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N° RG 20/03371 – N° Portalis DBV2-V-B7E-ISUW
COUR D’APPEL DE ROUEN
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 21 SEPTEMBRE 2022
DÉCISION DÉFÉRÉE :
19/04030
Président du tribunal judiciaire d’Evreux du 13 octobre 2020
APPELANTE :
Samcv MACIF VAL DE SEINE PICARDIE
[Adresse 7]
[Localité 11]
représentée et assistée par Me Anne DESLANDES de la Scp SPAGNOL DESLANDES MELO, avocat au barreau de l’Eure
INTIMES :
Monsieur [S] [H]
né le [Date naissance 4] 1959 à [Localité 12]
[Adresse 5]
[Localité 8]
représenté et assisté par Me Mathieu BOURDET, avocat au barreau de Rouen substitué par Me LEHEMBRE
Monsieur [M] [F]
né le [Date naissance 3] 1964 à [Localité 9]
[Adresse 6]
[Localité 9]
représenté par Me Karine ALEXANDRE, avocat au barreau de l’Eure
GROUPAMA CENTRE MANCHE
[Adresse 2]
[Localité 10]
représentée par Me Karine ALEXANDRE, avocat au barreau de l’Eure
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE L’EURE
[Adresse 1]
[Localité 14]
non constituée bien que régulièrement assignée par acte d’huissier de justice remis le 22 décembre 2020 à personne habilitée
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 30 mai 2022 sans opposition des avocats devant Mme Magali DEGUETTE, conseiller, rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée :
Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre,
M. Jean-François MELLET, conseiller,
Mme Magali DEGUETTE, conseillère,
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Catherine CHEVALIER,
DEBATS :
A l’audience publique du 30 mai 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 21 septembre 2022.
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Rendu publiquement le 21 septembre 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier.
*
* *
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Le 24 juin 2016, vers 15h55, une collision a eu lieu à [Localité 13] à hauteur de l’intersection de la route départementale 31 en direction d'[Localité 14] et de la route communale 43 entre la motocyclette conduite par M. [S] [H] et le tracteur agricole équipé d’une remorque conduit par M. [M] [F] lors d’une manoeuvre de dépassement par la gauche effectuée par M. [S] [H].
Celui-ci a été hospitalisé. Ont été diagnostiqués :
– une fracture luxation du genou droit ouverte avec une fracture du condyle latéral, ainsi qu’une fracture transversale de la rotule,
– une luxation de l’inter-phalangienne de l’hallux droit ouverte,
– un traumatisme de l’épaule gauche avec une luxation acromio-claviculaire.
Par ordonnance du 27 juin 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance d’Evreux, saisi les 14, 15, 16 et 18 mai 2018 par M. [S] [H], a ordonné une expertise médicale de celui-ci au contradictoire de son assureur la Macif, de
M. [M] [F], de Groupama Centre Manche, assureur de ce dernier, et de la Cpam de l’Eure. Il a désigné le docteur [G] [J] pour réaliser cette mesure et a débouté M. [S] [H] de ses demandes de provision. L’expert judiciaire a établi son rapport d’expertise le 14 novembre 2018.
Suivant actes d’huissier de justice des 25, 29, 31 octobre et 05 novembre 2019,
M. [S] [H] a fait assigner M. [M] [F], Groupama Centre Manche, la Macif et la Cpam de l’Eure devant le tribunal de grande instance d’Evreux aux fins d’indemnisation intégrale de ses préjudices.
Par jugement du 13 octobre 2020, le tribunal judiciaire d’Evreux a :
– dit que la faute commise par M. [S] [H] au cours de l’accident de la circulation du 24 juin 2016 le prive de tout droit à indemnisation,
– débouté M. [S] [H] de toutes ses demandes indemnitaires dirigées contre M. [M] [F] et la société Caisse de réassurance mutuelle agricole du Centre Manche,
– dit que la société Macif est tenue de régler une indemnité contractuelle de
12 262,93 euros à M. [S] [H],
– dit qu’il convient de déduire de ce montant la provision de 5 000 euros d’ores et déjà versée par la Macif à M. [S] [H],
– condamné la société Macif à verser à M. [S] [H] la somme de
7 262,93 euros,
– condamné M. [S] [H] et la société Macif aux entiers dépens, en ce compris les frais de la procédure de référé enregistrée sous le n°18/177 et le coût de l’expertise judiciaire diligentée par le docteur [G] [J],
– dit que les dépens peuvent être recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile par le conseil de M. [M] [F] et la société Caisse de réassurance mutuelle agricole du Centre Manche,
– débouté les parties de leurs demandes formulées en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté toutes autres demandes des parties,
– assorti le présent jugement de l’exécution provisoire,
– déclaré le jugement commun à la Caisse primaire d’assurance maladie de l’Eure.
Par déclaration du 23 octobre 2020, la Samcv Macif a formé un appel contre ce jugement.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 1er décembre 2020 et signifiées le 22 décembre 2020 à la Cpam de l’Eure, la Macif Val de Seine Picardie demande de voir :
– réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d’Evreux le 13 octobre 2020 en ce qu’il a dit que la faute commise par M. [S] [H] au cours de l’accident de la circulation du 24 juin 2016 le prive de tout droit à indemnisation, dit que la Macif est tenue de régler une indemnité contractuelle de 12 262,93 euros à M. [S] [H] et rejeté les demandes présentées par la Macif à l’encontre de M. [M] [F] et de son assureur la Caisse de réassurance mutuelle agricole du Centre Manche,
– consacrer le droit à indemnisation intégrale de M. [S] [H] à la suite dudit accident,
– condamner in solidum la Caisse de réassurance mutuelle agricole du Centre Manche et M.[M] [F] à lui payer la somme de 75 599,49 euros réglée au titre de l’accident,
– y ajoutant, condamner in solidum la Caisse de réassurance mutuelle agricole du Centre Manche et M. [M] [F] à lui payer une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en plus des entiers dépens de la procédure d’appel avec droit de recouvrement direct au profit de la Scp Spagnol Deslandes Mélo.
Elle fait valoir qu’aucune faute de conduite n’est avérée à l’encontre de M. [S] [H], que le témoignage de Mme [W], conductrice circulant dans le sens inverse, selon lequel le clignotant gauche du tracteur était en fonction après l’accident, ne permet pas de retenir, comme l’a fait le tribunal, que celui-ci était bien actionné pour signaler son changement de direction avant que M.[S] [H] n’entreprenne sa manoeuvre de dépassement, qu’il ne peut être exclu que M. [M] [F] a actionné son clignotant concomittament à sa manoeuvre de changement de direction alors que M. [S] [H] venait de dépasser la remorque et arrivait à hauteur du tracteur.
Par dernières conclusions notifiées le 24 février 2022 et signifiées le 9 mars 2022 à la Cpam de l’Eure, M. [S] [H] sollicite, en application des dispositions combinées des articles 1er et suivants de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 et R.412-10 du code de la route, de :
– à titre principal :
. voir infirmer le jugement du tribunal judiciaire d’Evreux du 13 octobre 2020 en ce qu’il a dit que la faute commise par M. [S] [H] au cours de l’accident de la circulation du 24 juin 2016 le prive de tout droit à indemnisation et l’a débouté de toutes ses demandes indemnitaires dirigées contre M. [M] [F] et la société Caisse de réassurance mutuelle agricole du Centre Manche,
. voir débouter M. [M] [F] et la compagnie Groupama de l’ensemble de leurs demandes,
. voir condamner in solidum M. [M] [F] et la société Caisse de réassurance mutuelle agricole du Centre Manche au paiement des sommes suivantes :
* 7 032,50 euros au titre du poste de préjudice déficit fonctionnel temporaire,
* 7 699,91 au titre du poste de préjudice frais divers,
* 761,25 euros au titre du poste de préjudice dépenses de santé actuelles,
* 20 000 euros au titre du poste de préjudice souffrances endurées,
* 1 000 euros au titre du poste de préjudice esthétique temporaire,
* 27 690,78 euros au titre du poste de préjudice perte de gains professionnels actuels,
* 37 800 euros au titre du poste de préjudice déficit fonctionnel permanent,
* 4 000 euros au titre du poste de préjudice esthétique permanent,
* 25 000 euros au titre du poste de préjudice d’agrément,
* 1 067,83 euros au titre du poste de préjudice frais de logement adapté,
* 6 639,32 euros au titre du poste de préjudice frais de véhicule adapté,
* 50 000 euros au titre du poste de préjudice incidence professionnelle,
* 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
. voir condamner in solidum M. [M] [F] et la société Caisse de réassurance mutuelle agricole du Centre Manche aux entiers dépens, en ce compris les honoraires d’expertise du docteur [J], dont distraction au profit de la Selarl Mathieu Bourdet Avocat,
– à titre subsidiaire, se voir donner acte de ce qu’il accepte la proposition de la Macif tendant à l’indemniser au titre de la garantie contractuelle par l’octroi d’une somme de 12 262,93 euros et la voir condamnée à son paiement au titre de cette garantie et en tant que de besoin.
Il expose qu’aucune faute de conduite de sa part susceptible de réduire ou d’exclure son droit à indemnisation n’est démontrée par M. [M] [F] et Groupama Centre Manche de sorte que son droit à indemnisation est intégral. Il explique qu’il a entrepris de dépasser par la gauche l’engin agricole conduit par M. [M] [F] dès lors qu’aucun clignotant n’était allumé et après avoir procédé au contrôle visuel de ses rétroviseurs et s’être assuré qu’il pouvait dépasser sans danger, que le dépassement de la remorque s’est bien passé, mais qu’une fois arrivé à la hauteur du tracteur, il a constaté que le conducteur venait d’actionner son clignotant gauche et entreprenait brusquement de tourner à gauche, que M. [M] [F] n’a manifestement pas pris la peine de procéder aux contrôles visuels réglementaires ou l’a fait tardivement avant ou en même temps que d’amorcer sa manoeuvre visant à tourner à gauche en violation de l’article R.412-10 du code de la route, ce qui ne lui a pas permis d’éviter la collision, que l’absence de poursuite pénale contre M. [M] [F] ne signifie pas que ce dernier n’a pas commis de faute civile.
Il ajoute que le fait qu’après l’accident le clignotant gauche du tracteur était en marche, selon Mme [W], ne démontre pas qu’il avait été actionné suffisamment de temps à l’avance et accompagné d’un contrôle visuel préalable, que cette dernière n’est pas en mesure de dire si le tracteur avait son clignotant allumé avant que lui-même ne commence son dépassement ; que le dépassement par la droite était impossible car il avait entamé son dépassement par la gauche au moment où le véhicule conduit par M. [M] [F] circulait sur la voie de droite et n’avait pas commencé à tourner.
Par dernières conclusions notifiées le 2 mars 2021, M. [M] [F] et Groupama Centre Manche demandent de voir sur la base des articles 4 de la loi du 5 juillet 1985, R.414-4 et R.414-6 du code de la route :
– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d’Evreux le 13 octobre 2020 en toutes ses dispositions,
– débouter la Macif de toutes ses demandes contraires,
– condamner la Macif à payer à Groupama une somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en plus des entiers dépens de l’instance, avec droit de recouvrement direct au profit de Me Alexandre conformément à l’article 699 du code précité.
Ils soutiennent que M. [S] [H] a commis des fautes d’imprudence par violation des articles R.414-4 et R.414-6 du code de la route, causes uniques de son dommage et excluant son droit à indemnisation, que ce dernier ne peut pas soutenir que le clignotant de l’ensemble agricole aurait été actionné au moment où il venait de dépasser la remorque et arrivait à hauteur du tracteur, qu’en effet, l’ensemble agricole était particulièrement court et M. [S] [H] est arrivé à hauteur du tracteur probablement moins d’une seconde après avoir entamé sa manoeuvre de dépassement ; que le fait que le clignotant de l’ensemble agricole était bien actionné au moment du choc, c’est-à-dire moins de deux secondes après le début de la manoeuvre de dépassement de M. [S] [H], démontre au contraire que ce clignotant était bien mis en fonction au moment où M. [M] [F] a commencé sa manoeuvre de tourner, que la preuve d’une faute de ce dernier n’est pas apportée ; que M. [S] [H] a entamé une manoeuvre de dépassement sans prendre le temps de signaler suffisamment sa présence à M. [M] [F] et sans prendre toutes les précautions nécessaires, que, selon Mme [W], l’ensemble agricole était quasiment à l’arrêt à l’abord d’un virage à gauche, ce qui signifiait qu’il allait effectuer un tournant à gauche.
Ils ajoutent, à titre infiniment subsidiaire, que si le droit à indemnisation de
M. [S] [H] n’était pas exclu, il devrait être réduit à hauteur de 25 %.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 11 mai 2022. A ladite date, la Cpam de l’Eure, à qui la déclaration d’appel avait été signifiée le 22 décembre 2020 à personne habilitée, n’avait pas constitué avocat.
MOTIFS
Sur le droit à indemnisation de M. [H]
En vertu de l’article 4 de la loi du 5 juillet 1985, la faute commise par le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur victime d’un accident de la circulation a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation de son dommage dès lors qu’elle a contribué à sa réalisation.
Ce n’est pas la gravité du préjudice qui permet ou non de réduire ou d’exclure le droit à réparation, mais la faute de la victime. Celle-ci doit être en relation de causalité directe et certaine avec la réalisation du dommage subi. Peu importe que cette faute soit la cause exclusive ou non du dommage, le seul critère d’appréciation de la limitation ou de l’exclusion de l’indemnisation étant celui du degré de gravité de celle-ci. A cette fin, il n’y a pas lieu de tenir compte du comportement du conducteur de l’autre véhicule impliqué.
L’article R.414-4 du code de la route prévoit qu’avant de dépasser, tout conducteur doit s’assurer qu’il peut le faire sans danger. Il ne peut entreprendre le dépassement d’un véhicule que si :
1° Il a la possibilité de reprendre sa place dans le courant normal de la circulation sans gêner celle-ci,
2° La vitesse relative des deux véhicules permettra d’effectuer le dépassement dans un temps suffisamment bref,
3° Il n’est pas lui-même sur le point d’être dépassé.
Il doit, en outre, avertir de son intention l’usager qu’il veut dépasser. Pour effectuer le dépassement, il doit se déporter suffisamment pour ne pas risquer de heurter l’usager qu’il veut dépasser. Il ne doit pas en tout cas s’en approcher latéralement à moins d’un mètre en agglomération et d’un mètre et demi hors agglomération s’il s’agit d’un véhicule à traction animale, d’un engin à deux ou à trois roues, d’un piéton, d’un cavalier ou d’un animal.
Selon l’article R.414-6 du même code, les dépassements s’effectuent à gauche. Par exception à cette règle, tout conducteur doit dépasser par la droite un véhicule dont le conducteur a signalé qu’il se disposait à changer de direction vers la gauche.
En l’espèce, M. [F] conduisait un ensemble agricole composé d’un tracteur et d’une remorque à quatre roues de plusieurs mètres transportant plusieurs ballots comme cela apparaît sur le cliché n°2 de la planche photographique de l’enquête pénale. M. [H] le suivait sur la même voie au guidon de sa motocyclette.
Les versions des circonstances précédant l’accident données par les deux conducteurs lors de leur audition par les gendarmes sont contraires et aucune n’est corroborée par un élément objectif tel qu’un croquis des lieux qui n’a pas été établi par les enquêteurs.
M. [F] explique qu’il a actionné le clignotant gauche du tracteur et de la remorque lorsqu’il a vu l’intersection à gauche et bien avant celle-ci et le début de la manoeuvre de dépassement à gauche de M. [H]. Il ajoute que ce dernier n’a pas dû le voir, qu’il est venu heurter la roue avant gauche du tracteur et qu’il ne devait pas rouler très vite car il s’est rapidement immobilisé.
De son côté, M. [H] relate qu’il n’a pas vu de clignotant lorsqu’il suivait l’ensemble agricole et qu’il a commencé à le doubler par la remorque. Il précise que M. [F] n’a déclenché le clignotant gauche que lorsque lui-même est arrivé presqu’à la hauteur du tracteur lequel a tourné à gauche. Il indique qu’il n’a pas pu l’éviter et qu’il l’a percuté au niveau de la roue avant gauche. Selon lui, M. [F] ne l’a pas vu.
M. [N], qui n’a pas été témoin de l’accident, atteste que, lorsqu’il était dans la salle d’attente le jour de son audition par les gendarmes le 24 juin 2016, le chauffeur du tracteur lui avait affirmé qu’il n’avait ni vu, ni entendu, le motard arriver. Cette déclaration, qui émane d’un ami de M. [H] qui n’a pas fait état de la teneur de cette conversation aux gendarmes quand ils l’ont auditionné, est en outre remise en cause par l’audition de M. [F] qui indique qu’avant de tourner à gauche, il a regardé dans le rétroviseur et a vu une moto derrière lui. Aucun élément probant ne peut donc être retenu de cette attestation.
L’audition de Mme [W], conductrice arrivant en sens inverse, en direction de [Localité 15], et se trouvant à environ 150 ou 200 mètres du tracteur, n’apporte pas d’élément renseignant le moment du déclenchement du clignotant gauche de l’ensemble agricole. Elle n’a pas vu si le tracteur lorsqu’il était quasiment à l’arrêt au niveau du carrefour, ni si la moto au cours de sa manoeuvre de dépassement, avaient leur clignotant respectif en marche. Elle a vu la moto arriver par la gauche du tracteur. ‘Tout c’est passé vite, j’ai vu le motard voler.’. Elle n’a pas vu le point de choc entre le motard et le tracteur. Elle termine en déclarant qu’arrivée sur les lieux de l’accident, le conducteur du tracteur ‘a juste dit j’ai mis mon clignotant, je ne bouge pas mon tracteur. Il était très choqué. Je précise que j’ai vu le chauffeur du tracteur descendre de son véhicule en même temps que moi. Il était légèrement déboussolé, mais je ne l’ai pas vu bouger ni remonter dans son tracteur. Quand j’étais avec lui le clignotant de son tracteur était en marche et le tracteur est resté allumé. Lorsque je lui ai fait remarqué, il m’a dit qu’il ne touchait à rien pour que vos services le constate.’.
Cette dernière indication corrobore le fait que le clignotant du tracteur a été mis en marche de manière certaine au moins avant la collision, mais sans permettre de déterminer à quel moment précis celui-ci l’a été, notamment s’il l’a été plusieurs instants avant, c’est-à-dire avant l’engagement de M. [H] sur la voie de gauche pour doubler l’ensemble agricole.
En revanche, Mme [W] précise avoir vu que le tracteur était quasiment à l’arrêt au niveau du carrefour et qu’une moto arrivait par la gauche du tracteur. Il s’en déduit qu’avant de se positionner en quasi-arrêt, M. [F] avait sensiblement décéléré sur une distance d’au moins plusieurs mètres. Ce ralentissement très marqué de l’ensemble agricole qui le précédait, imposant par son volume et sa longueur, et à l’approche d’une intersection à gauche, exigeait de M.[H] qu’il adopte une vigilance accrue pour lui-même et pour les autres usagers de la route en ne s’engageant pas immédiatement dans une manoeuvre de dépassement par la gauche. Il ne s’est pas assuré qu’il pouvait le faire en toute sécurité. Son défaut de vigilance est constitutif d’une faute.
Son moyen visant à caractériser une faute de M. [F] est vain dès lors que, dans le cadre de cette discussion sur la faute de la victime, il n’est pas tenu compte du comportement fautif ou non du conducteur de l’autre véhicule impliqué.
Le dépassement par la gauche entrepris avec danger par M. [H] a concouru à la réalisation de son dommage. La gravité de cette faute est de nature à exclure en totalité son droit à indemnisation. Le jugement du tribunal ayant statué en ce sens et ayant rejeté les demandes indemnitaires de ce dernier et de la Macif sera confirmé.
Sur l’indemnisation contractuelle par la Macif
Celle-ci ne développe aucun moyen à l’encontre de M. [H] pour dénier son droit à une indemnisation contractuelle dont elle est débitrice en application du contrat d’assurance. Les dispositions du jugement faisant droit aux demandes de ce dernier à hauteur de 12 262,93 euros seront confirmées.
Sur les demandes accessoires
Les dispositions de première instance sur les dépens et les frais irrépétibles seront confirmées.
Partie perdante, la Macif sera condamnée aux dépens d’appel avec bénéfice de distraction au profit des avocats qui en ont fait la demande.
Il n’est pas inéquitable de la condamner également à payer à Groupama Centre Manche la somme de 2 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens qu’elle a exposés pour cette procédure d’appel. Les autres demandes présentées à ce titre seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu publiquement par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Condamne la Macif Val de Seine Picardie à payer à la compagnie d’assurances Groupama Centre Manche la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel,
Rejette le surplus des demandes,
Condamne la Macif Val de Seine Picardie aux dépens d’appel, dont distraction au profit de Me Karine Alexandre, de la Selarl Mathieu Bourdet Avocat et de la Scp Spagnol Deslandes Melo, avocats, en application de l’article 699 du code de procédure civile.
Le greffier,La présidente,