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N° RG 21/03551 – N° Portalis DBV2-V-B7F-I4AZ
COUR D’APPEL DE ROUEN
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 27 SEPTEMBRE 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
19/03478
Tribunal judiciaire d’Evreux du 31 août 2021
APPELANT :
Monsieur [C] [X]
né le 14 Juin 1950 à [Localité 10]
[Adresse 5]
[Localité 4]
comparant en personne, représenté par Me Céline BART de la SELARL EMMANUELLE BOURDON-CÉLINE BART AVOCATS ASSOCIÉS, avocat au barreau de Rouen et assisté de Me Matthieu LEMAIRE, avocat au barreau de Caen
INTIMEES :
SASU PREMYS (anciennement dénommée Sasu BRUNEL DÉMOLITION)
RCS de Versailles 323 592 881
[Adresse 3]
[Localité 6]
représentée par Me Valérie GRAY de la SELARL GRAY SCOLAN, avocat au barreau de Rouen et assistée de Me François LEGENDRE, avocat au barreau de Rouen
SA ALLIANZ IARD
RCS de Nanterre 542 110 291
[Adresse 1]
[Localité 7]
représentée par Me Marc ABSIRE de la SELARL DAMC, avocat au barreau de Rouen et assistée de Me Benjamin PORCHER, avocat au barreau de Paris
SAS POLYEXPERT ILE DE FRANCE CENTRE
RCS de Nanterre 438 209 926
[Adresse 2]
[Localité 8]
représentée par Me Edouard POIROT-BOURDAIN de la SELARL HERCE MARCILLE POIROT-BOURDAIN, avocat au barreau de Rouen et assistée de Me de Gaudemont, avocat au barreau du Val d’Oise
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 6 février 2023 sans opposition des avocats devant Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre, rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre
M. Jean-François MELLET, conseiller
Mme Magali DEGUETTE, conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Catherine CHEVALIER
DEBATS :
A l’audience publique du 6 février 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 12 avril 2023, date à laquelle le délibéré a été prorogé au 14 juin 2023, au 30 août 2023, puis au 27 septembre 2023
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 27 septembre 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.
*
* *
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Dans la nuit du 20 au 21 octobre 2005, un incendie a détruit le deuxième étage et les combles du château de [Localité 9], propriété de M. [X], ne laissant en élévation que neuf conduits de cheminée et vingt des vingt-deux chiens assis. La Sa Agf aux droits de laquelle vient désormais la Sa Allianz Iard, assureur des lieux, a désigné la Sas Polyexpert pour évaluer les dommages et définir les mesures préventives.
M. [X] a sollicité l’intervention de la Sas Frères pour l’assister dans le cadre de l’expertise amiable. En raison des désaccords entre les techniciens, un troisième expert, la société Betamex, a déposé un rapport le 10 avril 2006.
Suivant devis accepté le 2 mai 2006, M. [X] a confié la réalisation des travaux de démolition préventive pour un montant de 233 000 euros à la Sasu Brunel Démolition désormais dénommée Premys. Le 30 juin 2006, cette dernière a dressé une facture de 176 840,56 euros. M. [X] a refusé de payer cette facture en faisant valoir que les travaux étaient inachevés, et étaient à l’origine de dégradations et a mis en demeure, le 5 décembre 2006 puis le 15 janvier 2007, la société de terminer le chantier.
Par ordonnance du 27 novembre 2008, le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire. L’expert, M. [O], a déposé son rapport le 30 septembre 2009.
Par acte d’huissier du 14 décembre 2009 puis par actes des 24 et 25 août 2011, la Sasu Bunel Démolition a fait assigner d’une part M. [X], d’autre part, la Sa Allianz Iard assureur de l’immeuble et son propre assureur, la Sa Axa France Iard. Les deux instances ont été jointes le 3 octobre 2011.
Dans le cadre d’une procédure distincte, par arrêt de la cour d’appel de Rouen du 5 janvier 2012 rectifié par arrêt des 5 mai et 3 juillet 2012 afin d’inclure la TVA, la Sa Allianz Iard a été condamnée à payer à M. [X] les sommes suivantes :
– 5 769 100,86 euros au titre des dommages matériels correspondant à la reconstruction du château,
– 134 122,13 euros au titre des pertes pécuniaires et frais divers,
– 769 413 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires.
Par jugement avant dire droit du 8 octobre 2013, le tribunal a ordonné un complément d’expertise pour que soient évalués la réalité et le coût de reprise des désordres provoqués par la Sasu Brunel Démolition.
Par actes des 7 et 15 octobre 2015, M. [X] a appelé en la cause la Sas Polyexpert Île-de-France Centre venant aux droits de la Sa Polyexpert Île-de-France et la Sa Allianz Iard. Les procédures ont été jointes le 14 décembre 2015.
Le rapport de l’expert judiciaire a été déposé le 27 juin 2018.
Par jugement contradictoire du 31 août 2021, le tribunal judiciaire d’Évreux a :
– prononcé la mise hors de cause de la Sa Axa France Iard,
– prononcé l’irrecevabilité des demandes formulées contre la Sas Polyexpert comme étant prescrites,
– prononcé l’irrecevabilité des demandes formulées contre la Sa Allianz Iard,
– débouté M. [X] de ses demandes de nullité du rapport d’expertise établi par
M. [U] le 23 mars 2018,
– condamné M. [X] à payer à la Sasu Premys la somme de de 122 298,70 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision,
– condamné la Sasu Premys à payer à M. [X] la somme de 20 000 euros au titre du préjudice subi du fait de l’absence de pose de la couverture provisoire,
– condamné la Sasu Premys à payer à M. [X] la somme de 59 404 euros HT avec indexation en fonction de l’évolution de l’indice BT 01 entre 2017 et jusqu’à complet paiement au titre des désordres relatifs aux opérations de démolition,
– ordonné la compensation entre les condamnations prononcées à l’encontre de la Sasu Premys et à l’encontre de M. [X],
– débouté la Sa Allianz Iard de sa demande indemnitaire dirigée à l’encontre de
M. [X] au titre de la résistance abusive,
– débouté les parties de leurs plus amples demandes,
– condamné la Sasu Premys à payer à la Sa Axa France Iard la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [X] à payer à la Sa Allianz Iard la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [X] à payer à la Sas Polyexpert la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté la Sas Polyexpert de sa demande dirigée à l’encontre de la Sa Axa France Iard sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté les parties de leurs demandes complémentaires au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– laissé à chaque partie la charge de ses dépens,
– ordonné l’exécution provisoire.
Par déclaration reçue au greffe le 8 septembre 2021, M. [X] a formé appel du jugement.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 3 janvier 2023, M. [C] [X] demande à la cour, au visa des articles 175 à 178, 16, 237, 238 et 244, 910-4, alinéa 1er du code de procédure civile, 1134 et 1147, 1184 et 1382 anciens, 1788 et 2224 du code civil, L. 111-1, L. 113-3 et L. 114-1 (anciens) du code de la consommation, L. 114-1 du code des assurances, de réformer le jugement entrepris et de :
in limine litis,
– prononcer la nullité du rapport d’expertise de M. [U] du 23 mars 2018,
à titre principal,
– déclarer irrecevables la Sasu Premys de ses demandes formées au visa de l’article 1799-1 du code civil comme tardives et contraires au principe de concentration des moyens,
– déclarer la Sasu Premys responsable de son préjudice,
– condamner la Sasu Premys à l’indemniser des préjudices suivants :
. la somme de 8 580 550 euros au titre du coût de démolition et de reconstruction du sauvetage perdu du sinistre incendie (à parfaire de la variation de l’indice BT 01 qui sera connu au jour de l’arrêt à intervenir),
. la somme de 1 684 256 euros au titre de l’actualisation de la variation des indemnités du sinistre incendie versées suivant arrêt de la cour d’appel de Rouen du 5 janvier 2012 (à parfaire de la variation de l’indice BT 01 qui sera connu au jour de l’arrêt à intervenir),
. la somme de 44 068 euros au titre du préjudice financier de non-emploi des sommes versées par la Sa Allianz Iard,
. la somme de 2 726 784 euros au titre du préjudice de non-jouissance de sa résidence principale (à parfaire de la somme de 16 832 euros pour chaque mois écoulé au-delà du 30 avril 2023, date supposée du prononcé de l’arrêt jusqu’à la date effective de l’arrêt à intervenir),
. 500 000 euros au titre du préjudice moral subi,
– débouter la Sasu Premys de ses demandes,
– débouter les sociétés Allianz Iard et Polyexpert de leurs demandes,
à titre subsidiaire,
– condamner in solidum les sociétés Premys, Allianz et Polyexpert à lui payer les sommes suivantes :
. la somme de 8 580 550 euros au titre du coût de démolition et de reconstruction du sauvetage perdu du sinistre incendie (à parfaire de la variation de l’indice BT 01 qui sera connu au jour de l’arrêt à intervenir),
. la somme de 1 684 256 euros au titre de l’actualisation de la variation des indemnités du sinistre incendie versées suivant arrêt de la cour d’appel de Rouen du 5 janvier 2012 (à parfaire de la variation de l’indice BT 01 qui sera connu au jour de l’arrêt à intervenir),
. la somme de 44 068 euros au titre du préjudice financier de non-emploi des sommes versées par la Sa Allianz Iard,
. la somme de 2 726 784 euros au titre du préjudice de non-jouissance de sa résidence principale (à parfaire de la somme de 16 832 euros pour chaque mois écoulé au-delà du 30 avril 2023, date supposée du prononcé de l’arrêt jusqu’à la date effective de l’arrêt à intervenir),
. 500 000 euros au titre du préjudice moral subi,
– débouter la Sasu Premys de ses demandes,
– débouter les sociétés Allianz Iard et Polyexpert de leurs demandes,
en toutes hypothèses,
– condamner in solidum les sociétés Premys, Allianz et Polyexpert à lui payer la somme de 200 000 euros outre les dépens qui comprendront les frais d’expertise judiciaire de M. [O] et de M. [U] au visa des articles 695 et 696 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées le 16 janvier 2023, la Sasu Premys demande à la cour, au visa des articles 1101, 1134, 1135 et suivants et 1147 (anciens), 1799-1 du code civil, de réformer le jugement en ce qu’il a :
– condamné M. [X] à payer à la Sasu Premys la somme de de 122 298,70 euros TTC avec intérêts au taux légal, applicable aux particuliers, à compter de la signification de la décision,
– condamné la Sasu Premys à payer à M. [X] la somme de 20 000 euros au titre du préjudice subi du fait de l’absence de pose de la couverture provisoire,
– condamné la Sasu Premys à payer à M. [X] la somme de 59 404 euros HT avec indexation en fonction de l’évolution de l’indice BT 01 entre 2017 et jusqu’à complet paiement au titre des désordres relatifs aux opérations de démolition,
– débouté les parties de leurs plus amples demandes au titre des dommages et intérêts, de l’indemnité procédurale et des dépens et frais d’expertise,
statuant à nouveau, de :
– dire M. [X] autant mal fondé en fait qu’en droit en sa demande visant à la voir déclarer irrecevable en ses demandes formées au visa de l’article 1799-1 du code civil lesquelles ne sont en l’occurrence ni tardives ni contraires au principe de concentration des moyens, comme ayant été exposées dès les premières écritures signifiées le 8 mars 2022,
– condamner M. [X] à lui payer la somme de 176 840,56 euros TTC correspondant à 70 % du chantier, les intérêts de cette somme devant courir à compter de la mise en demeure du 12 octobre 2007,
– juger M. [X] entièrement responsable de la non-exécution de la phase 2 des travaux et notamment de l’absence de pose de la couverture provisoire ainsi que de la dégradation de sa propriété,
– en conséquence le déclarer mal fondé en ses demandes indemnitaires et
– condamner M. [X] à restituer les sommes de 20 000 euros versée au titre du préjudice subi du fait de l’absence de pose de couverture provisoire, et de
59 404,38 euros HT avec indexation en fonction de l’évolution de l’indice BT 01 entre 2017 et jusqu’à complet paiement au titre des désordres relatifs aux opérations de démolition,
– fixer le montant des sommes dues à M. [X] au titre des désordres imputables à la société aux montants reconnus et justifiés dans le cadre de l’expertise judiciaire confiée à M. [U],
– infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée au titre des dommages et intérêts, de l’indemnité procédurale et des dépens et frais d’expertise,
l’accueillant en son appel incident et la disant bien fondée,
– condamner M. [X] à lui payer une somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– une somme de 200 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d’appel que la Selarl Gray Scolan avocats associés, sera autorisée à recouvrer directement pour ceux la concernant, les frais d’expertise restant à la charge de M. [X] conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
– prononcer la compensation des sommes dues au titre de l’indemnisation des désordres inhérents aux travaux due par la société avec la créance due par M. [X].
Par dernières conclusions notifiées le 13 janvier 2023, la Sa Allianz Iard, assureur du bien, demande à la cour, de :
à titre principal,
– confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré les prétentions de M. [X] à son égard irrecevables comme prescrites,
à titre subsidiaire,
– déclarer irrecevables les prétentions de M. [X] à son encontre comme se heurtant à l’autorité de la chose jugée et au principe de concentration des motifs,
à titre très subsidiaire,
– débouter M. [X] ou tout autre partie de l’ensemble des demandes dirigées contre elle,
en tout état de cause,
– infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté ses demandes reconventionnelles au titre du caractère abusif des prétentions de M. [X] et statuant à nouveau le condamner à lui payer une somme de 100 000 euros de ce chef,
– confirmer le jugement sur le principe d’une condamnation de M. [X] au titre des frais de procédure mais l’infirmer sur le montant accordé et condamner M. [X] à lui payer la somme de 75 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [X] aux dépens dont distraction au profit de Me Absire en application de l’article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées le 12 janvier 2023, la Sas Polyexpert Île-de-France demande à la cour, au visa des articles 2224 et 1382 du code civil de :
à titre principal,
– confirmer le jugement en ce qu’il a :
. prononcé l’irrecevabilité des demandes formulées contre la Sas Polyexpert comme étant prescrites,
. condamné M. [X] à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
à titre subsidiaire,
– débouter M. [X] en l’absence de démonstration de la responsabilité civile recherchée et prononcer sa mise hors de cause,
très subsidiairement,
– déclarer que l’éventuelle et très contestée responsabilité serait en toutes hypothèses limitées à la période du 24 octobre 2005 au 31 janvier 2006 ou à défaut et au pire jusqu’au mois d’avril 2006, date du début de l’intervention de la société Premys,
– déclarer que M. [X] ne justifie pas d’un préjudice en lien de causalité direct et certain avec ses diligences,
– débouter M. [X] de ses demandes,
en tout état de cause,
– débouter M. [X] de toute demande indemnitaire dirigée à son encontre pour la période postérieure au mois d’avril 2006, ou à défaut au mois de juin 2006,
– condamner M. [X] à lui payer une somme de 25 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont distraction au profit de Me Jérôme Hercé en application de l’article 699 du code de procédure civile.
Il est renvoyé aux écritures susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 18 janvier 2023.
MOTIFS
I – Sur la nullité du rapport d’expertise de M. [U] du 23 mars 2018
In limine litis, M. [X] demande l’infirmation du jugement de ce chef et sollicite le prononcé de la nullité de ce rapport.
De la page 21 à la page 60 de ses conclusions auxquelles il est renvoyé, M. [X] reproche à l’expert au titre des motifs graves devant justifier la nullité du rapport :
« a) S’être emparé d’une mission qui ne lui a jamais été confiée ;
b) Avoir refusé d’exécuter, de décrire et de chiffrer les dommages résultant de l’absence de pose d’une toiture provisoire à laquelle s’était contractuellement engagée la société PREMYS ; malgré l’ordonnance du Juge de la mise en état du 29 février 2016 qui a étendu l’expertise au contradictoire des sociétés ALLIANZ et POLYEXPERT sur les écrits dudit expert [U] qui développait alors que sans cette mesure il ne pourrait pas définir les responsabilités entre les susnommés ;
c) Avoir falsifié à au moins neuf reprises les résultats et données de l’expertise allant même jusque conclure dans son rapport le contraire de ce que ses propres photographies démontrent ; ainsi que d’écrire le contraire de ce que les analyses et les conclusions de ses propres sapiteurs, les sociétés Normandie Termites et son laboratoire BCCM-MUCL ont démontré et conclu ;
d) Avoir évincé les constats d’huissier des 4 avril et 28 septembre 2017 qui n’ont été dressé que pour décrire l’aggravation constante des désordres que
M. [U] refusait de venir lui-Même constater. Alors que dans ses notes aux parties il avait lui-même reconnu le caractère évolutif des désordres ;
e) Avoir refusé de répondre aux dires de M. [X] ».
Le premier juge a rejeté la demande visant le prononcé de la nullité du rapport.
L’article 175 du code de procédure civile dispose que la nullité des décisions et actes d’exécution relatifs aux mesures d’instruction est soumise aux dispositions qui régissent la nullité des actes de procédure. Elle suppose la démonstration d’un grief causé par une violation des textes constituant un vice de procédure.
Comme rappelé par le premier juge,
– l’article 237 du code de procédure civile précise que le technicien commis doit accomplir sa mission avec conscience, objectivité et impartialité ;
– l’article 238 du même code indique que le technicien doit donner son avis sur les points pour l’examen desquels il a été commis. Il ne peut répondre à d’autres questions, sauf accord écrit des parties. Il ne doit jamais porter d’appréciations d’ordre juridique.
Il convient d’ajouter que le technicien ne donnant qu’un avis, le rapport d’expertise ne lie pas le juge. Ainsi les erreurs d’appréciation, d’analyses de l’expert sauf si elle procède de manquements relevant des articles susvisés ne constituent pas une cause de nullité en ce qu’elles sont, après les opérations, de nouveau soumises au débat contradictoire devant la juridiction saisie.
M. [X] conteste les constatations, observations, réflexions et conclusions de l’expert sur les aspects les plus techniques, exprimant ainsi pleinement son désaccord avec le professionnel. La seule désapprobation portée sur le travail de l’expert, quand bien même elle serait nourrie de termes forts telles que des allégations de « mensonges » voire de « falsifications », ne constitue pas en tant que tel un vice de procédure au regard des dispositions des articles 232 et suivants du code de procédure civile. En conséquence, il ne sera répondu aux écritures que dans la mesure où l’argumentation conduit à envisager l’existence d’un vice de procédure.
1- L’exécution d’une mission non confiée
M. [X] soutient que :
– la seule mission confiée par le jugement du 8 octobre 2013 était de dire « si l’arase avait été effectuée ou non à cette côte (1,10 m sous corniche), si des fers raidisseurs des façades avaient ou non été coupés, si cet arasement avait été effectué ou non dans les règles de l’art ou s’il avait eu pour conséquence l’ouverture des murs de façades et la désolidarisation de ceux des ailes » ;
– remettant en cause les expertises amiables visant la nécessité d’écrêter le bâtiment à la cote de moins 1,10 m, M. [U] a outrepassé sa mission pour prétendre que les 0,50 m, en réalité 0,40m, de maçonneries des murs de façade n’avaient plus à être écrêtés ;
– il a en outre refusé de tenir compte des observations de son expert privé qui considérait que le seul contrôle visuel de ces parties ne suffisait pas à l’élaboration du diagnostic émis.
L’expert n’a pas excédé sa mission puisqu’il lui revient en conscience d’apprécier les faits soumis, soit la question de l’arasement des murs et que la mission comporte expressément celle de « fournir tous éléments permettant d’apprécier le cas échéant les responsabilités encourues et les préjudices subis », sans que le professionnel désigné ne soit tenu par les avis des autres techniciens et ce quelle que soit la compétence de chacun. L’analyse des rapports des experts privés est soumise à la juridiction qui doit trancher le litige à la lumière de l’ensemble des pièces versées aux débats.
M. [X] ne caractérise pas l’existence d’un vice de procédure susceptible d’être sanctionné par la nullité du rapport critiqué.
2- Le refus d’exécution d’une mission confiée
M. [X] reproche à M. [U] d’avoir refusé d’accomplir sa mission sur les désordres consécutifs à l’absence de pose de la toiture provisoire.
Il omet de rappeler les termes du jugement du tribunal de grande instance d’Évreux qui avait expressément retenu dans ses motifs que « l’accès en sécurité du bâtiment était impossible avant l’intervention de la société BRUNEL DEMOLITION, contrairement aux affirmations de M. [X], et que l’absence de pose d’une toiture provisoire est due à son fait. ». Si le tribunal n’a pas exclu expressément le chef de préjudice et donc de la mission d’expertise, force est de constater qu’il n’a retenu aux termes de la mission confiée, que la question de l’arasement des murs situés au niveau de la corniche.
Sans qu’il y ait lieu de reprendre l’intégralité de la motivation de la juridiction, elle rappelle en substance l’impossibilité matérielle d’imputer des conséquences à l’absence de toiture provisoire avant d’en imputer la responsabilité à M. [X].
La lecture du jugement ne met donc pas en évidence l’existence d’une mission confiée à l’expert judiciaire sur ce chef de préjudice.
Par lettre du 13 avril 2015, M. [U] a clairement exposé que « Le vrai problème de ce site est de constater qu’aucun ouvrage provisoire de protection du château n’a été posé entre le jour de l’incendie (octobre 2005) et la mi-2006, période à laquelle a démarré l’intervention de la société BRUNEL. Pendant cette période où l’entreprise BRUNEL n’était pas liée à M. [X], des dégradations réelles (château exposé aux intempéries) ont existé dont on ne pourra jamais évaluer l’ampleur exacte. Or cette détermination est une condition impérative pour pouvoir ultérieurement déterminer une éventuelle responsabilité de la SA BRUNEL dans le laps de temps correspondant au démarrage de son intervention jusqu’à maintenant. ». Il précise qu’il n’entend pas refuser sa mission.
En suite de cette correspondance, l’expert a saisi le juge chargé du contrôle des expertises pour analyse et restriction concernant sa mission.
M. [X] se prévaut de l’audience d’incident du 13 mai 2015 et de la lettre du 28 mai 2015 du magistrat en ces termes : « Vous avez indiqué que, pour certains désordres, il vous serait difficile de déterminer avec certitude qu’elle était leur origine. Dans cette hypothèse, il vous faudra évoquer les différentes causes envisageables. Éventuellement, vous pourrez indiquer les probabilités que telle ou telle cause est selon vous, à l’origine des désordres et dans quelles proportions. ».
D’une part, en l’espèce, le juge chargé du contrôle des expertises n’a pas statué sur la demande qui lui était soumise concernant le périmètre de la mission expertale par ordonnance mais a uniquement émis un avis par lettre qui en aucun cas, ne peut être contraire à la définition qu’a entendu donner le tribunal à la mission confiée.
D’autre part, l’obligation faite à l’expert d’agir avec objectivité lui interdit toute spéculation sur des faits qu’il ne peut constater et analyser. Il ne peut hiérarchiser les causes et conséquences d’un dommage, proposer plusieurs explications possibles que sur la base d’éléments vérifiés justifiant différentes explications.
En l’espèce, l’incendie du château s’est produit en octobre 2005. Les travaux de démolition confiés à la Sasu Premys ont fait l’objet d’un devis accepté par M. [X] le 2 mai 2006 sans qu’à cette date ne soit dressé un procès-verbal de l’état des lieux. M. [U] a été désigné par jugement du 8 octobre 2013 soit huit ans après le sinistre et près de sept après le début de l’intervention de la société mise en cause. Il lui était matériellement impossible d’effectuer des constatations objectives dans le cadre de la mission confiée : il n’a donc pas failli à ses obligations.
3- La falsification de résultats et données de l’expertise
M. [X] reproche à l’expert neuf faits de « falsification » parfois « avec la circonstance aggravante qu’elle était préméditée ».
a) Des constatations contraires et mensongères aux photographies prises par l’expert le 3 juin 2014
M. [X] rappelle les difficultés qui ont justifié l’intervention du juge chargé du contrôle des expertises et indique que
– par note technique du 5 septembre 2015, son expert, M. [R], « a stigmatisé sur 11 pages que la simple lecture des 200 photos prises le 3 juin 2014 par l’expert [U], enfin produites un an plus tard, révélaient l’exact contraire des affirmations de M. [U] » ;
– « Avec la circonstance aggravante que l’expert [U] a prémédité ses mensonges en refusant pendant plus d’un an de produire ses photos qui l’accablent, se contentant de prétexter qu’il n’avait aucune obligation de les produire aux parties, contrairement à ce qui lui a été enjoint par le juge chargé du contrôle des expertises. »
Ces observations concernent en premier lieu la méthode utilisée : les photographies prises par l’expert n’ont d’intérêt que dans le cadre d’une note commentée donnant du sens au cliché ; la production tardive des photographies par l’expert prises dans le cadre d’opérations contradictoires ne constitue pas un motif de nullité, ce d’autant plus que l’intention de nuire sous-tendue par les écritures de M. [X] n’est pas démontrée.
Quant aux constatations et analyses de l’expert judiciaire, le débat relève du fond et non d’un vice de procédure. En outre, contrairement à ce que qu’affirme M. [X], M. [R] forme des observations sur la base de douze photographies qui peuvent être différentes de celles de M. [U] sans relever de faits susceptibles de qualifier des manquements de l’expert judiciaire, étant rappelé de surcroît que le professionnel du bâtiment intervenant en qualité de conseil travaille dans l’intérêt de son client.
Les pages 31 à 37 des conclusions concernent la réalité des dommages, l’interprétation de l’état des lieux et analyses relevant d’une réflexion sur les responsabilités dans le cadre limité de l’intervention de l’entreprise de démolition et non de l’indemnisation du sinistre incendie.
b) Des allégations fausses concernant le chaînage métallique du gros ‘uvre
M. [X] indique que dans sa note du 10 septembre 2015 annexée au rapport, chapitre 1.2.2 intitulé Gros ‘uvre au droit des élévations du rez-de-chaussée, l’expert judiciaire a porté une affirmation mensongère en prétendant que « en l’absence de dépose inutile pour l’expertise il n’est pas possible de déceler la présence d’un chaînage métallique dans le gros ‘uvre du rez-de-chaussée ».
Les pages 37 à 40 des conclusions concernent de nouveau le débat sur l’état de la construction, la maçonnerie et donc le fond du dossier.
c) L’élaboration « de faux plans » et la substitution de 100 désordres à 17 désordres
M. [X] reproche à l’expert d’avoir annoncé dans des notes aux parties des 26 septembre et 14 novembre 2014 la mise au propre d’un relevé et l’énonciation d’une centaine de désordres et d’avoir, par note aux parties du 10 septembre 2015 annexée au rapport, communiqué 4 nouveaux plans datés de juillet 2015 en ne retenant que 17 désordres de nature esthétique.
Les notes de l’expert transmises de façon transparente aux parties ne sont que des outils de travail, la production du rapport correspondant à la commande judiciaire. Le contenu y compris s’il met en évidence des différences voire des contradictions entre les différents écrits de l’expert judiciaire relève d’une appréciation au fond des responsabilités encourues.
Les pages des conclusions 40 à 43 ne mettent en évidence aucun motif de nullité du rapport.
d) Le développement de la mérule
M. [X] critique l’expert judiciaire en ce qu’il a reconnu l’existence d’une infestation généralisée de la mérule et donc la nécessité de remplacer tous les bois, mais n’a retenu que 19 fenêtres à changer car déposées à tort par la société Brunel construction pour écrire qu’« aucun développement de la Mérule n’a été constaté sur les fenêtres » en page 30 ce qui sera un « mensonge colossal ». Le sapiteur et le laboratoire auraient émis des avis différents notamment au regard des échantillons prélevés.
La phrase extraite de son contexte ne peut constituer un élément pertinent. Les faits et appréciations techniques seront analysés, si besoin est, au titre de l’examen des responsabilités encourues.
Les pages des conclusions 43 à 45 ne mettent en évidence aucun motif de nullité du rapport.
e) L’analyse des préjudices
M. [X] porte le débat sur les mesures urgentes à mettre en ‘uvre pour protéger l’immeuble, les hésitations et contradictions de l’expert.
L’expert a écrit au sujet de la toiture provisoire dans sa note du 14 novembre 2014 : « Il est certain qu’à l’époque du chantier une assise d’une toiture provisoire sur la superstructure aurait pu être envisagée. Aujourd’hui il en va autrement : la nécessité d’assèchement général de l’immeuble tend à étudier une ossature indépendante permettant aussi de bâcher les flancs du château pour accélérer le séchage. ». M. [X] reproche à l’expert de ne pas avoir préconisé malgré la réflexion entreprise de solution de séchage du bâtiment.
De nouveau, les conclusions concernent l’appréciation critique qui est faite du travail de l’expert au cours des opérations d’expertise, le contenu et la gestion de la mission, sans démontrer des griefs constituant des vices de procédure. En effet, il convient de dissocier le désaccord dans l’analyse et l’existence de ce vice.
Les pages 45 à 47 des conclusions ne révèlent aucun moyen utile au visa des articles 175, 232 et suivants du code de procédure civile.
f) La posture constructive de la société Brunel construction
M. [X] reprend une phrase de l’expert précisant que par dire du 14 avril 2017, la société aurait complété « sa posture constructive entre 2006 et 2008 » allégation qui serait fausse.
Il n’en tire aucune conséquence sérieuse et utile, quand bien même l’expert aurait commis une erreur sur la complétude de données en réalité acquises. L’observation de M. [X] est dépourvu d’intérêt procédural.
Les pages 47 et 48 des conclusions ne révèlent aucune cause de nullité.
g) L’impossibilité de reprendre des désordres
M. [X] revient sur les divergences alléguées entre des dommages qui seraient évidents pour M. [R] et écartés par M. [U], les différentes appréciations techniques qui devraient pour lui être retenus. Il revient sur les argumentations déjà développées au titre de l’analyse des causes des dommages.
Les pages 48 à 50 sont donc infructueuses pour établir un motif de nullité.
h) L’étendue de la mérule et l’importance de son traitement
Il s’agit une fois de plus d’un débat sur les responsabilités et dommages et non d’un vice de procédure, page 51.
i) Le coût de remplacement des planchers
M. [X] soutient que l’expert a écrit faussement en page 12 de son rapport que s’agissant du coût de remplacement des planchers du rez-de-chaussée « les parties n’ont pas remis d’estimation récente et précise pour cette reprise ».
Cette assertion de l’expert est vraie puisque M. [X] n’a pas produit de devis d’entreprise mais a repris une évaluation au prix du m2 provenant du rapport de
M. [K], expert, qu’il a actualisé en appliquant un indice soit un coût global. L’expert disposait certes de critères d’évaluation mais pas d’une estimation récente et précise.
Les pages 51 à 54 des conclusions ne font état d’aucun moyen propre à justifier une nullité du rapport.
4- Le rejet des constats d’huissier des 4 avril et 28 septembre 2017
L’expert a écrit que « ces constats ont été vus. Ils ne constituent en rien des éléments techniques nouveaux’ ».
M. [X] reproche à l’expert de ne pas avoir retenu l’intérêt de ces pièces.
L’expert en a manifestement pris connaissance et n’en a pas tiré de substance au regard de leur date de rédaction en particulier. L’expert a procédé à la visite du site dès 2014 de sorte qu’il a effectué ses propres constatations sans avoir besoin, pour établir les faits, desdites pièces qui en toutes hypothèses restent disponibles pour la juridiction statuant au fond.
L’examen des pages 54 à 58, développant à nouveau des critiques déjà émises précédemment sur les analyses de l’expert ne révèle aucun vice relevant de l’article 175 du code de procédure civile.
5- Le refus de réponses aux dires de l’appelant
En pages 58 à 60, M. [X] reproche à l’expert de ne pas avoir répondu à son « dire final » du 30 janvier 2018.
L’expert judiciaire a répondu expressément au dire de l’appelant dans une annexe dédiée en page 25 à 33 évoquant « point par point » au sujet des causes de nullité des opérations d’expertise déjà alléguées puis les dommages et leurs évaluations. Cette réponse apportée par l’expert est très détaillée puisqu’elle comporte un retour du technicien désigné à la fois sur sa rédaction, l’examen des pièces, ses constatations et analyses.
Le moyen soulevé par M. [X] ne peut aboutir.
A défaut de nullité encourue du rapport, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de M. [X] à ce titre.
II- Sur la recevabilité des demandes de la Sasu Premys
L’article 954 du code de procédure civile dispose que les conclusions d’appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l’article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
L’appelant fait valoir que les conclusions notifiées par la Sasu Premys le 4 août 2022 comprennent des demandes irrecevables parce que les ajouts n’ont pas fait l’objet d’un trait en marge après avoir déjà été modifiés de façon importante ; que notamment elle a ainsi complété le fondement de l’article 1799-1 du code civil pour réclamer le paiement de sa facture du 30 juin 2006 et contester ses prétentions.
La Sasu Premys réfute l’argumentation développée par l’appelant en faisant valoir que non seulement les termes de l’article 954 du code de procédure civile n’exige pas l’apposition du trait de marge mais en outre, elle ne soulève aucun moyen nouveau justifiant un marquage. Elle n’a fait que réorganiser sa présentation pour répondre aux conclusions particulièrement longues de M. [X].
En premier lieu, le mode de formalisation des moyens nouveaux dans les conclusions n’est pas défini par le texte susvisé. Le changement de présentation formelle des premières conclusions et des écritures suivantes n’est pas susceptible d’une sanction et peut s’expliquer par la réponse qu’il convient d’apporter aux parties adverses.
En second lieu, M. [X] n’énonce pas les moyens nouveaux qui feraient l’objet d’un ajout non signalé formellement à l’exception du visa l’article 1799-1 du code civil. Le seul développement des faits et analyses par l’intimée en réponse aux conclusions de l’appelant ne constitue pas strictement un moyen.
M. [X] limite dans le dispositif de ses conclusions la fin de non-recevoir « aux demandes formées par l’article 1799-1 du Code civil, comme tardives et contraires au principe de concentration des moyens ». Ce texte vise l’obligation du maître d’ouvrage de garantir aux entreprises le paiement des sommes dues : il ne s’agit pas en réalité en l’espèce du fondement de la demande en paiement de la facture discutée du 30 juin 2006 mais d’un moyen de défense opposé au refus du maître d’ouvrage de la payer et à l’action en responsabilité engagée contre elle.
La fin de non-recevoir invoquée est rejetée de sorte que les demandes de la Sasu Premys en paiement doivent être examinées tant sur le montant des travaux exécutés que sur son indemnisation des préjudices formées à hauteur de 50 000 euros ci-dessous selon les débats sur la responsabilité des parties.
III- Sur la créance de la Sasu Premys au titre des travaux exécutés en 2006
Au visa de l’article 1134 du code civil, le premier juge a retenu une somme de
122 298,70 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement pour ne tenir compte que du montant des travaux exécutés tel qu’établi par le rapport de M. [O] le 25 septembre 2009.
La Sasu Premys expose que par lettre du 2 mai 2006, M. [X] a accepté le devis rédigé le 6 avril 2006 y compris avec l’option de la couverture provisoire sous des conditions de délai soit des travaux d’un montant de 201 000 euros HT et la fourniture et la pose d’une couverture provisoire pour un montant de 32 000 euros HT, ces prestations et prix étant validés par le cabinet Polyexpert et la société [K] experts ; que la première facture a été établie le 30 juin 2006 pour un montant de 176 840 euros correspondant aux travaux réalisés à 70 % ; que l’absence de réalisation de la couverture provisoire est uniquement imputable à M. [X] qui a pris la décision en réunion du 8 juin 2006 d’interrompre le chantier ; que le tribunal ne peut tenir compte de l’évaluation de l’expert, M. [O], qui n’emporte pas la conviction ; que la condamnation doit être prononcée TVA comprise. Elle conteste la fin de non-recevoir opposée par M. [X].
M. [X] conteste devoir toute somme à la Sasu Premys en invoquant en substance :
– l’absence de respect des dispositions légales dans la rédaction du devis,
– l’absence de prévision de tout paiement partiel,
– l’absence de résolution du contrat à l’initiative de la Sasu Premys,
– la mise en échec de la mise en ‘uvre d’une caution bancaire,
– l’inopposabilité de la facture en application de l’article 1788 du code civil, les carences de la Sasu Premys ayant abouti en réalité à la destruction de l’ouvrage, le château,
– une évaluation faite par l’expert judiciaire de l’exécution réelle de travaux à hauteur de 102 256,44 euros HT dont il y a lieu de déduire la somme de 7 300 euros de pose d’une bâche non commandée et inutile soit une somme de 94 956 euros.
1- L’absence de respect des dispositions légales dans la rédaction du devis
Pour s’opposer au paiement des travaux exécutés, M. [X] invoque les dispositions des articles L. 111-1, L. 113-3 et L. 114-1 du code de la consommation en vigueur à la date de l’établissement du devis litigieux, l’arrêté du 2 mars 1990 relatif à la publicité des prix et des prestations de dépannage, de réparation et d’entretien dans le secteur du bâtiment et de l’équipement de la maison.
L’article L. 111-1 du code de la consommation dans sa version issue de la loi du 26 juillet 1993 applicable en l’espèce disposait que tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service.
Selon l’article L. 113-3 du même code, tout vendeur de produit ou tout prestataire de services doit, par voie de marquage, d’étiquetage, d’affichage ou par tout autre procédé approprié, informer le consommateur sur les prix, les limitations éventuelles de la responsabilité contractuelle et les conditions particulières de la vente, selon des modalités fixées par arrêtés du ministre chargé de l’économie, après consultation du [X] national de la consommation.
Selon l’article L. 114-1, dans tout contrat ayant pour objet la vente d’un bien meuble ou la fourniture d’une prestation de services à un consommateur, le professionnel doit, lorsque la livraison du bien ou la fourniture de la prestation n’est pas immédiate et si le prix convenu excède des seuils fixés par voie réglementaire, indiquer la date limite à laquelle il s’engage à livrer le bien ou à exécuter la prestation. Le consommateur peut dénoncer le contrat de vente d’un bien meuble ou de fourniture d’une prestation de services par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en cas de dépassement de la date de livraison du bien ou d’exécution de la prestation excédant sept jours et non dû à un cas de force majeure. Ce contrat est, le cas échéant, considéré comme rompu à la réception, par le vendeur ou par le prestataire de services, de la lettre par laquelle le consommateur l’informe de sa décision, si la livraison n’est pas intervenue ou si la prestation n’a pas été exécutée entre l’envoi et la réception de cette lettre. Le consommateur exerce ce droit dans un délai de soixante jours ouvrés à compter de la date indiquée pour la livraison du bien ou l’exécution de la prestation.
Sous réserve de son champ d’application qui ne couvre pas les travaux de démolition, l’arrêté du 2 mars 1990 susvisé est davantage précis quant aux mentions devant apparaître sur un devis.
Cependant, M. [X] ne prétend pas bénéficier de la nullité du contrat, ni de sa résolution et dès lors ne se prévaut pas de moyens et de prétentions justifiant d’écarter toute obligation au paiement des travaux exécutés. Tout au plus, les insuffisances incontestables du devis sur la définition des travaux et leur coût permettent d’ouvrir le débat sur leur prix et d’en discuter et non de dispenser M. [X] de tout paiement.
Il est par ailleurs fait constat que le devis ne comporte pas de référence à la norme NF P03-001 qui ne peut être opposée à M. [X].
2- L’absence de prévision de paiement partiel
Il est constant que le devis soumis à M. [X] ne comprenait aucune disposition imposant un paiement partiel. Ce seul moyen ne fait pas obstacle à la faculté pour le créancier d’obtenir dans la présente instance le paiement des travaux réellement exécutés et divisibles de la part non réalisée, au regard du devis accepté, l’absence de disposition à ce titre dans le contrat formé n’emportant pas son anéantissement soit par la nullité soit par la résolution de la convention.
L’absence de paiement partiel dû peut en l’espèce tout au plus emporter le différé du point de départ des intérêts de retard nonobstant mise en demeure.
3- L’absence de résolution du contrat à l’initiative de la Sasu Premys
Selon l’article 1184 ancien du code civil applicable en 2006, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.
En l’espèce, aucune des parties n’a demandé la résolution du contrat qui correspond à son anéantissement et à l’obligation pour les parties de restituer ce que chacune a éventuellement reçu. L’exécution partielle des prestations par la Sasu Premys dont la réalité n’est pas contestée tant à la lecture des rapports d’expertise que des conclusions des parties, et précisément de M. [X], impose d’établir le compte entre les parties avant déclinaison des responsabilités encourues. M. [X] a en effet bénéficié de prestations justifiant une contrepartie financière conformément à l’accord initial des parties. Le moyen soulevé n’est pas pertinent pour s’opposer à la fixation de la créance de la Sasu Premys.
4- La mise en échec de la mise en ‘uvre d’une caution bancaire
L’article 1799-1 du code civil dispose que le maître de l’ouvrage qui conclut un marché de travaux privé visé au 3° de l’article 1779 doit garantir à l’entrepreneur le paiement des sommes dues lorsque celles-ci dépassent un seuil fixé par décret en [X] d’État. A compter du 1er janvier 2002, le seuil était fixé à 12 000 euros.
En l’espèce, le débat sur les relations, loyales ou non, entre les parties est sans incidence sur l’appréciation du sort des travaux exécutés et l’obligation pour le maître d’ouvrage de les payer, le cas échéant.
5- L’inopposabilité de la facture
M. [X] invoque l’article 1788 du code civil qui précise que si, dans le cas où l’ouvrier fournit la matière, la chose vient à périr, de quelque manière que ce soit, avant d’être livrée, la perte en est pour l’ouvrier, à moins que le maître ne fût en demeure de recevoir la chose.
Cette disposition n’est pas applicable dans le cas où il s’agit d’apprécier si la perte ou la détérioration de la chose est due à l’inexécution fautive des obligations du cocontractant.
6- L’évaluation des travaux réellement exécutés
Les moyens susvisés ne permettant pas d’écarter toute obligation de M. [X] de payer les travaux exécutés, il convient d’examiner les éléments de la discussion.
Après analyse des travaux à entreprendre par le cabinet Betamex sur accord des parties, la transmission et validation des experts choisis d’une part, par M. [X] (cabinet Colomé) et d’autre part par son assureur, la Sa Allianz Iard (cabinet Polyexpert), M. [X] a accepté expressément, par lettre du 2 mai 2006 les termes du devis émis le 6 avril 2006 avec couverture provisoire du bâtiment sous les conditions suivantes :
– l’exécution complète des démolitions, tri, évacuation ramenée à un mois soit le 2 juin au plus tard, les « travaux de l’option couverture provisoire pouvant être réalisés ultérieurement sans pouvoir toutefois excéder le délai de 2 mois soit terminés pour le 2 juillet au plus tard ».
Les termes de ces conditions n’ont pas été acceptés de façon explicite par la Sasu Premys, alors Brunel démolition, qui prévoyait un délai d’exécution de deux mois.
La solution de base comprenait pour un prix de 201 000 HT :
« . Réalisation des démarches administratives
. Amenée du matériel
. Installation du chantier
. Mise en place des protections collectives
. Récupération du mobilier sinistré et mise en dépôt sur site
. Écrêtage du bâtiment à moins 1,10 m de la corniche. Cette phase de démolition sera réalisée à l’aide de nacelles et d’une grue télescopique de façon à ne pas laisser tomber de gros éléments de maçonneries sur les planchers
. Dépose des radiateurs
. Démolition des cloisons du Rez-de-chaussée et du 1er étage
. Démolition des planchers du 1er et 2ème étage en conservant uniquement la poutraison
. Démolition des escaliers
. Démolition des revêtements de sols au Rez-de-chaussée
. Tri sélectif des matériaux à l’avancement des travaux
. Chargement et évacuation des gravats aux décharges publiques ou centre de recyclage
. Nettoyage général du chantier en fin de travaux
. Repli du matériel »
sans autres précisions quant au prix de chacune des prestations.
A la suite d’une réunion entre les parties du 4 février 2008, la Sasu Premys a reconnu par lettre du 6 mars 2008 ne pas avoir procédé aux travaux suivants :
« 1. Écrêtage des têtes de murs au-dessus des fers et des linteaux de fenêtres. L’écrêtage restant à effectuer porte sur environ 0.50 ml, uniquement sur les briques de remplissage, avec conservation de tous les éléments en pierre.
2. Dépose des planchers du niveau R+1 avec conservation des poutraisons principales
3. Dépose des escaliers entre RDC et R+1
4. Dépose des revêtements de sol RDC et démolitions des cloisons légères (inférieures à 0,20 ml)
5. Travaux en option : mise hors d’eau du RDC par pose d’une couverture en bardage ou platelage bois avec étanchéité bitume. Cette dernière sera mise en ‘uvre au niveau du RDC, comme convenu lors de notre réunion.
Nous réitérons nos remarques et réserves en ce qui concerne l’écrêtage des têtes de murs du R+1 ‘moins-value ‘que nous estimons à HT 23.660 € ».
La Sasu Premys réclamait dans sa facture du 30 juin 2006 le paiement de 70 % du montant des travaux ; dans son rapport du 25 septembre 2009, l’expert a évalué à 43,88 % le montant des travaux exécutés.
En page 4 de son rapport, il a chiffré chaque poste à la fois compte tenu de son état d’exécution mais également selon les évaluations fournies par la société Brunel Démolition suivant les pièces listées lors de la première note du 11 mars 2009 en page 4 communiquées par cette dernière pour éclairer la lecture de son devis.
Il a ainsi arrêté le montant des réalisations à la somme de 122 298,70 TTC en comprenant l’exécution du bâchage de la tête de murs à hauteur de 7 300 euros.
Pour contester cette évaluation, la Sasu Premys se réfère aux validations préalables des experts quant au coût de l’opération : force est de constater que cette évaluation n’a pu viser que le forfait appliqué de fait dans le devis. L’expert a tenu compte des prix mais aussi de l’état d’avancement des travaux résultant également de l’aveu de la société d’un inachèvement des prestations tel qu’exprimé le 6 mars 2008.
Les parties n’ont fait dresser aucun constat d’huissier avant intervention de la société de démolition, ni après les travaux pour comparaison avec le premier état des lieux.
Quant aux travaux supplémentaires, si M. [X] n’a pas procédé à une commande à ce sujet, et contestait l’action en écrivant le 5 décembre 2006, qu’ils avaient été exécutés à son insu, ils répondent à la préoccupation de préservation des murs recherchés par le propriétaire sur prescription de l’expert du cabinet Betamex dans son rapport du 10 avril 2006. Le débat sur la communication de ce rapport à la Sasu Premys est sans incidence à défaut de plus amples éléments, la référence n’étant faite que pour consolider la pertinence de cette action retenue également par l’expert judiciaire. En l’état des relations entre M. [X] et son assureur, de la question du financement des travaux de démolition et de reconstruction. Les travaux étaient utiles bien que n’étant pas aussi précisément prévus dans le devis de sorte qu’il n’y a pas lieu de les exclure.
La condamnation s’entend TVA comprise, l’entreprise se devant de percevoir la taxe pour le compte de l’État et conformément aux dispositions comptables applicables. Faute de paiement partiel visé au devis et d’achèvement accepté des travaux, même à titre partiel en raison du contentieux noué entre les parties, le point de départ des intérêts est différé à la date de la signification de la décision tranchant le conflit.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il condamne M. [X] à payer à la Sasu Premys la somme de 122 298,70 euros TTC avec intérêt au taux légal à compter de la signification de la décision.
IV- Sur la responsabilité de la Sasu Premys
Pour s’opposer à ce paiement effectif et obtenir une indemnisation de ses préjudices à la hauteur du coût de destruction et de reconstruction du château, M. [X] invoque la responsabilité de la société de démolition.
Il se fonde sur l’article 1147 du code civil qui dispose que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
En substance, M. [X] construit son argumentation comme suit :
– il fait état de l’indigence du rapport de l’expert judiciaire, de la nécessité de retenir l’ensemble des rapports qu’il verse aux débats établissant le « constat d’état de ruine des éléments réputés à sauvegarder suite au sinistre incendie du 21 octobre 2005 » et « le caractère incontestable de l’excellent état des éléments sauvegardables du château après sinistre et avant intervention de l’entreprise BRUNEL » ;
– il évoque « les man’uvres dolosives de la société PREMYS, ayant abouti au prononcé du jugement avant dire droit du 8 octobre 2013 prononcé par le TJ d’EVREUX » provenant notamment de la production d’une lettre mensongère de
M. [E], auteur de rapports et correspondances pour le cabinet Polyexpert ;
– il conteste que le défaut de paiement de la facture du 30 juin 2006 dans les conditions ci-dessus exposées puisse justifier une exception d’inexécution de la part de la Sasu Premys ;
– la Sasu Premys a ainsi commis une faute en ne posant pas la toiture provisoire, en lien causal direct et certain avec la nécessité de détruire et reconstruire le château ;
– juridiquement il ne lui revenait pas de minorer ses dommages dans l’intérêt de leur auteur ; matériellement, il en a été empêché par les procédures en cours nées de la faute de la Sasu Premys et aucune entreprise n’aurait accepté de pallier les carences et dommages imputables à la Sasu Premys au regard de l’ampleur des manquements et de la responsabilité induite par la pose d’une toiture provisoire sur un tel édifice.
La Sasu Premys conteste les allégations de M. [X] pour soutenir qu’il est l’auteur de son dommage en n’accomplissant pas les actes possibles pour préserver le château et réclame la limitation de sa responsabilité aux faits qu’elle a reconnus dans le cadre des opérations d’expertise.
Pour l’analyse de la responsabilité recherchée, ne sont examinés que les pièces du dossier et les moyens et arguments fondés sur les éléments objectifs, à l’exclusion des allégations dépourvues de preuve et sans lien avec la nécessaire démonstration de la faute, de son imputation et de ses conséquences.
1- Sur les manquements de la Sasu Premys
Il est reproché à la Sasu Premys de :
– s’être prévalu à tort du défaut de paiement d’un acompte qui ne pouvait pas être réclamé pour arrêter toute intervention et de ne pas avoir achevé en conséquence les travaux par la pose de la couverture provisoire, soit une exception d’inexécution,
– avoir mal exécuté les travaux commandés au point de dégrader les lieux.
a) Sur les dégradations commises
Comme le rappelle à juste titre le tribunal, l’expert judiciaire, M. [U] a exclu un certain nombre de désordres qui en raison de leur origine, de leur manifestation, de leur ampleur, ne se rattachent pas aux actions de la Sasu Premys. Il a retenu une indemnisation à hauteur de 59 404,38 HT au titre des désordres relatifs aux opérations de démolition avec indexation selon l’indice BT 01.
La Sasu Premys demande l’infirmation de cette décision en demandant que le montant de son obligation soit limité « aux montants reconnus et justifiés par elle dans le cadre des opérations d’expertise confiées à M. [U] ».
Dans les développements de ses écritures, la Sasu Premys s’abstient de tout décompte permettant de « fixer sa créance » même si elle ne semble retenir que les sommes de 4 334,40 euros HT concernant les dommages causés à la façade ouest et de
1 073,28 euros HT correspondant à la face interne du linteau de fenêtre centrale en pages 22 et 23, contestant le surplus. Il ne revient pas à la cour de définir la demande.
Ainsi, dans le dispositif de ses conclusions, la Sasu Premys ne sollicite ni condamnation, ni débouté de M. [X]. Elle ne fixe pas un montant déterminé ou clairement déterminable.
Dès lors, le montant retenu par le jugement entrepris sera repris en cause d’appel.
M. [X] demande le prononcé de condamnations comprenant la TVA en ce qu’elles correspondent à la réalité du préjudice.
La somme accordée sera dès lors de 59 404,38 HT + 10 % de TVA =
65 344,82 euros, somme qui sera indexée sur la base de l’indice BT 01 au 31 décembre 2017, jusqu’à la date du prononcé de l’arrêt.
Le jugement sera uniquement infirmé de ce chef.
b) Sur l’exception d’inexécution
Le 21 octobre 2005, le château de M. [X] a été partiellement détruit par un incendie : M. [X] ne verse aucun constat des lieux dressé par un professionnel, permettant notamment à l’aide d’un plan, de préciser d’une part l’importance des dommages causés de façon détaillée, seules quelques photographies extérieures étant communiquées, et d’autre part leur évolution éventuellement, avant et après l’hiver 2005/2006, sur ce bâtiment éventré dépourvu de toute protection.
Aucune action sur le bâti n’aura lieu avant l’intervention de la Sasu Premys en mai 2006, après différentes recommandations expertales.
Sur la base d’un devis rédigé dès le 6 avril 2006, pour des travaux d’une durée de deux mois, accepté le 2 mai, M. [X] a confirmé son accord. Par lettre du 5 décembre 2006 dans laquelle il revient sur les conditions dans lesquelles la société est intervenue, il décrit l’ampleur des réflexions préparatoires à la rédaction du devis, sous le contrôle direct du cabinet Polyexpert. Le délai d’acceptation du devis s’explique par le contexte.
Dans cette lettre d’acceptation du devis du 2 mai 2006, il a néanmoins modifié de façon unilatérale et dans des termes exposés ci-dessus des conditions de délais dépourvus de crédibilité au regard des délais normaux, raisonnables, de préavis à retenir dans l’organisation du travail de l’entreprise et de l’ampleur de la tâche. Il vise, dans la correspondance du 5 décembre 2006 comprenant la description du déroulement des faits, outre des exécutions manuelles d’envergure dans des conditions de danger telles que décrites par l’expert amiable du cabinet Betamex,
M. [F]. Ce cadre de travail rendait impossible l’exécution des travaux dans un délai d’un mois comme souhaité, délai non expressément accepté par la Sasu Premys.
Les allégations de M. [X] selon lesquelles la Sasu Premys aurait promis la présence de 25 personnes sur le chantier ne sont soutenues par aucun document.
En l’absence de tout élément autre, antérieur à l’intervention de la Sasu Premys, et bien que succinct et non contradictoire, M. [F] précise le 10 avril 2006 :
« En arrivant sur le site, nous constatons que l’édifice est pratiquement décapité. Il ne possède plus, ni charpente, ni couverture’ Dans le cadre de la mission, nous avons pu voir l’intérieur de l’édifice qui se trouve en état précaire de sécurité’
Nous recommandons les mesures suivantes :
– la mise en sécurité du personnel appelé à intervenir en prenant soin de faire effectuer par le personnel qualifié, toutes les vérifications’
– le balisage des circuits autorisés au personnel tant à l’extérieur… qu’à l’intérieur’ de vider totalement le bâtiment’
– de mettre en sécurité les ouvrages se trouvant en situation précaire’
– de démolir avec précautions tous les éléments jugés instables ‘ ».
Si ce document est postérieur à la rédaction du devis, il démontre l’ampleur et la difficulté des tâches.
Dans les huit jours de l’acceptation de M. [X] le 9 mai selon lui, le 29 mai 2006 selon la correspondance du 12 octobre 2007 de la société de démolition, la Sasu Premys est intervenue sans autre formalité ni constatation.
Une réunion s’est tenue le 8 juin 2006 en présence du propriétaire des lieux et du cabinet mandaté par son assureur, d’un représentant de la Sasu Premys : M. [X] ne communique aucun compte rendu de cette réunion. Il n’en est résulté à cette date aucune critique, aucune réclamation à l’encontre de la Sasu Premys quand bien même elle présentait un retard dans l’esprit de M. [X] ayant posé la condition d’un achèvement des travaux de démolition et de déblaiement dès le 2 juin 2006.
Les longs développements chargés de vindicte dans les conclusions des parties, portant sur la lettre rédigée par M. [E], représentant le cabinet Polyexpert du 6 février 2013, par laquelle l’intéressé indique en substance que M. [X] était à l’origine de l’interruption des travaux sont vains en l’absence d’éléments corroborant les faits allégués procédant uniquement d’une affirmation, ce quelle que soit la confiance ou non accordée à l’auteur de l’écrit.
L’intéressé précisait : « La première phase des travaux était en cours d’achèvement’
Nous avions demandé que les murs périphériques et les refends du rez de chaussée et du premier étage soient conservés.
Cette disposition a été contestée par Monsieur [X] qui nous a informés au cours du rendez-vous du 08 juin de son intention de faire passer un bureau d’études structure afin de donner son avis sur la stabilité de ces ouvrages.
Les travaux de mise en place de la toiture provisoire ont donc été suspendus, en effet, si la démolition des murs se révélait nécessaire, la couverture provisoire n’avait plus lieu d’être.
Il a été demandé dans une phase intermédiaire de protéger les têtes de murs ce qui a été fait dans l’attente de statuer sur l’étendue des travaux de reconstruction. »
Cette seule correspondance, bien que claire, ne peut suffire en tant que telle à la lumière des contestations émises et en l’absence d’éléments probants complémentaires.
L’incertitude totale subsiste sur la relation alors entre les parties.
A l’échéance par lui fixée du 2 juillet 2006 pour la pose de la couverture provisoire, et alors que le délai de deux mois fixé par l’entreprise était également écoulé, le propriétaire du château ne s’est pas manifesté et a attendu le 5 décembre 2006 pour adresser une notification à l’entreprise cocontractante.
Pour expliquer la situation de retard, la Sasu Premys invoque les atermoiements de M. [X] sur les options à prendre quant au niveau de la destruction et la pertinence de la pose de la couverture provisoire.
Aux termes de 13 pages de critiques importantes, non documentées, mettant en cause l’honnêteté et la compétence de la Sasu Premys, en la suspectant de collusion avec l’expert de son assureur et en décrivant des manquements, M. [X] se borne à réclamer à l’entreprise de « terminer le chantier conformément au devis et aux précisions données par les experts Mrs [P] et [E]. »
Une telle mise en cause de son cocontractant et les informations portées dans cette correspondance ne pouvait que nuire aux relations entre les parties.
Elle fait état des inquiétudes de M. [X] de ne pas percevoir l’indemnisation espérée en raison de l’application de la police d’assurance :
« J’ai rappelé (au frère du dirigeant de la Sasu Premys le 8 juin 2006) ce que je vous avias exposé le 30/03. Que mon grand souci était le butoir de garantie de mon contrat d’assurance qui plafonne les indemnités reconstruction à 5 060 000 euros . Alors que le chiffrage de janvier 2006 établi par MR [P] le dépasse de beaucoup et s’élève à 6 449 648 euros y compris démolition puis reconstruction du 1er étage. Donc j’avais donc le plus grand intérêt à ce que vos démolitions dont le but était de sauver le 1er étage n’aggravent pas le sinistre. ». M. [X] vise la réception du chiffrage le 10 juillet 2006 sans autres précisions sauf la suspicion qu’il exprime dans la relation entre M. [E] et la société de démolition. Cette déclaration a le mérite de confirmer que l’état des lieux ne faisait pas obstacle au bon déroulement de l’expertise diligentée par le professionnel de l’assureur qui ne s’est pas davantage plaint d’une difficulté.
Ces déclarations sont clairement de nature à laisser craindre des impayés.
La correspondance reprise ci-dessus laissait également présager un contentieux sur les actions conduites par la Sasu Premys. Ce présage est conforté par les affirmations de M. [X] quant aux manquements prêtés à son cocontractant et notamment par l’imputation de travaux non clairement compris au devis tels que le dépiquetage et l’évacuation des plâtres.
Dans ce contexte, la Sasu Premys a, le 18 décembre 2006 directement auprès de
M. [X] et le 6 février 2007 auprès du cabinet [K], porté ses exigences de paiement de l’acompte réclamé en juin 2006 puis de signature d’une délégation de paiement consentie par M. [X] à son assureur, la Sa Allianz Iard. Si elle n’a donné suite aux interpellations de l’expert de M. [X] que par lettre du 12 octobre 2007, force est de constater que :
– la délégation de paiement et donc la garantie demandée à hauteur de 200 000 euros pour poursuivre les travaux n’a jamais été adressée à l’entreprise ;
– un désaccord a persisté sur les travaux de « dégarnissage des murs sauvegardés pour une étude approfondie des structures » selon les termes des télécopies du cabinet [K], le devis ne visant que des démolitions. Ce cabinet n’a d’ailleurs pas pris le soin de s’exprimer clairement sur la couverture provisoire du bâtiment.
Le désaccord a perduré entre les parties en 2007 et jusqu’en mai 2008, M. [X] mettant fin aux négociations par correspondance.
Par ailleurs, l’exposé des faits et condamnations prononcées repris dans l’arrêt de la cour d’appel du 5 janvier 2012 permet de vérifier que :
– avant procédure de référé du 8 mars 2007, M. [X] avait perçu une provision de 300 000 euros qu’il s’est abstenu de mobiliser pour payer une partie des travaux exécutés de démolition à titre d’apaisement quand bien même l’obligation de s’acquitter partiellement des montants alors réclamés ne lui était pas faite. Il disposait des fonds pour désintéresser la Sasu Premys, avait même la faculté de provoquer la résolution ou la résiliation du contrat pour en accélérer l’exécution par un tiers ;
– les condamnations définitives dues par l’assureur avaient été limitées à la somme de 5 769 100,86 euros sous déduction des provisions à hauteur de 533 571,56 euros, de 134 122,13 euros au titre des pertes pécuniaires et frais divers, de 769 416 euros à titre de dommages et intérêts soit des sommes insuffisantes pour réaliser les travaux de reconstruction au regard des évaluations faites avant les méfaits du temps sur le bâti et de la majoration des coûts depuis la première évaluation de l’ordre de
6 000 000 d’euros il y a plus de 15 ans.
La confirmation d’un paiement par l’assureur de deux provisions de 300 000 euros en janvier 2006 et de 233 571 euros en 2007, en exécution de l’ordonnance de référé prononcée, aurait également contribué à rassurer le créancier sur ses chances d’être payé. M. [X] a fait preuve de mauvaise foi en ne faisant pas état de ses capacités de paiement et en ne donnant pas de certitude à son cocontractant du règlement de la dette à sa date d’exigibilité. Sa persistance sur ce point met en évidence sa volonté de ne pas s’acquitter de ses engagements.
Fort d’une réclamation financière fructueuse obtenue d’abord en référé contre son assureur et bien qu’assisté juridiquement puis au fond, M. [X] n’a pas pris l’initiative d’une assignation de même nature contre la Sasu Premys en référé pour obtenir l’exécution du contrat, au fond pour obtenir la résolution ou la résiliation du contrat.
Enfin, le dossier de M. [X] révèle toute absence de volonté de sauver la propriété pour un motif tenant à la difficulté de financer la part lui incombant, non prise en charge puisque dès la première évaluation de janvier 2006, antérieure à l’intervention de la Sasu Premys, la teneur de sa correspondance révèle ses inquiétudes sur la part à sa charge de l’ordre de 6 449 648 euros (frais de démolition et reconstruction)
‘ 5 060 000 euros (couverture assurantielle) soit 1 389 648 euros.
Cette absence de volonté de sauvegarder le château et le rebâtir dans sa partie détruite est confortée par l’absence de la production de tout devis de maîtrise d”uvre, toute élaboration d’un projet de permis de construire, tout devis d’entreprise durant plus de 15 ans.
Les deux seuls devis versés datent :
– pour le premier du 17 janvier 2019 sur un descriptif et un métré définis par
M. [X] et donc un chiffrage ex abrupto de la Sarl Hardy, d’un montant de
68 743,68 euros ;
– pour le second du 24 mai 2019 portant sur le gros ‘uvre sur un descriptif et un métré et donc un chiffrage ex abrupto de la Sas Lanfry qui a précisé qu’il était considéré que « le château et les maçonneries aux abords sont démolis et les problèmes de mérule éradiqués. » pour un montant de 5 905 803,70 euros.
Ces documents ont été recherchés postérieurement aux opérations d’expertise conduite jusqu’au dépôt du rapport de M. [U] le 23 mars 2018 pour soutenir l’action en cours relative aux indemnisations réclamées.
M. [X] ne s’est pas préoccupé notamment de faire évaluer par un professionnel, hors expertise, et dans les meilleurs délais, le coût de traitement de la mérule.
Il rétorque qu’il n’était pas tenu de limiter les conséquences de la responsabilité de l’auteur des dommages. Si ce principe est effectivement applicable, la faute commise par la victime, caractérisant une volonté de nuire, à tout le moins, le choix délibéré de créer un dommage et de participer à l’aggravation des préjudices, fait obstacle à leur imputation à la partie adverse.
La chronologie des échanges et les pièces versées démontrent qu’en réalité :
– de la date à laquelle s’est produit l’incendie, dans la nuit du 20 au 21 octobre 2005 à la date d’acceptation du devis de la Sasu Premys le 2 mai 2006, soit cinq mois durant l’hiver, le château a été exposé aux intempéries malgré l’urgence d’avoir à le protéger ;
– M. [X] a bénéficié, dès janvier 2006, d’une évaluation de l’importance de sa part à charge dans les travaux ;
– le délai d’exécution d’un mois avancé par M. [X] n’a pas été accepté par l’entreprise et n’est pas cohérente avec la charge des travaux ;
– les conditions d’intervention de la Sasu Premys ne sont pas circonstanciées de même que les conditions d’interruption du chantier de façon certaine alors que
M. [X] s’est inscrit rapidement dans la contestation ;
– les délais fixés pour l’exécution du contrat tant par la Sasu Premys que par
M. [X] étaient expirés lors de la mise en demeure rédigée le 5 décembre 2006 de sorte qu’il pouvait également en tirer toute conséquence si sa volonté était réellement de sauvegarder son bien et de limiter comme il l’indiquait les coûts de reconstruction ;
– il disposait des fonds suffisants lui permettant de rassurer l’entreprise sur ses capacités de paiement voire d’accepter un paiement partiel des travaux afin de purger la situation ;
– il n’a formé sa demande qu’en réponse à l’action en paiement engagée par la Sasu Premys en 2009.
En définitive,
– il n’est pas possible d’imputer avec certitude le défaut de pose de la couverture provisoire à la Sasu Premys en l’absence de réclamation de M. [X] jusqu’en décembre 2006 ;
– les termes de la correspondance de M. [X] du 5 décembre 2006 étaient de telle nature qu’ils justifiaient d’une part, une demande de garantie de paiement compte tenu du risque d’insolvabilité révélée de fait par l’intéressé sur les travaux de démolition et reconstruction en leur ensemble lui-même, ses attentes étant déjà déçues sur le plan indemnitaire et d’autre part, l’abstention de la Sasu Premys en raison des malentendus importants subsistant sur les termes du contrat.
A défaut de responsabilité caractérisée de la Sasu Premys qui s’est heurtée au comportement fautif de M. [X], les préjudices réclamés ne peuvent faire l’objet d’une condamnation.
M. [X] ne démontre pas davantage l’existence d’une faute de nature extracontractuelle qui pourrait motiver une condamnation, demandée à titre subsidiaire, in solidum avec la Sa Allianz Iard et la Sas Polyexpert, les allégations relatives à des manquements et une collusion entre les intimées n’étant soutenues par aucune pièce, aucun document objectif.
Le tribunal, bien que retenant la faute, a, pour débouter M. [X] de l’essentiel de ses prétentions amplement repris les correspondances et rapports ultérieurs confirmant l’absence persistante de la part M. [X] d’initiatives expliquant directement l’apparition de désordres liés à l’humidité, aux infiltrations supportées par la structure et susceptible d’expliquer notamment le développement de la mérule sans que ces conséquences ne soient dès lors rattachables à une faute de la Sasu Premys.
Il a uniquement condamné cette dernière pour une faute commise et des dommages supportés du 2 juillet au 5 décembre 2006 à payer la somme de 20 000 euros. Ce forfait n’est pas fondé sur une faute tel qu’indiqué ci-dessus et des préjudices en lien démontrés, ce d’autant plus qu’ont été relevés ci-dessus le défaut d’acceptation expresse de l’entreprise des délais proposés, l’absence de constat des lieux préalable, de production du compte rendu de la réunion du 8 juin 2006 et de réclamation de la part de M. [X] durant plusieurs mois. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.
Il n’y a pas lieu d’ordonner la restitution de ces fonds puisque le compte entre les parties sera effectué en exécution de la décision prononcée sans qu’il y ait lieu d’ordonner en l’état des restitutions. La Sasu Premys demande elle-même une compensation entre les sommes dues par chacune des parties.
2- Sur les autres demandes indemnitaires formées dans la relation entre M. [X] et la Sasu Premys
a) Les demandes de M. [X]
Les premiers juges ont écarté les demandes formées par M. [X] au titre de :
– l’actualisation de la variation des prix des indemnités du sinistre incendie qui ont été versées suite à l’arrêt de la cour d’appel de Rouen du 5 janvier 2012,
– le préjudice financier résultant du non-emploi des sommes versées par la Sa Allianz au titre du sinistre incendie,
– le préjudice de jouissance,
– le préjudice moral.
En cause d’appel, M. [X] reprend ses demandes de façon majorée.
Compte tenu de l’absence de responsabilité de la Sasu Premys, hormis le poste uniquement relatif aux désordres causés à hauteur de 65 344,82 euros, sans impact au long cours, les demandes de M. [X] ne peuvent être retenus :
– l’actualisation de la variation des prix des indemnités du sinistre incendie qui ont été versées suite à l’arrêt de la cour d’appel de Rouen du 5 janvier 2012 : M. [X] disposait amplement d’un capital lui permettant d’engager des tranches importantes de travaux au titre du clos et du couvert du château et s’en est abstenu ; il a en outre bénéficié de la possibilité de placer les fonds et d’en disposer pour investir ; aucune faute n’est imputable à la Sasu Premys, et dès lors aucun préjudice ;
– le préjudice financier résultant du non-emploi des sommes versées par la Sa Allianz au titre du sinistre incendie : M. [X] a pu placer ses fonds puisqu’il a fait le choix de ne pas les utiliser ; ce poste ne concerne pas la Sasu Premys ;
– le préjudice de jouissance : il a perçu à ce titre une indemnisation de la part de son assureur arrêtée en 2012 ; en outre, il a été démontré ci-dessus que dès le second semestre 2006, M. [X] a adopté une stratégie marquée par l’inertie du propriétaire qui s’est abstenu d’accomplir les actes d’un bon père de famille et par une contribution directe à la réalisation du préjudice allégué soit l’aggravation des conséquences de l’incendie ;
– le préjudice moral : M. [X] a fait preuve d’une volonté contraire à la préservation de son patrimoine immobilier incompatible avec l’imputation de douleurs qui auraient pour origine la partie adverse.
Le jugement sera confirmé de ces chefs.
b) Les demandes de la Sasu Premys
Elle réclame la somme de 50 000 euros sans toutefois caractériser, par la production de pièces, le préjudice subi pour le non-paiement de la facture alors qu’elle est par ailleurs débitrice de M. [X], le cas échéant par la procédure.
Elle sera déboutée de cette demande.
V- Sur les demandes formées à titre subsidiaire par M. [X] à l’encontre de la Sa Allianz Iard
Les premiers juges ont déclaré l’action de M. [X] contre l’assureur, irrecevable comme étant prescrite en application de l’article L. 114-1 du code des assurances.
Ils ont relevé que M. [X] se fondait sur la responsabilité contractuelle de la Sa Allianz Iard en lui reprochant de ne pas avoir préconisé la pose d’une couverture provisoire du château ; qu’en réalité, il connaissait la nécessité de l’installation de cet construction provisoire dès 2006.
M. [X] conteste cette analyse en soutenant que le point de départ de la prescription biennale se situait à la date où l’assuré avait eu connaissance du manquement de l’assureur à ses obligations et du préjudice en résultant pour lui. Il affirme qu’il n’a connaissance du manquement de l’assureur que par la lettre de l’expert judiciaire de M. [U] du 13 avril 2015 qui suggérait ce manquement. Ce dernier a évoqué le retard pris par l’assureur et la Sas Polyexpert dans la définition des murs qu’il convenait de conserver ou de détruire comme étant susceptible de contribuer à l’aggravation des préjudices.
L’article L. 114-1 du code des assurances dispose que toutes actions dérivant d’un contrat d’assurance sont prescrites par deux ans à compter de l’événement qui y donne naissance.
Entre le sinistre et juin 2006, M. [X] a été avisé à la fois par son propre expert et par l’expert choisi par la société d’assurance de la nécessité de poser une couverture provisoire visant à protéger le bâtiment : cette préconisation est rappelée par la société [K] frères par lettre du 7 avril 2006 pour le compte de M. [X] et confirmée par la Sas Polyexpert qui valide le devis comprenant cette prestation le 27 avril 2006. Le conseil technique de M. [X] détenait le rapport de visite de
M. [F] du 10 avril 2006 alertant sur l’état du bâtiment et les risques encourus en l’absence de mesures conservatoires.
M. [X] ne se réfère pas à la connaissance du besoin mais à la révélation d’un manquement imputable à l’assureur en 2015.
La police d’assurance impose à l’assureur de procéder à l’indemnisation d’un sinistre, si besoin est en ayant recours à un expert afin de déterminer les conditions de la réparation en application du contrat signé.
L’assureur ne se substitue pas au maître d’ouvrage dans les choix qu’il convient d’opérer pour la réalisation des travaux confiés aux entreprises sur devis obtenus par le propriétaire des lieux ; il ne se constitue pas maître d”uvre dans la réalisation et la conduite des travaux réparatoires.
Dès 2005 sur le plan technique, dès 2006 sur le plan juridique, M. [X] était parfaitement avisé des règles applicables puisqu’il était conseillé dans les actions à mener et a fait lui-même sans autre sanction, le choix de ne pas signer de contrats d’entreprise et d’utiliser les fonds constituant l’indemnisation de ses préjudices.
En conséquence, la seule « suggestion » de l’expert sur un lien possible entre les préjudices et l’analyse des travaux à entreprendre est sans effet pour fixer le point de départ de la prescription.
M. [X] n’ignorait pas les conséquences liées au maintien du château en état de délabrement de façon prolongée sans protection et a engagé contre son assureur l’action utile dès le 8 juin 2007.
Les demandes formées par conclusions du 15 octobre 2015 sont prescrites. Le jugement sera confirmé.
VI- Sur les demandes formées à titre subsidiaire par M. [X] à l’encontre de la Sas Polyexpert
Le tribunal les a déclarées également prescrites au regard de la connaissance acquise qu’avait M. [X] du besoin de protection du château dès 2006 et une première demande formée par assignation en intervention forcée le 7 octobre 2015.
M. [X] conteste également cette analyse en rappelant qu’il agit sur le fondement extracontractuel des articles 1382 et 1383 du code civil alors applicable et fait état de la même suggestion émise par l’expert.
La Sas Polyexpert indique qu’en application de la réforme des délais de prescription du 17 juin 2008, M. [X] ne pouvait agir contre elle que jusqu’au 19 juin 2013.
En application de l’article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Il est acquis aux débats que la société étant intervenue en qualité d’expert pour la Sa Allianz Iard a émis des avis avant le 17 juin 2008 de sorte que M. [X] qui était parfaitement en capacité d’apprécier le service rendu compte tenu de l’ensemble des éléments ci-dessus évoqués disposait d’un délai pour agir jusqu’au 19 juin 2013 compte tenu de la réduction du délai pour agir en la matière à cinq ans.
Aucune « révélation » provenant de la seule remarque de l’expert judiciaire ne peut justifier un allongement du délai. L’action est dès lors prescrite et le jugement confirmé en ce qu’il a déclaré les demandes contre la Sas Polyexpert irrecevables.
VII- Sur les frais de procédure
En application de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
Les premiers juges ont laissé à la charge de chacune des parties les dépens par elle engagée.
M. [X] demande la condamnation in solidum des sociétés Premys, Allianz et Polyexpert aux dépens de l’instance en ce inclus les honoraires d’expertises judiciaires de M. [O] et M. [U].
La Sasu Premys demande la condamnation de M. [X] aux dépens de première instance et d’appel.
Les sociétés Allianz Iard et Polyexpert sollicitent la condamnation de M. [X] aux dépens.
S’agissant de la première instance, compte tenu des condamnations réciproques prononcées et de l’intérêt partagé de l’expertise, M. [X] et la Sasu Premys seront condamnées à supporter les dépens par moitié y compris les coûts des expertises judiciaires.
En revanche, M. [X] a pris l’initiative de l’appel sans obtenir davantage au regard de l’économie générale de la décision de sorte qu’il sera condamné aux dépens du second degré de juridiction avec droit de recouvrement direct au profit des avocats en faisant la demande.
Les dispositions du jugement entrepris relatives à l’application de l’article 700 du code de procédure civile n’appellent pas de critiques.
En cause d’appel, M. [X] sera condamné à payer à la Sa Allianz Iard et la Sas Polyexpert la somme de 5 000 euros, la Sasu Premys étant déboutée de chef.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a :
– condamné la Sasu Premys à payer M. [C] [X] la somme de 20 000 euros au titre du préjudice subi du fait de l’absence de pose de la couverture provisoire ;
– condamné la Sasu Premys à payer à M. [C] [X] la somme de
59 404,38 HT avec indexation en fonction de l’indice BT 01 entre 2017 et jusqu’à complet paiement au titre des désordres relatifs aux opérations de démolition ;
– laissé à chaque partie la charge des dépens ;
Et statuant à nouveau de ces chefs infirmés, y ajoutant,
Condamne la Sasu Premys à payer à M. [C] [X] la somme de
65 344,82 euros, indexée sur la base de l’indice BT 01 au 31 décembre 2017 jusqu’à la date de la présente décision,
Condamne M. [C] [X] à payer d’une part à la Sa Allianz Iard, d’autre part à la Sas Polyexpert, chacune la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties pour le surplus ;
Condamne in solidum M. [C] [X] et la Sasu Premys aux dépens de première instance qui comprendront les frais d’expertises judiciaires et dans leur rapport entre eux, à supporter chacun la moitié ;
Condamne M. [C] [X] aux dépens d’appel avec autorisation de recouvrement direct donnée à Me Absire, la Selarl Gray et Scolan.
Le greffier, La présidente de chambre,