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N° RG 19/03658 – N° Portalis DBV2-V-B7D-IJDE
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 16 JUIN 2022
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE ROUEN du 12 Août 2019
APPELANTS :
S.A.R.L. VERNAKA
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Jerôme DEREUX de la SELARL CARNO AVOCATS, avocat au barreau de ROUEN substitué par Me Cyrielle CAZELLES, avocat au barreau de SENLIS
Me [S] [L] (SCP LEHERICY-[S]) – Mandataire judiciaire de la S.A.R.L. VERNAKA
[Adresse 4]
[Localité 6]
représenté par Me Jerôme DEREUX de la SELARL CARNO AVOCATS, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Cyrielle CAZELLES, avocat au barreau de SENLIS
INTIMEES :
Madame [U] [X]
[Adresse 2]
[Localité 7]
représentée par Me Michel ROSE de la SELARL DPR AVOCAT, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Eléonore LAB SIMON, avocat au barreau de ROUEN
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA [Localité 8]
[Adresse 3]
[Localité 8]
représentée par Me Guillaume DES ACRES DE L’AIGLE de la SCP BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 04 Mai 2022 sans opposition des parties devant Madame BERGERE, Conseillère, magistrat chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente
Madame BACHELET, Conseillère
Madame BERGERE, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme DUBUC, Greffière
DEBATS :
A l’audience publique du 04 Mai 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 16 Juin 2022
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 16 Juin 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [U] [X] a été engagée en qualité de responsable de magasin par la SARL Vernaka exploitant un magasin de prêt à porter féminin sous l’enseigne ‘Promod’ situé à [Localité 17] par contrat de travail à durée indéterminée du 20 mars 2006 à effet au 29 mars 2006.
Les relations contractuelles des parties étaient soumises à la convention collective nationale du commerce de détail, de l’habillement et des articles textiles.
Mme [X] a été placée en arrêt maladie à compter du 26 février 2015.
Le 16 juin 2015, le médecin du travail a déclaré Mme [X] inapte à tout poste dans l’entreprise.
Le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement a été notifié à la salariée le 30 juin 2015.
Par requête initiale du 3 mars 2016 réinscrite le 28 mars 2018 après radiation, Mme [X] a saisi le conseil de prud’hommes de Rouen en contestation de son licenciement, ainsi qu’en paiement de rappels de salaire et d’indemnités.
Par jugement du 12 août 2019, le conseil de prud’hommes a dit que la classification de Mme [X] est celle de cadre, catégorie C, de la convention collective du commerce de détail, de l’habillement et articles textiles, en conséquence, condamné la SARL Vernaka au paiement de la somme de 2 359,23 euros au titre de l’indemnité de licenciement conventionnelle prévue pour un cadre de catégorie C, condamné la SARL Vernaka à verser à Mme [X] les rappels de salaires subséquents :
– pour l’année 2011 : 14 031,40 euros,
– pour l’année 2012 : 15 327,21 euros,
– pour l’année 2013 : 18 268,14 euros,
– pour l’année 2014 : 17 867,42 euros,
– pour l’année 2015 : 9 039,67 euros,
outre la somme de 7 456,49 euros à titre de conges payes afférents,
-dit que le licenciement de Mme [X] est dénué de toute cause réelle et sérieuse en raison du comportement fautif de l’employeur, en conséquence, condamné la SARL Vernaka au paiement des sommes suivantes :
dommages et intérêts en raison de la violation de l’obligation de résultat édictée par l’article L. 4121- 1 du code du travail : 5 000,00 euros,
indemnité compensatrice de préavis : 10 854,57 euros,
congés payés sur préavis : 1 085,45 euros,
dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 38 000 euros,
-ordonné la remise des documents de fin de contrat modifiés, sous astreinte de 10 euros par jour de retard et par document, astreinte commençant à courir 30 jours après la notification du jugement, et dans la limite de 6 mois, s’est réservé la faculté de liquider ladite astreinte,
-condamné la SARL Vernaka au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, débouté Mme [X] du surplus de ses demandes, débouté la SARL Vernaka de l’ensemble de ses demandes, condamné la SARL Vernaka aux entiers dépens.
La SARL Vernaka a interjeté appel de cette décision le 12 septembre 2019.
Par jugement du 22 janvier 2020, le tribunal de commerce de [Localité 13] a ouvert une procédure de sauvegarde concernant la SARL Vernaka et désigné Mme [L] [S] en qualité de mandataire judiciaire de la société. Cette procédure a été clôturée par jugement rendu le 21 janvier 2022.
Par conclusions remises le 14 avril 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, la SARL Vernaka demande à la cour de dire son appel bien fondé et y faire droit, dire l’appel incident de Mme [X] mal fondé, en conséquence, infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau, débouter Mme [X] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions, condamner Mme [X] à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions remises le 12 avril 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, Mme [X] demande à la cour de confirmer le jugement rendu en ce qu’il a jugé que la classification de son poste est celle de cadre, catégorie C de la convention collective du commerce de détail, de l’habillement et articles textiles et dit que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, en conséquence, et eu égard au jugement du tribunal de commerce de Compiègne en date du 21 janvier 2022,
-à titre principal, condamner la SARL Vernaka à lui verser les sommes suivantes et, à titre subsidiaire, fixer ces mêmes sommes au passif de la procédure collective :
indemnité de licenciement conventionnelle prévue pour un cadre de catégorie C : 2 359,23 euros,
rappel de salaire pour l’année 2011 : 14 031,40 euros,
rappel de salaire pour l’année 2012 : 15 327,21 euros,
rappel de salaire pour l’année 2013 : 18 268,14 euros,
rappel de salaire pour l’année 2014 : 17 867,42 euros,
rappel de salaire pour l’année 2015 : 9 039,67 euros,
congés payés y afférents : 7 456,49 euros,
indemnité de compensatrice de préavis : 10 854,57 euros,
congés payés sur préavis : 1 085,45 euros,
dommages et intérêts en violation de l’obligation de sécurité édictée par l’article L. 4121-1 du code du travail : 5 000 euros,
sur son appel incident,
-à titre principal, condamner la SARL Vernaka à lui verser les sommes suivantes et, à titre subsidiaire, fixer ces mêmes sommes au passif de la procédure collective :
dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 43 418,28 euros,
rappel d’heures supplémentaires sur l’année 2014 : 17 131,81 euros,
rappel d’heures supplémentaires pour l’année 2013 : 14 985,64 euros,
contrepartie obligatoire en repos pour l’année 2013 : 2 963,29 euros,
contrepartie obligatoire en repos pour l’année 2014 : 3 542,99 euros,
congés payés afférents à la contrepartie obligatoire en repos pour 2013 : 296,33 euros,
congés payés afférents à la contrepartie obligatoire en repos pour 2014 : 354,30 euros,
indemnités kilométriques pour l’année 2014 : 769,40 euros,
-en tout état de cause, confirmer le jugement entrepris pour le surplus des demandes, juger que la garantie de l’AGS sera acquise en cas de défaillance de l’entreprise dans le règlement du passif, dans la limite de son plafond de garantie, condamner la SARL Vernaka et Mme [L] [S], ès qualités, au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions remises le 27 octobre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, l’UNEDIC délégation AGS CGEA d'[Localité 8] demande à la cour :
-à titre principal, de dire l’action introduite à son encontre irrecevable, par conséquent, débouter Mme [X] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à son encontre,
-à titre subsidiaire, prononcer sa mise hors de cause, la SARL Vernaka ne s’étant vue ouvrir qu’une procédure de sauvegarde, la garantie AGS n’étant donc pas acquise,
-en tout état de cause, rappeler qu’il n’est tenu de garantir les sommes dues, dans les limites des plafonds légaux, qu’en l’absence de fonds disponibles, à titre infiniment subsidiaire, débouter Mme [X] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions, le mettre hors de cause pour toutes demandes au-delà de la somme de 76 080 euros bruts de toutes charges, dire que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement, statuer ce que de droit quant aux dépens, frais d’instance et astreintes, sans qu’ils puissent être mis à la charge du CGEA.
L’ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 14 avril 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les demandes au titre de l’exécution du contrat
– Sur la classification professionnelle
La qualification du salarié se détermine en référence aux fonctions réellement exercées et au regard de la convention collective applicable, laquelle peut édicter un seuil d’accueil en fonction des diplômes obtenus, étant précisé que la charge de la preuve pèse sur le salarié qui revendique une autre classification que celle appliquée.
En l’espèce, aux termes de son contrat de travail initial, Mme [X] a été engagée en qualité de responsable de magasin en catégorie 5. Suivant avenant à effet au 1er novembre 2008, elle a été promue au poste de chef de magasin, agent de maîtrise, catégorie A1.
Soutenant qu’à compter de 2009, ses fonctions ont été modifiées et qu’en sus de la gestion du magasin Promod de Vernon, elle s’est vue confiée la gestion de neuf autres magasins sur cinq départements différents, Mme [X] estime que la classification de son poste qui a été maintenue à chef de magasin catégorie A1 ne correspondait plus à la réalité de ses fonctions et elle revendique l’application du statut cadre catégorie C de la convention collective applicable.
L’accord du 12 octobre 2006 relatif aux classifications annexé à la convention collective nationale du commerce de détail, de l’habillement et des articles textiles définit comme suit le poste d’agent de maîtrise, catégorie A1 dans la filière vente: ‘Chef de magasin/chef de rayon, assure de manière permanente la gestion courante du magasin ou du rayon tant à l’égard de la clientèle que du personnel de vente mais ne bénéficie à ce titre d’aucune délégation de responsabilité de la part de l’employeur; anime, coordonne et contrôle une équipe de vendeur(se)s ; continue à effectuer des ventes ; dynamise les ventes de son équipe ; applique et fait appliquer les consignes et décisions de la direction relatives notamment aux procédures de vente et à la politique commerciale, aux règles d’implantation des produits dans le magasin et en vitrine, au réassort, au suivi de l’état du stock ; apte à régler toutes les difficultés qui peuvent se présenter à l’occasion des ventes en fonction des directives reçues.’
Quant au poste de cadre catégorie C revendiqué par Mme [X], il est défini comme suit : ‘Directeur de magasin/chef de rayon acheteur, dispose d’une large délégation de pouvoir notamment en matière de :
– gestion du personnel et recrutement ;
– gestion financière ;
– gestion commerciale : est chargé de constituer la collection, doit connaître le marché et les conditions d’achat, est capable de négocier au meilleur coût, place et transmet les commandes, peut décider des actions promotionnelles.
Acheteur
Responsable de produit, de marché : organise et négocie les achats.’
Madame [X] soutient que depuis 2009-2010, son rôle dans l’entreprise consiste à diriger et à former des équipes de différentes structures et enseignes, à gérer et à participer au bon déroulement de la mise en place des plans d’actions commerciales et visuelles des magasins, à recruter des équipes de vente et à suivre et analyser les résultats commerciaux des boutiques qui lui ont été confiées, de sorte qu’elle disposait dans les faits d’une large délégation de pouvoir sur le plan commercial, financier et disciplinaire sur les salariés des magasins concernés.
Il n’est pas contesté par la société Vernaka qu’en sus de ses fonctions de chef de magasin dans l’enseigne Promod de Vernon, il a été confié à Mme [X] des fonctions d’animatrice et de formatrice d’autres magasins. Cette situation est confirmée par un mémo du 5 octobre 2011 ‘à l’attention de toutes les équipes’, par lequel Mme [N], la gérante de la société Vernaka entend informer ses salariés de deux nouvelles évolutions au sein de la société, dont celle de Mme [X], en ces termes : ‘Madame [X] [U], connue par un grand nombre d’entre vous se voit confirmer son rôle qu’elle occupe déjà en tant qu’animatrice et formatrice des équipes de vente du prêt-à-porter féminin, si cela était nécessaire elle pourrait être amenée à intervenir sur d’autres magasins afin d’aider les jeunes responsables dans leurs missions.[…]’.
Les pièces produites par les parties montrent que sont concernés par l’intervention de Mme [X], outre le magasin Promod de Vernon, les enseignes suivantes :
– Kookai à [Localité 10]
– Jules à [Localité 14]
– Grain de malice à [Localité 13]
– Mango à [Localité 13]
– Mango à [Localité 16]
– Grain de Malice à [Localité 9]
– Cache-cache/Bonobo/Morgan à [Localité 12]
– Jules à [Localité 9].
A cet égard, il convient de relever que l’examen des pièces communiquées à la procédure révèle que ces établissements ne dépendent pas de la société Vernaka qui gère uniquement le magasin Promod de Vernon. Chacun de ces magasins est géré par une société différente avec une immatriculation au RCS différente. En revanche, ils ont tous en commun d’avoir le même siège social à [Adresse 11] (60) et la même gérante, Mme [C] [N]. Il s’en suit que les fonctions exercées par Mme [X] auprès de ces magasins se sont nécessairement déroulées dans le cadre d’une mise à disposition de la salariée au profit des autres sociétés gérées par Mme [N], étant précisé que la salariée ne conteste pas avoir accepté cette situation et que l’employeur ne conteste pas non plus avoir maintenu l’exécution du contrat de travail initial et être redevable notamment du salaire dû à Mme [X] dans ce contexte.
Aucune des deux parties ne remet en question le fait que les fonctions réellement exercées par Mme [X] au sein du magasin Promod de Vernon correspondent à la classification visée par l’avenant à son contrat de travail et ses bulletins de salaires. Le litige porte donc uniquement sur les fonctions et les pouvoirs dont elle disposait dans le cadre de cette mise à disposition au profit des autres magasins gérés par Mme [N].
Or, à cet égard, aucun avenant ou convention écrite n’a été signée entre les parties, ou à tout le moins n’est produit aux débats, de sorte que les missions de ‘formation et d’animation’ qui étaient confiées à Mme [X] dans ce cadre ne font l’objet d’aucune définition explicite contractualisée. De même, il convient de relever que cette fonction ne correspond pas à une catégorie précise définie par les dispositions conventionnelles.
Par ailleurs, c’est de façon inopérante que la société Vernaka tente de se prévaloir des clauses de son contrat de franchise avec la marque Promod, des relations avec la directrice régionale de cette marque et plus particulièrement des échanges de mails et compte-rendu de réunion avec cette dernière, pour démontrer que Mme [X] ne pouvait disposer des pouvoirs de délégation qu’elle revendique. En effet, les missions litigieuses ‘de formation et d’animation’ s’exercent dans des magasins franchisés sous d’autres enseignes. Or, pour ces magasins, il n’est pas démontré que le contrat de franchise s’exécutait dans les mêmes conditions de contrôle très strict de la politique salariale, commerciale et financière par le franchiseur, notamment quant à l’absence de pouvoir du franchisé sur la gestion des stocks, le merchandising, les commandes d’articles, de gestion des dépenses courantes etc, ces éléments sur l’exécution du contrat de franchise de la marque Promod, qui concerne uniquement le magasin de [Localité 17], sont indifférents.
De plus, les éléments de comparaison avec les fonctions de ‘formatrice-animatrice’ exercées par d’autres salariées ([M] [J] et [V] [I]) ne sont pas pertinents. En effet, contrairement à ce que soutient l’employeur, l’analyse des pièces démontrent que ces deux salariées n’avaient pas les mêmes fonctions que Mme [X], que si elles avaient des missions d’animation et de gestion de plusieurs magasins, c’était sous le contrôle de Mme [X]. C’est ainsi que les comptes-rendus établis par Mme [J] montrent qu’elle rendait compte de son activité à Mme [N] mais également à Mme [X], qui devait donner son aval sur les appréciations et évaluations réalisées par cette dernière.
De même, s’agissant de Mme [I], s’il n’est pas contestable qu’elle apparaît jusqu’en 2011 comme l’unique référente des magasins Jules de Mme [N], cette situation n’est plus vraie à partir de 2012, puisqu’à compter de cette date, les documents produits par la société Vernaka elle-même montrent que Mme [X] est en copie de tous les ‘mémo’ concernant les magasins Jules, que Mme [X] est missionnée pour intervenir en soutien de Mme [I] qui finalement va prendre le rôle d’assistante de Mme [X] pour les magasins Jules, ainsi que cela ressort du mail adressé par Mme [N] à la directrice régionale de la marque Jules. Cette évolution est confirmée par un mémo du 6 septembre 2013 dans lequel Mme [N] relève les erreurs commises par Mme [I] et lui demande d’en référer à ‘[U]’ pour les décisions de gestion et de suivi du chiffre d’affaire.
Le fait que dans le mail adressé par Mme [N] à la directrice régionale de la marque Jules, celle-ci indique expressément que Mme [X] n’est pas ‘directrice régionale’ n’est pas significatif et ce d’autant que dans ce même document, Mme [N] explique que ‘compte tenu du développement de l’ensemble de notre parc de magasins et de nos enseignes, il est apparu afin de maintenir notre niveau d’exigence, la nécessité de me faire accompagner dans mes activités’, qu’elle présente Mme [X] comme la personne qui la seconde dans les process de formation, d’animation et de contrôle, ce qui tend, au contraire, à établir un rôle de délégataire avec un large pouvoir dans la gestion des magasins.
Les attestations produites aux débats par la société Vernaka pour tenter de démontrer le contraire ne sont pas plus efficientes. En effet, l’attestation de Mme [I] n’a qu’une valeur probante très faible, compte tenu du lien de subordination et de la proximité existant avec Mme [N], de la rivalité qui pouvait exister avec Mme [X], étant précisé qu’à son départ, Mme [I] a pris son poste. De surcroît, son témoignage ne contient pas d’éléments précis sur les missions confiées à Mme [X] mais uniquement des considérations psychologiques très subjectives sur les ambitions professionnelles et le positionnement de cette dernière. Il en est de même des autres déclarations des responsables de magasin produites aux débats.
Enfin, si la société Vernaka insiste sur le caractère ponctuel des missions de Mme [X] auprès des différents magasins, force est de relever que les éléments du dossier démontrent le contraire, puisqu’il résulte des plannings produits aux débats par l’employeur que la salariée était, a minima, en déplacement trois voire quatre jours par semaine, et ce toutes les semaines. Les bulletins de salaires corroborent cette analyse puisqu’il en ressort que la salariée percevait tous les mois une prime de déplacement. Ces déplacements n’étaient donc pas ponctuels ou exceptionnels. Au contraire, il s’agissait d’une mission habituelle.
Or, dans le cadre de cette mission habituelle, contrairement à ce que soutient la société Vernaka, Mme [X] rapporte la preuve qu’elle disposait de larges pouvoirs de délégation de la part de Mme [N].
Ainsi, le mémo du 26 avril 2011 rédigé par Mme [N] confie à Mme [X] les décisions urgentes à prendre pendant ses congés, y compris, le cas échéant, pour des embauches en CDI, et rappelle qu’elle valide les plannings des magasins et les demandes de jours de récupération et de congés payés. Cette gestion des congés payés est confirmée dans un mémo du 17 septembre 2014.
Le mémo du 2 novembre 2012 sur les heures supplémentaires rappelle à tous les responsables de magasin les consignes d’utilisation restreinte des heures supplémentaires et indique expressément que pour la période de Noël et les soldes de janvier, ‘chaque magasin qui devra transgresser ces règles le fera avec l’accord de [U] (pour les magasins dont elle a la gestion à ou de moi-même’.
Mme [X] justifie également que le 27 octobre 2013, elle a établi auprès d’une autre société prestataire de service appartenant au groupe de sociétés de Mme [N] une demande officielle pour la réalisation de travaux d’entretien de différents magasins (réparation de vitrines, devis pour entretien plomberie ou électricité), ce qui montre qu’elle avait le pouvoir d’engager des dépenses au nom de chacune des sociétés gérant lesdits magasins.
Par ailleurs, la salariée verse les avertissements et autres procédures de licenciement menés contre des salariés de différents magasins. Ces documents font apparaître que les entretiens préalables étaient tenus par Mme [X] et qu’elle a même pu signer pour le compte de Mme [N] l’avertissement délivré à Mme [T] le 26 novembre 2012. Elle gérait également le recrutement du personnel, puisqu’aux termes d’un mail du 20 avril 2014, elle a mandaté un expert graphologique pour analyse des lettres de motivation adressées par des candidats à des postes de responsables de magasin.
Enfin, sur la gestion commerciale des enseignes, malgré la situation de franchise, force est de constater à la lecture du mémo 18 février 2014, que Mme [X] n’avait pas qu’un rôle d’animatrice-formatrice, mais qu’elle devait également contrôler que les directives données aux responsables du magasin Kookai à [Localité 10] étaient bien appliquées. Il en est de même pour le magasin situé à [Localité 12] dans le Var, ainsi que l’établit le courrier du 24 février 2014 dans lequel il est rappelé au responsable que Mme [X] intervenir pour contrôler et vérifier la mise en place des objectifs fixés en 2013, à savoir ‘application et respect des procédures administratives et organisationnelles, meilleur participation au merchandising, aux opérations commerciales pour l’ensemble des enseignes, formation et plus grand accompagnement des équipes’.
Au vu de l’ensemble de ces éléments qui établissent que Mme [X], dans l’exercice de ses fonctions ‘d’animatrice-formatrice’ auprès des magasins dans lesquels elle était mise à disposition par la société Vernaka, disposait de la part de la gérante de ces magasins d’un pouvoir de délégation tant sur le plan commercial et financier que sur le plan social et disciplinaire, c’est à juste titre qu’elle revendique l’application de la classification de cadre, catégorie C, de la convention collective du commerce de détail, de l’habillement et articles textiles à compter de 2011. Le jugement est confirmé sur ce point.
Les sommes allouées par le conseil de prud’hommes à titre de rappels de salaires subséquemment à l’application de ce changement de classification ne sont pas contestées par les parties. Le jugement est donc également confirmé sur ce point.
– Sur les heures supplémentaires et les repos compensateurs
Aux termes de l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte des articles L. 3171-2 à L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Il est acquis que le salarié doit fournir préalablement des éléments de nature suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.
En l’espèce, Mme [X] présente, pour fonder sa demande de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires sur les années 2013-2014, un tableau dans lequel elle indique, par semaine, le nombre d’heures travaillées, sans préciser quels ont été ses horaires quotidiens.
C’est à juste titre que la société Vernaka critique ce tableau en faisant observer qu’elle ne peut utilement y répondre dans la mesure où il contient des éléments trop imprécis et surtout incohérents avec les propres pièces de la salariée. Ainsi, force est de constater que les heures qu’elle déclare dans ce tableau ne correspondent absolument pas aux heures qu’elle chiffre, dans un autre tableau dressé pour établir les kilomètres réalisés dans le cadre de ses déplacements mais qui contient également une colonne relative au nombre d’heures travaillés par semaine, un nombre d’heures différent de celui qu’elle retient dans son autre tableau et ce pour toutes les semaines des deux années 2013 et 2014, et sans donner d’explications.
De même, Mme [X] ne peut valablement soutenir que les heures travaillées qu’elle déclare au soutien de sa demande sont corroborées par la production de ses agendas, puisque ces derniers, s’ils établissent l’existence de ses fréquents déplacements, ne contiennent, en revanche, aucune indication sur ses horaires de début et de fin de travail, ni même sur les horaires ou la durée des réunions et autres obligations professionnelles mentionnées.
Néanmoins, malgré cette imprécision et l’inopposabilité du tableau litigieux à l’employeur, il est acquis, eu égard aux motifs adoptés précédemment, que Mme [X] occupait, outre son poste de chef du magasin Promod de Vernon pour lequel elle a été engagée sur la base de 39 heures par semaine, une fonction de gestion de plusieurs magasins situés sur cinq départements. Or, même s’il résulte des pièces du dossier qu’elle était secondée par la responsable adjointe du magasin de [Localité 17], ce qui lui permettait de s’absenter pour ses déplacements trois ou quatre jours par semaine, il n’en demeure pas moins que ces missions s’ajoutaient à celles de chef de magasin.
En outre, par des éléments objectifs et datés (compte-rendu de réunions horodatés, mail de Mme [N] lui imposant d’aller chercher le responsable de magasin du Var un soir à 22 heures à l’aéroport d'[Localité 15], mémo de Mme [N] louant la disponibilité de Mme [X] restée jusqu’à 22h30 dans le magasin Mango de Beauvais pour l’implantation des soldes), Mme [X] établit que ces missions la conduisaient régulièrement à accomplir des horaires tardifs et ce, sans qu’elle bénéficie, en contre-partie, de jours de récupération ou autre compensation dans la même semaine, ses agendas, non contestés sur ce point, démontrant au contraire que sur ces semaines de réunions, elle était en déplacement ou dans son magasin à [Localité 17] dès le lendemain matin et sur tous les jours de la semaine conformément à son emploi du temps habituel.
Ces événements qui sont précisément datés et remis dans leur contexte de l’emploi du temps hebdomadaire tel qu’indiqué par l’agenda de Mme [X] sont des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments, étant précisé qu’il est constant et établi par les bulletins de salaire qu’en dehors des 4 heures contractualisées (39h par semaine), Mme [X] n’a jamais perçu la moindre rémunération d’heures supplémentaires ou compensation en journée de repos.
Or, la société Vernaka n’est pas en mesure de justifier des horaires accomplis par Mme [X], reconnaissant qu’elle n’était soumise à aucun horaire et qu’elle n’est donc pas en capacité de justifier des horaires réalisés.
En outre, elle ne peut se prévaloir des plannings du magasin de [Localité 17] qu’elle produit aux débats (uniquement quelques semaines sur les deux années concernées). Certes, ces documents sont établis et signés par Mme [X] et indique qu’elle a réalisé 39 heures. Toutefois, cette mention ne correspond manifestement pas à la réalité, puisque ce calcul ne repose sur aucun planning précis, Mme [X] portant uniquement sur ce document ses horaires de présence sur le magasin de [Localité 17], les autres journées contenant uniquement l’information ‘déplacement’ sans aucun horaire précis.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, la cour a la conviction que Mme [X] a accompli des heures supplémentaires au regard de la nature de ses tâches, de la qualité de son travail et de son investissement non démenti par son employeur, mais dans des proportions toutefois moindres que celles revendiquées.
Ainsi, il convient de retenir pour l’année 2013 l’accomplissement de 184 heures supplémentaires non rémunérées pour lesquelles il convient de lui allouer, à titre de rappels de salaires la somme de 4 779, 40 euros, outre celle de 477, 94 euros au titre des congés payés y afférents, ce qui porte le nombre d’heures supplémentaires total réalisé sur l’année, Mme [X] étant contractuellement tenu à 39h par semaine, à 357 heures.
Pour l’année 2014, la cour retient que Mme [X] a accompli 235 heures supplémentaires non rémunérées pour lesquelles il convient de lui allouer, à titre de rappels de salaires la somme de 6 104,13 euros, outre celle de 610,41 euros au titre des congés payés y afférents, ce qui porte le nombre d’heures supplémentaires total réalisé sur l’année, Mme [X] étant contractuellement tenu à 39h par semaine, à 408 heures.
Le nombre d’heures supplémentaires retenu établissant que Mme [X] a réalisé des heures supplémentaires au-delà du contingent d’heures supplémentaires annuelles de 220 heures prévu par l’article D. 3121-14-1 du code du travail, en l’absence de dispositions plus favorables de convention collective applicable, il convient de lui allouer à ce titre, pour l’année 2013, une somme de 1 778,95 euros, outre 177,90 euros au titre des congés payés y afférents et pour l’année 2014 une somme de 2 441,65 euros, outre 244,17 euros au titre des congés payés y afférents
Le jugement entrepris est donc infirmé sur ces points.
– Sur les frais kilométriques
Mme [X] soutient que pour l’année 2014, son employeur l’a indemnisée de ses déplacements réalisés avec son véhicule personnel en lui allouant une indemnité de frais kilométriques sur la base de 0,350 euros par kilomètre, alors que le barème fiscal applicable pour l’année 2014 était à 0,382 euros par kilomètre. Soutenant qu’elle a parcouru sur cette année-là, 240 044 kilomètres avec son véhicule personnel, elle demande la différence, à savoir la somme de 769,40 euros.
Il est constant que Mme [X] était indemnisée de ses frais kilométriques exposés avec son véhicule personnel pour ses déplacements dans les différents magasins appartenant aux sociétés gérées par Mme [N]. Toutefois, ces remboursements n’apparaissent pas sur les bulletins de salaires de Mme [X] et aucun justificatif n’est produit aux débats par l’une ou l’autre des parties, de sorte que la cour n’est pas en mesure d’apprécier la somme perçue à ce titre par la salariée sur l’année 2014.
En outre, Mme [X] se contente d’évaluer son kilométrage par affirmation, sans produire les itinéraires réalisés, de même qu’elle ne justifie pas de la puissance fiscale du véhicule utilisé.
Dès lors, en l’absence d’éléments probants établissant le fait que l’employeur avait validé le principe de la distance parcourue alléguée aujourd’hui, il ne peut être fait droit à la réclamation de Mme [X] tendant à obtenir un complément d’indemnisation par application d’un taux de barème plus élevé, la cour estimant que la salariée ne rapporte pas la preuve suffisante du caractère professionnel des frais ainsi allégués.
Le jugement entrepris est donc confirmé sur ce point.
Sur les demandes au titre de la rupture du contrat
– Sur l’origine de l’inaptitude non professionnelle
Selon l’article L.1235 -1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite aux salariés.
Ainsi l’administration de la preuve, en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement, n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.
Il résulte de l’article L. 4121-1 du code du travail que l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, lesquelles comprennent des actions de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation, la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
Est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude lorsqu’il est démontré que l’inaptitude est consécutive à un manquement préalable de l’employeur qui l’a provoquée.
En l’espèce, dans le cadre de l’examen des heures supplémentaires, il est apparu que Mme [X] a dû faire face à une surcharge de travail au cours des années 2013-2014, avec des heures supplémentaires accomplies en nombre important, au delà du contingent annuel fixé par la loi et sans aucune contre-partie en terme de repos, Mme [X] n’ayant pris que 4 semaines complètes de congés, dont seulement deux semaines au cours de l’été 2013 et 5 semaines de congés en 2014 dont trois semaines au cours de l’été.
Contrairement à ce que soutient la société Vernaka, malgré l’absence de plainte explicite et répétée de Mme [X], celle-ci ne pouvait ignorer ses conditions de travail, sa charge et par suite les risques encourus sur le terrain du surmenage.
Au demeurant, Mme [X] verse aux débats un courrier du 3 octobre 2011 adressé à Mme [N] aux termes duquel elle l’informait de son souhait ‘d’avoir un entretien avec [elle], au sujet de mon poste au sein de votre entreprise. Cela est de plus en plus difficulté pour moi de gérer mon travail et ma vie familiale.’
Le courrier adressé le 16 mars 2015 à Mme [N], s’il est inefficace pour établir les alertes données par la salariée, puisqu’il est postérieur à l’arrêt maladie au terme duquel Mme [X] sera déclarée inapte, confirme néanmoins les conséquences de la surcharge de travail imposée à la salariée sur sa situation personnelle. Ainsi, elle indique avoir déjà informé Mme [N] en 2012-2013 sur le fait que sa situation se dégradait et devenait difficile à gérer physiquement et sur le plan familial, à cause des déplacements incessants, avoir renouvelée sa demande en 2014 en lui précisant qu’elle ne voulait plus découcher plus de deux nuits par semaine, que le mémo du 17 septembre 2014 confirme cette demande, mais qu’elle n’a jamais été prise en compte.
Or, la société Vernaka ne produit pas le moindre élément établissant qu’elle s’est préoccupée du respect du droit au repos de sa salariée et ne justifie pas non de la surveillance de sa charge de travail.
L’employeur a donc nécessairement manqué à son obligation de sécurité à l’égard de la salariée, peu important que cette dernière ne l’ait pas alerté expressément sur son état de santé physique.
Au vu de l’avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail, qui le 16 juin 2015 a déclaré Mme [X] inapte à tout poste dans l’entreprise, ce à l’issue d’un arrêt de travail débuté en février 2015, soit quelques semaines après avoir subi pendant deux années des conditions de travail dégradées, il est suffisamment établi que le manquement de la société Vernaka à son obligation de sécurité lui imposant de veiller à la charge de travail de sa salariée a contribué, même partiellement, à la dégradation de son état de santé et par suite à la déclaration d’inaptitude de Mme [X] à son poste prononcée le 16 juin 2015.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré le licenciement de Mme [X] dénué de cause réelle et sérieuse, sans qu’il y ait lieu de statuer sur le moyen fondé sur le non-respect de l’obligation de reclassement.
En revanche, force est de constater que Mme [X] ne produit aucun élément médical sur son état de santé, les arrêts de travail produit ne mentionnant pas leur cause, à l’exception du dernier du 17 juin au 17 juillet 2015 qui fait état d’un épuisement physique et mental, épuisement qui, néanmoins, était déjà en voie de guérison, puisque cet arrêt n’a pas été prolongé. Elle ne verse pas non plus d’éléments décrivant les conséquences du surmenage et de la surcharge de travail sur sa vie personnelle et familiale.
Aussi, en l’absence d’éléments établissant l’existence d’un préjudice distinct des conséquences de la rupture du contrat de travail, c’est à tort que les premiers juges ont alloué à Mme [X] une indemnité de 5 000 euros pour indemniser le préjudice résultant de son état de santé physique et psychologique considérablement dégradé au cours de la relation de travail, aucune pièce médicale ou aucune autre pièce pertinente n’étant produite aux débats.
En conséquence, il convient d’infirmer le jugement de ce chef.
Conformément à l’article L. 1235-5 du code du travail dans sa version antérieure à l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 applicable au présent litige eu égard à la date du licenciement intervenu le 30 juin 2015 et à la taille de la société Vernaka qui emploie moins de onze salariés, en considération de son ancienneté (9 ans), de son âge au moment de la rupture du contrat de travail (49 ans), des circonstances de la rupture, du montant de son salaire mensuel moyen de 3 601,05 euros revalorisation au titre de la reclassification prise en compte, et de ce que Mme [X] établit avoir perçu des indemnités chômage à hauteur de 1 300 euros par mois jusqu’en décembre 2016, il y a lieu d’allouer à ce titre à la salariée une somme de 22 000 euros.
Les sommes allouées au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et de l’indemnité de licenciement revalorisée ne sont pas contestées, de sorte qu’elles seront confirmées.
Sur la garantie de l’AGS
C’est à juste titre que l’UNEDIC Délégation AGS CGEA d’Amiens fait valoir, d’une part, que l’article L. 625-3 du code de commerce ne prévoit pas la mise en cause des institutions mentionnées à l’article L. 3253-14 du code du travail en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde au cours de l’instance prud’homale et d’autre part, qu’il résulte de l’article L. 3253-8 du code du travail que, dans ce cas, seules sont garanties les créances résultant de ruptures intervenues pendant la période d’observation et dans le mois suivant le jugement qui a arrêté le plan de sauvegarde.
Mme [X] ayant nécessairement intérêt à s’assurer de l’éventuelle application de la garantie légale de l’AGS, il convient de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir soulevée par l’UNEDIC Délégation AGS CGEA d’Amiens. En revanche, il y a lieu de faire droit à sa demande tendant à être mise hors de cause, la créance de salaires de Mme [X] étant antérieure à l’ouverture de la procédure de sauvegarde, procédure qui, de surcroît, a été clôturée le 21 janvier 2022.
Sur les dépens et frais irrépétibles
En qualité de partie succombante , il y a lieu de condamner la société Vernaka aux entiers dépens, de la débouter de sa demande formulée en application de l’article 700 du code de procédure civile et de la condamner à payer à Mme [X] la somme de 2 000 euros sur ce même fondement pour les frais générés en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant contradictoirement,
Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme [U] [X] de sa demande de rappels de salaires au titre des heures supplémentaires et des repos compensateurs ainsi que sur le montant des dommages et intérêts alloués en raison de la violation de l’obligation de résultat édictée par l’article L. 4121-1 du code du travail et au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Statuant à nouveau,
Condamne la SARL Vernaka à payer à Mme [U] [X] les sommes suivantes :
4 779,40 euros à titre de rappels de salaires pour les heures supplémentaires effectuées sur l’année 2013, outre la somme de 477,94 euros au titre des congés payés y afférents,
6 104,13 euros à titre de rappels de salaires pour les heures supplémentaires effectuées sur l’année 2014, outre la somme de 610,41 euros au titre des congés payés y afférents,
1 778,95 euros au titre de l’indemnité de repos compensateurs pour l’année 2013, outre 177,90 euros au titre des congés payés y afférents,
2 441,65 euros au titre de l’indemnité de repos compensateurs pour l’année 2013, outre 244,17 euros au titre des congés payés y afférents ;
Déboute Mme [U] [X] de sa demande de dommages et intérêts en raison de la violation de l’obligation de résultat édictée par l’article L. 4121-1 du code du travail ;
Condamne la SARL Vernaka à payer à Mme [U] [X] la somme de 22 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Confirme le jugement pour le surplus ;
Y ajoutant,
Rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir soulevée par l’UNEDIC Délégation AGS CGEA d’Amiens ;
Met hors de cause l’UNEDIC Délégation AGS CGEA d’Amiens ;
Déboute la SARL Vernaka de sa demande formulée en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SARL Vernaka à payer à Mme [U] [X] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SARL Vernaka aux entiers dépens.
La greffièreLa présidente