Droits des Compositeurs : 17 novembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/14672

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Droits des Compositeurs : 17 novembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/14672
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 10

ARRÊT DU 17 NOVEMBRE 2022

(n° , 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/14672 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCPJK

Décision déférée à la Cour : jugement du 12 février 2015 du tribunal de grande instance de Paris – RG 13/18106

DEMANDEUR A LA REQUETE :

NEST A/S

Représentée par son administrateur Monsieur [P] [W] désigné par jugement du Tribunal Maritime et Commercial de Copenhague en date du 22 mars 20

Société de droit Danois ayant son siège social :

[Adresse 10]

[Adresse 12]

[Localité 7] (DANEMARK)

Représentée par Me Philippe GALLAND, GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Assisté de Me Basile ADER, SCP AUGUST DEBOUZY ET ASSOCIES – Toque : P0438.

DEFENDEUR A LA REQUETE :

Monsieur [M] [L]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Francis PUDLOWSKI, avocat au barreau de PARIS, toque : K0122

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 22 Septembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Florence PAPIN, Présidente

Monsieur Laurent NAJEM, Conseiller

Madame Valérie MORLET, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Florence PAPIN, Présidente dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Dorothée RABITA

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Florence PAPIN, Présidente et par Dorothée RABITA, greffier présent lors de la mise à disposition.

***

M. [M] [L] a été appelé à la succession de [S] [J], décédé le 19 février 2001, en qualité de légataire universel.

Il a hérité outre des avoirs monétaires, d’une villa située à [Localité 6], d’une maison située à [Localité 5], et des droits d’auteur de [S] [J].

Il a emprunté, auprès de la banque Privée Saint Dominique :

-le 20 juillet 2005, la somme de 2.174.200 euros, prêt garanti par la cession pendant la durée du prêt des créances qu’il peut avoir sur la SACEM au titre des droits d’auteur de [S] [J] ainsi que par une hypothèque conventionnelle sur le bien immobilier situé à [Localité 6] et sur le bien immobilier situé à [Adresse 4] qu’il s’engageait à ne pas aliéner pendant la durée du prêt. Cette dernière est de deux ans ou dès la cession du bien situé à [Localité 6],

-le 28 juillet 2005, la somme de 825.800 euros pour deux ans avec la garantie d’une hypothèque sur le bien immobilier situé à [Localité 6].

-le 16 novembre 2005, la somme de 750.000 euros jusqu’au 31 mai 2007 avec la garantie d’une hypothèque sur le bien immobilier situé à [Adresse 4] et la délégation de sa police d’assurance individuelle auprès de la CARDIF.

M. [M] [L] a conclu, le 11 juillet 2006, un contrat intitulé accord cadre avec trois sociétés dont la société de droit danois Nest ApS, ayant pour objet l’achat, la cession ou la location de biens immobiliers ayant appartenu à [S] [J] ainsi qu’une cession des droits de propriété intellectuelle et des droits voisins de ceux-ci, convention à laquelle était incorporée une convention d’arbitrage désignant l’Institut [8].

Le même jour, un contrat de cession de droits de propriété littéraire et artistique a été signé entre M. [M] [L] et la société Nest ApS moyennant un prix de 1.500.000 euros payable sous la forme de la prise en charge des 3 prêts de M. [M] [L] contractés auprès de la banque Privée Saint Dominique qui avait en gage lesdits droits.

A la suite, le 10 août 2006, une promesse de vente a été signée entre M. [M] [L] et la société Nest ApS concernant la villa située à [Localité 6] au prix de 4.000.000 d’euros, la réitération devant intervenir le 30 novembre 2006 et une promesse de bail emphytéotique devant être réitérée le 30 septembre 2006 sur la propriété située à [Localité 5] dont le bâtiment principal était destiné à accueillir un musée [S] [J] et la surface restante un projet immobilier .

Un contrat de cession d’oeuvres d’art et de bibelots a été signé entre M. [M] [L] et la société Nest ApS, destinés au musée [S] [J], le 8 décembre 2006.

Par ailleurs, un contrat de travail avait été signé le 30 juin 2006 entre la société Nest ApS et M.[L], embauché en qualité de ‘responsable des relations publiques’, pour une rémunération brute annuelle de 60.000 euros.

Le 1er novembre 2006, la société Nest ApS est devenue la société Nest A/S.

Par deux ordonnances en date des 6 avril et 29 juin 2007, le juge des requêtes du tribunal de grande instance de Paris a ordonné à la demande de M.[L] une mesure de séquestre entre les mains du bâtonnier de Paris des droits d’auteur perçus en vertu des contrats d’édition des chansons de [S] [J].

Par une ordonnance en date du 28 septembre 2010, confirmée par un arrêt en date du 1er juin 2010 de la cour d’appel de Paris, le juge des requêtes du tribunal de grande instance de Paris a déclaré la société Nest A/S mal fondée en sa demande de mainlevée du séquestre.

Par un jugement en date du 12 septembre 2008, confirmé par un arrêt en date du 21 janvier 2009 de la cour d’appel de Paris, le tribunal de grande instance de Paris, saisi d’une action en annulation des contrats des 11 juillet 2006 ( accord cadre et cession des droits d’auteur) et de la convention d’arbitrage, s’est déclaré incompétent et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir.

Par un arrêt du 12 mai 2010, la première chambre civile de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi no 09-11.872 formé par M. [M] [L] contre l’arrêt rendu le 21 janvier 2009 par la cour d’appel de Paris.

Par une lettre en date du 30 août 2013, l’Institut Danois d’Arbitrage a radié la procédure d’arbitrage.

Par un jugement en date du 7 octobre 2013, confirmé par un arrêt en date du 25 novembre 2013 de la cour d’appel de Copenhague, le tribunal de Copenhague, saisi aux fins de validation des conventions litigieuses, a déclaré irrecevable la demande de la société Nest A/S.

Par exploit en date du 29 janvier 2014, la société Nest A/S a de nouveau assigné M. [M] [L] devant le tribunal de Copenhague aux fins de validation des conventions litigieuses, procédure qui a fait depuis l’objet d’une radiation.

Par arrêts de la cour d’appel de Paris, chambre correctionnelle, du 5 octobre 2015, M.[C], intermédiaire avec lequel M.[L] avait été en relation et M.[F], avocat danois et président du conseil d’administration de la société Nest, ont été relaxés des faits d’escroquerie au préjudice de M. [M] [L], reconnus coupables d’un recel d’abus de confiance à son préjudice pour détournement de documents, fait commis en juin et septembre 2010 et ont été condamnés à une amende délictuelle ainsi qu’à lui payer des dommages et intérêts. Un recel de biens commis à compter du 2 juin 2008 a également été retenu concernant le versement des droits d’auteur qui a donné lieu au prononcé d’une amende sans condamnation à des dommages et intérêts au profit de M. [M] [L].

Dans le cadre de la présente procédure, par exploit d’huissier en date du 19 décembre 2013, M. [M] [L] a fait assigner la société Nest A/S devant le tribunal de grande instance de Paris en nullité des conventions.

Par un jugement en date du 12 février 2015, décision déférée, le tribunal de grande instance de Paris a :

– rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Nest A/S ;

– dit et jugé être compétent pour connaître de l’affaire selon le droit danois ;

– prononcé la caducité des promesses de vente et de bail du 10 août 2006 ainsi que la résolution pour inexécution par la société Nest A/S de l’accord-cadre du 11 juillet 2006, de la cession des droits d’exploitation du 11 juillet 2006 et de la cession d”uvres d’art et bibelots du 8 décembre 2006 ;

– condamné la société Nest A/S à restituer à M. [M] [L] les 168 ‘uvres d’art et bibelots listés à l’article 1 du contrat de cession du 8 décembre 2006 dans les 15 jours de la signification du jugement, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard pendant 50 jours, passé ce délai ;

-condamné la société Nest A/S à payer à M. [M] [L] la somme de 2 000 000 d’euros de dommages et intérêts et 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– ordonné l’exécution provisoire dudit jugement ;

– rejeté toutes les autres demandes ; et

– condamné la société Nest A/S aux dépens, qui pourront être recouvrés, à la demande des avocats, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Une première déclaration d’appel en date du 20 mars 2015 ayant été déclarée nulle, par une nouvelle déclaration en date du 6 décembre 2016, la société Nest A/S a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris.

Par une ordonnance en date du 24 janvier 2018, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Paris a jugé irrecevable comme tardif l’appel du 6 décembre 2016 de la société Nest.

Par un arrêt en date du 25 octobre 2018, la cour d’appel de Paris a notamment infirmé l’ordonnance du 24 janvier 2018 en ce qu’elle a déclaré irrecevable l’appel formé le 6 décembre 2016.

Par ordonnance en date du 6 octobre 2021, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Paris a notamment rejeté l’incident présenté par M. [M] [L] tendant à voir constater la péremption de l’appel du 6 décembre 2016 ou à voir radier l’instance.

Le 22 mars 2016 le tribunal maritime et commercial de Copenhague a ouvert une procédure de liquidation judiciaire concernant la société Nest A/S ( ci après la société Nest) et désigné M.[W] en qualité de liquidateur.

Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique (RPVA) le 23 octobre 2020, la société Nest A/S, représentée par son administrateur, demande à la cour d’appel de Paris de :

– déclarer la société Nest A/S recevable et bien fondée en son appel ;

Y faisant droit,

– infirmer le jugement entrepris dont appel en toutes ses dispositions ;

Et, statuant à nouveau,

À titre principal,

– constater que la Cour de cassation, dans son arrêt en date du 12 mai 2010, a jugé que le présent litige sur la validité des accords intervenus le 11 juillet 2006 ne relevait pas de la compétence du juge français, mais de celle de l’Institut danois d’arbitrage ;

– constater que la demande formulée par M. [M] [L] se heurte à l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt de la Cour de cassation en date du 12 mai 2010 susvisé ;

En conséquence,

– déclarer M. [M] [L] irrecevable à agir devant les juridictions françaises ;

À titre subsidiaire, si la cour de céans retenait la compétence des juridictions françaises,

– dire que la notion d’indivisibilité entre les contrats du 11 juillet 2006 et le contrat de cession des ‘uvres d’art et objets du 8 décembre 2006 retenue aux termes du jugement dont appel n’existe pas en droit danois,

– déclarer M. [M] [L] irrecevable à poursuivre la nullité ou la résolution du contrat de cession des bibelots en date du 8 décembre 2006, son action étant prescrite ;

Subsidiairement, le débouter en sa demande de résolution du contrat du 8 décembre 2006 et le condamner à restituer l’ensemble de ces biens sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard passé le délai d’un mois à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;

– dire que M. [M] [L] est seul à l’origine de l’inexécution des contrats du 11 juillet 2006 en faisant procéder au blocage des droits dès le mois de mars 2007 alors que toute l’économie de l’opération de désendettement de M. [M] [L] reposait précisément sur la perception des droits ;

– dire que les promesses de vente et de bail du 10 août 2006 ont été prorogées et ne pouvaient en conséquence faire l’objet d’une caducité ;

En conséquence,

– débouter M. [M] [L] en toutes ses demandes, fins et prétentions ;

En tout état de cause,

– condamner M. [M] [L] à payer à la société Nest A/S la somme 50 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ; et

– condamner M. [M] [L] aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Philippe Galland, avocat au barreau de Paris, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’appelante fait valoir:

– qu’elle n’a pas renoncé à l’arbitrage,

-que le courrier en date du 30 août 2013 de l’Institut [8] fait état d’une radiation et que l’instance pourra être reprise dès que l’intimé versera sa quote part de consignation supplémentaire,

-qu’elle a réintroduit l’instance arbitrale par courrier du 19 mai 2015,

-que la saisine des juridictions étatiques danoises a été faite pour débloquer la situation et ne saurait emporter une renonciation à la procédure d’arbitrage,

-que l’intimé n’a pas justifié ne pas être en mesure de régler la consignation supplémentaire et ne peut invoquer sa propre turpitude,

-que la décision déférée se heurte à l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt du 21 janvier 2009, ( pourvoi rejeté par la Cour de cassation le 12 mai 2010), selon lequel le litige sur la validité des accords ne relevait pas de la compétence du juge français,

-que l’obligation, qui sert de base à la demande, concerne la cession de droits d’auteur et n’est pas un litige portant sur des droits réels immobiliers, contrairement à ce qu’ont jugé les premiers juges, que son siège social est au Danemark et que les tribunaux danois sont compétents étant ceux du domicile du défendeur ( en application de l’article 2 du règlement CE n°44: 2001 du 22 décembre 2000 dit Bruxelles I),

-que l’accord cadre et le contrat de cession de droits d’auteur en date du 11 juillet 2006 prévoient l’application de la loi danoise, loi choisie par les parties, liberté mise en avant par l’article 3 du règlement 593/ 208,

-que concernant le contrat de cession de bibelots en date du 8 décembre 2006, dont la nullité est demandée pour la première fois aux termes de l’assignation du 19 décembre 2013, l’action est prescrite (la durée de la prescription pour l’exécution des contrats en droit danois est de 3 ans), la notion d’indissociabilité n’existant pas en droit danois, de plus il a été exécuté et la restitution est intervenue suite à une ordonnance du juge d’instruction du 19 décembre 2014,

-que le montage contractuel était destiné à rendre temporairement insaisissable le patrimoine de M. [L] en l’externalisant, qu’il était associé à hauteur de 70 % du capital de la société Nest, que les ressources de cette dernière ne pouvaient provenir que des droits d’auteur à charge pour elle de les faire fructifier,

-que comme le relève la chambre correctionnelle de la cour d’appel, il n’est nullement établi que son consentement ait été obtenu par des manoeuvres frauduleuses et que c’est en connaissance de cause qu’il s’est adressé à elle pour mettre en place un montage fiscal,

-qu’il s’est ingénié à rendre impossible l’exécution des accords, que privée des droits qui ont été mis sous séquestre, elle ne pouvait remplir ses obligations, et qu’il doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts, sa situation financière étant obérée avant la signature des contrats litigieux,

– qu’il pouvait convertir l’adjudication en vente amiable, et au contraire a signé une transaction avec la banque, et qu’il est seul à l’origine de son préjudice.

Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique (RPVA) le 23 novembre 2021, M. [M] [L] demande à la cour d’appel de Paris de :

– confirmer le jugement entrepris dont appel en ce que le tribunal de grande instance de Paris s’est déclaré compétent ;

– infirmer le jugement entrepris dont appel en ce qu’il a déclaré la loi danoise applicable ;

Et, statuant à nouveau,

– dire et juger que la loi applicable est la loi française ;

– déclarer M. [M] [L] recevable et bien fondé en ses demandes en nullité et, subsidiairement, en résolution, du contrat de cession d”uvres d’art et de bibelots du 8 décembre 2006 ;

Subsidiairement,

– infirmer le jugement entrepris dont appel en ce qu’il a rejeté la demande d’annulation des contrats de M. [L] ;

Et, statuant à nouveau,

– annuler pour vice du consentement les contrats signés entre M. [L] et la société Nest A/S les 11 juillet, 10 août et 8 décembre 2006 ;

Plus subsidiairement,

– annuler pour absence de cause les contrats signés entre M. [L] et la société Nest A/S les 11 juillet, 10 août et 8 décembre 2006 ;

À défaut,

– annuler pour absence de prix le contrat de cession de droits signé entre M. [L] et la société Nest A/S le 11 juillet 2006 ;

Très subsidiairement,

– prononcer la caducité de l’accord cadre et du contrat de cession de droits du 11 juillet 2006 faute de réalisation de la condition suspensive de l’accord de la Banque privée Saint Dominique, aujourd’hui Banque privée 1818 ;

Encore plus subsidiairement,

– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a prononcé la résolution pour inexécution par la société Nest A/S de l’accord cadre du 11 juillet 2006, de la cession des droits d’exploitation du 11 juillet 2006, de la cession d”uvres d’art et bibelots du 8 décembre 2006 ;

En tout état de cause,

– confirmer le jugement entrepris dont appel en ce qu’il a ordonné en conséquence à la société Nest A/S, par son liquidateur, de restituer à M. [L] les 168 ‘uvres d’art et bibelots dont la liste figure dans l’article 1 du contrat de cession du 8 décembre 2006 ;

Et, statuant à nouveau,

– prononcer à l’encontre de Me [P] [W] une astreinte de 5 000 euros par jour de retard, passé un délai de 8 jours à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;

– confirmer le jugement entrepris dont appel en ce qu’il a prononcé la caducité de la promesse de vente et de la promesse de bail emphytéotique signées par M. [L] au profit de la société Nest A/S le 10 août 2006 à [Localité 9] ;

– débouter la société Nest A/S représentée par son liquidateur, de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

– condamner la société Nest A/S, représentée par son liquidateur, à verser à M. [L] la somme de 2. 000. 000 d’euros à titre de dommages et intérêts – fixer la créance de M. [L] à la somme de 2. 000. 000 d’euros au passif de la société Nest Under Konkurs ;

– condamner Me [P] [W], à lui verser la somme de 30. 000 d’euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; et

– le condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Francis Pudlowski , pour ceux dont il aura fait l’avance sans avoir reçu provision, conformément à l’article 699 du même code.

L’intimé fait valoir:

-que des événements postérieurs interdisent sur le fondement de l’Estopel à la société Nest de se prévaloir de l’autorité de la chose jugée du jugement du TGI de Paris en date du 12 septembre 2008 ( confirmé par arrêt de la cour d’appel de Paris) qui s’est déclaré incompétent au profit de l’Institut Danois d’Arbitrage,

-les décisions du Conseil constitutionnel et de la Cour européenne des droits de l’homme reconnaissent, au titre de l’article 6 de la Convention, le nécessaire droit du justiciable à l’accès au juge, et il est constant que depuis 8 ans, il ne parvient pas à obtenir une décision,

-que l’appelante a renoncé à l’instance arbitrale, et à la clause compromissoire,

-que la compétence des tribunaux français résulte de l’article 22 du règlement CE ( Bruxelles I) qui prévoit la compétence exclusive en matière de droits réels immobiliers ou de baux d’immeubles des tribunaux de l’état membre où l’immeuble est situé, or le contrat prévoyait l’engagement d’acheter une villa située à [Localité 6] et de louer une maison située à [Localité 5], et les contrats contestés sont interdépendants,

-qu’en vertu de l’article 5 du règlement, le défendeur domicilié sur le territoire d’un Etat contractant peut être attrait en matière contractuelle devant le tribunal du lieu où l’obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée,

-que la compétence des tribunaux français résulte aussi de l’article 15 § 1 du règlement CE ( Bruxelles I) ‘ compétence en matière de contrats conclus par les consommateurs’ qui prévoit que ces derniers peuvent saisir à leur choix la juridiction de leur domicile,

-que son consentement et la validité des contrats ne peuvent être appréciés qu’au regard de son pays de résidence, la France, en application de l’article 8 de la convention applicable aux obligations contractuelles ( Rome 1),

-que leur exécution est soumise également à la loi française, la clause d’application de la loi danoise relevant d’une fraude à la loi, ( la société Nest et son président ont été condamnés pour dénonciation calomnieuse par le tribunal de grande instance de Paris le 12 juillet 2018, décision dont ils n’ont pas interjeté appel, de même ils ont été condamnés ainsi que M.[C] pour escroquerie et abus de confiance par 3 arrêts du 5 octobre 2015),

-subsidiairement, sur le fondement de la loi danoise, qu’ils doivent être déclarés nuls pour fraude, abus de faiblesse et engagement disproportionné, ainsi qu’erreur sur les qualités substantielles, et subsidiairement pour inexécution,

-que le contrat de cession de bibelots ayant appartenu à [S] [J] pour être exposés dans un musée conclu le 8 décembre 2006 dont il demande l’annulation et à titre subsidiaire la résiliation pour inexécution est indissociable des contrats du 11 juillet et 10 août 2006 ( promesse de bail emphytéotique pour la mise en place du musée) et dès lors son action non prescrite au regard de la loi danoise ( 3 ans). Au surplus en cas d’inexécution contractuelle la loi danoise prévoit une action dans un délai raisonnable et la loi française applicable prévoit un délai de 5 ans,

-qu’il a été trompé par diverses manoeuvres constitutives d’un dol : on lui a fait croire qu’il serait salarié cadre de Nest, que la banque Privée Saint Dominique acceptait le transfert du droit de gage sur les biens et agréait la société comme débiteur en ses lieu et place, or elle n’a jamais donné son accord et avait notifié à M.[C] avant la conclusion du contrat dans quelles conditions elle était susceptible de le donner,

-qu’il a été trompé sur la solvabilité de Nest, qui était censée acquérir la maison d'[Localité 6], payer 1.500.000 euros au titre des droits d’auteur, et désintéresser la banque du capital emprunté de 3.700.000 euros alors qu’elle n’avait aucune trésorerie et n’a jamais réglé aucune somme,

-que les redevances s’élevant à 170.000 euros par an après impôt ne pouvaient suffire à tout payer d’autant que la banque n’avait pas donné son accord sur la cession des redevances et la levée du gage,

-qu’il y a eu erreur sur la personne de M.[C] qui se présentait comme un financier et qui pour toute qualification professionnelle était dirigeant de fait d’une société de maçonnerie en liquidation judiciaire et avait des ennuis avec le fisc danois,

-qu’il croyait qu’il aurait 70% des parts et contrôlerait Nest alors que rien n’établit qu’il en ait été actionnaire,

-que l’ensemble des contrats sont nuls pour absence de cause la société Nest n’ayant jamais eu l’intention d’exécuter ses obligations,

-que le prix ( 1.500.000 euros ) de cession des droits d’auteur afférents à l’oeuvre de [S] [J] est vil,

-que l’accord du 11 juillet 2006 a été signé sous condition suspensive d’acceptation par la banque qui n’a jamais accepté et au contraire a fait vendre aux enchères l’ensemble de ses biens immobiliers (maison d'[Localité 5], objet du bail emphytéotique, et maison d'[Localité 6]),

-qu’aucun des engagements de Nest n’a été respecté alors qu’ils formaient un tout: la société Nest n’a pas acquis la maison d'[Localité 6], n’a pas signé le bail emphytéotique, ni créé un musée, qu’elle n’a rien payé au titre du contrat de cession de droits d’auteur alors qu’elle a encaissé des redevances pour 172.890 euros, ni versé le prix de cession des oeuvres d’art et bibelots, contrairement à ses dires,

-que son préjudice résulte du fait que les maisons d'[Localité 5] ( perte de 800.000 euros ) et d'[Localité 6] ( perte de 2,5 millions d’euros) ont fait l’objet d’adjudications alors qu’elles auraient été vendues de gré à gré à un meilleur prix et qu’il reste devoir des sommes importantes à la banque et à l’administration fiscale et qu’il a été privé de revenus jusqu’à la décision dont appel et l’ordonnance de main-levée de séquestre.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l’action de M.[L]:

L’appelante demande que M. [L] soit déclaré irrecevable à agir en raison de l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt de la Cour de cassation en date du 12 mai 2010 qui a jugé que le litige relevait de l’Institut [8].

L’intimé demande que la fin de non recevoir soit écartée.

L’autorité de la chose jugée interdit que soit soumis à nouveau à une juridiction ce qui a été jugé sous la condition de la triple identité des parties, de la chose demandée et de la cause.

Il résulte des pièces que suite au non paiement par M. [L] de la consignation supplémentaire fixée, et refusant qu’un délai supplémentaire lui soit accordé pour régler cette somme, l’appelante a résilié la convention d’arbitrage.

En effet la société Nest A/S, par courrier en date du 12 août 2013, a indiqué au tribunal arbitral « joindre [sa] lettre de résiliation de la convention d’arbitrage » (« I attach my letter of termination of the agreement [‘] »). La lettre de rupture jointe indiquait notamment « Je dois ainsi résilier la convention d’arbitrage avec effet immédiat » (« I shall therefore terminate the agreement of arbitration with immediate effect »). Le terme ‘terminate’ doit être compris, en français, comme étant une « résiliation ».

La société Nest A/S a également saisi à deux reprises la juridiction danoise les 12 août 2013 (qui a rendu une décision de classement de l’affaire, l’assignation étant irrecevable, confirmée par arrêt de la cour d’appel de Copenhague) et 29 janvier 2014.

L’autorité de la chose jugée par rapport aux arrêts de la cour d’appel de Paris du 21 janvier 2009 et de la cour de Cassation en date du 12 mai 2010 ne peut dès lors être invoquée en l’absence d’identité de cause au regard de ces événements nouveaux qui ont modifié la situation antérieurement reconnue en justice.

Sur la compétence du juge français:

Dès lors, la fin de non recevoir tenant à l’autorité de la chose jugée étant écartée, il y a lieu à nouveau de s’interroger sur la compétence du juge français.

Il n’est pas rapporté la preuve par l’appelante que par fraude, M.[L] aurait refusé de payer la consignation supplémentaire de 80.000 euros fixée par l’Institut [8] alors que la précarité de sa situation résulte de son avis d’imposition (aucun revenu déclaré en 2013) et que les revenus générés par les oeuvres de [S] [J] étaient à cette époque sous séquestre.

Compte tenu de la résiliation de la convention d’arbitrage  par la société Nest A/S qui a, en outre, saisi à deux reprises le tribunal de première instance de Copenhague les 12 août 2013 et 29 janvier 2014 ainsi que la cour d’appel de Copenhague, il y a lieu de considérer qu’elle a renoncé à la compétence de l’Institut [8].

Le règlement (CE) no 44/2001 du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, ci-après ” le règlement Bruxelles I “, est applicable, conformément à l’article 76 de ce texte, à compter du 1er mars 2002.

Il s’applique, selon l’article 1er, § 1, « en matière civile et commerciale et quelle que soit la nature de la juridiction ».

Par deux accords en date du 19 octobre 2005, conclus entre la Communauté européenne et le Royaume du Danemark, il a été décidé que le règlement Bruxelles I devenait applicable dans les relations avec le Danemark le 1er juillet 2007.

Le règlement (UE) no 1215/2012 du 12 décembre 2012 qui lui a succédé, ci-après ” le règlement Bruxelles I bis “, est applicable, quant à lui, aux situations réalisées avant son entrée en vigueur dès lors que l’instance a été introduite après celle-ci soit aux actions intentées depuis le 10 janvier 2015 (CJCE, 13 nov. 1979, Sanicentral, aff. C-25/79), le règlement Bruxelles I continuant de s’appliquer aux actions introduites avant cette date mais postérieurement au 1er mars 2002.

En l’espèce, c’est par exploit en date du 19 décembre 2013 que M. [M] [L] a assigné la société Nest A/S, domiciliée à [Localité 7], au Danemark, devant le tribunal de grande instance de Paris.

En conséquence, le litige entre dans le champ d’application temporel du règlement Bruxelles I ainsi que dans son champ d’application matériel s’agissant de contrats en matière civile et commerciale et territorial eu égard au domicile de la société Nest A/S au Danemark.

Selon l’article 2, § 1, du règlement Bruxelles I, ” les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État membre “. Or, par application de l’article 60 dudit règlement, ” les sociétés et les personnes morales sont domiciliées là où est situé [‘] a) leur siège statutaire “.

Mais conformément à l’article 5, § 1, a), dudit texte, ” une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut être attraite, dans un autre État membre [‘], en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l’obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée “.

Toutefois, en matière de vente d’immeuble et bail, le règlement Bruxelles I énonce dans son article 22, § 1, que ” sont seuls compétents, sans considération de domicile : 1) en matière de droits réels immobiliers et de baux d’immeubles, les tribunaux de l’État membre où l’immeuble est situé “.

Par exploit en date du 9 décembre 2013, M. [M] [L] a saisi le tribunal de grande instance de Paris afin ” d’annuler pour vice du consentement les contrats signés [‘] les 11 juillet et 8 décembre 2006 “.

En ce qui concerne la cession de droits d’auteur et d’artiste, M. [M] [L], cédant, et débiteur de cette obligation, est domicilié en France au [Adresse 3] à [Localité 6] (Alpes-Maritimes), et les enregistrements sont détenus par différents organismes( Sacem, Sacd, éditions Breton, BMG Salabert, Warner Chappel Music, Emi Music France Adami) dont la siège social est à [Localité 11] en France, le lieu d’exécution est donc situé en France, de sorte que la société Nest A/S peut valablement être attraite devant les juridictions françaises, celles-ci étant compétentes pour connaître de l’action en nullité de cette cession.

Concernant la cession d”uvres d’art et de bibelots conclue le 8 décembre 2006, il faut considérer que l’obligation qui sert de base à la demande est le transfert de la propriété des meubles concernés de [S] [J]. M. [M] [L], cédant domicilié en France, étant de nouveau le débiteur de cette obligation, les juridictions françaises sont compétentes pour connaître de l’action en nullité de cette seconde cession.

La promesse de vente conclue le 10 août 2006 porte sur le bien immobilier sis à [Localité 6] (Alpes-Maritimes) et la promesse de bail emphytéotique conclue à cette même date porte sur un bien immobilier sis à [Localité 5] (Bouches-du-Rhône), de sorte que les juridictions françaises sont compétentes.

Le contrat cadre se réfère expressément aux accords séparés qui seront conclus pour l’achat du bien immobilier, le bail emphytéotique et l’achat des droits.

En conséquence, en application du règlement de Bruxelles I, les juridictions françaises sont compétentes pour connaître de l’action en nullité des contrats visés introduite par M. [M] [L].

De plus les parties n’ayant pu obtenir un jugement effectif tant devant la juridiction arbitrale que devant les juridictions étatiques danoises et ce, depuis plus de 13 ans si on se place à la date de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 21 janvier 2009, qui a renvoyé les parties à mieux se pourvoir, il y a lieu de retenir la compétence des juridictions françaises pour connaître du litige relatif à la validité des contrats conclus afin de permettre aux parties de jouir de leur droit à une protection juridictionnelle effective reconnu par les articles 6, §1 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, relatifs respectivement au droit à un procès équitable et au droit à un recours effectif qui impliquent le droit d’obtenir un jugement.

Sur la loi applicable :

Selon l’article 3, § 1 de la convention du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, ci-après « la Convention de Rome » applicable aux contrats conclus après le 1er avril 1991, date de son entrée en vigueur, le contrat est régi par ‘ la loi choisie par les parties ” .

Pour faire écarter l’application de la loi danoise, M.[L] invoque la fraude à la loi.

Elle n’est pas suffisamment caractérisée par les décisions qu’il vise au soutien de cet argument alors que M.[C] a été relaxé des faits d’escroquerie à son encontre par arrêt en date du 5 octobre 2015 de la cour d’appel de Paris, que l’abus de confiance retenu par arrêt en date du même jour de la même cour concerne le détournement de documents remis par M.[L], faits commis postérieurement en juin et septembre 2010 et étrangers à la présente affaire, et que la dernière décision concerne des faits de recel de détournement de séquestre commis également postérieurement en 2008. De même la décision du tribunal correctionnel de Paris en date du 12 juillet 2018 qu’il vise concerne des faits postérieurs de dénonciation calomnieuse commis le 13 septembre 2010.

Toutefois, l’article 3, § 3, de la Convention de Rome indique que lorsque tous les éléments de la situation sont localisés dans un seul État, différent de celui dont la loi est choisie, seront applicables toutes les ” dispositions impératives ” de la loi du pays dans lequel le contrat est localisé. Sont des ” dispositions impératives “, toutes les dispositions auxquelles il est interdit de déroger par contrat (art. 3, § 3 C).

Les dispositions relatives aux vices du consentement constituent des dispositions impératives : les parties ne peuvent à l’évidence pas écarter dans leur contrat les règles sur l’erreur, le dol ou la violence.

En l’espèce, force est de constater que tous les éléments de la situation, à l’exception du siège social de la société Nest A/S, sont localisés en France. Ainsi, tous les contrats ont été négociés et conclus en France. De plus, l’objet de chacun de ces contrats est purement français :

– les droits cédés par contrat du 11 juillet 2006 sont détenus par des sociétés et organismes français ;

– la promesse de vente du 10 août 2006 porte sur un bien immobilier situé à [Localité 6] ;

– la promesse de bail du 10 août 2006 porte sur un bien immobilier situé à [Localité 5] ; et

– les ‘uvres d’art et bibelots cédés par contrat du 8 décembre 2006 sont situés en France.

En conséquence, bien que la loi applicable soit la loi danoise, il convient de faire également application des textes français relatifs aux vices du consentement dans la mesure où ceux-ci sont impératifs dès lors que tous les éléments du litige sont localisés en France.

Sur la prescription:

La prescription de l’action en résolution du contrat en date du 8 décembre 2006 portant sur les oeuvres d’art et les bibelots, est régie par le droit danois.

M.[L] n’a formé de demande en résiliation concernant ce contrat qu’à l’occasion de la présente instance soit le 19 décembre 2013 plus de 7 ans après sa conclusion .

Il n’est pas fait référence dans ce contrat à l’accord cadre en date du 11 juillet 2007 et ce dernier au vu des pièces produites ( aucune des parties ne produit les annexes mentionnées à l’acte) ne s’y réfère pas expressément.

Il résulte de l’affidavit établi par Me Doeren Locher, avocat à la Cour de cassation du Danemark, le 5 octobre 2020, produit par l’appelant mais auquel l’intimé se réfère également, que des contrats conclus à des dates différentes et concernant différents objets ou droits ne sont pas indissociables, qu’ils doivent faire l’objet d’un examen séparé et que le délai de prescription en droit danois est de 3 ans. Si l’on se situe au regard d’un délai raisonnable, notion également utilisée en droit danois, il y a aussi lieu de considérer qu’un délai de 7 ans excède un délai raisonnable pour solliciter la résolution.

Dès lors, il y a lieu de déclarer prescrite l’action en résolution de la cession en date du 8 décembre 2006 portant sur les oeuvres d’art et les bibelots ayant appartenu à [S] [J].

La décision déférée est infirmée de ce chef.

Sur les vices du consentement:

M.[L] expose avoir été victime d’un dol et d’une erreur sur la personne de M.[C], sur les qualités substantielles de la société Nest et sur l’agrément de la banque .

Il sera fait application des articles du code civil français relatifs aux vices du consentement ( les articles 1109 ancien, 1116 ancien pour le dol et 1110 ancien pour l’erreur compte tenu de la date des contrats antérieure au 1er octobre 2016 , date d’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations), comme indiqué ci-dessus.

Il résulte des arrêts de la cour d’appel de Paris du 5 octobre 2015 que M.[L] était entouré, lors de la conclusion des contrats litigieux, de professionnels, M.[B], expert comptable qui l’assistait en matière fiscale, sociale et bancaire et Me [A], avocat spécialisé en propriété artistique et s’était adressé à l’appelante en connaissance de cause pour mettre en place un montage fiscal qu’il considérait comme avantageux alors qu’il avait près de 4 millions d’euros de dettes auprès de la banque Privée Saint Dominique.

Les actes critiqués ont été signés, selon ses propres dires, devant un notaire niçois, tenu d’un devoir de conseil et dont la responsabilité n’a pas été mise en cause par M.[L].

La capacité de financement de l’appelante, la qualification professionnelle de M.[C], les clauses de droit de vote de la société Nest, étaient vérifiables par M.[L] et ses conseils.

Il n’est pas non plus établi que le contrat de travail signé le 30 juin 2006 au profit de l’intimé, prévoyant une rémunération de 60.000 euros par an, n’ait pas eu vocation à s’appliquer.

Sur l’acceptation par la banque du transfert du droit de gage sur les droits d’auteur mentionnée faussement dans le contrat de cession de droits, cette dernière indique dans un courrier en date du 9 novembre 2006 avoir eu comme interlocuteur le conseiller financier de M. [L] et l’ avoir informé que son consentement était subordonné au remboursement de l’ensemble des prêts.

Dès lors, il n’est pas établi que le consentement de M. [L] ait été obtenu par des manoeuvres frauduleuses constitutives d’un dol au sens de l’article 1116 ancien du code civil ni qu’il ait été victime d’une erreur sur la personne de M.[C], sur les qualités substantielles de la société Nest ou sur l’agrément de la banque, de nature à vicier son consentement.

Sur l’absence de cause et de prix et sur les dispositions du droit danois sur la conclusion des contrats:

M.[L] ne rapporte pas la preuve que des dispositions relatives à l’absence de cause ou à la vileté du prix existent en droit danois, loi choisie par les parties.

En se fondant sur l’affidavit du 25 novembre 2014 de Me Winter Plas, avocat au barreau de Copenhague, dont le contenu n’est pas démenti par l’appelante, M.[L] cite les articles de la loi danoise concernant la fraude assimilable au dol, et l’erreur substantielle vis à vis desquels il a déjà été statué au regard de la loi française seule applicable, mais également l’article 31 relatif à l’abus de faiblesse et à l’engagement disproportionné consécutif, sans expliquer en termes précis en quoi il serait applicable à sa situation.

Il résulte de l’article 954 du code de procédure civile que les conclusions doivent formuler expressément les prétentions des parties ainsi que les moyens en fait et en droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée, que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont évoqués dans la discussion.

Il résulte en outre de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 5 octobre 2015 concernant les faits d’escroquerie que M.[L] a été soumis à une mesure d’expertise dans le cadre de l’information judiciaire ouverte et qu’il ne présentait ni d’altération de ses facultés mentales et corporelles au sens de l’article 425 du code civil ni de particulière vulnérabilité due à une déficience physique ou psychique au sens de l’article 223-15-2 du code pénal. Aucune autre pièce n’est produite qui rapporterait la preuve de sa vulnérabilité dont il aurait été abusé étant à nouveau précisé qu’il résulte de la procédure pénale qu’il était entouré et assisté de professionnels lors de la conclusion des contrats litigieux.

Il cite aussi les articles 36 et 33 du code danois concernant les bonnes moeurs et la bonne foi sans préciser en quoi ces dispositions seraient applicables en l’espèce.

S’agissant de moyens qui ne sont pas évoqués de façon précise dans la discussion, il n’y sera pas répondu par la cour.

Sur la résolution des contrats pour inexécution:

La ‘résiliation’ des contrats pour inexécution est prévue en droit danois selon l’affidavit de Me Plas, avocat au barreau de Copenhague, non contredit par l’appelante.

Les parties sont remises dans la situation qui était la leur avant la conclusion du contrat ( ce qui en droit français correspond à la résolution) et des dommages et intérêts peuvent être octroyés ‘ pour des dommages survenus en raison de la confiance de la victime dans le contrat’.

Il n’est pas contesté et résulte du dossier que la société Nest A/S ne s’était pas acquittée du dépôt de garantie de 200.000 euros qui devait être versé dans les 15 jours de l’acte en date du 10 août 2006 et que l’acte authentique de vente de la maison d'[Localité 6] n’a jamais été réitéré devant notaire.

De même la promesse de bail emphytéotique n’a jamais été réitérée comme prévu à l’acte le 30 septembre 2006.

La banque Privée St Dominique, contrairement à ce qui est mentionné dans l’accord cadre, en page 2 et dans l’acte de cession des droits, n’a jamais donné son accord au transfert des biens et des droits de propriété intellectuelle alors qu’elle disposait d’un gage, ni à la substitution de débiteur.

Dès lors il y a lieu de prononcer, en l’absence de prorogation au-delà du 31 mars 2007 (une prorogation jusqu’au 31 mars 2007 résulte de l’acte sous seing privé en date du 23 décembre 2006), la caducité des promesses de vente et de bail en date du 10 août 2006 ainsi que la résolution du contrat de cession de droits de propriété littéraire et artistique, et de l’accord cadre (qui est également caduc en application plus spécifiquement de l’article 11 al 2 dudit accord).

Sur la demande de dommages et intérêts :

Le premier juge a retenu que l’inexécution des conventions a fait perdre à M.[L] une chance de vendre à l’amiable les biens au prix du marché et d’apurer son passif qu’il a évaluée à 2.000.000 euros.

La société Nest A/S soutient qu’elle ne serait pas responsable de l’inexécution des contrats.

Au préalable, il y a lieu de préciser que M.[L], par le jeu de clauses de pondération, était minoritaire au sein de la société Nest A/S, la majorité des droits de vote appartenant à M.[V] [C]. Dès lors il n’avait pas de pouvoir réel au sein de cette société et n’était pas en mesure d’influer sur ses décisions.

La société Nest A/S ne s’est pas acquittée du versement du dépôt de garantie concernant la maison d'[Localité 6] ni a réitéré son consentement devant notaire.

Le 27 avril 2007, Me [K], notaire à [Localité 9], a dressé un PV de carence suite à une sommation adressée à la société de se présenter faite par constat d’huissier en date du 23 mars 2007.

De même, elle n’a pas réitéré son consentement au bail emphytéotique.

Aux termes du contrat de cession des droits d’auteur du compositeur du 8 décembre 2006, elle s’était engagée à prendre en charge les 3 prêts de M. [M] [L] contractés auprès de la banque Privée Saint Dominique. Il résulte du dossier qu’elle n’a pas exécuté son engagement.

Ce n’est qu’à partir de février et mars 2007, soit plusieurs mois plus tard, que suite à l’ inexécution de son engagement par la société Nest A/S, M.[L] a entrepris de faire placer sous séquestre les droits d’auteur perçus.

Il résulte de cette chronologie et des éléments ci-dessus que l’inexécution des contrats est bien imputable à la faute de la société Nest A/S.

La société Nest A/S fait également valoir qu’aucune perte de chance ne lui est imputable. Elle soutient que M.[L] aurait pu solliciter du juge de l’exécution la conversion de l’adjudication en vente amiable.

Cependant à l’époque des ventes aux enchères, les promesses de vente et de bail emphytéotique n’avaient pas été déclarées caduques ce qui faisait obstacle à une vente amiable.

La non réitération de la promesse de vente de la maison d'[Localité 6] au prix de 4.000.000 euros, admis par les parties à l’acte comme étant le prix du marché, a fait perdre à M.[L] une chance de vendre à l’amiable ce bien à ce prix ; il a été adjugé 1.500.000 euros.

La maison d'[Localité 5], objet de la promesse de bail emphytéotique, a été adjugée au prix de 391.000 euros. Aucun élément n’est produit concernant son état et sa valeur au prix du marché.

La perte de chance sera fixée à 80%.

A l’issue de ces ventes, il restait à M.[L] devoir à la banque des sommes importantes pour lesquelles une transaction est finalement intervenue le 30 janvier 2015 ainsi qu’à l’administration fiscale.

Son préjudice peut être évalué à 2.500.000 euros.

Dès lors la décision déférée est confirmée en ce qu’elle a fixé le montant de la perte de chance de M.[L] à 2.000.000 euros .

Il conviendra de fixer à 2.000.000 euros la créance de M.[L] à l’encontre de la  société Nest A/S Under Koncours, représentée par son administrateur, M.[W].

Sur l’article 700 et les dépens:

La décision déférée est confirmée en ce qui concerne les dépens et l’article 700 du code de procédure civile.

A hauteur d’appel, il y lieu de condamner la société Nest A/ S représentée par son administrateur, M.[W] à verser M.[L] une indemnité de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civil ainsi qu’aux dépens qui seront recouvrés par le conseil de la partie adverse conformément aux dispositions de l ‘article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Confirme la décision entreprise, sauf en ce qui concerne la caducité de la cession d’oeuvre d’art et de bibelots, et la condamnation de la société Nest A/ S à restituer les oeuvres d’art et bibelots listés dans ce contrat,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déclare prescrite l’action en résolution concernant la cession d’oeuvre d’art et de bibelots intervenue le 8 décembre 2006,

Fixe à la somme de 2.000.000 euros la créance de M. [L] à l’encontre de la société Nest A/S under Konkurs, représentée par son administrateur, M.[W],

Condamne la société Nest A/ S représentée par son administrateur, M.[W] à verser M.[L] une indemnité de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Nest A/ S représentée par son administrateur, M.[W] aux dépens de l’appel qui seront recouvrés par le conseil de la partie adverse conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires,

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

 


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