Designer : 19 janvier 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/06302

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Designer : 19 janvier 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/06302
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AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 20/06302 – N° Portalis DBVX-V-B7E-NHPJ

[M]

C/

S.E.L.A.R.L. [D]

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE CHALON SUR SAONE

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MONTBRISON

du 13 Octobre 2020

RG : 19/00094

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 19 JANVIER 2023

APPELANT :

[C] [M]

né le 06 Mai 1990 à [Localité 5]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représenté par Me Karim MRABENT, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMÉES :

S.E.L.A.R.L. [D] Mandataire liquidateur de la SARL SAINT ETIENNE AUSTRALIA

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Célia DUMAS de la SELARL LEX LUX AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE CHALON SUR SAONE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Jean-bernard PROUVEZ de la SELARL CARNOT AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Evanna IENTILE, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Octobre 2022

Présidée par Etienne RIGAL, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Elsa SANCHEZ, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

– Etienne RIGAL, président

– Thierry GAUTHIER, conseiller

– Vincent CASTELLI, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 19 Janvier 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Etienne RIGAL, Président et par Jihan TAHIRI, Greffière placée auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS ET PROCEDURE

La société SAINT ETIENNE AUSTRALIA , a été immatriculée au RCS de SAINT ETIENNE le 5 février 1999.

Cette société avait pour activité l’achat et la vente de tous objets, notamment d’occasion, et l’achat et la vente de bijoux d’occasion en métaux précieux sous l’enseigne P-CASH.

Il résulte des statuts de la dite société que Monsieur [I] [M] en était le gérant désigné.

Monsieur [C] [M], par ailleurs fils de ce gérant, était engagé, suivant contrat à durée déterminée, par cette société, en qualité de vendeur à temps partiel, soit 20 heures par semaine, à compter du 28 juillet 2008 et jusqu’au 30 août 2008.

Un contrat à durée indéterminée était conclu entre ces mêmes parties, à compter du 25 janvier 2011, pour ce même emploi de vendeur, cela à hauteur de 4 heures par semaine, le samedi.

Suivant avenant du 27 juin 2014, la durée hebdomadaire du dit travail était portée à 7,5 heures hebdomadaires à compter du 1er juillet 2014.

Suivant avenant du 26 juillet 2014, et pour Ia période du 28 juillet 2014 au 10 août 2014, la durée du travail était portée à 35 heures hebdomadaires, en raison du remplacement d’un salarié absent, étant en congés.

Suivant avenant conclu le 5 décembre 2015, la durée du travail était portée à 20 heures par semaine, à compter du 16 décembre 2015.

II était mis fin à ce contrat de travail.

Par un nouveau contrat à durée déterminée en date du 1er septembre 2016, Monsieur [C] [M] était engagé pour une durée de 6 mois par la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA, en qualité de vendeur.

Ce contrat de travail stipulait que Monsieur [C] [M] effectuerait 30 heures de travail hebdomadaire pour une rémunération brute horaire de 9,67 €. La fin du contrat de travail était prévue le 28 février 2017.

Un nouveau contrat à durée détermine de 6 mois était conclu entre les parties Ie 16 mars 2017 cela jusqu’au 31 août 2017.

ll y était convenu que Monsieur [C] [M] percevrait une rémunération brute horaire de 9,76 € pour 30 heures de travail par semaine.

Monsieur [M] était enfin engagé en contrat à durée indéterminée par la société SAINT-ETIENNE AUSTRALIA à compter du 18 septembre 2017, en qualité de vendeur, 30 heures de travail par semaine pour une rémunération brute horaire de 9,76 €.

Par avenant en date du 2 février 2018, Ia durée du travail était abaissée à 10 heures de travail par semaine à compter du 18 février 2018.

La société SAINT ETIENNE AUSTRALIA était placée en redressement judiciaire, suivant décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ETIENNE du 19 décembre 2018.

La SELARL [D] en était désignée mandataire judiciaire.

La société SAINT ETIENNE AUSTRALIA faisait I’objet d’une décision de liquidation judiciaire, suivant jugement du Tribunal de Commerce de SAINT-ETIENNE du 15 mai 2019.

La SELARL [D] en était designer mandataire liquidateur.

Par lettre du 29 mai 2019 de la SELARL [D], Monsieur [C] [M] était licencié pour motif économique.

Il était dispensé de l’exécution du préavis.

Par requête reçue au greffe le 18 novembre 2019, Monsieur [C] [M] faisait convoquer la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA à comparaître devant le Conseil de Prud’hommes de Montbrison et cela au titre d’une demande en paiement de salaires, de l’indemnité de préavis, outre congés payés afférents, de l’indemnité de licenciement.

Le 13 octobre 2020, le dit conseil rendait un jugement dont le dispositif était rédigé pour l’essentiel comme suit:

‘Déboute Monsieur [C] [M] de l’ensemble de ses demandes,

Déboute la SELARL [D] (…) de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne Monsieur [C] [M] aux entiers dépens de l’instance.’

Le 11 novembre 2020, Monsieur [C] [M] formait appel de ce jugement.

Au terme de ses dernières écritures notifiées le14 mars 20021, Monsieur [C] [M] demande à la cour de:

– Déclarer recevable et bien fondées ses demandes,

– Rejetter toute demande plus ample ou contraire,

– lnfirmer la décision dont appel,

Par conséquent,

– Fixer ses créances au passif de la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA aux sommes suivantes:

– Rappel de salaire ………………………………………………………….. .. 13.055,90 € net

Congés payes sur rappel de salaire ………………………………….. .. 1.305,59 € net

– indemnité compensatrice de préavis (2 mois) ………………………. .. 869,20 € brut

– indemnité de conges payes sur préavis ………………………………… .. 86,92 € brut

– indemnité de licenciement ……………………………………………………….. .. 289,73 €

– Ordonner la remise par la SELARL [D] es qualité d’un bulletin de salaire en conséquence du jugement, d’une attestation destinée au POLE EMPLOI et d’un certificat de travail.

Mais encore,

– Condamner la SELARL [D], aux entiers dépens.

Au termes de ses écritures notifiées le 8 mars 2021, la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA, prise en la personne de son mandataire liquidateur demande à cette juridiction de :

– Débouter Monsieur [C] [M] de l’intégralité de ses demandes.

– Le Condamner à verser à la SELARL [D], représentée par Maître [D] es qualité de mandataire liquidateur de la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Au terme de ses conclusions notifiées le 12 mars 2021, L’UNEDIC délégation AGS-CGEA DE [Localité 3] conclut à ce qu’il plaise à la Cour de :

– Confirmer le jugement entrepris,

– Subsidiairement minimiser les sommes octroyées à Monsieur [C] [M] ,

En toute hypothèse,

– Dire et juger que la garantie de l’AGS-CGEA DE [Localité 3] n’intervient qu’à titre subsidiaire, en l’absence de fonds disponibles,

– Dire et juger que l’AGS-CGEA DE [Localité 3] ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L. 3253-8 du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des articles L. 3253-20, L. 3253-19 et L. 3253-17 du code du travail ,

– Dire et juger que l’obligation de L’AGS CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des éventuelles créances garanties, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé de créance par le mandataire judiciaire, et sur justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l’article L 3253-20 du code du travail,

– Dire et juger que l’AGS CGEA de [Localité 3] ne garantit pas les sommes allouées sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ou au titre de la liquidation d’une éventuelle astreinte.

– Dire et juger L’AGS CGEA DE [Localité 3] hors dépens.

Il sera renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties aux conclusions, susvisées, qu’elles ont déposées et, ce, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur l’existence d’un contrat de travail

Au terme des motifs du jugement déféré le conseil de prud’hommes a indiqué que :

‘Monsieur [C] [M] a fait le choix de travailler bénévolement afin d’essayer de préserver l’équilibre financier de la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA.’

Ce faisant elle a exclu l’existence d’un lien salarial liant Monsieur [C] [M] et cette entreprise.

Arguments des parties

Monsieur [C] [M] soutient que :

Il n’a nullement fait le choix de travailler bénévolement.

ll parait, en effet, discutable de caractériser l’intention libérale d’un travailleur au regard du seul constat de l’absence de rémunération des tâches qu’il a accomplies.

II a été admis, à propos d’une concubine qui participait à l’exploitation du fonds de commerce de son conjoint, que la seule existence d’une relation de concubinage avec l’empIoyeur, exploitant d’un fonds de commerce, ‘ne saurait exclure I’existence d’un lien de subordination à son égard’.

Pour la jurisprudence, une telle entraide ne doit pouvoir être caractérisée que dans Ie cas où Ia prestation de travail est accomplie de manière occasionnelle et spontanée, dans un but, nécessairement désintéressé, d’assistance ou de solidarité.

A défaut, la prétendue relation d’entraide ne peut être qualifiée que de contrat de travail.

Tel est bien le cas en l’espèce, puisque il avait des contrats de travail et fiches de paye ce qui démontent que les parties n’ont nullement entendu que la relation contractuelle serait bénévole.

Il n’était pas le gérant de Ia holding [M] DEVELOPPEMENT.

Comme pourra Ie constater la Cour, il est devenu le gérant de cette société, suivant procès-verbal d’AGO du 30 septembre 2019.

De plus et tel que cela ressort de ce procès-verbal, Monsieur [C] [M] n’était nullement propriétaire d’une quelconque part sociale dans la société.

Ce changement postérieur de gérance et Ia production d’un extrait KBis à jour expliquent pourquoi le Conseil de Prud’hommes a été trompé par Ies parties adverses sur la réalité de la situation au moment des faits.

La partie intimée répond que:

Monsieur [C] [M] prétend ne pas avoir perçu de rémunération, ou de rémunération entière, à compter du mois de décembre 2016.

Or, il apparaît que Maître [D] n’a été désigné aux fonctions de liquidateur judiciaire qu’à compter du 15 mai 2019.

Il n’échappera pas à la Cour la multiplicité des contrats de travail conclu et la confusion totale du statut de ce salarié.

Monsieur [C] [M] a signé pas moins de huit contrats et avenants avec la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA. Ce nombre de signatures avec des variations conséquentes de durée et de statut (CDD multiples et / ou CDI) pose nécessairement question.

Monsieur [C] [M] invoque une prétendue défaillance de paiement de sa rémunération dès décembre 2016.

Par conséquent, il est étonnant de voir que ce dernier a continué de travailler et a même accepté de signer un nouveau contrat de travail à durée déterminée le 1er avril 2017.

De plus, malgré les prétendues difficultés rencontrées pour percevoir sa rémunération depuis plus de neuf mois, Monsieur [C] [M] n’a pas hésité à signer encore un nouveau contrat à durée indéterminée avec la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA le 1 er septembre 2017.

Enfin, le 2 février 2018, Monsieur [C] [M], va, une fois de plus, signer un avenant à son contrat de travail pour réduire son nombre d’heures à hauteur de 10 heures de travail par semaine.

Il existe également une réelle difficulté factuelle à la réalisation des prétendues heures de travail au sein de la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA.

En effet, Monsieur [C] [M], exerçait une autre activité en qualité d’actionnaire et de gérant de la société B&H.

Il était donc fort occupé par cette activité dans cette société qu’il gérait.

Il a d’ailleurs publié sur son réseau social les multiples soirées organisées par ses soins dans cet établissement de nuit.

Il était en effet tout à la fois organisateur et même le DJ principal de ce pub-discothèque.

Parmi ses nombreuses publications, Monsieur [C] [M] fait notamment la promotion de soirées en date du 13 janvier, du 23 et du 9 décembre 2018 mais également du 11 novembre 2017 où il précise qu’il sera « samedi aux platines à partir de 2h00 ».

Il est impensable que Monsieur [C] [M] puisse ainsi cumuler tout à la fois un emploi de vendeur au sein de la société AUSTRALIA SAINT ETIENNE qui était prétenduement de 30 heures par semaine selon les contrats de travail fournis, et tout à la fois gérer, animer une discothèque et également occuper des fonctions de disque jockey. Il résulte également des pièces produites qu’il est chargé, pour cet établissement dont il est propriétaire et qui a « entre 6 et 9 salariés », de l’organisation de l’ensemble de la communication et des soirées.

Il est ainsi impensable qu’il réalise de tels horaires de travail sur des amplitudes impossibles à cumuler en réalité.

Il ne produit d’ailleurs aux débats aucun planning, et aucune pièce de nature à démontrer de la réalité de ces heures de travail prétendument réalisées.

Par ailleurs, il est étonnant de constater que celui-ci ne produit aucun courrier ou réclamation qu’il n’aurait pourtant pas manqué d’adresser à son « employeur » s’il n’avait pas été rémunéré pendant plus de 2 ans’ !

Il a encore attendu décembre 2019 pour saisir la juridiction prud’homale de ses prétendues demandes de rappels de salaire au terme d’une requête.

Monsieur [C] [M] ne justifie donc aucunement de la réalité de ses prestations de travail au sein de la société AUSTRALIA SAINT ETIENNE. Bien au contraire, il s’agit donc vraisemblablement d’une prestation de travail fictive.

L ‘AGS CGEA de [Localité 3] ajoute que :

la Cour observera que Monsieur [C] [M] était simultanément :

– Le fils du supposé dirigeant de la société,

– L’actionnaire et le dirigeant de la société [M] DEVELOPPEMENT, holding

détenant la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA.

Cet état de fait et de droit n’est pas compatible avec l’existence d’un véritable lien de subordination.

En deuxième lieu, il est manifeste que :

Monsieur [C] [M] a eu un nombre de contrats de travail absolument incalculable avec des avenants dont l’authenticité est susceptible d’être discutée,

Simultanément, Monsieur [C] [M] aurait rencontré des difficultés de paiement depuis 2016 de son salaire.

Cet état de fait n’est pas compatible avec la réalité de la situation d’un salarié qui ne peut tolérer de telles difficultés de paiements à les supposer établies et pour autant renouveler tant les contrats de travail que les avenants.

En troisième lieu, Monsieur [C] [M] était, concomitamment à ses supposées fonctions de

salarié, dirigeant de la société B & H.

Cette situation témoigne de l’absence de réalisation d’une prestation de travail pour la société

SAINT ETIENNE AUSTRALIA.

En dernier lieu, il est manifeste que nonobstant ces éléments de fait et de droit Monsieur [M] ne justifie nullement de ses prestations de travail et du lien de subordination du supposé employeur.

Sur ce

A titre liminaire, il sera observé que Monsieur [C] [M] n’est devenu gérant de la soiciété [M] DEVELOPPEMENT que le 30 septembre 2019, soit après avoir été licencié par le mandataire de la société AUSTRALIA SAINT ETIENNE.

L’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles s’est exercée l’activité du travailleur.

C’est à la partie qui invoque l’existence d’une relation salariale d’apporter la preuve de ci, c’est-à-dire d’une activité exercée sous la subordination du prétendu employeur.

Cependant, il sera rappelé qu’en présence d’un contrat de travail apparent il revient à celui qui invoque son caractère fictif d’en rapporter la preuve (Soc 25/10/90 88-12868).

Or, Monsieur [C] [M] produit aux débats de nombreux contrats de travail écrits ou avenants, à durée déterminé ou indéterminée, formés avec la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA.

A ce titre, il sera considéré que cette multiplicité peut être justifiée par les modifications que ces conventions apportaient, notamment quant à la durée du travail convenue. Elle n’induit pas que ces écrits n’étaient pas sincères.

Il produit également copie de bulletins de paye mensuels, pour des périodes courant du 1er janvier 2016 au 31 mars 2019.

Enfin il dépose des déclarations de commerçants voisins rapportant qu’il a bien eu une activité de vendeur pour le compte de la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA

La présente juridiction ne peut que constater l’existence d’un contrat de travail apparent au vu de ces pièces concordantes.

Il revient donc à la partie intimée et à l’AGS CGEA de [Localité 3] de démontrer le caractère fictif du dit contrat apparent.

Ce caractère fictif ne peut se déduire du fait que l’appelante aurait exercé une autre activité, d’autant que pour l’essentiel ses contrats formés avec la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA ont été stipulés à temps partiel.

Il ne peut pas plus découler de sa qualité de fils du gérant de l’entreprise ou d’associé minoritaire, à supposer ce fait démontré, lesquelles ne sont pas exclusives d’un lien salarial.

Enfin, il ne peut pas plus être démontré par l’absence d’action en paiement des salaires ou par sa présence prolongée dans cette activité, alors qu’il ne percevait pas la rémunération convenue.

La société SAINT ETIENNE AUSTRALIA et l’AGS CGEA de [Localité 3], qui ne produisent aucune pièce de ce chef, aucune preuve de l’absence d’activité de Monsieur [M] au sein de l’entreprise ou de l’absence de subordination, n’apportent ainsi pas la preuve leur incombant du caractère fictif des contrats produit aux débats.

Le jugement, en ce qu’il n’a pas retenu l’existence d’un contrat de travail, inversant la charge de la preuve en présence d’une apparence, sera en cela infirmé.

Sur la demande en paiement de salaires

Monsieur [C] [M] énonce de ce chef que :

Le paiement du salaire constitue une obligation essentielle de l’employeur.

C’est à l’employeur débiteur de I’obligation du paiement des salaires de rapporter la preuve du paiement des salaires afférents au travail accompli.

Depuis un arrêt du 2 février 1999, la délivrance par l’employeur du bulletin de paie n’emporte plus présomption de paiement des sommes mentionnées. L’employeur est donc tenu en cas de contestation de prouver le paiement des salaires notamment par la production de pièces comptables.

L’intimée répond que :

Monsieur [C] [M] ne justifie donc aucunement de la réalité de ses prestations de travail au sein de la société AUSTRALIA SAINT ETIENNE, bien au contraire. Il s’agit donc vraisemblablement d’une prestation de travail fictive.

L ‘AGS CGEA de [Localité 3] ajoute que :

L’article 1329 du Code civil dispose que :

« La novation est un contrat qui a pour objet de substituer à une obligation, qu’elle éteint, une

obligation nouvelle qu’elle crée.

Elle peut avoir lieu par substitution d’obligation entre les mêmes parties, par changement de

débiteur ou par changement de créancier. »

Conformément aux articles 1271 et suivants du Code Civil (devenus 1329 et suivants), la

jurisprudence a jugé que si l’intention de nover ne se présume pas, les juges peuvent la rechercher dans les faits de la cause. L’intention de nover peut être établie par tous les modes de preuve admis par la loi.

Il n’est pas nécessaire que l’intention de nover soit exprimée en termes formels, dès lors qu’elle est certaine et qu’elle résulte soit d’actes positifs non équivoques soit des faits de la cause.

Ayant relevé que la salariée qui était l’épouse du dirigeant, avait, pour aider l’entreprise, renoncé à réclamer le paiement de ses salaires, la CA a pu estimer qu’il y a eu une novation de la créance salariale en créance civile ou commerciale.

Il a notamment été jugé que la novation de la créance salariale en créance civile ou

commerciale était établie en raison des relations personnelles unissant un employeur et un salarié, et de l’implication de ce dernier dans la création de la société, du soutien financier apporté.

Sur ce

Il a déjà été répondu sur l’argument tiré du prétendu caractère fictif de la relation salariale, lequel n’est pas démontré et cela, d’autant qu’il est attesté que Monsieur [C] [M] a bien eu une activité de vendeur pour le compte de la société AUSTRALIA SAINT ETIENNE.

Quant à l’argument tiré de la novation du contrat, il sera rappelé que celle-ci doit être certaine.

Il doit donc être recherché s’il est acquis, sans doute possible, que les parties au contrat et, particulièrement Monsieur [C] [M], ont entendu renoncer définitivement au versement des salaires initialement convenus.

Or, la remise jusqu’en mars 2019 de bulletins de salaires contredit ce fait, comme le fait que des contrats de travail et avenants, de 2016 à 2018, ont bien stipulé un salaire.

Le défaut d’action en paiement et la persistance d’une activité, dans un contexte de relations familiales, ne sauraient suffire à démontrer avec certitude la novation invoquée.

L’existence de créances salariales est ainsi démontrée.

Quant à leur paiement, il sera rappelé que l’article 1353 nouveau du Code civil dispose que:

« Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.»

Il revient bien au débiteur d’une obligation de paiement, ainsi à un employeur débiteur de créances salariales mentionnées par lui même sur des bulletins de salaire, de démontrer qu’il a bien versé les sommes dues ( en ce sens Soc. 2 février 1999, n°96-44.798).

Le liquidateur de la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA , qui a accès à sa comptabilité et, au delà, peut rechercher ses relevés de comptes bancaires ne produit aucune pièce justifiant des paiements déniés par l’appelant.

Il est bien dû par cette société les sommes à titre de salaires, outre congés payés réclamées par celui-ci, non contestées en leur montant, même à titre subsidiaire.

Sur l’indemnité de préavis

Arguments des parties

De ce chef, Monsieur [C] [M] énonce que :

La convention collective du commerce de détail non alimentaire prévoit un préavis de 2 mois pour les salaries niveau 1 à0 5, après deux ans d’ancienneté.

Il bénéficiait d’une ancienneté de 2 ans et 8 mois lors de son licenciement.

Dans la lettre de licenciement, le mandataire- liquidateur lui indiquait qu’il était dispensé d’effectuer son préavis.

N’ayant pas et payé de son préavis, il est bien fondé à solliciter le versement d’une indemnité compensatrice à ce titre.

La société SAINT ETIENNE AUSTRALIA, ainsi que l ‘AGS CGEA de [Localité 3] répondent que :

Monsieur [C] [M] sera débouté de cette demandes en raison de la facticité de son emploi.

De plus, la Cour constatera qu’il ne peut percevoir d’indemnité compensatrice de préavis ainsi que des congés payés afférents, puisqu’il a accepté de bénéficier du contrat de sécurisation professionnelle.

Sur ce

L’article L.1233-67 du code du travail dispose que :

‘L’adhésion du salarié au contrat de sécurisation professionnelle emporte rupture du contrat de travail. Toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif se prescrit par douze mois à compter de l’adhésion au contrat de sécurisation professionnelle. Ce délai n’est opposable au salarié que s’il en a été fait mention dans la proposition de contrat de sécurisation professionnelle.

Cette rupture du contrat de travail, qui ne comporte ni préavis ni indemnité compensatrice de préavis ouvre droit à l’indemnité prévue à l’article L. 1234-9 et à toute indemnité conventionnelle qui aurait été due en cas de licenciement pour motif économique au terme du préavis ainsi que, le cas échéant, au solde de ce qu’aurait été l’indemnité compensatrice de préavis en cas de licenciement et après défalcation du versement de l’employeur représentatif de cette indemnité mentionné au 10° de l’article L. 1233-68. Les régimes social et fiscal applicables à ce solde sont ceux applicables aux indemnités compensatrices de préavis.’

Or, le liquidateur de la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA produit aux débats une pièce numérotée 17, ‘Attestation CSP’, justifiant de l’adhésion de Monsieur [C] [M] à ce dispositif exclusif du versement de l’indemnité de préavis sollicitée.

La demande de ce chef sera rejetée.

Sur l’indemnité de licenciement

De ce chef, Monsieur [C] [M] énonce que :

Il bénéficiait d’une ancienneté de 2 ans et 8 mois Iors de son licenciement.

ll a perçu ou aurait dû percevoir Ies salaires suivant :

La somme de 5.130,30 € brut au titre des 12 derniers mois soit une moyenne de 427,53 €.

La somme de 1.303,80 € au titre des 3 derniers mois soit une moyenne de 434,60 €.

Il y a donc lieu de retenir la somme de 434,60 € comme base de calcul de l’indemnité

de licenciement.

Sa créance de ce chef et sur cette base s’arrête à la somme de 289,73 €.

La société SAINT ETIENNE AUSTRALIA, ainsi que l ‘AGS CGEA de [Localité 3] répondent que

Monsieur [C] [M] sera débouté de ces demandes en raison de la facticité de cet emploi.

Il est évident que Monsieur [C] [M], dirigeant de fait, a ‘uvré pour obtenir une indemnisation maximale dans le cadre de la procédure collective de sa propre entreprise.

A titre subsidiaire, Monsieur [C] [M] a reçu une somme de 316.17€ au titre de son indemnité de licenciement pour motif économique.

Sur ce

Dès lors qu’il a été jugé que l’emploi de Monsieur [C] [M] n’était pas fictif, il est bien créancier d’une indemnité de licenciement pour la somme sollicitée, non contestée en son montant et justement calculée sur la base du salaire moyen des 3 derniers mois ( soit 434,60 euros).

Le bulletin de salaire du mois de mai 2019, versé aux débats par le mandataire liquidateur de la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA fait mention d’une indemnité due s’élevant à une somme supérieure, soit 316,17 euros.

Mais rien ne démontre que cette somme a bien été versée et elle sera inscrite au passif de la liquidation de cette société, en deniers ou quittance.

Sur la remise de documents sociaux

Monsieur [C] [M] a d’ores et déjà reçu les bulletins de paie afférents aux salaires objets de l’inscription au passif de cette société, liquidés plus avant.

Le bulletin de paie de mai 2019 qu’ il conteste avoir reçu est produit aux débats et est donc en sa possession de ce fait.

Cette demande sera rejetée.

Sur les dépens et frais irrépétibles

La société SAINT ETIENNE AUSTRALIA succombant supportera les dépens de première instance et d’appel; elle succombera en sa demande reconventionnelle fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par arrêt prononcé par sa mise à disposition au greffe,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de MONTBRISON le 13 octobre 2020,,

Statuant à nouveau,

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA les créances suivantes dues à Monsieur [C] [M] :

– 13.055,90 € à titre de rappel sur salaires, outre 1 305,59 € de congés payés afférents,

– En deniers ou quittance, 289,73 €.d’indemnité de licenciement,

Dit que l’UNEDIC délégation AGS CGEA de CHALON SUR SAONE devra sa garantie dans les limites et conditions prévues par la loi,

Rejette les autres ou plus amples demandes,

CONDAMNE La SELARL [D] en la personne de Maître [P] [D] en qualité de mandataire judiciaire de la liquidation de la société SAINT ETIENNE AUSTRALIA aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

 


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