Conclusions d’appel : 25 octobre 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 22/01417

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Conclusions d’appel : 25 octobre 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 22/01417
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COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

————————–

ARRÊT DU : 25 OCTOBRE 2023

PRUD’HOMMES

N° RG 22/01417 – N° Portalis DBVJ-V-B7G-MTOW

S.A.R.L. LIMCE exerçant sous l’enseigne Seizième Rue

S.E.L.A.R.L. PHILAE ès qualités de mandataire judiciaire de la SARL Limce

c/

Monsieur [T] [X]

UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 3]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 février 2022 (R.G. n°F 19/00836) par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce suivant déclaration d’appel du 21 mars 2022,

APPELANTES :

SARL Limce exerçant sous l’enseigne Seizième Rue, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 6]

N° SIRET : 825 178 510

SELARL Philae, ès qualités de mandataire judiciaire de la SARL Limce, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 1]

représentées par Me Max BARDET de la SELARL BARDET & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

Monsieur [T] [X]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Astrid GUINARD-CARON, avocat au barreau de BORDEAUX

UNEDIC délégation AGS – CGEA de [Localité 3], prise en la personne de sa Directrice Nationale domiciliée en cette qualité audit siège social [Adresse 5]

représentée pasr Me Philippe HONTAS de la SELARL HONTAS ET MOREAU, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 11 septembre 2023 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [T] [X], né en 1964, a été engagé verbalement le 4 décembre 2017 dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à temps partiel (104 heures par mois) en qualité de serveur par la SARL Limce, qui exploite un restaurant à l’enseigne “16ème Rue” au [Localité 4].

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des hôtels, cafés et restaurants.

Par lettre datée du 12 novembre 2018, M. [X] a été convoqué à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement, fixé au 19 novembre 2018, entretien au cours duquel les parties ont convenu d’une rupture conventionnelle du contrat de travail à la date du 31 décembre 2018.

A cette date, M. [X] avait une ancienneté d’un an et la société occupait à titre habituel moins de onze salariés.

Demandant la requalification de son contrat en un contrat de travail à temps complet à compter du 4 décembre 2017, l’annulation de la convention de rupture, les indemnités afférentes outre des rappels de salaires dont certains pour heures supplémentaires et congés conventionnels, une indemnité pour travail dissimulé et des dommages et intérêts au titre des manquements de la société à la durée de repos journalière et à ses obligations conventionnelles, M. [X] a saisi le 11 juin 2019 le conseil de prud’hommes de Bordeaux.

Par jugement du 26 février 2020, le tribunal de commerce de Bordeaux a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la société, désignant la SELARL Philae en qualité de mandataire judiciaire.

Le 22 septembre 2021, un plan de redressement a été adopté, le tribunal désignant la SELARL Philae en qualité de commissaire à l’exécution du plan de redressement.

Par jugement rendu le 17 février 2022, le conseil de prud’hommes de Bordeaux a :

– dit que le contrat de travail à temps partiel de M. [X] doit être requalifié en un contrat à temps plein pour la période du 4 décembre 2017 au 19 novembre 2018,

– rejeté ses demandes :

* pour irrégularité dans la procédure de licenciement,

* au titre du paiement d’heures complémentaires,

* au titre du travail dissimulé,

* au titre des congés conventionnels,

– dit que la mise en cause de l’Unedic Délégation AGS CGEA de [Localité 3] ne peut avoir pour objet de lui rendre opposable le jugement,

– condamné la société Limce au paiement des sommes suivantes :

* 5.465,39 euros à titre de salaire pour requalification du contrat de travail à temps plein pour la période du 4 décembre 2017 au 19 novembre 2018,

* 546,54 euros au titre des congés payés y afférents,

* 5,85 euros à titre de rappel de congés pour l’exercice 2017/2018 ,

500 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de la société quant au temps de repos,

800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit n’y avoir lieu qu’à exécution provisoire de droit,

– ordonné la remise des documents de fin de contrat sous astreinte de 30 euros par jour de retard suivant la notification du présent jugement passée une période de 15 jours, à savoir, solde de tout compte, certificat de travail rectifié, attestation Pôle Emploi rectifiée,

– débouté M. [X] de l’ensemble de ses autres demandes,

– condamné la société Limce aux dépens de l’instance.

Par déclaration du 21 mars 2022, les sociétés Limce et Philae, en qualité de mandataire judiciaire de la société, ont relevé appel de cette décision, notifiée le 17 février 2022.

Par ordonnance en date du 8 février 2023, le conseiller de la mise en état a :

– déclaré irrecevable l’appel formé par la SELARL Philae en qualité de mandataire judiciaire de la société Limce, cette dernière ayant fait l’objet d’un plan de redressement adopté le 21 septembre 2021,

– constaté la caducité de l’appel incident formé par M. [X], les demandes d’annulation ou d’infirmation du jugement ayant été formulées après le délai de trois mois prévu à l’article 909 du code de procédure civile,

– débouté la société Limce de sa demande d’irrecevabilité des demandes de fixation des créances de M. [X],

– dit que le conseil de M. [X] devra régulariser des écritures tenant compte de la caducité de son appel incident et de la situation de la société Limce qui n’est plus représentée par la SELARL Philae, celle-ci étant en outre commissaire à l’exécution du plan et non plus mandataire et ce, au plus tard le 11 mai 2023,

– dit n’y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que les dépens de l’incident seront supportés par moitié par la société Limce et par M. [X],

– rappelé que la présente décision est susceptible de déféré dans les quinze jours de son prononcé dans les conditions de l’article 916 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 19 juin 2023, la société Limce demande à la cour de :

* Sur la demande de requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps plein,

– réformer le jugement en ce qu’il a fait droit à la demande de requalification à temps plein et aux demandes afférentes (rappel de salaire et remise de documents rectifiés),

Et, statuant à nouveau,

– débouter M. [X] de l’ensemble de ses demandes afférentes et découlant de la requalification tant au titre des rappels de salaire que de remise des documents de rupture rectifiés,

A titre subsidiaire, si la cour confirmait le jugement, les sommes allouées à M. [X] seraient fixées à son passif,

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [X] de ses demandes de paiement du salaire pour la période du 22 novembre 2018 au 31 décembre 2018, de rappel d’heures supplémentaires et rappel d’heures complémentaires, tant à titre principal que subsidiaire, le jugement étant définitif sur ces points,

* Sur la rupture conventionnelle,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande de M. [X] pour irrégularité dans la procédure de licenciement et débouté le requérant des demandes afférentes (dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité compensatrice de préavis, congés payés sur préavis, indemnité de licenciement), le jugement étant définitif sur ce point,

– le confirmer en ce qu’il a rejeté la demande de M. [X] formée à titre subsidiaire à titre de solde d’indemnité de rupture conventionnelle, le jugement étant définitif sur ce point,

* Sur les congés payés

– le réformer en ce qu’il l’a condamnée à verser à M. [X] la somme de 55,85 euros à titre de rappel de congés payés et le débouter de sa demande,

A titre subsidiaire, si la cour confirmait le jugement au titre des congés payés, les sommes allouées à M. [X] seraient fixées à son passif,

– le confirmer en ce qu’il a rejeté la demande de M. [X] au titre des congés conventionnels et le débouter de sa demande, le jugement étant définitif sur ce point,

* Sur le travail dissimulé

– le confirmer en ce qu’il a rejeté la demande de M. [X] au titre du travail dissimulé et débouter le requérant des demandes afférentes, le jugement étant définitif sur ce point,

* Sur le temps de repos

– le réformer en ce qu’il a fait droit à la demande de M. [X] au titre de sa demande de dommages et intérêts afférente et le débouter de ses demandes à ce titre,

A titre subsidiaire, si la cour confirmait le jugement, les sommes allouées à M. [X] seraient fixées à son passif,

* Sur l’article 700 du code de procédure civile

– le réformer ce qu’il a fait droit à la demande de M. [X] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– le débouter de sa demande de condamnation de la société au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

*A titre reconventionnel, le condamner à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 10 mai 2023, M. [X] demande à la cour de débouter la société Limce, la SELARL Philae et les AGS CGEA de l’ensemble de leurs demandes, en conséquence, de confirmer le jugement rendu le 17 février 2022 par le conseil de prud’hommes de Bordeaux en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :

– fixer au passif du redressement judiciaire de la société Limce les sommes suivantes’:

* 5.465,39 euros à titre de salaire pour requalification du contrat de travail à temps plein pour la période du 4 décembre 2017 au 19 novembre 2018,

* 546,54 euros au titre de congés payés sur le salaire pour requalification du contrat de travail à temps plein,

* 55,85 euros au titre de rappel de congés pour l’exercice 2017/2018,

* 500 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de la société dans l’application des temps de repos,

* 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

* les dépens de première instance,

– en conséquence, la condamner à lui verser les sommes précitées,

– dire que l’arrêt à intervenir sera opposable aux AGS dans les limites de sa garantie,

– condamner la société Limce à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner aux dépens exposés en cause d’appel.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 1er septembre 2022, l’UNEDIC Délégation AGS CGEA de [Localité 3] demande à la cour de’:

– juger que l’appel de la société Philae en sa qualité de mandataire judiciaire (en réalité commissaire à l’exécution du plan) est irrecevable,

– juger que dans le dispositif des conclusions d’intimé déposées par M. [X], il n’est pas demandé l’infirmation ni l’annulation des chefs du jugement qu’il entend critiquer,

– juger que la cour ne pourra que confirmer les chefs du jugement critiqués par M.'[X] (et ce sous réserve de l’appel de la société Limce),

– juger recevable et bien-fondé son appel incident et réformer / infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Bordeaux en ce qu’il a :

* dit que le contrat de travail à temps partiel de M. [X] doit être requalifié en un contrat de travail à temps plein pour la période du 4 décembre 2017 au 19 novembre 2018,

* condamné la société Limce au paiement des sommes suivantes :

– 5.465,39 euros au titre de salaire pour requalification du contrat de

travail à temps plein pour la période du 4 décembre 2017 au 19 novembre 2018,

– 546,54 euros au titre de congés payés sur salaire pour requalification du contrat de travail à temps plein,

– 55,85 euros au titre de rappel de congés pour l’exercice 2018/2019,

– 500 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de la société Limce dans l’application des temps de repos,

– juger mal fondé et irrecevable M. [X] en ses demandes,

– juger que de par l’effet attaché à l’adoption du plan de redressement, l’employeur est à cet instant in bonis et que dès lors, la garantie des éventuelles créances auxquelles M. [X] peut prétendre, ne peut plus être mise en oeuvre,

– juger que l’UNEDIC sera mise hors de cause et que les demandes de M. [X], si elles sont accueillies, ne pourront pas être garanties par la concluante,

– juger mal fondée la société Limce en sa demande tendant à fixer les éventuelles condamnations à son passif,

– débouter M. [X] de l’ensemble de ses demandes,

– le juger mal fondé en ses demandes :

* tendant à prononcer la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet à compter du 4 décembre 2017,

* tendant à fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Limce la somme de 6.061,97 euros à titre de rappel de salaire sur la période allant du 4 décembre 2017 au 31 décembre 2018 outre la somme de 606,20 euros pour l’indemnisation des congés payés y afférents,

* tendant à fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Limce la somme de 65,22 euros au titre des heures supplémentaires impayées sur la période allant du 10 septembre 2018 au 31 décembre 2018 et celle de 6,52 euros au titre des congés payés afférents,

* tendant à prononcer la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet à compter du 10 septembre 2018,

* tendant à fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Limce la somme de 1.742,63 euros, à titre de rappel de salaire sur la période allant du 10 septembre 18 au 31 décembre 2018, outre la somme de 174,26 euros pour l’indemnisation des congés payés afférents,

* tendant à fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société les sommes

de 65,22 euros au titre des heures supplémentaires impayées sur la période allant du 10 septembre 2018 au 31 décembre 2018 et 6,52 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférents,

Si la cour ne faisait pas droit à la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel de M. [X] en contrat de travail à temps plein,

– le juger mal fondé en sa demande à titre subsidiaire tendant à fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société les sommes de 1.185,54 euros au titre des heures complémentaires effectuées sur la période du 11 juin 2018 au 31 décembre 2018 ainsi que de 118,55 euros au titre des congés payés y afférents,

– le juger mal fondé en sa demande à titre subsidiaire tendant à fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société les sommes de 1.267,27 euros au titre d’un rappel de salaire pour la période du 23 novembre 2018 au 31 décembre 2018 et de 126,73 euros au titre des congés payés y afférents,

– juger mal fondé M. [X] en ses demandes :

* tendant à prononcer la nullité de la convention de rupture de son contrat de travail,

* tendant à fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société la somme de 8.991 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– juger mal fondé M. [X] en sa demande tendant à fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Limce les sommes de 1.498,50 euros, au titre de l’indemnité

compensatrice de préavis et de 149,85 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférent au préavis,

– le juger mal fondé en sa demande tendant à fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société la somme de 119,60 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

Subsidiairement, dans le cas où la rupture conventionnelle serait annulée, ordonner le remboursement et la compensation des sommes versées à ce titre,

– juger mal fondé M. [X] en sa demande à titre subsidiaire, si la cour venait à considérer que la rupture conventionnelle de son contrat de travail était régulière, tendant à fixer au passif du redressement judiciaire de la société la somme de 89,63 euros à titre de rappel d’indemnité conventionnelle de rupture du contrat de travail,

– le juger mal fondé en sa demande tendant à fixer au passif du redressement judiciaire de la société les sommes suivantes :

* 55,85 euros au titre d’un rappel de congés payés,

* 359,64 euros au titre d’indemnités de congés payés conventionnels, ou à titre subsidiaire, la somme de 265,04 euros,

* 265,04 euros au titre d’indemnités de congés payés conventionnels,

* 8.991 euros à titre de dommages intérêts pour travail dissimulé ou à titre subsidiaire, la somme de 6.626,10 euros,

* 5.000 euros au titre des manquements de la société Limce qui a contrevenu à la durée de repos journalière et à ses obligations conventionnelles,

– le juger mal fondé en ses demandes:

* tendant à fixer au passif du redressement judiciaire de la société prise en la personne du mandataire judiciaire, la SELARL Philae le paiement des intérêts légaux sur le montant des dommages-intérêts alloués à compter du jour de l’introduction de l’instance, à titre de réparation complémentaire conformément aux dispositions de l’article 1231-6 du code civil,

* tendant à ordonner la capitalisation des intérêts en application de l’article 1343-2 du code civil,

* tendant à fixer au passif du redressement judiciaire tendant à ordonner la remise des documents suivants (sic), sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter du prononcé du jugement, à savoir, bulletins de salaires rectifiés, solde de tout compte, certificat de travail, documents Pôle Emploi,

* tendant à fixer au passif du redressement judiciaire tendant à déclarer le jugement opposable à l’AGS (sic)

* tendant à fixer au passif du redressement judiciaire tendant à condamner la société prise en la personne du mandataire judiciaire (sic) à verser à M.'[X] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* tendant à fixer au passif du redressement judiciaire tendant à condamner la société prise en la personne du mandataire judiciaire (sic) aux dépens,

– juger que la garantie de l’UNEDIC Délégation AGS CGEA de [Localité 3] ne peut pas

être recherchée de ces chefs,

En tout état de cause,

– juger que la mise en cause de l’UNEDIC dans la présente instance ne peut avoir pour objet que de lui rendre opposable le jugement à intervenir et non d’obtenir une condamnation au paiement qui serait dirigée à son encontre et ce, à défaut de droit direct de M. [X] à agir contre elle,

– juger que sa garantie n’est pas acquise et qu’en tout état de cause, elle est limitée, toutes sommes et créances avancées confondues, à un ou des montants déterminés par décret, en référence au plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions du régime d’assurance chômage, et inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d’origine légale, ou d’origine conventionnelle imposée par la loi et ce dans les limites des articles L. 3253-8 et L. 3253-17 du code du travail et des textes réglementaires édictés pour son application,

– juger que les demandes de M. [X] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens ne sont pas garanties par l’UNEDIC.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 août 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 11 septembre 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ainsi qu’au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’exécution du contrat de travail

– Sur la requalification du contrat à temps partiel en un contrat à temps complet

Sollicitant l’infirmation de la décision déférée sur ce point, la société appelante soutient que si le contrat de travail à temps partiel doit en principe être écrit et comporter un certain nombre de mentions obligatoires, en revanche il ne s’agit pas d’une présomption irréfragable de sorte que la preuve d’un contrat à temps partiel peut être rapportée par tous moyens. Elle considère que la preuve de la durée hebdomadaire exacte convenue et de la réalité du contrat à temps partiel du salarié est rapportée par le salarié lui-même.

De son côté, M. [X] affirme que malgré ses demandes, l’employeur n’a jamais régularisé de contrat écrit. Il souligne qu’en l’absence de contrat de travail écrit, son contrat doit être requalifié en contrat à temps plein dans la mesure où il a été amené, par le biais d’heures complémentaires, à atteindre la durée légale du travail. Il produit à cet effet un relevé d’heures. Il sollicite en conséquence la requalification de son contrat en un contrat à temps complet, l’employeur s’abstenant de rapporter la preuve de la stabilité de ses horaires de travail hebdomadaires et le caractère régulier de la pratique suivie par l’employeur. Il ajoute que contrairement à ce que prétend l’employeur, il lui est arrivé de travailler certains samedis et certains soirs.

***

Aux termes de l’article L. 3123-6 du code du travail , le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit qui doit mentionner la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail’entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification, les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiquées par écrit au salarié chaque mois.

La convention collective des hôtels, cafés et restaurants ajoute que l’employeur qui souhaite modifier la répartition de la durée du travail doit prévenir le salarié au moins 7 jours avant la date à laquelle elle doit avoir lieu.

L’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps complet et il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve d’une part, de la durée hebdomadaire ou mensuelle convenue et d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait dès lors pas à se tenir constamment à sa disposition.

L’existence d’un contrat de travail verbal n’est pas contestée par les parties.

M. [X] fait état d’horaires différents que ceux retenus par l’employeur puisqu’il indique avoir pu travailler certains samedis et certains soirs, ce qui rendait impossible la connaissance par avance de son planning, ce que conteste la société en faisant valoir que le salarié a toujours travaillé les lundi, mardi jeudi et vendredi de 10 heures à 14 heures 30 et le mercredi de 7 heures 30 à 14heures 30 selon un planning «’théorique’» sur lequel figure ces horaires qu’elle verse aux débats.

La société produit également un planning manuscrit établi pour la préparation des salaires à revenir à M. [X] relatif aux mois de juin, septembre et novembre 2018 dont il ressort que le salarié n’a pas travaillé aux horaires établis aux termes du planning «’théorique’» ; ainsi, il aurait travaillé :

* le lundi 3 septembre de 11 heures à 14 heures,

* le mardi 4 septembre de 11 heures à 13 heures 30,

* le mercredi 5 septembre de 10 heures à 14 heures,

* le jeudi 6 septembre de 11 heures à 14 heures,

* il n’a pas travaillé le vendredi suivant,

*le lundi 10 septembre de 11 heures à 13heures 30,

* le mardi 11 septembre de 11 heures à 13 heures 30,

*il n’a pas travaillé le mercredi suivant,

* le jeudi 13 septembre de 11 heures à 14 heures,

* le vendredi 14 septembre de 11heures à 14heures,

* le mardi 6 novembre de 8 heures à 13heures 30,

* le mercredi suivant de 10 heures à 14 heures,

* le vendredi 9 novembre de 8 heures à 14 heures .

Les bulletins de salaire de M. [X] sur ces périodes font état de 104 heures de travail mensuel pour les mois de juin et septembre 2018 et de 68 heures 50 pour le mois de novembre 2018, ce qui ne correspond pas au relevé d’horaires établi par l’employeur comptabilisant 56 heures 30 pour le mois de juin, 29 heures 30 pour septembre et 30 heures pour novembre 2018.

Ces éléments sont corroborés non seulement par les copies des horaires effectués sur ces périodes par le salarié (par exemple : vendredi 15 juin de 18 h00 à 22 h30, samedi 16 juin de 10 heures à 14 heures, le vendredi 22 juin de 11heures à 14 heures puis de 18 heures à 22 heures) mais également par les attestations que verse aux débats M. [X] aux termes desquelles :

– il « exerçait les ouvertures et les services du midi le début de semaine et honorait également les services du soir pour les jeudis et vendredis. Il lui arrivait également d’être présent lors de réservations pour des soirées exceptionnelles (…) » selon Mme [Y], cuisinière,

– il « travaillait de manière régulière le soir au bar… les jeudis, vendredis et certains samedis soir. J’ai moi-même participé à plusieurs soirées et événements, soirées côtes de boeuf et concerts les 6 janvier 2018 et 8 mars 2018 » selon Mme [N].

Il n’est donc pas établi que M. [X] travaillait selon le planning « théorique » tel que présenté par l’employeur et compte-tenu de l’ensemble de ces éléments, la cour considère que M. [X] ne pouvait prévoir son rythme de travail et devait donc se tenir à la disposition constante de son employeur.

Le contrat de travail à temps partiel sera dès lors requalifié en contrat à temps plein à compter du 4 décembre 2017.

– Sur la demande de rappel de salaire et de congés payés ensuite de la requalification du contrat

Le salarié sollicite la confirmation du jugement entrepris qui a condamné la société à lui verser la somme de 5.465,39 euros au titre des salaires, celle de 546,54 euros au titre des congés payés afférents. il sollicite également la fixation de ces sommes au passif de la société.

Au regard du taux horaire applicable de 9,88 euros du 4 décembre 2017 au 31 décembre 2018 et d’une durée de travail mensuelle de 151 heures 67, le rappel de salaire s’élève à la somme de 5.465,39 euros, après déduction des salaires déjà versés sur la période, outre la somme de 546,54 euros au titre des congés payés afférents.

Ces sommes seront fixées au passif de la procédure de redressement de la société Limce.

– Sur les congés payés

Après avoir rappelé les dispositions légales, M. [X] explique qu’au regard des 12 jours de congés payés auxquels il pouvait prétendre, il aurait du percevoir une indemnité à hauteur de la somme de 530,09 euros et n’a perçu que celle de 474,24 euros de sorte que l’employeur reste redevable du solde, soit la somme de 55,85 euros à ce titre.

Sans contester le principe du paiement des congés payés, l’employeur fait valoir que le salarié a commis une erreur en retenant au titre du salaire de référence les salaires des 12 derniers mois d’une part, et en incluant les indemnités de repas, d’autre part.

Sollicitant la réformation du jugement sur ce point, l’AGS soutient que les demandes, mal fondées, du salarié ne peuvent être garanties par ses soins et ce, dans la mesure où en raison du plan de redressement adopté, la société apparaît dès lors in bonis.

L’article L .3141-24 code du travail dispose que :

I.-Le congé annuel prévu à l’article L. 3141-3 ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence.

Pour la détermination de la rémunération brute totale, il est tenu compte :

1° De l’indemnité de congé de l’année précédente ;

2° Des indemnités afférentes à la contrepartie obligatoire sous forme de repos prévues aux articles L.3121-30, L.3121-33 et L.3121-38,

3° Des périodes assimilées à un temps de travail par les articles L.3141-4 et L.3141-5 qui sont considérées comme ayant donné lieu à rémunération en fonction de l’horaire de travail de l’établissement.

Lorsque la durée du congé est différente de celle prévue à l’article L. 3141-3, l’indemnité est calculée selon les règles fixées au présent I et proportionnellement à la durée du congé effectivement dû.

II.-Toutefois, l’indemnité prévue au I du présent article ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler.

Cette rémunération, sous réserve du respect des dispositions légales, est calculée en fonction :

1° Du salaire gagné dû pour la période précédant le congé ;

2° De la durée du travail effectif de l’établissement.

En l’espèce, il résulte des pièces versées par l’une et l’autre des parties et plus particulièrement des bulletins de salaire que le solde de congés payés du salarié s’élevait à 12 jours au titre de l’année 2017/2018 .

Au cours de la période de référence, le salaire de M. [X] s’élevait à la somme annuelle de 13.252,20 euros (avantage en nature compris et avant requalification dans la limite de la demande). L’indemnité de congés payés calculée sur cette base est égale à 13 252,20 X 1/10ème soit 1.325,22 euros : 30 X1 2 = 530,09 euros.

Il a perçu à ce titre la somme de 474,24 euros.

En conséquence et ainsi que l’ont retenu les premiers juges, une somme complémentaire de 55,85 euros, dans la limite de la demande, sera fixée au passif de la société Limce.

– Sur la demande au titre du non-respect des dispositions relatives à la durée du repos journalier et aux interruptions de travail

Pour voir infirmer la décision entreprise, l’appelant soutient que le salarié s’abstient de démontrer un quelconque préjudice.

Le salarié sollicite la fixation au passif de la société d’une créance de 500 euros au titre du manquement de l’employeur quant au respect du temps de repos. Il indique qu’au moins à 4 reprises, il a repris le travail après moins de 11 heures de repos contrevenant ainsi aux dispositions de l’article L. 3131-1 du code du travail.

***

Selon l’article L. 3131-1 du code du travail, tout salarié bénéficie d’un repos quotidien d’une durée minimale de onze heures consécutives, sauf dans les cas prévus aux articles L. 3131-2 et L. 3131-3 ou en cas d’urgence, dans des conditions déterminées par décret.

En l’espèce, le salarié produit un décompte d’heures de travail duquel il résulte notamment que le 8 novembre 2018, il a terminé sa journée de travail à 23 heures et a repris le lendemain à 8 heures. Le 15 novembre 2018, sa journée de travail s’est terminée à 22 heures 30 et a repris le lendemain à 8 heures.

Ce manquement de l’employeur est de nature à porter atteinte à la santé et à la sécurité du salarié que l’instauration des durées de repos vise à protéger.

Le préjudice en résultant a été justement réparé par le conseil de prud’hommes qui a accordé une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la garantie de l’AGS

Le salarié demande que ses entières créances, hors article 700 du code de procédure civile, soient garanties par l’AGS dans les limites prévues par les articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail pour les sommes dues au titre de la rupture du contrat de travail intervenue antérieurement à la date de jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire.

La société ne conclut pas sur ce point.

L’AGS expose que par application des dispositions des articles 542 et 954 du code de procédure civile, la cour ne pourra que confirmer, sur ce point, le jugement critiqué. Elle souligne, à titre subsidiaire, que conformément aux dispositions des articles L. 3253-6 et suivants et L. 3253-20 du code du travail, la garantie des éventuelles créances auxquelles le salarié peut prétendre ne peut plus être mise en oeuvre, l’employeur étant in bonis en raison de l’adoption le 22 septembre 2021 du plan de redressement, ce dernier devant faire face à d’éventuelles dettes. L’organisme soutient qu’aucune créance ne peut être payée et aucune avance ne peut être consentie en l’absence de mandataire ou de liquidateur judiciaire de sorte que les demandes, si elles sont accueillies, ne pourront être garanties par l’AGS.

***

L’article 542 du code de procédure civile énonce que l’appel tend par la critique du jugement rendu par une juridiction de premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel.

L’article 954 précise que «’les conclusions d’appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l’article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.

Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.

La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.»

Il en résulte que lorsque l’appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l’infirmation ni l’annulation du jugement, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement.

En l’espèce, M. [X], appelant incident, n’a sollicité aux termes de ses écritures

ni l’infirmation ni l’annulation du jugement ayant dit que « la mise en cause de l’UNEDIC Délégation AGS CGEA de [Localité 3] ne peut avoir pour objet de lui rendre opposable le présent jugement », demandant à la cour de « confimer le jugement rendu le 17 février 2022 par le conseil de prud’hommes de Bordeaux dans toutes ses dispositions ».

Par voie de conséquence la décision de première instance ne qu’être confirmée sur ce point.

Sur les autres demandes

En considération des condamnations prononcées, la société appelante devra délivrer au salarié un bulletin récapitulatif des sommes allouées, l’attestation destinée à Pôle Emploi ainsi qu’un certificat de travail rectifiés, dans le délai de deux mois suivant la signification de celui-ci, la mesure d’astreinte sollicitée n’étant pas en l’état justifiée.

Les dépens de la première instance et en cause d’appel seront employés en frais privilégiés de la procédure de redressement judiciaire et la société sera condamnée à verser à M. [X] la somme complémentaire de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

***

Pour plus de clarté, le jugement déféré sera infirmé afin de fixer les créances de M. [X] au passif de la procédure de redressement judiciaire de la société Limce sauf en ce qui concerne le rejet de la demande pour irrégularité de la procédure de licenciement, le rejet de la demande au titre des heures complémentaires, le rejet de la demande au titre du travail dissimulé, le rejet de la demande de congés conventionnels et le rejet de la mise en cause de l’UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 3].

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement du conseil de prud’hommes en ce qui concerne d’une part, le rejet des demandes de M. [X] pour irrégularité de la procédure de licenciement, au titre des heures complémentaires, du travail dissimulé,de congés conventionnels, d’autre part, le montant de sommes allouées à M. [X], sauf à dire que les créances de celui-ci doivent être fixées au passif de la procédure colective de la société Limce er enfin, en ce q’uil a dit que la mise en cause de l’UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 3] ne peut avoir pour effet de lui rendre le jugement opposable,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe les créances de M. [X] au passif de la procédure de redressement judiciaire de la société Limce aux sommes suivantes’:

– 5 465,39 euros au titre de rappel de salaire ensuite de la requalification du contrat de travail de M. [X] en un contrat de travail à temps complet pour la période du 4 décembre 2017 au 31 décembre 2018,

– 546,54 euros au titre des congés payés y afférents,

– 55,85 euros représentant un rappel de congés pour l’exercice 2017/2018,

– 500 euros à titre de dommages et intérêts au titre du non-respect des temps de repos,

– 1.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel,

Dit que la société Limce devra délivrer à M. [X] un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte ainsi qu’une attestation Pôle Emploi rectifiés en considération des condamnations prononcées et ce, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision,

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure de redressement judiciaire de la société Limce.

Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire

 


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