Sauvegarde de la compétitivité : 8 janvier 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 18-22.194

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Sauvegarde de la compétitivité : 8 janvier 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 18-22.194
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8 janvier 2020
Cour de cassation
Pourvoi n°
18-22.194

SOC.

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 janvier 2020

Rejet non spécialement motivé

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10012 F

Pourvoi n° W 18-22.194

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par Mme X… Q…, domiciliée […] ,

contre l’arrêt rendu le 4 juillet 2018 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l’opposant à la société Electre, société anonyme, dont le siège est […] ,

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 26 novembre 2019, où étaient présents : Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prache, conseiller référendaire rapporteur, M. Maron, conseiller, Mme Pontonnier, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de Mme Q…, de la SCP Richard, avocat de la société Electre ;

Sur le rapport de Mme Prache, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Q… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit janvier deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour Mme Q…

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir débouté Mme X… Q… de sa demande d’annulation du blâme du 27 mars 2014 ;

aux motifs propres que « sur la demande d’annulation de l’avertissement du 27 mars 2014, il ressort qu’un journaliste de la rédaction, M. E…, a écrit un article consacré à B… D…, article dans lequel M. C…, éditeur de cette même artiste et compagnon de l’appelante, était critiquée dans des termes assez forts, ce qui a amené Mme X… Q… à en informer M. C…, tiers à l’entreprise, qui a contacté la […] de Livre Hebdo pour faire modifier le contenu de cet article qui sera finalement amputé de toute référence à ce dernier pouvant être considérée comme polémique, ce que confirme M. V… correcteur-réviseur dans une attestation produite aux débats – pièce 12 de la salariée. Contrairement à ce que prétend Mme X… Q…, une telle attitude est constitutive d’un manquement de sa part aux règles élémentaires de déontologie, en sorte que la sanction est justifiée et que le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il l’a déboutée de sa demande aux fins d’annulation » ;

et aux motifs adoptés que « le courrier de notification du blâme daté du 27 mars 2014 précise : « Vous avez informé un tiers extérieur à l’entreprise de l’existence d’un article écrit par un de vos confrères et susceptible de concerner indirectement cette personne. Le caractère fautif est aggravé par le fait qu’il s’agissait d’une version de travail d’un article non encore validé par la rédaction en chef ». Mme Q… reconnaît avoir informé M. C… de l’existence de cet article et explique qu’elle a voulu éviter à l’entreprise un nouveau procès en diffamation ; cependant elle aurait dû discuter préalablement avec sa […] des possibles conséquences liées à la parution de cet article et obtenir son autorisation avant d’en parler à un tiers, fût-il son compagnon ; en conséquence, le conseil juge motivé le blâme et déboute Mme Q… de sa demande à ce titre » ;

alors 1/ qu’aucune sanction ne peut être prise à l’encontre du salarié sans que celui-ci soit informé, dans le même temps et par écrit, des griefs retenus contre lui et la notification écrite de la sanction fixe les termes du litige ; qu’en retenant, pour considérer que la sanction infligée à l’exposante aurait été justifiée, que cette dernière aurait informé M. C… de l’existence de l’article litigieux, quand la lettre d’avertissement adressée à Mme Q… indiquait que cette sanction était motivée d’une part par la circonstance que celle-ci aurait informé un tiers de l’existence d’un article écrit par un confrère, d’autre part par la communication prétendue de cet article, sans vérifier s’il était établi que l’exposante avait communiqué le texte d’un article écrit par un confrère à un tiers, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1332-1 du code du travail ;

alors 2/ qu’en considérant que la sanction infligée à Mme Q… aurait été justifiée, sans répondre au moyen péremptoire tiré de ce que celle-ci avait, par son intervention, évité à la société Electre un procès voire une condamnation pour diffamation, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir débouté Mme X… Q… de sa demande de condamnation de la société Electre à lui verser une somme de 130.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

aux motifs propres que « nonobstant ce que soutient l’appelante, il n’apparaît manifestement pas que son licenciement ait été la réponse programmée de la SA Electre à sa saisine le 9 octobre 2014 du conseil de prud’hommes de Créteil et qu’en l’absence de plus amples éléments, au-delà de cette seule affirmation, comme l’ont relevé à bon droit les premiers juges, rien ne permet en définitive de caractériser le fait que l’employeur se serait rendu coupable en l’espèce de la violation de la liberté fondamentale pour tout salarié d’agir en justice. Sur la cause économique du licenciement, malgré ce qu’affirme Mme X… Q…, et comme l’ont dit à juste titre les premiers juges, la SA Electre justifie bien d’une dégradation sensible et durable de son résultat d’exploitation depuis l’année 2012 avec un déficit qui est passé de – 1.015.595 € (résultat net après impôt de – 396.955 €) en 2014 à – 1.262.025 € (résultat net après impôt de – 676.330 €) en 2015, ce qui constitue des difficultés économiques suffisamment importantes ayant rendu indispensable une réorganisation de l’entreprise afin de sauvegarder sa compétitivité et pérenniser un certain niveau d’emplois en son sein, comme cela été exposé en détail lors de la procédure d’information consultation des institutions représentatives du personnel. Concernant l’obligation de recherche d’un poste en reclassement, Mme X… Q… précise qu’elle aurait pu tenir la rubrique « On en parlera » autrefois attribuée à une collègue Mme T… récemment promue […], rubrique qui a finalement été confiée à Mme L… alors embauchée depuis peu comme simple […], ce à quoi la SA Electre répond lui avoir fait quatre propositions de reclassement – outre la réitération d’une proposition de modification à la baisse de son temps de travail, des offres sur des emplois de chargés de bibliographie, de techniciens de fabrication et de journalistes pigistes -, propositions auxquelles la salariée n’a pas répondu favorablement. Comme le rappelle la SA Electre, Mme L… a été initialement recrutée en contrat de travail à durée déterminée à compter du 9 février 2015 avant de bénéficier courant mai 2015 d’un contrat à durée indéterminée à temps plein, de sorte que si elle a pu être affectée à la même époque sur un emploi de […] à la rubrique « On en parlera », comme l’indique l’appelante, c’est bien chronologiquement avant l’engagement en août 2015 de la procédure devant conduire à son licenciement en septembre, de sorte que cet emploi n’était alors plus disponible. Dès lors en définitive que Mme X… Q… a refusé les offres de reclassement lui ayant été faites, et qu’il n’y avait pas d’autres emplois disponibles pouvant lui être proposés à cette fin, comme l’ont relevé à juste titre les premiers juges, il convient de dire que l’intimée n’a pas manqué à son obligation issue de l’article L. 1233-4 du code du travail » ;

et aux motifs adoptés que « aux termes de l’article L. 1233-3 du code du travail : « Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques » ; la sauvegarde de compétitivité de l’entreprise peut constituer un motif économique justifiant une réorganisation de l’entreprise et une suppression de poste ; en application des dispositions de l’article L. 1233-3 du code du travail, il doit résulter des éléments du dossier la double démonstration et du motif économique proprement dit (difficultés financières ou changements technologiques ou autres) et de sa conséquence sur l’emploi occupé par le salarié concerné ; l’article 1233-16 dispose : « la lettre de licenciement comporte l’énoncé des motifs économiques invoqués par l’employeur. Elle mentionne également la priorité de réembauche prévue par l’article L. 1233-45 et ses conditions de mise en oeuvre ». L’article L. 1233-4 dispose : « Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient. Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent. A défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure. Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises » ; les termes du litige sont circonscrits à ceux de la lettre de licenciement en date du 8 septembre 2015 : les comptes pour l’exercice 2014 font apparaître un déficit de près de 400 Kg/€ et un déficit d’exploitation supérieur à 1.000.000 €. Les pertes d’exploitation se concentrent largement sur l’activité d’édition de presse magazine (constituée de Livre Hebdo pour l’essentiel
). Des mesures de réduction des charges doivent être prises dès à présent pour sauvegarder la compétitivité d’Electre
L’effort doit se concentrer sur les rémunérations liées directement ou indirectement à l’activité de presse. Une réduction du temps de travail a été proposée aux cinq collaborateurs concernés, dont vous-même
Vous n’avez pas donné suite aux propositions de reclassement interne proposées ». Les éléments versés aux débats objectivent, sans contestation possible, les difficultés économiques importantes avec diminution du chiffre d’affaires en 2014, une forte dégradation du résultat d’exploitation qui diminue de 177% par apport à 2013 et de 700% par rapport à 2012 ; sont versées aux débats les notes économiques remises au comité d’entreprise lors de sa consultation, lesquelles détaillent les raisons de l’aggravation des résultats ; Electre n’appartient à aucun groupe et les possibilités de reclassement sont inexistantes en dehors des postes modifiés proposés et refusés par les salariés faisaient l’objet d’un licenciement économique ; Est versé aux débats le courrier de la direction en date du 13 août 2015, détaillant ces quatre propositions de postes à titre de reclassement ; il apparaît des éléments versés aux débats que Mme L… a été embauchée en CDI à compter du 4 mai 2015 en qualité de […], soit plus de quatre mois avant la mise en place de la procédure de licenciement de Mme Q… ; en conséquence, le conseil juge motivé le licenciement économique et déboute Mme Q… de sa demande à ce titre » ;

alors 1/ que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques ou à la réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise ; qu’en jugeant motivé le licenciement économique de Mme Q… et débouter cette dernière de ses demandes à ce titre, sans examiner, comme elle y était invitée, la globalité de la situation économique de la société Electre, compte tenu de ses capitaux propres et ses placements de valeurs mobilières, de l’augmentation de sa masse salariale, de l’augmentation des cinq salaires les plus élevés de l’entreprise et de la situation telle qu’elle avait été présentée au comité d’entreprise le 29 avril 2015, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1233-3 du code du travail, dans sa version applicable à l’espèce ;

alors 2/ que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques ou à la réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise ; qu’en jugeant motivé le licenciement économique de Mme Q… et débouter cette dernière de ses demandes à ce titre, sans examiner la mesure de licenciement litigieuse à l’aune du gain potentiel permis par cette mesure, de l’augmentation des cinq salaires les plus élevés et de l’importance pour le magazine, des rubriques dont l’exposante avait la charge, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1233-3 du code du travail, dans sa version applicable à l’espèce ;

alors 3/ qu’ un licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse lorsque les difficultés économiques alléguées n’ont pas induit la suppression de l’emploi occupé par le salarié licencié ; qu’en jugeant motivé le licenciement économique de Mme Q… et débouter cette dernière de ses demandes à ce titre, sans vérifier la réalité de la suppression de l’emploi qu’elle occupait, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1233-3 du code du travail, dans sa version applicable à l’espèce ;

alors 4/ que le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque l’employeur a effectué une recherche préalable, sérieuse, active et loyale des possibilités de reclassement ; qu’en se bornant, pour considérer que la société Electre n’aurait pas manqué à son obligation de reclassement, à relever les propositions adressées à Mme Q…, que celle-ci avait refusées, sans vérifier si tous les efforts avaient été faits pour parvenir au reclassement de l’exposante, en particulier si les propositions qui lui avaient été adressées, correspondant aux propositions de modification des contrats de travail adressées aux autres salariés qui faisaient l’objet d’un licenciement et à des postes de journalistes pigiste et technicien de fabrication, relevaient de la même catégorie et étaient loyales, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1233-4 du code du travail ;

alors 5/ que les possibilités de reclassement s’apprécient antérieurement à la date du licenciement, à compter du moment où celui-ci est envisagé ; qu’en appréciant le respect par la société Electre de son obligation de recherche sérieuse et loyale des possibilités de reclassement de Mme Q… à la date de l’engagement de la procédure de licenciement et non à compter du jour où celui-ci a été envisagé, la cour d’appel a violé l’article L. 1233-4 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION, SUBSIDIAIRE

Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir débouté Mme Q… de sa demande de condamnation de la société Electre à lui verser une somme de 130.000 € pour inobservation de l’ordre des licenciements ;

aux motifs propres que « concernant les critères d’ordre des licenciements, dès lors que sur les cinq salariés destinataires comme Mme X… Q… d’une proposition de modification de leur contrat de travail quatre – dont l’appelante – l’ont refusée, et ont tous été licenciés, comme l’ont dit à bon droit les premiers juges, la SA Electre n’avait donc pas à appliquer les dispositions issues de l’article L. 1233-5 » ;

aux motifs adoptés que « sur la demande de dommages et intérêts pour inobservation de l’ordre des licenciements : Mme Q… reproche à son employeur de ne pas avoir mis en oeuvre les critères d’ordre des licenciements ; l’employeur a proposé une réduction de leur temps de travail aux cinq salariés concernés par son projet de réorganisation ; quatre d’entre eux ont refusé cette modification de leur contrat de travail et ont donc fait l’objet d’une procédure de licenciement économique ; l’employeur n’a donc pas eu à choisir quel salarié licencier, puisque tous les salariés ayant refusé la modification de leur contrat de travail ont été licenciés ; dès lors, les critères d’ordre des licenciements n’étaient pas applicables en l’espèce » ;

alors que si une modification du contrat de travail n’a pas été proposée à tous les salariés, l’employeur qui procède à un licenciement collectif pour motif économique définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements ; qu’en considérant que la société Electre n’aurait pas été tenue d’établir un ordre des licenciements, quand il était acquis au débat que la proposition de modification du contrat de travail ne concernait que cinq des quatre vingt huit salariés de la société Electre, la cour d’appel a violé l’article L. 1233-5 du code du travail.

 


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