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20 septembre 2017
Cour de cassation
Pourvoi n°
15-25.922
CIV. 1
CGA
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 20 septembre 2017
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10571 F
Pourvoi n° M 15-25.922
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Nedel, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est […] ,
contre l’arrêt rendu le 3 juillet 2015 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 2), dans le litige l’opposant à la société Jabouley, société anonyme, dont le siège est […] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 4 juillet 2017, où étaient présents : Mme Batut, président, M. X…, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Nedel, de la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat de la société Jabouley ;
Sur le rapport de M. X…, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Nedel aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Jabouley la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la société Nedel
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué, confirmatif sur ce point, d’AVOIR dit que la société Jabouley justifie de la titularité de ses droits patrimoniaux sur le modèle de dentelle référencé 18105 ;
AUX MOTIFS, sur la titularité des droits de la société Jabouley sur le modèle de dentelle référencé 18105, QUE la société Nedel soutient que la société Jabouley ne justifie pas de la titularité des droits sur le modèle de dentelle litigieux et fait valoir à cet effet que la fiche de fabrication communiquée est manuscrite, sans date certaine et sur laquelle figure comme mention “Etablissements Jabouley” et non la SA Jabouley immatriculée en 1988 ; qu’elle poursuit en faisant valoir que l’on ne connaît pas la chaine des droits entre ces deux entités juridiques et qu’il n’est pas prouvé que la société Jabouley aurait reçu dans son patrimoine, suite à la fusion absorption intervenue, qui n’a été opposable aux tiers qu’au mois de février 2008, les droits de création spécifiques de cette dentelle ; qu’elle conteste tout caractère probant aux documents communiqués par la société Jabouley pour justifier de ses droits sur ce modèle de dentelle en indiquant qu’aucun échantillon toute laize du modèle datant de cette époque ou dessin daté de manière certaine attestant de l’identité entre la fiche de fabrication d’octobre 1997 et le modèle de dentelle et sa facture sur laquelle ne figure pas la référence sont communiqués ; qu’elle ajoute que la SA Jabouley ne rapporte pas la preuve d’avoir commercialisé sous son nom ce modèle de dentelle ; que la société Jabouley expose qu’elle est titulaire du modèle de dentelle référencé 18105 qui a été créé en octobre 1997 au sein des Etablissements Jabouley dont la SA Jabouley est issue suite à une fusion absorption avec cette société ; qu’elle ajoute que ce modèle issu d’une esquisse en date du 20 février 1989 a été initialement décliné en une dentelle version Lycra référencée 19280 en mai 1993, avant d’être créée en version rigide sous la référence 18105 ; qu’elle précise que le modèle 18105 est régulièrement commercialisé depuis 1998 ; que pour justifier de la titularité de ses droits sur le modèle de dentelle en cause la société Jabouleay verse aux débats :
– l’esquisse de la dentelle,
– la facture d’achat de l’esquisse,
– le fax de commande et la facture de la prestation du “dessinateur technique, monsieur Y… G… ayant “mis en carte” le dessin, c’est-à-dire procédé à la transformation du dessin en données techniques pour permettre la fabrication de la dentelle,
– la fiche de fabrication du modèle dentelle dans sa version lycra référencée 19580 d’octobre 1993,
– la fiche de fabrication du modèle dentelle dans sa version rigide lycra référencée 18105 d’octobre 1997,
– des photographies du métier, du tissage et d’une partie de la chaine de programmation ayant servi à sa réalisation,
– l’attestation du dessinateur, monsieur Daniel Z…, qui certifie avoir créé le dessin en 1989 et avoir cédé l’intégralité de ses droits patrimoniaux d’auteur sur ce dessin à la société Jabouley, accompagnée du fax de commande, du dessin du modèle et de la facture de prestation contresignée par ses soins,
– l’attestation de monsieur Jany A… ayant participé à la fabrication de la chaîne de programmation permettant le tricotage de la dentelle accompagnée de la représentation et des fiches techniques du modèle dans sa version rigide (18105) et élastique (19280)
ainsi que des photographies du métier, du tissage et d’une partie de la chaîne de programmation, contresignées par ses soins,
– l’attestation du directeur technique et responsable de production expliquant et dirigeant de la société Jabouley expliquant le processus de création de la dentelle dont s’agit, le rôle de chaque intervenant et la déclinaison du modèle sous ses deux versions ;
que ceci étant exposé, la société Nedel conteste la valeur probante de l’attestation de monsieur Z… établissant que le modèle a été créé en 1989 car l’esquisse ne serait qu’une photocopie non datée et que sur la facture ne figurerait pas la référence de cette esquisse ; que cependant l’esquisse est signée et référencée et ces éléments sont corroborés par l’attestation de monsieur Z… qui a contresigné l’esquisse et par sa facture du 20 février 1989 ; qu’il est justifié par ailleurs par la fiche de fabrication communiquée et les autres documents relatifs à sa fabrication que la dentelle litigieuse a été créée le 20 février 1989 au sein des établissements Jabouley qui en ont acquis les droits qui ont été transmis à la SA Jabouley lors de la fusion par cette dernière de la société Etablissement Jabouley, qui entraîne la transmission universelle de son patrimoine, conformément aux dispositions de l’article L. 236-3 du code de commerce ; que de plus, il est constant que la personne morale qui commercialise de façon non équivoque une oeuvre de l’esprit est présumée à l’égard des tiers recherchés en contrefaçon et en l’absence de toute revendication du ou des auteurs, détenir sur ladite oeuvre les droits patrimoniaux de l’auteur ; que pour bénéficier de cette présomption simple, il appartient à la personne morale d’identifier précisément l’oeuvre qu’elle revendique et de justifier de la date à laquelle elle a commencé à en assurer la commercialisation ; qu’il lui incombe également d’établir que les caractéristiques de l’oeuvre qu’elle revendique son identiques à celles dont elle rapporte la preuve de la commercialisation sous son nom ; qu’enfin si les actes d’exploitation propres à justifier l’application de cette présomption s’avèrent équivoques, elle droit préciser les conditions dans lesquelles elle est investie des droits patrimoniaux de l’auteur ; qu’en l’espèce, il est justifié par la dentelle sur laquelle est agrafé un carton comportant la référence du modèle, la première facture de commercialisation en date du 8 octobre 1998 sous le nom de dentelle de Saint André et de deux attestations circonstanciées portant la référence de la dentelle de clients les sociétés F… et Sonia B… que la SA Jabouley commercialise sous ce nom, à tout le moins depuis octobre 1998, et de façon ininterrompue comme cela ressort de nombreuses autres attestations, la dentelle litigieuse sous son nom depuis qu’elle en a acquis les droits, sans revendication de tiers, de sorte que c’est à bon droit que le tribunal a jugé qu’elle était recevable à agir en contrefaçon de ce chef ; que l’allégation par la société Nedel d’une commercialisation antérieure dès 1996 de son modèle par son fournisseur chinois qui en atteste, sans pièce justificative pour corroborer ses dires alors qu’il est impliqué dans le processus de la contrefaçon alléguée, n’est pas de nature à justifier de prétendus droits antérieurs chinois alors qu’il est justifié par la société Jaboulay d’une création en février 1989 et d’une fabrication en version Lycra dès 1993 ;
ET AUX MOTIFS, à les supposer adoptés du tribunal, QU’en l’espèce, il ressort du dessin du motif de la dentelle objet du litige versé aux débats, de l’attestation de Monsieur Z… qui confirme être l’auteur de ce dessin, et de la facture d’achat intervenue entre Monsieur Z… et les Etablissements Jabouley que les Etablissements Jabouley ont acquis des droits d’auteur sur un dessin créé par Monsieur Daniel Z… en date du 20 février 1989, et ont fait fabriquer une dentelle à partir de ce dessin, d’abord en une version lycra référencée 19280 en mai 1993, puis en version rigide sous la référence 18105 en 1997 ; qu’il ressort de l’extrait Kbis des Etablissements Jabouley que ces derniers ont fait l’objet d’une fusion absorption par la société Jabouley SA avec effet rétroactif au 1-09-2007 ; que de surcroît, la société Jabouley justifie par la production de factures courant 2000 et 2002 à F… et à Sonia B… d’une commercialisation non équivoque de la dentelle référencée 18105 ; que par conséquent, la société Jabouley démontre bien être titulaire des droits d’auteur sur l’oeuvre revendiquée ;
ALORS QU’il est fait interdiction aux juges du fond de dénaturer les termes du litige dont ils sont saisis ; qu’en affirmant qu’il était justifié que la dentelle litigieuse référencée 18105 avait été créée le 20 février 1989 et fait l’objet d’une fabrication dès 1993 quand la société Jabouley faisait valoir, ce qui est constaté (arrêt, p. 5), que son modèle référencé 18105 pour lequel elle réclamait la protection de l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle avait été créé en octobre 1997, ce dont il résultait qu’elle ne pouvait se prévaloir d’un droit privatif pour une période antérieure, la cour d’appel a dénaturé les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué, infirmatif sur ces points, d’AVOIR dit que le modèle de dentelle référencé 18105 est original et éligible à la protection du droit d’auteur, dit que la société Nedel a commis des actes de contrefaçon de droits d’auteur de ce modèle, condamné la société Nedel à payer à la société Jabouley SA la somme de 80.000 euros en réparation du préjudice subi par les actes de contrefaçon, interdit à la société Nedel de représenter et de vendre la dentelle référencée 18105 sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée passé le délai de 8 jours de la signification de l’arrêt, ordonné la publication par extraits de la présente décision dans trois revues ou journaux au choix de la SA Jabouley et aux frais de la société Nedel sans que le coût de chaque insertion ne dépasse la somme de 3.500 euros et condamné la société intimée à payer à la société appelante la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS, sur le caractère protégeable de la dentelle référencée n°18105, QUE l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous, comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial ; que le droit de l’article susmentionné est conféré selon l’article L. 112-1 du même code, à l’auteur de toute oeuvre de l’esprit, quels qu’en soit le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination ; qu’il s’en déduit le principe de la protection d’une oeuvre sans formalité et du seul fait de la création d’une forme originale ; que la société Jabouley revendique la combinaison des revendications suivantes pour justifier du caractère original de la dentelle référencée 18105 :
– Modèle de dentelle floral sur un fond de type large résille (transparent),
– Les fleurs sont assez volumineuses (cinq à six centimètres de largeur sur cinq centimètres et demi à six centimètres de hauteur) et comportent 11 pétales et une tige à trois feuilles,
– Le coeur de la fleur est légèrement ouvert et laisse apparaître un rond duquel se dégagent quatre pétales (deux pétales pleins et un divisé en deux),
– Le pétale le plus haut s’apparente à un trois quart de lune ; indépendamment de la fleur et au-dessus de ce pétale, sont représentés trois petits pétales stylisés se dégageant de la fleur,
– Les trois autres pétales partent du bas et semblent remonter vers le pétale du haut ; un des pétales est allongé (ovale) et l’autre a une forme analogue et est partiellement divisé en deux par une petite encoche,
– A l’extérieur de ces trois pétales (partie inférieure de la fleur et comme accolés à eux), sont représentés les sept autres pétales,
– Trois pétales, rassemblés les uns aux autres, suivent la ligne d’un des pétales du premier contour (celui qu’une encoche divise partiellement en deux) ; les autre autres pétales suivent la ligne du pétale en forme d’ovale présenté au coeur de la fleur et semblent tomber comme de grosses gouttelettes ; les deux autres suivent la ligne du pétale en forme d’ovale,
– Entre les trois pétales de la partie externe de la fleur et les quatre pétales de la même partie externe, se dégage une tige (doublée sur le haut) comportant trois feuilles ; celle qui se rapproche le plus des pétales est une feuille ronde, légèrement ovale de taille comparable aux plus petits pétales de la fleur ; les deux autres sont présentés de part et d’autre du milieu de la tige et sont de plus petite taille ; sur le côté où sont représentées les deux feuilles se dégageant de la tige, deux longues feuilles partant d’entre deux fleurs pour échouer sur la plus petite feuille arrondie partant de la tige,
– Les fleurs sont placées les unes à la suite des autres sur une ligne régulière et elles apparaissent tantôt vers la droite, tantôt vers la gauche ; lorsque sur une ligne les fleurs sont tournées vers la droit, sur la ligne du dessous, elles sont tournées vers la gauche et ainsi de suite ;
que la société Nedel conteste toute originalité à ce modèle de dentelle en faisant valoir qu’il s’agit d’une dentelle florale banale qui fait partie du domaine public comme en atteste madame Michel C…, membre de l’Association Expertex, qui est une association d’experts textiles et l’attestation de la société Unfold Industrial Co qui atteste détenir des droits sur la dentelle arguée de contrefaçon depuis 1996 et verse à cet effet six modèles de dentelle datant pour certains de 1861 et 1925 ; qu’elle soutient que le motif central est parfaitement connu avec une présentation de gauche à droit banale qui de surcroît a une fonction utilitaire afin de ne pas perdre du métrage de tissu et permettre des raccords et qui se retrouve en particulier dans la robe Chanel de 1932 ; mais que la personnalité de l’auteur s’exprime lors de la création de cette dentelle, comme mentionné par la société intimée, à travers le choix esthétique d’avoir accolé les motifs floraux les uns aux autres tantôt vers la droite, tantôt vers la gauche, en laissant très peu d’espace entre les motifs, par la présence de courtes tiges et de petites feuilles, par le choix de forme très ronde tant pour les pétales que les tiges et les feuilles, de tailles et de formes différentes, par le choix de proportionner les fleurs de manière prédominante par rapport aux tiges et aux feuilles, par le choix d’incliner légèrement les fleurs et de les représenter de manière très volumineuses, par le choix de ne représenter que des roses en les apposant sur un fond de type résille de forme arrondie et irrégulières et par la combinaison et l’agencement particulier de ces caractéristiques de sorte que cette dentelle reflète la créativité et la personnalité de son auteur et revêt une physionomie propre ; que les modèles de dentelles à roses communiquées par la société intimée en pièces 11 à 18 et 46 pour contester le caractère original de la dentelle en cause, ne reprennent pas les motifs particuliers et leur combinaison de cette dentelle (l’agencement des roses est différent, sans alternative de gauche et droite, comportent des tiges et feuilles différentes et la plupart de ces dentelles comportent également d’autres motifs ou n’ont ni tiges ni feuilles, certains modèles sont des dessins et non des dentelles ou des tissus ajourés et non des dentelles et peu ont des résilles) pas plus que dans le modèle de la robe Chanel divulgué en 1932 dans le magazine Harper’s qui présente des tiges, feuilles dans des tailles et densités différentes, plus allongées, sans mouvement alternatif vers la droite et la gauche, qui ne génèrent pas la même impression d’ensemble et ne sont donc pas de nature, comme jugé à bon droit par le tribunal, à détruire l’originalité du modèle de dentelle de la société Jabouley, l’existence d’établissement de protocoles transactionnels évoqués par la société appelante, dans d’autres affaires, étant sans incidence sur le caractère original de cette dentelle telle qu’examinée présentement par la cour ; que la société Nedel verse aux débats pour contester l’originalité de la dentelle litigieuse une analyse présentée comme étant celle de Madame Michèle C… et signée par madame Michèle D… née E… qui n’ont pas la qualité d’expert près la cour d’appel qui se rapporte à une analyse comparative entre le modèle de dentelle Jabouley 18105 et une autre intitulée Seteri Argenti 157MEMOLE mais qui ne comporte aucune reproduction ni description et ne fait qu’une présentation générale sous forme de concept insusceptible de détruire le caractère original de la dentelle dont s’agit ; que les indications de madame C… qui indique que les exigences techniques du matériel de fabrication (induiraient) une soumission de l’esquisseur et du dessinateur aux capacités restreintes de la machine, sont contredites par la diversité de modèles de dentelles produites par une même machine comme en justifie la société Jabouley ; qu’il convient en conséquence d’infirmer le jugement à ce titre et de dire que le modèle de dentelle référencé 18105 est éligible à la protection au titre du droit d’auteur ;
ALORS, D’UNE PART, QUE seul peut être protégé le dessin ou modèle nouveau, présentant un caractère propre, exprimant la personnalité de l’auteur, et résultant d’un effort de création ; qu’en ne recherchant pas, comme elle y était invitée (cf. concl. p. 18), si eu égard aux autres modèles de dentelle à motif floral formant le fonds commun de référence, l’effort créatif personnel n’était pas insuffisant pour reconnaître au modèle de dentelle référencé 18105 la protection accordée au titre de l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle, et ce quand bien même le modèle contesté ne reprendrait pas à l’identique les motifs particuliers et combinaisons de dessins de dentelles antérieurs, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard dudit texte ;
ALORS, D’AUTRE PART, QUE dans son jugement du 19 juin 2014, le tribunal de grande instance de Paris avait retenu (p. 10, al. 2 & 3) que toutes les caractéristiques de la composition du motif floral de la société Jabouley se retrouvaient dans la robe du soir Chanel divulguée en 1932 et que « l’impression visuelle d’ensemble est quasiment identique » ; qu’en affirmant cependant que les caractères du modèle de robe Chanel divulgué en 1932 « ne génèrent pas la même impression d’ensemble et ne sont donc pas de nature, comme jugé à bon droit par le tribunal, à détruire l’originalité du modèle de dentelle de la société Jabouley » (arrêt, p. 5, al. 5), la cour d’appel a dénaturé ledit jugement et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué, infirmatif sur ces points, d’AVOIR condamné la société Nedel à payer à la société Jabouley SA la somme de 80.000 euros en réparation du préjudice subi par les actes de contrefaçon, ordonné la publication par extraits de la présente décision dans trois revues ou journaux au choix de la SA Jabouley et aux frais de la société Nedel sans que le coût de chaque insertion ne dépasse la somme de 3.500 euros et condamné la société intimée à payer à la société appelante la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS, sur les mesures réparatrices, QUE l’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle énonce que : « Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits et le préjudice moral causé au titulaire des droits du fait de l’atteinte ; toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire qui ne peut être inférieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte » ; que la société Nedel soutient que la société Jabouley ne démontre pas la réalité de son préjudice car elle ne verse pas aux débats des catalogues de commercialisation de ce modèle et ne communique pas sa marge ; qu’elle fait valoir le caractère accessoire de la dentelle par rapport au vêtement ; que les actes de contrefaçon ont porté atteinte aux droits patrimoniaux de la société Jabouley sur son modèle de dentelle qui a nécessité un travail de création et des investissements et en le banalisant et ce d’autant que celle-ci recouvre intégralement le modèle et en constitue l’élément principal et qu’il a été largement diffusé au travers de 42 boutiques de la société Nedel, 50 magasins à enseigne et sur internet ; que la commercialisation licite ou non par des sociétés tiers de même modèle de dentelle n’est pas exclusive du préjudice subi par les actes de contrefaçon propres à la société Nedel ; qu’il ressort des opérations de saisie-contrefaçon que la société Nedel a acquis 8.657 tee-shirts litigieux le 13 juin 2012 sur lequel 6.525 exemplaires ont été vendus pour la somme de 232.947,89 euros ; que la société Jabouley ne communique aucun document permettant d’établir l’importance de la commercialisation de ce modèle de dentelle et la diminution des ventes résultant de cette contrefaçon ; qu’il convient en conséquence en regard de l’ensemble de ces éléments de condamner la société Nedel à payer à la société Jabouley la somme de 80.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par les actes de contrefaçon ; qu’à titre de dommages et intérêts complémentaires, il y a lieu d’ordonner la publication par extraits de la présente décision dans trois revues ou journaux au choix de la SA Jabouley et aux frais de la société Nedel sans que le coût de chaque insertion ne dépasse la somme de 3.500 euros ;
ALORS, D’UNE PART, QUE viole l’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, la cour d’appel qui accorde une somme de 80.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par les actes de contrefaçon après avoir constaté que le demandeur ne justifiait d’aucun préjudice économique ;
ALORS, D’AUTRE PART, et en toute hypothèse, QUE viole l’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, la cour d’appel qui accorde une somme globale de 80.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par les actes de contrefaçon quand il lui appartenait de préciser les différents postes de préjudice qu’elle prenait en considération et les montants d’indemnités correspondant.