Designer : 24 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 20/00279

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Designer : 24 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 20/00279
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4

ARRÊT AU FOND

DU 24 MAI 2023

N°2023/

Rôle N° RG 20/00279 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BFMYB

[R] [C]

C/

[I] [B]

[P] [A]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me TOLLINCHI

Me BOTHY

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 12 Novembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/05239.

APPELANT

Monsieur [R] [C], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Charles TOLLINCHI de la SCP CHARLES TOLLINCHI – CORINNE PERRET-VIGNERON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, (postulant) et ayant pour avocat plaidant, Me Alberto PONTI SIMONIS DI VALLARIO, membre de l’Association PONTI SIMONIS – TERRAZZONI – GIRAUDON NICOLAI, avocats au barreau de NICE,

INTIMEES

Madame [I] [B], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Valérie BOTHY, avocat au barreau de NICE

Madame [P] [A], demeurant [Adresse 1]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 806 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Mai 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :

Madame Michèle JAILLET, Président Rapporteur,

et Madame Nathalie BOUTARD, conseiller- rapporteur,

chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :

Madame Michèle JAILLET, Présidente

Monsieur Jean-Marc BAÏSSUS, Président

Madame Nathalie BOUTARD, Conseillèr

Greffier lors des débats : Mme Patricia CARTHIEUX.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Mai 2023..

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Mai 2023.

Signé par Madame Michèle JAILLET, Présidente et Mme Patricia CARTHIEUX, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [Z] [C], né le à 28 mai 1943 à [Localité 5] (Alpes-Maritimes), a conclu un pacte civil de solidarité le 7 mai 2014 avec Mme [I] [B], née le à 20 juillet 1968 à [Localité 4] (Hauts-de-Seine).

Par testament authentique daté du 12 juin 2013 reçu par Maître [T], notaire à [Localité 5], M. [C] a institué sa partenaire ‘ Mme [B] ‘ légataire de l’universalité de ses biens successoraux à charge pour elle de délivrer un legs particulier au profit de Mme [P] [Y] épouse [A], soit 28% des parts dont il était titulaire au sein du capital de la société VANLO.

Un codicille du testament en date du 15 septembre 2013 a révoqué cette charge liée au legs universel.

M. [C] est décédé le 21 septembre 2014. Il laisse à sa survivance son neveu, M. [R] [C] seul héritier légal appelé en rang utile par ordre et degré conformément aux dispositions des articles 734 et suivants du code civil.

Par ordonnance sur requête rendue par le président du tribunal de grande instance de Nice le 1er décembre 2014, un huissier de justice ‘ Maître [G] [L] ayant succédé à Maître [H] [U] ‘ a été autorisé à se rendre en l’étude de Maître [M] [T], notaire à [Localité 5], afin de se voir remettre le testament de M. [Z] [C] ainsi que le compte-rendu d’interrogation du fichier central des dispositions des dernières volontés.

Par acte d’huissier en date du 6 novembre 2017, M. [R] [C] a assigné Mme [I] [B] et Mme [P] [A] devant le tribunal de grande instance de Nice aux fins d’annulation du testament du 12 juin 2013 rédigé par M. [Z] [C].

Mme [P] [A] n’a pas constitué avocat en première instance.

Par jugement réputé contradictoire rendu le 12 novembre 2019, auquel il convient de se référer pour plus ample exposé des faits et des prétentions des parties, le tribunal de grande instance de Nice a :

– Débouté M. [R] [C] de sa demande d’annulation du testament de M. [Z] [C] en date du 12 juin 2013 et du codicille en date du 15 septembre 2013,

– Débouté M. [R] [C] de sa demande d’expertise médicale,

– Débouté Mme [I] [B] de sa demande de condamnation en dommages et intérêts,

– Débouté M. [R] [C] de sa demande d’exécution provisoire,

– Condamné M. [R] [C] au paiement de la somme de 2.500 euros à Mme [I] [B] en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamné M. [R] [C] aux entiers dépens de l’instance.

Le jugement n’a été, selon les parties, jamais signifié.

M. [R] [C] a interjeté appel de cette décision par déclaration reçue au greffe le 8 janvier 2020.

Par premières conclusions déposées le 22 août 2020, l’appelant a demandé à la cour de :

Vu les dispositions de l’article 909 du Code Civil, Vu les dispositions des articles R. 4321-96 et suivants du Code de la Santé Publique Vu les dispositions de l’article 901 du Code Civil, Vu les pièces versées au débat.

RECEVOIR Monsieur [Z] [C] en son appel et le dire bien fondé,

REFORMER le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

SUR L’INCAPACITE A RECEVOIR DE MADAME [B]

DIRE ET JUGER que Madame [B], en sa qualité de professionnel de santé ayant prodigué des soins à Monsieur [Z] [C], était dans l’incapacité de recevoir de ce dernier.

En conséquence,

DIRE ET JUGER nul et de nul effet le testament en date du 12 juin 2013 et l’ensemble des actes subséquents en ce y compris le codicille du 15 septembre 2013.

SUR L’ALTERATION DES FACULTES MENTALES DE Monsieur [Z] [C]

A TITRE PRINCIPAL

DIRE ET JUGER que les facultés mentales de Monsieur [Z] [C] étaient altérées.

En conséquence,

DIRE ET JUGER nul et de nul effet le testament en date du 12 juin 2013 et l’ensemble des actes subséquents en ce y compris le codicille du 15 septembre 2013.

SUBSIDAIREMENT et si par extraordinaire la Cour ne s’estimait pas suffisamment informée

DESIGNER tel expert psychiatre avec pour mission de :

Se faire remettre l’intégralité des dossiers médicaux de Monsieur [Z] [C] auprès de tous les établissements de santé ayant reçu Monsieur [Z] [C],

Déterminer si lors de l’établissement du testament du 12 juin 2013 , du codicille du 15 septembre 2013 et du PACS du 7 mai 2014, Monsieur [Z] [C] disposait de l’ensemble de ses facultés lui permettant d’avoir une volonté libre et sereine.

SUR LE DOL

Si mieux n’aime la Cour,

DIRE ET JUGER que l’attitude de Madame [B] à l’égard de Monsieur [Z] [C] est constitutive d’un dol pour organisation unilatérale de la succession de ce dernier.

En conséquence,

DIRE ET JUGER nul et de nul effet le testament en date du 12 juin 2013 et l’ensemble des actes subséquents en ce y compris le codicille du 15 septembre 2013.

CONDAMNER Madame [I] [B] à payer à Monsieur [R] [C] la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

LA CONDAMNER aux entiers dépens de l’instance.

Par premières conclusions notifiées les 05, 06 et 07 octobre 2020, Mme [I] [B] a sollicité de la cour de :

Débouter purement et simplement Monsieur [R] [C] de la totalité de ses demandes, fins et conclusions

Confirmer le jugement entrepris sur ces points.

A titre reconventionnel :

Condamner Monsieur [R] [C] au paiement de la somme de 1 euro à titre de dommage et intérêt en réparation du préjudice moral subi par Madame [B].

Condamner Monsieur [R] [C] au paiement de la somme de 6000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du CPC outreles entiers dépens.

Par écritures en réponse transmises le 05 janvier 2021, M. [C] a réitéré ses demandes.

Par demande parvenue le 09 novembre 2022, le conseil de l’appelant a sollicité la fixation du dossier.

Par soit-transmis du 15 décembre 2022, le magistrat de la mise en état a sollicité les observations des parties sur la déclaration d’appel qui ne semble pas comporter d’objet.

Par avis du même jour, le magistrat chargé de la mise en état a informé les parties que l’affaire était fixée à l’audience du 03 mai 2023.

Le conseil de l’appelant a transmis ses observations le 19 janvier 2023 en soulignant que la déclaration d’appel mentionne expressément l’objet de l’appel.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées les 21 et 30 mars 2023, M. [R] [C] a maintenu ses prétentions initiales sauf à y ajouter :

Vu les articles 542 et 954 du Code de procédure civile,

Vu l’article 6, § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,

Vu la jurisprudence de la Cour de cassation du 17 septembre 2020.

Dire que la Cour a été valablement saisie et que la dévolution a joué.

En l’absence de réponse de l’intimée, le magistrat chargé de la mise en état a, de nouveau, interrogé les parties sur la validité de la déclaration d’appel qui ne semble pas comporter d’objet.

Par courrier du 04 avril 2023, le conseil de l’appelant, a indiqué que si l’appel total n’opère désormais aucune dévolution, ce serait uniquement en raison de l’absence de mentions des chefs de jugement expressément critiqués. Il rappelle, en substance, que :

– l’arrêt du 9 juin 2022 de la cour de cassation concerne l’absence de mention des chefs du jugement critiqués et non l’objet de l’appel,

– Plusieurs cours d’appel ont eu à statuer sur la question de l’absence de mention de l’objet de l’appel sans retenir d’absence d’effet dévolutif,

– l’absence d’objet n’entraîne qu’une éventuelle nullité de l’appel dans le cadre d’un incident, exception qui ne peut pas être soulevée d’office,

-l’arrêt du 17 septembre 2020 ne peut pas s’appliquer car il est postérieur à la déclaration d’appel de M. [C]. Une décision privant d’effet dévolutif la déclaration d’appel aurait pour effet de limiter injustement l’appelant de son droit d’accès au juge garanti par la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. Il estime que si la Cour devait constater l’absence de dévolution, elle méconnaîtrait gravement le droit d’accès au juge.

Le conseil de Mme [B] n’a pas répondu à ce soit-transmis.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 05 avril 2023.

Mme [P] [A], intimée, n’a pas constitué avocat dans la présente procédure.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la qualification de l’arrêt

La déclaration d’appel de M. [R] [C], la constitution du conseil de l’appelant et les conclusions d’appel déposées le 22 août 2020 ont été signifiées à la personne de Mme [P] [A] par exploit extrajudiciaire du 25 août 2020.

Par exploit extrajudiciaire du 31 mars 2023, les dernières conclusions de M. [C] ont été également signifiées à la personne de Mme [P] [A].

En vertu de l’article 474 du code de procédure civile, l’arrêt sera réputé contradictoire.

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées.

Sur l’étendue de la saisine de la cour

Il convient de rappeler qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.

Les demandes de “donner acte” sont dépourvues de tout enjeu juridique et ne constituent pas des prétentions au succès desquels les parties pourraient avoir un intérêt légitime à agir au sens de l’article 4 du code de procédure civile.

Ne constituent pas par conséquent des prétentions au sens de l’article sus-cité du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir “constater” ou “donner acte” ou encore à “prendre acte” de sorte que la cour n’a pas à y répondre.

Il n’y a donc pas lieu de reprendre ni d’écarter dans le dispositif du présent arrêt les demandes tendant à “constater que” ou “dire que ” telles que figurant dans le dispositif des conclusions des parties, lesquelles portent sur des moyens ou éléments de fait relevant des motifs et non des chefs de décision devant figurer dans la partie exécutoire de l’arrêt.

L’article 9 du code de procédure civile dispose qu’”il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention” et que l’article 954 du même code, dans son alinéa 1er, impose notamment aux parties de formuler expressément ses prétentions et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée “avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et leur numérotation”.

Par ailleurs l’effet dévolutif de l’appel implique que la cour connaisse des faits survenus au cours de l’instance d’appel et depuis le jugement déféré et statue sur tous les éléments qui lui sont produits même s’ils ne se sont révélés à la connaissance des parties qu’en cours d’instance d’appel.

Sur la déclaration d’appel

L’article 542 du code de procédure civile dispose que “L’appel tend à faire réformer ou annuler par la cour d’appel un jugement rendu par une juridiction du premier degré.”

L’article 562 du même code précise que “L’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible”.

La déclaration d’appel de M. [R] [C] reçue au greffe le 8 janvier 2020 est ainsi rédigée:

“Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués en ce qu’il a : Débouté Monsieur [E]/[X] de l’appel : [R] [C] de sa demande d’annulation du testament de Monsieur [Z] [C] en date du 12 juin 2013 et du codicille en date du 15 septembre 2013 Débouté Monsieur [R] [C] de sa demande d’expertise médicale Condamné Monsieur [R] [C] au paiement de la somme de 2500 euros à Madame [B] en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile Condamné Monsieur [R] [C] aux entiers dépens de l’instance”.

Cette déclaration d’appel ne précise toutefois pas s’il est demandé la réformation ou l’annulation de la décision attaquée, à savoir le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nice.

Contrairement à ce qu’évoque le conseil de l’appelant, l’objet de l’appel est très clairement exigé à l’article 562 du code de procédure civile tel que combiné à l’article 542 du même code. Il n’existe aucune limitation du droit d’accès au juge de l’article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme en pareille situation puisque M. [R] [C] était libre de rédiger une déclaration d’appel rectificative dans le délai imparti.

Si la portée de l’appel est définie en listant les chefs visés dans la déclaration de M. [C], en revanche l’objet de l’appel n’est pas précisé, de sorte que la cour ne peut pas statuer faute de dévolution.

Aux termes des dispositions de l’article 562 du code de procédure civile, seul l’acte d’appel emporte dévolution des chefs critiqués de l’ordonnance.

L’absence d’objet dans la déclaration d’appel reçue le 8 janvier 2020 fait que cette dernière n’a pas opéré d’effet dévolutif au profit de la cour, contrairement aux prescriptions des articles 542 et 562 du code de procédure civile.

En conséquence, il y a lieu de juger que la déclaration d’appel n’a pas opéré d’effet dévolutif.

Sur l’appel incident

L’article 550 du code de procédure civile dispose que “Sous réserve des articles 905-2,909 et 910, l’appel incident ou l’appel provoqué peut être formé, en tout état de cause, alors même que celui qui l’interjetterait serait forclos pour agir à titre principal. Dans ce dernier cas, il ne sera toutefois pas reçu si l’appel principal n’est pas lui-même recevable ou s’il est caduc.

La cour peut condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de former suffisamment tôt leur appel incident ou provoqué”.

En application des dispositions de l’article 550 du code de procédure civile, la recevabilité de l’appel incident est subordonnée à celle de l’appel principal.

En l’espèce, Mme [B] n’a formé aucun appel incident.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

M. [R] [C], qui succombe, supportera les dépens d’appel et doit être être débouté de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

M. [R] [C], sera condamné à payer à Mme [I] [B] la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

M. [C] sera débouté de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Juge dépourvue d’effet dévolutif la déclaration d’appel de M. [R] [C] reçue au greffe le 08 janvier 2020,

Condamne M. [R] [C] aux dépens d’appel,

Condamne M. [R] [C] à payer à Mme [I] [B] la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Déboute M. [C] de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

Signé par Madame Michèle Jaillet, présidente, et par Madame Patricia Carthieux, greffière, auxquelles la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

la greffière la présidente

 


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