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26 janvier 2016
Cour d’appel de Lyon
RG n°
14/07845
R.G : 14/07845
Décision du
Tribunal de Grande Instance de LYON
Au fond
du 30 septembre 2014
RG : 13/08034
ch n°4
SA BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS
C/
[Z]
[O]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
1ère chambre civile B
ARRET DU 26 Janvier 2016
APPELANTE :
SA BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par la SELARL COLBERT LYON, avocat au barreau de LYON
INTIMES :
M. [W] [S]
né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 2] (ITALIE)
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par la SCP DESBOS BAROU, avocat au barreau de LYON
Mme [V] [E] [Q] [O]
née le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 1]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par la SCP DESBOS BAROU, avocat au barreau de LYON
******
Date de clôture de l’instruction : 27 Mai 2015
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 03 Décembre 2015
Date de mise à disposition : 26 Janvier 2016
Audience présidée par Jean-Jacques BAIZET, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Emanuela MAUREL, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré :
– Jean-Jacques BAIZET, président
– Marie-Pierre GUIGUE, conseiller
– Michel FICAGNA, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Jean-Jacques BAIZET, président, et par Emanuela MAUREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
*****
EXPOSE DE L’AFFAIRE
Le 17 janvier 2013, M [W] [S] et Mme [E] [O] ont signé un compromis pour l’acquisition d’un appartement au coût total de 748 250 euros et ils ont contacté la Banque populaire Loire et Lyonnais pour financer cette opération par un emprunt.
Le 12 février 2013, il leur a été proposé un plan de financement et, le 19 mars 2013, la banque leur a remis une attestation confirmant qu’elle donnait une suite favorable à leur demande de prêt.
La date de réitération par acte authentique du compromis de vente a été fixée au 2 mai 2013.
Quatorze jours avant la signature de l’acte authentique, la SA Banque Populaire Loire et Lyonnais leur a fait connaître son refus de leur accorder le prêt et leur a proposé d’autres montages financiers.
Ils ont finalement obtenu le financement de leur opération auprès d’un tiers par trois prêts.
Par acte d’huissier en date du 3 juillet 2013, M [W] [S] et Mme [E] [O] ont fait assigner la SA Banque populaire Loire et Lyonnais, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, en paiement de la somme de 78 884 euros au titre du surcoût financier généré par l’impossibilité de pouvoir bénéficier de temps suffisant pour mener à bien des négociations efficaces, de la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral de Mme [O], celle de 7 500 euros en réparation du préjudice moral et de la perte de chiffre d’affaires de M [S] , et de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement en date du 30 septembre 2014, assorti de l’exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Lyon a déclaré la SA Banque populaire Loire et Lyonnais responsable des préjudices subis par M [W] [S] et Mme [E] [O] pour rupture abusive des pourparlers, l’a condamnée à leur payer à la somme totale de 25 000 euros outre celle de 800 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 1 500 euros chacun en réparation de leur préjudice moral et 1 500 euros à M [S] en réparation de son préjudice financier.
La SA Banque populaire Loire et Lyonnais a formé un appel total.
Par ordonnance du 27 mai 2015, le conseiller de la mise en état a prononcé l’irrecevabilité des conclusions n°2 de la société Banque populaire Loire et Lyonnais du 1er avril 2015.
Dans ses premières conclusions, la banque conclut à la réformation du jugement et demande que les consorts [S] et [O] soient déboutés de toutes leurs demandes et condamnés à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers frais et dépens.
Elle soutient qu’aucune offre ferme de la banque n’a été émise. Elle explique que la simulation de financement du 12 février 2013 ne peut être considérée comme valant offre de prêt car elle ne correspond pas aux caractéristiques exigées par les articles L 312-7 et suivants du code de la consommation, elle est basée sur les informations données spontanément par les emprunteurs sans qu’ils aient produit l’ensemble des pièces justificatives nécessaires, elle était conditionnée à la souscription par les emprunteurs d’une assurance de groupe prise à 100% qu’ils ont refusé de souscrire, et mentionne qu’elle ne constitue en aucun cas une offre contractuelle et ne peut engager la responsabilité de la banque. Elle ajoute que l’attestation du 19 mars 2013 n’est pas, non plus, un offre ferme de prêt dans la mesure où elle avait pour seul but de justifier auprès du notaire des diligences accomplies en vue de trouver une financement pour le projet immobilier c’est à dire justifier du dépôt effectif par les emprunteurs d’une demande de prêt, et que la formule ‘dossier sur lequel nous avons donné une suite favorable’ qu’elle contient ne vaut pas engagement ferme de la banque car de nombreuses pièces justificatives devaient encore être produites, la souscription de l’assurance de groupe était encore en suspens, et elle est postérieure à la date de validité de la simulation de financement.
Elle fait valoir qu’elle n’a pas rompu brutalement les pourparlers avec les consorts [S] et [O] mais qu’elle a seulement refusé d’octroyer les prêts demandés car ils généraient un taux d’endettement trop élevé et leur a proposé un autre montage pour réduire ce taux dans des limites acceptables. Elle fait remarquer que la jurisprudence reconnaît la liberté d’interrompre les pourparlers et que seul l’abus est sanctionné, qu’aucune intention de nuire ou mauvaise foi ne peut être relevée à son encontre, et que les consorts [S] et [O] ne démontrent pas davantage qu’ils avaient accepté le prêt.
Elle estime que le premier juge n’a pas suffisamment motivé l’évaluation du préjudice financier des consorts [S] et [O] en le fixant à une somme forfaitaire de 25 000 euros, que les intimés ne peuvent pas se prévaloir d’un préjudice né du surcoût des prêts qui leur ont finalement été consentis car le crédit qu’elle leur avait proposé n’était pas acquis, et qu’en tout état de cause, ce préjudice ne peut être qu’une perte de chance de souscrire un crédit moins onéreux et ne peut donc être égal à la différence de coût réel des crédits. Elle considère également que le préjudice moral allégué par chacun d’eux n’est pas sérieux car les sommes demandées correspondent à une perte de chiffre d’affaires pendant dix jours et au coût de travaux d’installation.
M [W] [S] et Mme [E] [O], intimés, concluent à la confirmation du jugement en ce qu’il a déclaré que la SA Banque populaire Loire et Lyonnais est responsable de leurs préjudices pour rupture abusive des pourparlers et à sa réformation pour le surplus. Ils demandent la condamnation de la banque à leur verser la somme de 78 884 euros au titre du surcoût financier généré par l’impossibilité de pouvoir bénéficier de temps suffisant pour mener à bien des négociations efficaces, la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral de Mme [O], 7 500 euros en réparation du préjudice moral et de la perte de chiffre d’affaires de M [S] ainsi que 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ils soutiennent que la banque leur avait indiqué sans équivoque avoir accepté leur demande de prêt sur la base du plan de financement en date du 12 février 2013, qu’ils pouvaient donc considérer son acceptation comme acquise et que l’attestation dans laquelle il est indiqué qu’il a été donné une suite favorable à leur dossier ne comporte aucune réserve. Selon eux, la banque ne démontre pas que le taux d’endettement était trop élevé puisque le même financement leur a finalement été accordé à un taux supérieur. Ils expliquent qu’ils ont transmis toutes les pièces justificatives à la Banque populaire Loire et Lyonnais et que la souscription de l’assurance groupe n’était pas érigée en condition. Ils estiment, en conséquence, que la banque leur a fait croire qu’elle allait contracter avant de rompre abusivement les pourparlers.
Ils font valoir que suite au refus de la banque, ils ont dû rechercher dans l’urgence un autre financement en passant par un courtier et sans avoir le temps suffisant pour mener une négociation efficace, et qu’ils ont obtenu un crédit de remplacement plus onéreux que celui qu’ils auraient obtenu à la Banque populaire Loire et Lyonnais. Ils précisent qu’ils ne demandent pas l’indemnisation du gain manqué mais de la perte de chance de n’avoir pu souscrire un crédit plus favorable, et que ce préjudice est égal à la différence du coût réel du crédit évalué au jour de la décision car il résulte en intégralité de la perte de chance. Ils ajoutent que la recherche d’un nouveau crédit a été génératrice de perte de jours de travail et d’un préjudice moral car ils ont dû décaler leur déménagement de quatorze jours et gérer le décalage des travaux d’installation.
MOTIFS
Attendu qu’il résulte des pièces produites aux débats que la Banque Populaire a d’abord établi, le 12 février 2013, une simulation de financement qui ne répond nullement aux caractéristiques d’une offre de prêt ; que ce document, fondé sur les informations données par les emprunteurs, mentionne qu’il ne constitue en aucun cas une offre contractuelle ; qu’elle nécessitait, pour aboutir à une offre de prêt, la fourniture par les emprunteurs de diverses pièces justificatives ; que la durée de validité de cette simulation était fixée au 14 mars 2013 ;
Attendu que l’attestation établie par la banque le 19 mars 2013 ne peut être considérée comme un engagement de celle-ci d’accorder le prêt, alors que la date de validité de la simulation était dépassée ; qu’elle a été émise uniquement pour justifier du dépôt effectif par les emprunteurs d’une demande de prêt ; que des pièces justificatives, notamment des revenus et charges, de ces derniers, devaient être produites ; que l’attestation ne fait aucune référence aux conditions du prêt ; que la question de la souscription à l’assurance de groupe, qui figurait comme une condition dans la simulation, n’avait pas été tranchée, puisqu’il résulte de la pièce n°4 de la Banque Populaire que M [S] et Mme [O] avaient souhaité souscrire à une délégation d’assurance auprès de la société April ;
Attendu qu’il découle de ce qui précède que ces derniers n’ont pu se méprendre sur la portée de l’attestation litigieuse qui ne renfermait pas un engagement ferme de la Banque Populaire sur l’octroi d’un prêt déterminé avec précision ;
Attendu que M [S] et Mme [O] fondent leur demande uniquement sur la rupture abusive de pourparlers et la responsabilité délictuelle de la Banque Populaire ;
Attendu cependant que la Banque n’a pas rompu les pourparlers, puisqu’elle a établi de nouvelles propositions de financement ; qu’elle a réfusé d’octroyer des prêts de 420 000 euros, 175 000 euros et 236 000 euros , mais a proposé un autre montage réduisant le taux d’endettement, ainsi qu’il résulte des pièces n°6 et 7 de M [S] et Mme [O] ;
qu’en conséquence, la demande de ces derniers fondée sur la rupture abusive de pourparlers ne peut prospérer ;
Attendu que M [S] et Mme [O] qui succombent doivent supporter les dépens de première instance et d’appel ;
qu’il n’y a pas lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Réforme le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
Déboute M [S] et Mme [O] de leurs demandes,
Rejette les demandes présentées en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M [S] et Mme [O] aux dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT