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AC/DD
Numéro 23/334
COUR D’APPEL DE PAU
Chambre sociale
ARRÊT DU 26/01/2023
Dossier : N° RG 21/00146 – N°Portalis DBVV-V-B7F-HXWO
Nature affaire :
Contestation du motif économique de la rupture du contrat de travail
Affaire :
[L] [C]
C/
S.A.S. MATTEI COMPRESSEURS
Grosse délivrée le
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 26 Janvier 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 17 Novembre 2022, devant :
Madame CAUTRES, magistrat chargé du rapport,
assistée de Madame LAUBIE, greffière.
Madame CAUTRES, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame CAUTRES, Présidente
Madame SORONDO, Conseiller
Madame PACTEAU, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur [L] [C]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Maître DUBOURDIEU, avocat au barreau de PAU
INTIMÉE :
S.A.S. MATTEI COMPRESSEURS
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Maître PIAULT, loco Maître GALLARDO, avocat au barreau de PAU
sur appel de la décision
en date du 15 DECEMBRE 2020
rendue par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE PAU
RG numéro : F19/00080
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [L] [C] a été embauché le 2 juin 2014 par la société Mattei Compresseurs en qualité de gestionnaire technique SAV, niveau IV, échelon 1, coefficient 255, suivant contrat à durée indéterminée.
En décembre 2016 il a eu un accident du travail.
Du 28 décembre 2016 au 5 juin 2017, il a fait l’objet d’un arrêt de travail au titre de cet accident.
Le médecin du travail l’a déclaré apte avec des restrictions.
Du 5 au 20 octobre 2017, il a été placé en arrêt de travail.
Le 7 novembre 2017, la société Mattei Compresseurs lui a proposé un poste de formateur technicien sur la France entière et l’étranger au motif de mutations technologiques. Il a refusé cette proposition.
Du 15 novembre 2017 au 4 avril 2018, il a été placé en arrêt de travail.
Le 7 février 2018, la société Mattei Compresseurs lui a proposé un poste de magasinier qu’il a refusé.
Le 2 mars 2018, il a été convoqué à un entretien préalable fixé le 14 mars suivant.
Dans des conditions discutées par les parties, un contrat de sécurisation professionnel a été conclu.
Le 27 mars 2018, M. [L] [C] a été licencié pour motif économique.
Le 27 mars 2019, il a saisi la juridiction prud’homale.
Par jugement du 15 décembre 2020, le Conseil de Prud’hommes de Pau a notamment :
– dit et jugé la demande de M. [L] [C] irrecevable en son action, en raison de la prescription,
– dit et jugé en conséquence que les demandes ne peuvent être examinées au fond,
– débouté les parties de leurs demandes formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que chaque partie assumera la charge de ses propres dépens.
Le 15 janvier 2021, M. [L] [C] a interjeté appel de ce jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 15 avril 2021, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, M. [L] [C] demande à la cour de :
– infirmant le jugement entrepris,
– dire et juger que son action est parfaitement recevable et nullement prescrite, le délai de 12 mois prévu à l’article L. 1233-67 du code du travail ne lui étant pas opposable :
* à titre principal : au regard de la date de l’acceptation du CSP et de sa remise à l’employeur au plus tôt le 27 mars 2018,
* à titre subsidiaire : au regard de la nullité du CSP sur le fondement de des articles 1132 et 1137 du code civil et par application de l’article 1131 du code civil.
– dire et juger que son action sur le fondement des articles L. 1222-1 et L. 4121-1 du code du travail est recevable par application de l’article L. 1471-1 du code du travail,
– en conséquence, y rajoutant :
– dire et juger le licenciement économique qui lui a été notifié par la société Mattei Compresseurs dénué de toute cause réelle et sérieuse, et en ce abusif,
* à titre principal, en l’absence d’énonciation du motif économique préalablement à l’acceptation du CSP,
* à titre subsidiaire, en l’absence de tout caractère réel et sérieux des motifs économiques énoncés au sein de la lettre de licenciement,
* à titre infiniment subsidiaire, du fait de la violation de l’obligation de recherche préalable de reclassement,
– en conséquence :
– condamner la société Mattei Compresseurs à lui payer la somme de 6 456 € bruts (2 mois) au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et celle de 645,60 € bruts au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
– condamner la société Mattei Compresseurs au remboursement des indemnités pôle emploi qui lui ont été versées,
– dire et juger devoir écarter l’application de l’article L. 1235-3 nouveau du code du travail comme non conforme aux engagements internationaux de la France notamment la convention 158 de l’OIT et la du 03.05.1996 ratifiée par la France le 7 mai 1999,
– condamner la société Mattei Compresseurs à lui payer la somme de 32 280 € nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du caractère abusif de la rupture de son contrat de travail,
– en tout état de cause :
– dire et juger que société Mattei Compresseurs a été défaillante dans le respect de ses obligations de loyauté et de bonne foi ainsi que de sécurité de résultat s’agissant de la préservation de la santé des travailleurs dans l’entreprise,
– en conséquence :
– condamner la société Mattei Compresseurs à lui payer la somme de 5 000 € nets à titre de dommages et intérêts sur le fondement des articles L. 1222-1 et L. 4121-1 du code du travail,
– dire que les sommes allouées porteront intérêt au taux légal à compter de la citation en justice (date de réception par la société défenderesse de sa convocation devant le bureau de conciliation) pour les créances de nature salariale et à compter de la réception de la notification de la décision à intervenir pour les créances en dommages et intérêts,
– ordonner l’établissement et la remise de bulletins de salaire et de documents de fin de contrat rectifiés au regard de la décision à intervenir,
– condamner la société Mattei Compresseurs à lui payer la somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par voie électronique le 19 avril 2021, auxquelles il y a lieu de se référer pour l’exposé des faits et des moyens, la société Mattei Compresseurs demande à la cour de :
– à titre principal,
– confirmer le jugement entrepris.
– en tant que de besoin, déclarer prescrite l’action de M. [L] [C],
– dire et juger que M. [L] [C] est irrecevable dans son action en contestation de son licenciement, en raison de son défaut de droit d’agir né de la prescription de son action,
– subsidiairement et au fond,
– dire est juger que le licenciement de M. [L] [C] est fondé sur une cause économique réelle et sérieuse,
– dire et juger qu’elle a rempli son obligation de reclassement du salarié,
– débouter M. [L] [C] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
– débouter M. [L] [C] de sa demande de condamnation à lui payer la somme de 5 000 € au titre de l’atteinte portée à la santé du salarié,
– à titre infiniment subsidiaire,
– fixer le montant de l’indemnité due à M. [L] [C] [L] à une somme ne pouvant aller au-delà de trois mois de salaire,
– dans tous les cas,
– condamner M. [L] [C] à lui verser la somme de 2 400 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [L] [C] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 17 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les demandes au titre de la rupture du contrat de travail
Attendu que selon l’article 122 du code de procédure civile constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire ;
Attendu que conformément à l’article L. 1233-67 du code du travail l’adhésion du salarié au contrat de sécurisation professionnelle emporte rupture du contrat de travail ;
Que toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif se prescrit par 12 mois à compter de l’adhésion au contrat de sécurisation professionnelle ;
Que ce délai n’est opposable salarié que s’il en a été fait mention dans la proposition de contrat de sécurisation professionnelle ;
Attendu qu’en l’espèce les éléments du dossier démontrent que :
la lettre de convocation à entretien préalable en date du 2 mars 2018 mentionne explicitement « nous vous prions de bien vouloir vous présenter au siège de l’entreprise le 14 mars 2018 à neuf heures pour un entretien sur cette éventuelle mesure. Au cours de cet entretien vous sera proposé le bénéfice d’un contrat de sécurisation professionnelle. Vous disposerez d’un délai de 21 jours qui expirera donc le 5 avril 2018 pour nous faire connaître votre réponse. Cependant, pour votre plus ample information, vous pouvez d’ores et déjà trouver annexés aux présentes les documents que nous envisageons de remettre. En cas d’adhésion à ce contrat de sécurisation professionnelle, votre contrat de travail sera rompu à cette date. En outre, nous attirons votre attention sur le fait qu’à compter de cette date vous disposerez d’un délai de 12 mois pour éventuellement contester la rupture de votre contrat de travail » ;
le récépissé du document de présentation du contrat de sécurisation professionnelle a été signé par le salarié le 14 mars 2018 à [Localité 5], attestant que le salarié a bien eu connaissance des conséquences de l’acceptation d’un contrat de sécurisation professionnelle soit « toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif se prescrit par 12 mois à compter de l’adhésion au contrat de sécurisation professionnelle » ;
le bulletin d’acceptation et récépissé du document de présentation du contrat de sécurisation professionnelle signé du salarié à Monein le 26 mars 2018 ;
Attendu qu’il est donc certain que l’employeur a remis au salarié, lors de la proposition du contrat de sécurisation professionnelle, un document mentionnant le délai de prescription applicable en cas d’acceptation du contrat de sécurisation professionnelle ;
Que l’information du salarié est donc suffisante pour rendre opposable à Monsieur [C] le délai de recours qui lui était ouvert pour contester la rupture de son contrat travail ou son motif ;
Attendu qu’aucun élément au dossier ne permet d’établir que la date de signature du contrat de sécurisation professionnelle par le salarié le 26 mars 2018 n’est pas certaine ;
Que le fait que l’employeur ait envoyé au salarié une lettre de licenciement le 27 mars 2018 ne permet aucunement d’indiquer que la date de signature de l’adhésion au contrat de sécurisation professionnelle n’étaient pas certaine au 26 mars 2018 ;
Attendu qu’en saisissant le Conseil de Prud’hommes le 27 mars 2019, M. [C] était prescrit en son action concernant les motifs de la rupture de son contrat de travail ;
Attendu que le salarié fait valoir également que son adhésion au contrat de sécurisation professionnelle est nulle, faute d’y avoir valablement consenti en l’absence d’exposé par l’employeur des motifs économiques conduisant à son licenciement sur le fondement des articles 1131 et 1144 du code civil ;
Attendu que ce moyen soulevé, constituant une défense au fond, est en l’espèce inopérant puisqu’il doit intervenir dans le délai visé à l’article L.1233-67 du code du travail ;
Attendu en conséquence que les demandes formées au titre de la rupture du contrat de travail sont irrecevables parce prescrites ;
Sur les demandes au titre de l’exécution du contrat de travail
Attendu que conformément à l’article L.1471-1 du code du travail toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit ;
Attendu que le salarié fait état de fait de déloyauté de l’employeur dès sa reprise du travail après son accident du travail en janvier 2017 ;
Qu’il a connu ces faits dès le mois de janvier 2017 et a introduit son action le 27 mars 2019 ;
Attendu qu’il est donc également prescrit en son action concernant l’exécution de son contrat de travail ;
Que le jugement déféré sera confirmé par substitution de motifs ;
Sur les demandes accessoires
Attendu que le salarié qui succombe doit supporter les dépens d’appel ;
Qu’il apparaît équitable en l’espèce de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles non compris dans les dépens d’appel ;
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du Conseil de Prud’Hommes de Pau en date du 15 décembre 2020 ;
Et y ajoutant,
CONDAMNE Monsieur [L] [C] aux dépens d’appel et dit n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du code procédure civile en cause d’appel.
Arrêt signé par Madame CAUTRES, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,