Contrefacon de musique
Contrefacon de musique
Ce point juridique est utile ?

Mise à disposition de musique sans autorisation

La Cour de cassation vient de confirmer la condamnation d’un site internet qui diffusait au public, sans les autorisations requises, des enregistrements d’oeuvres musicales d’artistes de variété nationale ou internationale. Les titres en cause figuraient au répertoire de la société des producteurs de phonogrammes en France (SPPF) et de la société civile des Producteurs Phonographiques (SCPP). Ils étaient diffusés en ligne grâce à un système d’indexation via des liens hypertextes et d’un moteur de recherche permettant de trouver les phonogrammes par le nom de l’artiste ou de l’oeuvre, puis de les écouter. Le site mettait également à disposition du public un logiciel dénommé “radioblog” permettant de constituer sa propre liste, de l’écouter, de la partager et de la transférer sur un site ou un blog personnel.

Lourdes condamnations

Les dirigeants de la société exploitant le site se sont rendus coupables d’avoir, sans autorisation de l’artiste interprète ou du producteur de phonogrammes, communiqué ou mis à disposition du public, a titre gratuit, des phonogrammes. A également été sanctionné, le fait de proposer en téléchargement, un logiciel manifestement destiné à la mise à disposition du public, non autorisée, d’oeuvres protégées. Le délit a été sanctionné par neuf mois d’emprisonnement avec sursis, 10 000 euros d’amende, une dissolution de la société et une confiscation des sommes perçues. En matière pénale, l’intention coupable est impérative, elle a été admise car les prévenus, professionnels dans un domaine très spécialisé, ne pouvaient ignorer la nécessité de s’assurer au préalable du respect des droits des ayants droits, avant de permettre la diffusion des oeuvres au public.

Fonctionnement du Site

Tout internaute avait la possibilité, gratuitement, en accédant librement a la page d’accueil du site, de rechercher et d’écouter, dans leur intégralité, les phonogrammes de son choix, en inscrivant et recherchant dans une fenêtre du site, soit un nom d’artiste, soit un titre d’oeuvre, qu’il lui était également loisible de constituer sa propre liste de morceaux selon ses goûts, puis de l’écouter ou de la transférer par mail ou sur un blog. Lorsque le nom d’un artiste était affiché, apparaissait un choix important de phonogrammes de celui-ci, ou, lorsqu’un titre était sélectionné, plusieurs de ses autres créations, avec, à chaque fois, la possibilité d’écouter soit un morceau soit plusieurs, que l’accès à un titre permettait de voir apparaître une liste de phonogrammes de l’artiste recherché mais aussi d’autres auteurs, lesquels figuraient effectivement sur des “ playlists “ qui étaient alors automatiquement diffusées, à moins, pour l’internaute, d’interrompre la lecture ou de choisir d’autres morceaux ou de revenir à la page d’accueil pour d’autres choix.

Le moteur de recherche et la base de données du site, qui donnaient accès aux “ playlists “ constitués par la grande majorité des internautes (le référencement de la liste étant automatique sauf manoeuvre expresse), offraient pour tout internaute, donc au public, une grande variété de choix de phonogrammes.

Notion de mise à disposition de musique

En concevant les sites et logiciels concernés, les prévenus avaient, peu important les modalités techniques nécessaires pour ce faire, entendu permettre au public d’accéder à des oeuvres qu’ils savaient protégées. Le fait que les phonogrammes aient été diffusés en intégralité mais avec une qualité d’écoute moindre que les CD ou MP3 ne remet pas en cause la notion de mise à disposition du public, d’oeuvres protégées, ces droits ne se voyant pas modifiés ou suspendus en fonction du niveau qualitatif de l’écoute du phonogramme.

Pourquoi le statut d’hébergeur a été exclu ?

Le Site n’a pas été considéré comme un prestataire d’hébergement assurant, pour mise à disposition du public, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons, de messages. Il ne pouvait se prévaloir de la qualité d’hébergeur au sens de l’article 6-1-2 de la loi du 9 juillet 2004 (LCEN) en raison des fonctionnalités proposées aux internautes (créer et modifier des contenus accessibles, en l’occurrence des “ playlists “). Le Site, en offrant une capacité d’action sur les contenus accessibles, allant bien au-delà de la simple structuration ou classification des informations mises à la disposition du public.

Streaming et téléchargement : un même régime juridique

Les juges ont rappelé que le délit de mise à disposition illicite de musique est applicable même s’il n’y a pas eu de téléchargement de phonogrammes. En effet, le législateur n’a pas expressément limité l’application de l’article L. 335-2-1 du code de la propriété intellectuelle, à cette modalité technique. Le streaming est concerné dès lors qu’il aboutit aux mêmes résultats.

Sanctions et dommages et intérêts

La sanction est exceptionnelle : les juges ont confirmé la peine de fermeture définitive de la société exploitant le site et a prononcé la confiscation des sommes figurant au crédit de ses comptes bancaires. La société exploitant le Site avait généré des recettes publicitaires de 403 286 euros (2006) et 686 469 euros (2007). . L’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle prévoit que, pour fixer les dommages intérêts, la juridiction prend en considération les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner, subies par la partie lésées, les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits.

Sur les conséquences économiques négatives, les juges ont retenu que le Site mettait en péril la création artistique, la production musicale et la survie même des auteurs et des artistes-interprètes. La prolifération de la contrefaçon sur internet a entraîné, en outre, des conséquences sur l’emploi dans le domaine du disque. Le succès remporté par le site ayant compté plus de 20 millions de visites par mois s’est traduit par un manque à gagner pour les titulaires des droits.

Mots clés : Contrefacon de musique

Thème : Contrefacon de musique

A propos de cette jurisprudence : juridiction :  Cour de cass. ch. crim. | Date : 25 septembre 2012 | Pays : France


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