux contractuel de 4,58 % l’an à compter du 23 septembre 2020,

à titre subsidiaire, si la cour venait à prononcer la nullité des conventions :

– condamner solidairement M. [T] et Mme [T] à lui payer la somme de 21’900 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir, déduction à faire des échéances payées,

à titre infiniment subsidiaire,

– condamner solidairement M. [T] et Mme [T] à rembourser une partie du capital dont le montant sera fixé souverainement par la juridiction,

en tout état de cause,

– condamner solidairement M. [T] et Mme [T] à lui payer une indemnité d’un montant de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

La société Cofidis a signifié ses conclusions à M. [T] et Mme [T] par acte d’huissier délivré le 26 novembre 2020 à domicile et à personne, et à la Selarl Jérôme Allais ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Andrea Energy par acte huissier délivré le 30 novembre 2020 à personne morale.

Les époux [T] ont constitué avocat mais n’ont pas conclu.

La Selarl Jerôme Allais n’a pas constitué avocat, ni conclu.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures de l’appelante pour l’exposé de ses moyens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 décembre 2022 et l’affaire fixée pour être plaidée à l’audience du 11 janvier 2023.

MOTIFS

Sur la nullité du bon de commande:

L’article L221-5-1° du code de la consommation s’agissant des contrats conclus hors établissement prévoit en substance que préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues à l’article L. 111-1.

L’article L 111-1 du même code dans sa version résultant de l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et applicable au présent litige, dispose quant à lui:

«Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes: 1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4;
3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;
5° S’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’État.
Les dispositions du présent article s’appliquent également aux contrats portant sur la fourniture d’eau, de gaz ou d’électricité, lorsqu’ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée, ainsi que de chauffage urbain et de contenu numérique non fourni sur un support matériel. Ces contrats font également référence à la nécessité d’une consommation sobre et respectueuse de la préservation de l’environnement.»

L’article L 221-9 du dit code dispose quant à lui:

«Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties.
Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L. 221-5.
Le contrat mentionne, le cas échéant, l’accord exprès du consommateur pour la fourniture d’un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l’expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l’exercice de son droit de rétractation.
Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5.»

Par ailleurs l’article L 242-1 du même code prévoit en ce qui le concerne que les dispositions de l’article L 221-9 dudit code sont édictées à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

Au cas particulier la nature complexe de l’opération contractuelle en question implique que soit dûment précisées certaines caractéristiques essentielles. Faute de telles précisions le consommateur ne sera pas en mesure de procéder ‘ comme il peut légitimement en ressentir la nécessité – à une comparaison entre diverses offres de même nature proposées sur le marché pour opérer le choix qui lui paraît le plus conforme à ses souhaits et le plus judicieux.

Dans le cas présent force est de constater que le bon de commande litigieux apparaît extrêmement sommaire dans la mesure où font défaut de nombreuses informations afférentes aux caractéristiques essentielles des biens et de la prestation fournis.

” S’agissant de l’exigence de l’indication du calendrier exact des travaux et de la date de livraison:

En premier lieu ce bon de commande produit à la cause (pièce n°1 de l’appelante) ne précise aucunement l’exact calendrier des travaux ni la date précise de livraison. Il est certes mentionné sur ce document contractuel: ‘Délais: installation photovoltaïque et autre équipement au plus tard dans les trois mois à compter de la réception de l’avis de conformité.’ Toutefois ces indications apparaissent nébuleuses et nimbées de clair-obscur et ne permettent pas de satisfaire à l’exigence de la mention de cette caractéristique essentielle; cette stipulation ne fournit aucune précision sur la date exacte et certaine de début des travaux ni de fin des travaux. Or, il apparaît absolument primordial qu’un consommateur sache précisément les diverses dates des tranches des travaux en cause et la date de la livraison effective des panneaux photovoltaïques en cause.

” S’agissant de l’indication de la partie ayant en charge l’accomplissement des démarches administratives:

Le bon de commande précise de manière particulièrement lapidaire et lacunaire notamment ‘Démarches administratives (Mairie,Région, EDF, ERDF)’.

Or, il n’est pas expressément indiqué qui aura la charge de ces démarches administratives et notamment si la société ANDREA ENERGY devra les assumer.

” S’agissant de l’exigence de l’indication des modalités de paiement:

Le bon de commande en cause ne fournit strictement aucune précision sur les modalités de paiement. Du reste les rubriques du bon de commande à ce sujet ne sont pas du tout renseignées.

” S’agissant de l’exigence de l’indication de la marque des panneaux photovoltaïques:

Le bon de commande litigieux se borne à indiquer en substance qu’il s’agit au cas particulier de ’12 panneaux photovoltaïques’ de ‘250 watts’ sans nullement préciser la marque de ces panneaux. Or l’indication de la marque apparaît absolument essentielle.

” S’agissant de l’exigence de l’indication de la ventilation entre le coût du matériel et le coût des travaux:

Le bon de commande en cause ne fournit pas s’agissant du prix des précisions quant à la ventilation entre le coût du matériel d’une part et le coût de la main d’oeuvre d’autre part. Il s’agit à l’évidence d’une caractéristique essentielle du bien et de la prestation de service en cause. Aucune comparaison pertinente ne peut être opérée entre les prestations des divers fournisseurs sur le marché sans cette précision cruciale.

Par ailleurs il apparaît extrêmement symptomatique que la SA Cofidis ne conteste nullement dans ses écritures l’existence de ces irrégularités affectant le bon de commande et s’en rapporte à justice quant à la nullité des conventions (tant le contrat principal que le crédit affecté).

Il convient dès lors au regard des considérations qui précédent de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 6 juin 2017 entre M. [H] [T] et la société Andrea Energy.

– Sur la nullité du contrat de crédit affecté:

En application des dispositions de l’article L 312-55 du code de la consommation applicable au présent litige, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui même judiciairement résolu ou annulé.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société Cofidis et M. [H] [T] et Mme [W] [T] le 6 juin 2017.

– Sur les conséquences de la nullité du contrat principal et du contrat de crédit affecté:

Il résulte d’une jurisprudence bien établie que commet une faute la banque qui verse les fonds prêtés au vendeur de panneaux photovoltaïques sans avoir dûment et préalablement vérifié la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation. La banque commet également une faute en ne s’assurant pas au moyen de toutes démarches utiles, de la bonne exécution des travaux par le vendeur des panneaux photovoltaïques conformément à ses engagements contractuels avant de débloquer les fonds prêtés.

Au cas particulier l’objectivité commande de constater que la SA Cofidis a commis une faute en ne vérifiant pas la conformité du bon de commande litigieux aux dispositions d’ordre public du code de la consommation alors même que ce document contractuel – comme il a été vu ci-dessus – comportait de nombreuses irrégularités, lorsquelle a débloqué les fonds du crédit affecté. Il est du reste très révélateur de ce que la SA Cofidis avait pleine conscience de ses fautes qu’elle n’ait pas contesté ces irrégularités entachant le bon de commande en cause et s’en soit remise à justice quant à la nullité du contrat de vente et du crédit affecté.

Il convient de plus de mettre en exergue cette évidence que le crédit affecté conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile prends place dans une opération commerciale unique. Force est dès lors de constater que dans ce cadre, chacun des deux contrats n’existe que par l’autre, de telle manière que le déséquilibre s’en trouve d’autant plus accentué vis à vis du consommateur. Par suite, au cas particulier la privation de la banque de sa créance de restitution s’analyse objectivement comme la sanction tant des fautes commises par la banque elle même que de la faute commise par le professionnel dans le cadre du contrat principal.

Ces fautes ont incontestablement occasionné un préjudice pour Mme [W] [T] et M. [H] [T] dont l’exacte étendue doit être appréciée souverainement par le juge du fond et qui ne saurait être réduit à la seule chance qu’ils ont ainsi perdu de ne pas contracter. En outre il est manifeste que la déconfiture de la société Andrea Energy, a occasionné un préjudice substantiel pour M. [H] [T] et Mme [W] [T] car ils ont été du fait de cette faillite, dans l’impossibilité de récupérer le prix de vente auprès de cette société alors même qu’elle aurait été la conséquence juridique normale et automatique de l’annulation du contrat de vente.

Dès lors les fautes de la société Cofidis en l’espèce ont causé à Mme [W] [T] et M. [H] [T] un préjudice incontestable qui doit être justement arbitré à hauteur du montant intégral de la créance de restitution.

Il est donc logique au regard des observations qui précédent, que la SA Cofidis soit privée de sa créance de restitution.

Il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a condamné la SA Cofidis à restituer à M. [H] [T] et Mme [W] [T] l’ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 6 juin 2017;

– Sur les autres points déférés à la cour dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel:

Par des motifs pertinents que la cour adopte c’est à juste titre que le premier juge dans la décision déférée, a:

” débouté M. [H] [T] et Mme [W] [T] du surplus de leurs demandes,

” débouté la société Cofidis de ses demandes,

” condamné la société Cofidis à payer à M. [H] [T] et Mme [W] [T] la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Le jugement querellé sera donc confirmé sur ces points.

– Sur l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel.

L’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel.

– Sur les dépens d’appel.

Il y a lieu de condamner la SA Cofidis qui succombe, aux entiers dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier, et par mise à disposition au greffe,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement querellé,

Y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel,

Condamne la SA Cofidis aux entiers dépens d’appel.

Le greffier

Gaëlle PRZEDLACKI

Le président

Yves BENHAMOU

 


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