Your cart is currently empty!
COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 02 FEVRIER 2023
N° RG 22/00703 – N° Portalis DBVY-V-B7G-G7BU
[N] [P]
– demandeur à la saisine –
C/ S.C.A. LA SUZIENNE La société prise en la personne de son représentant légal en exercice.
Décision déférée à la Cour : Jugement en date du 15/05/2017 rendu par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MONTELIMAR dossier n°F 16/00140
DEMANDEUR A LA SAISINE
Monsieur [N] [P]
– demandeur à la saisine –
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me MONCEAUX-FAVRE de la SCPA MONCEAUX-FAVRE DE THIERRENS BARROUIN THEVENOT VRIGNAUD, avocat plaidant inscrit au barreau de NIMES, substitué par Me Emmanuelle DRIMARACCI, avocat au barreau de NIMES
et par Me Fabien PERRIER, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY
DEFENDERESSE A LA SAISINE
S.C.A. LA SUZIENNE La société prise en la personne de son représentant légal en exercice.
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Laurent ERRERA de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 10 Novembre 2022 en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Frédéric PARIS, Président,
Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller, chargé du rapport
Madame Isabelle CHUILON, Conseiller,
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Sophie MESSA,
Copies délivrées le :
********
FAITS ET PROCEDURE
M. [N] [P] a été engagé par la société coopérative vinicole La Suzienne en contrat à durée indéterminée le 1er février 2001 en qualité d’oenologue – directeur technique, position cadre, avec une rémunération de 11483,82 francs brut.
Le 1er avril 2004, une convention de forfait a été établie mentionnant notamment une rémunération forfaitaire brute annuelle de 42000 euros, soit 3000 euros brut par mois sur 14 mois.
A compter du 1er janvier 2008, son salaire a été porté à 4497,98 euros brut.
La convention collective applicable est celle des vins, cidres, jus de fruits, sirops, spiritueux et liqueurs de France.
M. [N] [P] a été convoqué à un entretien préalable à licenciement ‘xé le 30 novembre 2010.
Il a été licencié pour motif économique le 22 décembre 2010, avec un terme de préavis au 23 mars 2011
M. [N] [P] a saisi le conseil de prud’hommes de Montélimar le 20 mai 2011 aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et d’obtenir les indemnités afférentes. L’affaire a été radiée puis remise au rôle à plusieurs reprises.
Par jugement en date du 15 mai 2017, le conseil de prud’hommes de Montélimar, a :
– rejeté la demande d’exception soulevée par la partie défenderesse,
– déclaré recevables l’action et l’instance de M. [N] [P],
– dit que le licenciement de M. [N] [P] reposait bien sur un motif économique,
– débouté M. [N] [P] de l’ensemble de ses demandes,
– condamné M. [N] [P] à payer à la SCV La Suzienne la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
M. [N] [P] a interjeté appel de la décision en sa globalité par déclaration en date du 13 juillet 2017.
Par arrêt du 28 janvier 2020, la chambre sociale de la cour d’appel de Grenoble a:
– déclaré M. [N] [P] recevable en son appel,
– dit que la demande de la société coopérative vinicole La Suzienne au titre de la péremption est irrecevable,
– dit que l’action de M. [N] [P] n’est pas prescrite,
– confirmé en toutes ses dispositions le jugement déféré,
– condamné M. [N] [P] à payer à la société coopérative vinicole La Suzienne la somme de 1500 euros à sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
– condamné M. [N] [P] aux dépens.
M [N] [P] a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.
Par arrêt du 8 décembre 2021, la chambre sociale de la Cour de cassation a :
– cassé et annulé, mais seulement en ce qu’il a débouté M. [N] [P] de sa demande en paiement d’un rappel de salaires, l’a condamné aux dépens et à payer à la société Coopérative viticole La Suzienne la somme de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, l’arrêt rendu le 28 janvier 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Grenoble,
– remis, sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d’appeI de Chambéry,
– condamné la société Coopérative viticole La Suzienne aux dépens,
– en application de l’article 700 du code de procédure civile, rejeté la demande formée par la société Coopérative viticole La Suzienne, et l’ a condamnée à payer à M. [N] [P] la somme de 3 000 euros,
– dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, l’arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé.
La cour de cassation a retenu que «’pour débouter le salarié de sa demande en paiement d’un rappel de salaires, l’arrêt énonce que la cour à l’instar des premiers juges constate qu’aucune prime de quatorzième mois n’est prévue par le contrat de travail initial conclu en 2001 et que les bulletins de paie montrent qu’il a bien perçu la gratification du treizième mois prévu dans son contrat de travail ce qu’il ne conteste pas. Il ajoute que l’intéressé qui ne travaillait plus au sein de l’entreprise durant les années 2011 et 2012 en raison de son licenciement ne peut réclamer le versement de cette prime dite de quatorzième mois qui lui était versée mensuellement jusqu’au jour de son départ le 23 mars 2011. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d’appel, le salarié sollicitait un rappel de salaire au titre de la treizième et de la quatorzième partie de sa rémunération annuelle forfaitaire et sur les trois mois de préavis, ainsi qu’au titre de la gratification contractuelle de treizième mois, la cour d’appel, qui a modifié l’objet du litige, a violé le texte susvisé.’»
Par déclaration en date du 21 avril 2022, M. [N] [P] a saisi la cour d’appel de Chambéry pour voir vidé le renvoi ordonné par cet arrêt.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 30 septembre 2022, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens, M. [N] [P] demande à la cour de :
– réformer en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud’hommes de Montélimar du 15 mai 2017, sauf en ce qu’il a dit que son licenciement reposait bien sur un motif économique,
– condamner la SCV La Suzienne à lui verser :
* 122486 euros pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,
* 43359,12 euros bruts au titre des treizième et quatorzième parties de son salaire,
* 3810,59 euros bruts au titre de la prime de 13ème mois conventionnelle,
* 23270,50 euros bruts au titre de l’indemnité de congés payés,
* 5101,62 euros bruts au titre de complément de l’indemnité de licenciement économique,
* 19812 euros au titre d’indemnité compensatoire de l’aide au retour à l’emploi,
* 25000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
* 6000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamner la SCV La Suzienne aux entiers dépens, en ce compris ceux de première instance.
Au soutien de ses demandes, M. [N] [P] expose qu’au regard de sa date d’introduction, l’instance est régie par les dispositions applicables antérieurement au 1er août 2016 qui autorisaient des demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail même en cause d’appel et même devant la cour de renvoi.
La convention de forfait du 1er avril 2004 prévoyait un salaire annuel forfaitaire correspondant à quatorze fois le salaire mensuel. Il résulte de la jurisprudence que dans ce cas les 13ème et 14ème versements correspondent à des salaires et non des primes.
Or il n’a jamais perçu ces 13ème et 14ème versements composant la totalité de son salaire, ce dont attestent ses bulletins de salaire.
Une prime de 13ème mois ne peut être intégrée, sans l’accord du salarié, dans la rémunération contractuelle. Or aucun accord n’est démontré sur ce point.
La prime «’vendanges’» compensait sa mise à disposition hors forfait durant les vendanges, et là encore aucun accord prévoyant l’intégration de cette prime dans le salaire n’est démontré.
Il est fondé à solliciter le paiement des 13ème et 14ème mois sur les cinq ans précédant la rupture du contrat de travail et sur les trois mois du préavis, ainsi que le montant manquant sur la prime du 13ème mois conventionnelle.
L’inclusion de l’indemnité de congés payés dans la rémunération forfaitaire doit résulter d’une convention expresse entre les parties. Or la convention de forfait ne fait aucune référence aux congés payés, de sorte qu’il doit être considéré que ceux-ci n’étaient pas inclus dans la rémunération forfaitaire. Par ailleurs cette convention précise que la rémunération forfaitaire «’rémunère l’exercice de la mission confiée dans la limite du nombre de jours travaillés fixés par l’accord collectif’», de sorte qu’elle ne rémunère que le travail et pas les congés payés.
Il convient de tenir compte de l’incidence des 13ème et 14ème parties de salaire et de leur influence sur la prime de treizième mois conventionnelle pour compléter l’indemnité de licenciement et les allocations d’aide au retour à l’emploi qui lui ont été versées.
L’employeur a manqué à son obligation de reclassement, le licenciement est donc sans cause réelle et sérieuse. Il ne démontre pas avoir sérieusement et loyalement, préalablement au licenciement, recherché à le reclasser.
En le privant d’une partie substantielle de sa rémunération, en employant à son encontre, par l’intermédiaire du Président, des manoeuvres vexatoires pour le pousser à la démission, en ne mettant pas en place des négociations sur le montant de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, l’employeur a exécuté de façon déloyale le contrat de travail.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 31 juillet 2022, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens, la SCV La Suzienne demande à la cour de :
Au principal :
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Montélimar et s’agissant de l’arrêt de la cour d’appel le dispositif qui n’a pas été renvoyé par la cour de cassation à la cour d’appel de renvoi de Chambéry,
Subsidiairement :
– débouter M. [N] [P] de l’ensemble de ses demandes,
A titre reconventionnel :
– condamner M. [N] [P] au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [N] [P] aux dépens.
Au soutien de ses demandes, la SCV La Suzienne expose que les demandes nouvelles formulées par M. [N] [P] sont irrecevables en application des articles 564, 633 et 639 du code de procédure civile.
M. [N] [P] a perçu chaque année une «’prime vendanges’» et une prime de 13ème mois prévue par la convention collective. Rien n’interdisait de renommer dans les bulletins de salaire ce qui était la traduction des 13ème et 14ème mois visés par le contrat.
La notion de rémunération annuelle totale figurant à la convention de forfait incluait le salaire de base ainsi que les autres éléments de salaire comme les primes.
L’employeur a bien versé en quatorze fois les rémunérations dues.
Les deux directeurs généraux en poste en 2004 et 2007 attestent de ce que la convention de forfait incluait le 13ème mois de la convention collective et le 14ème mois correspondant aux vendanges, comme il en est d’usage dans la profession, et ce d’un commun accord avec le salarié qui n’a jamais contesté cette application.
Le salarié ayant été licencié, il ne peut réclamer une quelconque somme pour l’intervalle compris entre le 1er avril 2011 et le 31 mars 2012.
M. [N] [P] a bénéficié du maintien de son salaire lors de sa prise de congés, de sorte que la somme éventuellement due ne serait que de 7115,65 euros brut, et non 23270,50 euros brut.
Un poste de responsable fabrication a été proposé à M. [N] [P] dans le cadre de l’obligation de reclassement, poste que le salarié a refusé.
L’employeur justifie des recherches externes de reclassement qui ont été effectuées.
La clôture a été prononcée à la date du 2 novembre 2022. L’affaire a été appelée à l’audience du 10 novembre 2022. A l’issue, elle a été mise en délibéré au 24 janvier 2023, prorogé au 02 février 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité des demandes nouvelles en cause d’appel
Il résulte des dispositions de l’article R 1452-7 du code du travail applicables aux instances introduites devant le conseil de prud’hommes antérieurement au 1er août 2016 que les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel.
La présente instance ayant été introduite devant le conseil de prud’hommes de Montélimar antérieurement au 1er août 2016, les demandes nouvelles présentées par M. [N] [P] en cause d’appel sont recevables.
Sur les demandes de rappel de salaire au titre du 13ème et 14ème mois
Aux termes de l’article 1134 du code civil, «’les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.’»
Par ailleurs, si l’article 1192 du code civil qui dispose que «’on ne peut interpréter les clauses claires et précises à peine de dénaturation’» n’était pas en vigueur à la date de la convention de forfait concernée, une jurisprudence constante à cette date posait le même principe.
Il est de jurisprudence constante que lorsque le contrat de travail prévoit un salaire annuel fixé à treize fois le salaire mensuel, le treizième mois correspond à un salaire et non à une prime (Cass soc. 19 décembre 1990, n°88-41.075; Cass soc 8 juin 2011, n°09-71.056; Cass soc 17 octobre 2018, n°17-20.646).
Le contrat de travail du 1er février 2001 prévoyait une rémunération correspondant à une durée hebdomadaire de travail de 35 heures, outre une gratification dite «’13ème mois’» égale au salaire de décembre.
La convention de forfait du 1er avril 2004 prévoyait la perception par le salarié d’une «’rémunération forfaitaire brute annuelle de 42000 euros (ancienneté incluse) soit 3000 euros brut par mois, sur 14 mois’».
Elle fixait ainsi de façon claire et précise une modalité de règlement d’un salaire annuel payable en 14 fois.
Il est de jurisprudence constante que la rémunération contractuelle d’un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié ni dans son montant ni dans sa structure sans son accord exprès (Cass soc 25 janvier 2017, n°15-21.352).
La convention de forfait du salarié ne fait aucune référence à un salaire annuel total qui inclurait d’éventuelles primes, notamment la prime de 13ème mois prévue au contrat de travail du 1er février 2001 ou une prime de 13ème mois conventionnelle, ou une prime de vendanges.
L’employeur produit deux attestations de messieurs [I], directeur général de la société La Suzienne en 2004, et [J], président de cette même société en 2017, qui soutiennent que la rémunération forfaitaire annuelle du salarié prévue à la convention de forfait comprenait le 13ème mois de la convention collective ainsi que le 14ème mois correspondant aux vendanges, ce en accord avec lui.
Il n’est par ailleurs pas contesté que M. [N] [P] n’a jamais, sur la durée de son contrat de travail, réclamé le paiement des 13ème et 14ème mois de salaire qu’il sollicite désormais dans le cadre de la présente procédure.
Ces seuls éléments ne sauraient cependant démontrer que M. [N] [P] avait donné son accord exprès à une modification de son contrat de travail portant sur la structure de sa rémunération et conduisant à inclure dans son salaire annuel de base les primes de vendanges et de 13ème mois.
M. [N] [P] est donc en droit de solliciter le paiement de ses 13ème et 14ème mois de salaire dont il résulte des bulletins de paye produits qu’il ne lui ont jamais été versés, ce sur les cinq ans précédant l’introduction de l’instance.
La convention de forfait mentionnait une année de référence courant du 1er avril au 31 mars.
La demande présentée par le salarié à ce titre, si elle était contestée dans son fondement, n’est pas contestée par l’employeur dans son montant, qui apparaît fondé au regard des pièces produites aux débats.
Il lui sera donc alloué à titre de rappel de salaires des 13ème et 14ème mois la somme de 43359,12 euros.
Il est également en droit de solliciter un rappel au titre de la prime conventionnelle de 13ème mois, qui correspondait à 1/12ème des rémunérations brutes perçues dans l’année, en incluant dans son calcul les rappels de salaires ci-dessus.
La demande présentée par le salarié à ce titre, si elle était contestée dans son fondement, n’est également pas contestée par l’employeur dans son montant, qui apparaît fondé au regard des pièces produites aux débats.
Il lui sera donc alloué 3810,59 euros à ce titre.
Sur la demande de rappel de salaire au titre des congés payés
La convention de forfait ne prévoyait aucune modalité particulière s’agissant des congés.
En application de l’article L 3141-24 du code du travail, l’indemnité de congés payés est égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié sur la période de référence quand ce mode de calcul est plus favorable que le maintien de salaire durant les congés.
En l’espèce, M. [N] [P] devait bénéficier de la «’règle du 1/10è’», qui lui est plus favorable.
Il résulte des bulletins de paye du salarié que celui-ci a toujours bénéficié du maintien de son salaire durant ses congés payés.
Le calcul qu’il produit, effectué par un expert comptable et intégrant les 13ème et 14ème mois de salaire, fait ressortir un différentiel négatif de 7115,65 euros brut entre les sommes versées entre juin 2006 et mars 2011 au titre du maintien de salaire et les sommes qui auraient dû être versées en application de la «’règle du 1/10ème’». Ce calcul apparaît conforme aux pièces produites, notamment les bulletins de salaire.
Il y a donc lieu de condamner la SCA La Suzienne à verser à M. [N] [P] la somme de 7115,65 euros brut au titre des congés payés.
Sur la demande de rappel au titre de l’indemnité de licenciement
La somme sollicitée à ce titre par le salarié apparaît fondée tant dans son principe, résultant de la réintégration dans son salaire des 13ème et 14ème mois de salaire non pris en compte pour le calcul de l’indemnité qui lui a été versée, que dans son montant, qui n’est pas contesté par l’employeur.
En conséquence, la SCA La Suzienne sera condamnée à verser à M. [N] [P] la somme de 5101,62 euros.
Sur la demande au titre de l’indemnité compensatoire de l’aide au retour à l’emploi
Le calcul et le versement de l’aide au retour à l’emploi sont de la compétence de Pôle Emploi, auprès duquel il appartient au salarié de s’adresser pour faire valoir ses droits éventuellement corrigés afin de tenir compte des rappels de salaire ordonnés par la présente décision.
M. [N] [P] sera donc débouté de sa demande à ce titre.
Sur la demande au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse
La contestation de la procédure de reclassement n’apparaît pas être une nouvelle demande, mais un moyen nouveau tendant à remettre en cause le caractère réel et sérieux de la cause du licenciement économique. Or la décision de la cour d’appel de Grenoble portant sur la validité du licenciement économique est devenue définitive.
En conséquence, la demande au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre de l’indemnité s’y rapportant est irrecevable.
Sur la demande au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail
Aux termes de l’article 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
Il appartient à celui qui l’invoque de démontrer que le contrat de travail n’a pas été exécuté de bonne foi par l’autre partie.
Le salarié indique au soutien de cette demande que l’employeur l’aurait privé d’une partie substantielle de sa rémunération en ne lui réglant pas ses 13ème et 14ème mois, et ses droits à congés payés afférents.
L’employeur produit deux attestations de [V] [I], ancien directeur général de la société ayant signé avec le salarié la convention de forfait en 2004, et de [B] [J], ancien président de la société, dont il ressort que ces derniers avaient à l’époque considéré avoir convenu avec le salarié que les 13ème et 14ème mois prévus dans la convention de forfait de ce dernier consistaient dans le 13ème mois prévu à la convention collective et au 14ème mois indemnisant les vendanges. Ils évoquent un accord sur ce point avec M. [N] [P].
Il sera rappelé que le salarié ne justifie pas avoir sollicité au cours de son contrat de travail le paiement de ces 13ème et 14ème mois.
En tout état de cause, ces attestations sont de nature à s’interroger sur un éventuel malentendu entre les parties s’agissant du contenu de la convention de forfait.
Par ailleurs, le salarié ne produit pas d’élément de nature à justifier que le non versement de ces 13ème et 14ème mois de salaire résulterait d’une exécution de mauvaise foi par l’employeur du contrat de travail.
S’agissant de la clause de non-concurrence, il résulte d’une jurisprudence constante (Cass. soc., 10 juill. 2002, n° 00-45.3879 ; Cass. soc., 10 juill. 2002, n° 99-43.334 ; Cass. soc., 10 juill. 2002, n° 00-45.135) que la clause de non-concurrence doit obligatoirement pour être licite comporter une contrepartie financière.
Il est établi qu’aucune contre-partie financière n’avait été convenue entre les parties, de sorte que la clause de non-concurrence était nulle, et que M. [N] [P] n’avait aucune obligation de l’appliquer.
Il ne saurait aujourd’hui alléguer de la déloyauté de l’employeur qui n’aurait pas entamé de négociations avec lui pour déterminer le montant de cette contrepartie financière tout en ne lui redonnant pas sa liberté d’installation, alors que lui-même n’avait ni sollicité ni engagé de négociations, et que l’absence de contrepartie financière entraînait de fait la nullité de la clause de non-concurrence.
Au regard de ces éléments, il convient de débouter M. [N] [P] de sa demande à ce titre.
Sur l’article 700 du code de procédure civile
La SCA La Suzienne succombant à l’instance, elle sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel, et sera également condamnée à verser à M. [N] [P] la somme de 2000 euros au titre de ‘larticle 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
DÉCLARE recevables les demandes nouvelles formulées par M. [N] [P] en cause d’appel,
DÉCLARE irrecevable la demande de M. [N] [P] au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
DÉBOUTE M. [N] [P] de sa demande au titre de l’indemnité compensatoire d’aide au retour à l’emploi,
DÉBOUTE M. [N] [P] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
CONDAMNE la SCA La Suzienne à verser à M. [N] [P] :
la somme de 43359,12 euros à titre de rappel de salaires des 13ème et 14ème mois,
la somme de 3810,59 euros au titre de la prime conventionnelle de 13ème mois,
la somme de 7115,65 euros à titre de rappel de congés payés,
la somme de 5101,62 euros à titre de complément à l’indemnité légale de licenciement,
CONDAMNE la SCA La Suzienne aux dépens de première instance et d’appel,
CONDAMNE la SCA La Suzienne à verser à M. [N] [P] la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ainsi prononcé publiquement le 02 Février 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Frédéric PARIS, Président, et Madame Capucine QUIBLIER, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président