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24 mai 2017
Cour de cassation
Pourvoi n°
15-28.844
COMM.
IK
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 24 mai 2017
Rejet
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 787 F-D
Pourvoi n° N 15-28.844
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
1°/ M. E… Y… ,
2°/ Mme Liliane X…, épouse Y…,
tous deux domiciliés […] ,
contre l’arrêt rendu le 3 mars 2015 par la cour d’appel de Montpellier (2e chambre ), dans le litige les opposant à la société Fasver, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est […] ,
défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 28 mars 2017, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. Z…, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Z…, conseiller, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. et Mme Y…, de la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat de la société Fasver, l’avis de M. A…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen et le second moyen, rédigés pour partie en termes identiques, réunis ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 3 mars 2015), que Richard Y…, directeur général de la société de droit jordanien International Trading and Developpement Company, est entré en relation avec la société Fasver, laquelle lui a donné mandat le 1er juillet 2007 pour conclure des marchés de fabrication de documents sécurisés avec divers états du Proche-Orient, notamment avec la République du Liban et le royaume d’Arabie Saoudite ; qu’ultérieurement, Richard Y… s’est engagé, par lettre du 24 septembre 2007, à apporter à la société Fasver des contrats de fabrication de documents sécurisés avec le royaume d’Arabie Saoudite, en précisant les conditions de sa rémunération et les modalités de son paiement ; que Richard Y… est décédé le […] ; que M. et Mme Y…, ses parents et seuls héritiers, se prévalant du contrat d’apporteur d’affaires conclu par leur fils et estimant que la société Fasver restait débitrice de commissions à raison des contrats apportés par celui-ci, l’ont assignée en paiement ; que la société Fasver a reconventionnellement demandé le remboursement d’avances sur commissions indues ;
Attendu que M. et Mme Y… font grief à l’arrêt du rejet de leur demande en paiement au titre de la commission due sur le marché conclu avec le royaume d’Arabie Saoudite et de leur condamnation à rembourser à la société Fasver une certaine somme, alors, selon le moyen :
1°/ que les prétentions des parties formulées dans les conclusions d’appel sont récapitulées sous forme de dispositif, et la cour d’appel ne peut statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif ; que dans le dispositif de ses dernières conclusions d’appel, la société Fasver s’était bornée, s’agissant du remboursement des sommes perçues par Richard Y…, à mentionner : « condamner in solidum Monsieur Y… E… et Madame Y… Liliane au paiement de 105 000 euros de dommages et intérêts à la société Fasver au titre du remboursement des avances sur commissions indues » ; que la cour d’appel, dans la ligne des motifs des conclusions de l’appelante, était donc seulement saisie d’une action en responsabilité pour dol, fraude, escroquerie au jugement et faute ; qu’ainsi, la cour d’appel qui, tout en écartant expressément l’action en responsabilité dont elle était seule saisie, a fait droit à une action en remboursement fondée sur une condition résolutoire dont elle n’était pas saisie par le dispositif des dernières conclusions d’appel de la société Fasver, a violé l’article 954, alinéa 2, du code de procédure civile ;
2°/ que l’apporteur d’affaires, dont la mission est de mettre en relation des personnes qui souhaitent réaliser entre elles des opérations commerciales, n’est pas en principe responsable de la bonne exécution des contrats signés par son entremise ; qu’ainsi, dès lors qu’il résulte des constatations de la cour d’appel que, par l’intermédiaire de Richard Y…, des commandes avaient bien été passées entre la société Fasver et la société ITDC, la cour d’appel ne pouvait conditionner le droit à la rémunération contractuelle de Richard Y… à la preuve de la bonne exécution des contrats ainsi conclus par l’entremise de l’apporteur d’affaires, sans violer l’article 1134 du code civil ;
3°/ que l’existence d’une condition résolutoire insérée dans le
contrat d’apporteur d’affaires du 24 septembre 2007 n’a jamais été ni invoquée, ni discutée entre les parties ; qu’en conséquence, en énonçant d’office au soutien de sa décision que le contrat d’apporteur d’affaires aurait été passé sous condition résolutoire d’un accord définitif permettant la livraison de la marchandise et le paiement de celle-ci, et que cette condition résolutoire aurait été convenue le 24 septembre 2007 puis prorogée durant les relations d’affaires, si bien que l’obligation souscrite par la société Fasver à l’égard de Richard Y… aurait été suspendue à la levée de cette condition résolutoire, sans permettre aux parties de s’expliquer contradictoirement sur ce moyen soulevé d’office, et particulièrement de discuter la portée des termes équivoques de la lettre du 24 septembre 2007 relativement à l’existence de la prétendue condition résolutoire affectant le contrat d’apporteur d’affaires, la cour d’appel a méconnu le principe de la contradiction, et violé l’article 16 du code de procédure civile ;
4°/ que celui qui se prétend libéré doit prouver le fait qui a produit l’extinction de son obligation ; qu’ainsi, à supposer que le contrat d’apporteur d’affaires du 24 septembre 2007 ait contenu une condition résolutoire, il aurait incombé à la société Fasver, qui invoquait cette clause pour obtenir remboursement des sommes qu’elle avait versées à l’apporteur d’affaires, de rapporter la preuve de ce que les projets mentionnés dans le contrat ne s’étaient pas réalisés ; qu’en conséquence, en ordonnant le remboursement des sommes versées à Richard Y… sur le motif que les demandeurs n’auraient pas rapporté la preuve de l’exécution du projet de contrat avec l’Arabie Saoudite, la cour d’appel a renversé la charge de la preuve et violé l’article 1315 du code civil ;
5°/ que M. et Mme Y… avaient fait valoir dans leurs conclusions qu’au moins partie des sommes versées à Richard Y… ne l’avaient pas été à titre de commissions à valoir sur les contrats signés par l’entremise de celui-ci, mais à titre d’honoraires de conseil et pour services rendus, si bien que ces rémunérations, qui n’étaient pas visées dans le contrat d’apport d’affaires, ne devaient pas en tout état de cause donner lieu à remboursement ; qu’en omettant de réfuter ce moyen, la cour d’appel a entaché sa décision d’un défaut de motifs, violant l’article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que, la demande reconventionnelle de la société Fasver, telle qu’exprimée au dispositif de ses conclusions, tendant à la condamnation de M. et Mme Y… à lui verser la somme de 105 000 euros à titre de dommages- intérêts, mais aussi à son remboursement en raison du caractère indu de son paiement, la cour d’appel n’a pas méconnu les dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, en statuant sur cette demande de restitution ;
Attendu, en deuxième lieu, que la cour d’appel n’a pas méconnu le principe de la contradiction dès lors que la société Fasver faisait valoir dans ses conclusions qu’une rémunération n’était due à l’apporteur d’affaires que si le contrat attendu était réellement conclu, de sorte que le moyen était dans le débat ;
Attendu, en troisième lieu, que l’arrêt retient que Richard Y… et la société Fasver étaient convenus, par lettre du 24 septembre 2007, du montant et des modalités de la rémunération du premier, et avaient fait de la signature d’un contrat avec le royaume d’Arabie Saoudite la condition de cette rémunération et aussi que Richard Y… s’était engagé, à défaut de conclusion d’un tel contrat avec le royaume d’Arabie Saoudite, à restituer les avances sur commissions perçues ; que M. Richard Y… ajoute que M. et Mme Y… ne rapportent pas la preuve d’une commande passée par les autorités saoudiennes et en déduit qu’aucun contrat n’a été conclu avec celles-ci ; qu’en l’état de ces appréciations, la cour d’appel, qui n’a pas conditionné le droit à rémunération de Richard Y… à la preuve de la bonne exécution d’un contrat conclu par son entremise, a pu retenir, sans inverser la charge de la preuve, que les commissions versées à ce dernier à titre personnel en qualité d’apporteur d’affaires étaient indues et qu’aucune commission n’était due dès lors que le contrat n’avait pas été conclu ;
Et attendu, enfin, qu’ayant retenu que les différentes factures émises par Richard Y… et payées par la société Fasver ne spécifiaient pas qu’elles avaient pour objet de rémunérer des prestations distinctes des services rendus au titre du contrat avec le Royaume d’Arabie Saoudite, la cour d’appel a répondu, en les écartant, aux conclusions prétendument délaissées ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;