Jurisprudence sur l’Article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle : 18 février 2020 Cour d’appel de Paris RG n° 18/00175

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Jurisprudence sur l’Article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle : 18 février 2020 Cour d’appel de Paris RG n° 18/00175
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18 février 2020
Cour d’appel de Paris
RG n°
18/00175

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 1

ARRÊT DU 18 FÉVRIER 2020

(n° 033/2020, 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 18/00175 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B4WX7

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Novembre 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 16/13635

APPELANTE

SAS C8

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de NANTERRE sous le numéro 444 564 793

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée et assistée de Me Pierre-Louis DAUZIER de la SCP DAUZIER & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0224

INTIMÉE

SAS GENDREAU

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LA ROCHE SUR YON sous le numéro B 342 010 725

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

Assistée de Me Cyril TOURNADE de la SELARL HAROLD AVOCATS exerçant sous l’enseigne NMCG Avocats associés, Avocat au barreau de NANTES, Case palais 283

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 08 Janvier 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur David PEYRON, Président de chambre

Mme Isabelle DOUILLET, Conseillère

M. François THOMAS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues à l’article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON

ARRÊT :

Contradictoire

par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

signé par David PEYRON, Président de chambre et par Karine ABELKALON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

La société GENDREAU se présente comme une entreprise familiale spécialisée dans la conserverie appartenant au groupe MAISON GENDREAU créé en 1903, qui a pour activité la vente de solutions de repas chauds et froids et de conserves de poissons.

Elle indique qu’elle est titulaire et exploitante des marques suivantes :

la marque semi-figurative française ‘LA CUISINE D’OCEANE’, déposée le 11 juillet 2008 et enregistrée sous le n° 3 588 166 (ci-après, la marque 166) pour désigner les produits suivants :

en classe 29 : Viande, poisson, volaille et gibier ; extraits de viande ; fruits et légumes conserves, congelés, séchés et cuits ; gelées, confitures, compotes ; oeufs, lait et produits laitiers ; huiles et graisses comestibles ; graisses alimentaires ;beurre ; charcuterie ; salaisons ; crustacés (non vivants) ; conserves de viande ou de poisson ; fromages ; boissons lactées où le lait prédomine ;

en classe 30 : Café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédanés du café ; farine et préparations faites de céréales, pain, pâtisserie et confiserie, glaces comestibles ; miel, sirop de mélasse ; levure, poudre pour faire lever ; sel, moutarde ; vinaigre, sauces (condiments) ; épices ; glace à rafraîchir ; sandwiches, pizzas ; crêpes (alimentation) ; biscuiterie ; gâteaux ; biscottes ; sucreries ; chocolat ; boissons à base de cacao, de café, de chocolat ou de thé :

la marque semi-figurative française ‘LA CUISINE D’OCEANE’, déposée le 1er avril 2016 et enregistrée sous le n° 4 261 496 (ci-après, la marque 496) pour désigner les produits suivants :

en classe 29 : Viande ; poisson ; volaille ; gibier ; extraits de viande ; fruits conserves ; fruits congelés ; fruits secs ; fruits cuisinés ; légumes conserves ; légumes surgelés ; légumes séchés ; légumes cuits ; gelées ; confitures ; compotes ; oeufs ; lait ; produits laitiers ; huiles et graisses comestibles ; graisses alimentaires ; beurre ; charcuterie ; salaisons, crustacés (non vivants) ; conserves de viande ; conserves de poisson ; fromages ; boissons lactées où le lait prédomine ;

en classe 30 : Café ; thé ; cacao ; sucre ; riz ; tapioca; farine ; préparations faites de céréales ; pain ; pâtisseries ; confiserie ; glaces alimentaires ; miel ; sirop de mélasse ; levure ; poudre à lever ; sel ; moutarde ; vinaigre ; sauces (condiments) ; épices ; glace à rafraîchir ; sandwiches ; pizzas ; crêpes (alimentation) ; biscuits ; gâteaux ; biscottes ; sucreries ; chocolat ; boissons à base de cacao ; boissons à base de café ; boissons à base de thé :

Les produits de la société GENDREAU sont vendus en supermarchés et hypermarchés dans toute la France et sont présentés sur son site intemet www.maisongendreau.com. et, s’agissant des articles revêtus de la marque ‘LA CUISINE D’OCEANE’, sur le site www.lacuisinedoceane.com.

La société de production et de diffusion D8 exploite la chaîne de télévision généraliste privée éponyme D8, ensuite dénommée C8, qui propose, depuis mars 2016, une émission de reportages intitulée Déjà demain, présentée par le journaliste [Z] [H], et qu’elle décrit comme ayant pour objet des enquêtes journalistiques approfondies visant à éclairer les téléspectateurs sur les changements de la société et les transformations des modes de vie.

Le premier numéro de cette émission, intitulé ‘Qu’allons nous bientôt manger ”, a été diffusé le 27 mars 2016.

Il a été produit par la société LET’S PIX, placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce du 10 novembre 2015 ayant désigné la SCP B.T.S.G., en la personne de Maître [N] [F], en qualité de mandataire liquidateur, et auprès de laquelle la société D8 a acquis les droits de diffusion télévisuelle par un contrat signé le 24 mars 2014.

Le documentaire en cause, d’une durée de 1 heure 41 minutes et 10 secondes, présentait une enquête menée pendant un an sur certains aspects de l’industrie alimentaire, dont les techniques de fabrication de produits préparés, en évoquant notamment la traçabilité de leurs composants, parmi lesquels la pulpe de poisson. Afin de s’introduire dans des usines de fabrication de ce type de produits au Vietnam, où aucune autorisation de tournage ne leur avait été délivrée, les journalistes se sont présentés comme les dirigeants d’une société française LA CUISINE DE SOPHIE au nom de laquelle une brochure commerciale, un site intemet et une page Facebook avaient, à cette fin, été constitués.

Estimant que cette appellation fictive et les éléments s’y rapportant (documents, plaquettes, packagings et intitulé des produits) caractérisaient des actes de contrefaçon et de dénigrement de ses marques ‘LA CUISINE D’OCEANE’, la société GENDREAU a fait assigner la société D8 en référé d’heure à heure, par acte du 15 avril 2016, pour voir cesser la diffusion du reportage en cause et obtenir une indemnité provisionnelle.

A réception de l’assignation, la société D8 a suspendu la diffusion du premier numéro de l’émission Déjà demain intitulée ‘Qu’allons nous bientôt manger ” dans l’attente de la décision à intervenir.

Par ordonnance rendue le 18 mai 2016, le juge des référés :

a déclaré la société GENDREAU irrecevable à agir au titre des droits d’auteur,

dit n’y avoir lieu a référé en raison d’une contestation sérieuse sur la contrefaçon,

constaté la suspension spontanée par la société D8 de la diffusion du programme sur ses antennes et son site intemet www.D8.tv dans l’attente d’une décision au fond,

condamné à titre provisionnel la société D8 à payer à la société GENDREAU la somme de 10 000 euros à valoir sur l’indemnisation de son préjudice résultant de l’atteinte à l’image,

condamné la même aux dépens, outre le versement à la société GENDREAU d’une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par acte d’huissier en date du 13 septembre 2016, la société GENDREAU a fait assigner au fond la société D8 et la SCP BTSG, en la personne de Me [F], ès qualités de mandataire liquidateur de la société LET’S PIX, en contrefaçon de marque et de droits d’auteur, parasitisme et actes de dénigrement.

Par un jugement rendu le 10 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Paris a :

déclaré irrecevables les demandes présentées à l’encontre de la SCP BTSG, ès qualités de mandataire liquidateur de la société LET’S PIX,

débouté la société GENDREAU de ses demandes au titre de la contrefaçon de marques,

débouté la société GENDREAU de ses demandes au titre de la contrefaçon de droits d’auteur,

dit qu’en reprenant de façon servile le personnage du logo figurant sur ses produits, ainsi que les intitulés de deux plats comme leur emballage dont les formes, couleurs et illustrations sont reproduites à l’identique, le documentaire Déjà demain diffusé le 27 mars 2016 et intitulé ‘Qu’allons nous bientôt manger ” a porté atteinte à l’image de la société GENDREAU et lui a causé un préjudice,

fait interdiction à la société D8 de diffuser le documentaire ‘Qu’allons nous bientôt manger ” dans sa version du 27 mars 2016,

condamné la société D8 à verser à la société GENDREAU une somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts,

rejeté les demandes de publication,

débouté la société D8 de sa demande reconventionnelle au titre de la procédure abusive,

condamné la société D8 aux dépens et au paiement à la société GENDREAU de la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

ordonné l’exécution provisoire.

Le 20 décembre 2017, la société C8 a interjeté appel de ce jugement, intimant seulement la société GENDREAU.

Dans ses conclusions numérotées 2 transmises le 4 septembre 2018, la société C8 demande à la cour :

à titre liminaire,

d’infirmer le jugement en ce qu’il lui a fait interdiction de diffuser le documentaire ‘Qu’allons-nous bientôt manger ” dans sa version du 27 mars 2016,

de lui donner acte de la suspension de la diffusion du documentaire litigieux dans sa forme initiale dès le 15 avril 2016, et ceci dans l’attente de l’arrêt de la cour d’appel de Paris,

de rejeter la demande formée par la société GENDREAU tendant à interdire la diffusion de l’émission ‘Qu’allons-nous bientôt manger ”,

à titre principal,

de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société GENDREAU de ses demandes de contrefaçon de marques, de contrefaçon de droits d’auteur, de constatation d’actes de parasitisme et d’actes de dénigrement,

d’infirmer le jugement en ce qu’il a dit qu’elle a porté atteinte à l’image de la société GENDREAU et lui a causé un préjudice,

de juger qu’elle n’a commis aucune atteinte à l’image de la société GENDREAU et de débouter en conséquence la société GENDREAU de toutes ses demandes sur ce fondement,

d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à verser à la société GENDREAU une somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts,

de constater l’absence de démonstration du préjudice prétendument subi par la société GENDREAU et de débouter en conséquence la société GENDREAU de sa demande de dommages et intérêts,

par voie de conséquence, d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée aux dépens et à verser à la société GENDREAU une somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile,

de condamner, en tant que de besoin, la société GENDREAU au remboursement de toutes les sommes versées au titre des condamnations en référé d’un montant de 15 212,47 euros et en première instance d’un montant de 21147,94 euros,

à titre subsidiaire,

de juger que la demande de dommages et intérêts est excessive et injustifiée,

de constater que la société C8 n’est que diffuseur du documentaire ‘Qu’allons-nous bientôt manger ” dont elle a acquis les droits de diffusion par contrat de pré-achat de droits de diffusion et qu’elle n’en a dès lors pas la responsabilité de production,

de ramener en conséquence la demande de réparation de la société GENDREAU à un montant purement symbolique,

en tout état de cause,

de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté les demandes de publication de la société GENDREAU,

de débouter la société GENDREAU de l’ensemble de ses demandes,

de la condamner à lui verser la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses uniques conclusions transmises le 18 juin 2018, la société GENDREAU demande à la cour :

de la juger tant recevable que bien fondée en l’ensemble de ses demandes et de dire la société C8 mal fondée dans l’ensemble de ses demandes,

de confirmer le jugement en ce qu’il a :

dit qu’en reprenant de façon servile le personnage du logo figurant sur ses produits ainsi que les intitulés de deux plats comme leurs emballages dont les formes, couleurs et illustrations sont reproduites à l’identique, le documentaire de l’émission Déjà demain diffusé le 27 mars 2016 et intitulé ‘Qu’allons nous bientôt manger ” a porté atteinte à l’image de la société GENDREAU et lui a causé un préjudice,

fait interdiction à la société D8 de diffuser le documentaire ‘Qu’allons nous bientôt manger ” dans sa version du 27 mars 2016,

débouté la société D8 de sa demande reconventionnelle au titre de la procédure abusive,

condamné la société D8 à lui verser une somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

statuant à nouveau,

de juger que l’utilisation de la dénomination ‘La Cuisine de Sophie’ par la société C8 dans le cadre d’un reportage télévisé dans lequel des journalistes se font passer pour des industriels français spécialisés dans les plats préparés auprès d’un industriel vietnamien est constitutive d’actes de contrefaçon par imitation de la marque ‘LA CUISINE D’OCEANE’ numéro 3 588 166 et de la marque ‘LA CUISINE D’OCEANE’ n° 4 261 496 dont elle est titulaire,

de juger que l’utilisation des visuels originaux des emballages de produits de la société GENDREAU par la société C8 dans le cadre d’un reportage télévisé dans lequel des journalistes se font passer pour des industriels français spécialisés dans les plats préparés auprès d’un industriel vietnamien est constitutive d’actes de contrefaçon de droit d’auteur au préjudice de la société GENDREAU,

de juger que l’assimilation des produits prétendument commercialisés sous la marque ‘LA CUISINE DE SOPHIE’ aux produits réels de la société GENDREAU commercialisés sous la marque ‘LA CUISINE D’OCEANE’ par les sociétés C8 et LET’S PIX est constitutive d’actes de parasitisme, de dénigrement et d’atteinte à l’image,

par conséquent,

de juger que la diffusion de l’émission Déjà demain intitulée ‘La pulpe de poisson : de la pâtée pour chats à vos plats cuisinés’ constitue une faute commise par les sociétés C8 et LET’S PIX au préjudice de la société GENDREAU,

de condamner la société C8 à payer à la société GENDREAU la somme de 107 395,39 euros à titre de dommages intérêts en indemnisation de l’ensemble de ses préjudices, sauf à parfaire,

d’interdire aux sociétés C8 et LET’S PIX, sous astreinte de 15 000 € par infraction constatée à compter du prononcé du ‘jugement’ à intervenir, la diffusion de l’émission ‘La pulpe de poisson : de la pâtée pour chats à vos plats cuisinés’ sur la chaîne C8, sur le site internet www.d8.tv, en replay et sur tout support,

d’ordonner la publication de l’arrêt à intervenir aux frais de la société C8 et de la SCP BTSG, ès qualité de mandataire liquidateur de la société LET’S PIX, dans 3 journaux ou magazines au choix de la société GENDREAU dans la limite de 20 000 € HT par insertion,

d’ordonner la diffusion sur la chaîne C8 lors de la prochaine émission Déjà demain diffusée par cette chaîne, ainsi que sur le site internet C8 replay, du communiqué suivant, sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à compter du prononcé du ‘jugement’ à intervenir : « Concernant l’émission « Déjà demain » diffusée sur C8 le 27 mars 2016 « La pulpe de poisson : de la pâtée pour chats à vos plats cuisinés », il est précisé que la fausse marque créée pour le reportage « La cuisine de Sophie » n’a rien à voir avec les produits de la marque « La cuisine d’Océane » auxquels elle a pu être assimilée. Nous vous confirmons que les produits de la marque « La cuisine d’Océane », et notamment le Parmentier de poisson et la Moussaka qui ont été cités, ne sont pas concernés par les pratiques des industriels dénoncées et ne contiennent aucune pulpe de poisson telle que présentée dans le reportage.»,

de se réserver le contentieux de la liquidation de l’astreinte,

en tout état de cause,

de débouter la société C8 de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles et de ses demandes sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, de fixer la créance de la société GENDREAU au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société LET’S PIX à la somme 107 395,39 euros, sauf à parfaire,

de condamner in solidum la société C8 et la SCP BTSG ès qualité de mandataire liquidateur de la société LET’S PIX à payer à la société GENDREAU la somme de 10 000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est du 22 janvier 2019.

A l’audience du 8 janvier 2020, sur une question de la cour, l’avocat de la société GENDREAU a indiqué que c’est à la suite d’une erreur purement matérielle que ses écritures contiennent des demandes formées à l’encontre du mandataire liquidateur de la société LET’S PIX, alors que ce dernier n’a pas été appelé en cause d’appel, et que ces demandes sont donc sans objet.

MOTIFS DE L’ARRÊT

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées.

Sur le chef du jugement non critiqué

La cour constate que le jugement n’est pas critiqué en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes présentées à l’encontre de la SCP BTSG, ès qualités de mandataire liquidateur de la société LET’S PIX.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef pour les justes motifs qu’il comporte.

Sur la contrefaçon des marques invoquées par la société GENDREAU

Pour demander l’infirmation du jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande en contrefaçon de marques, la société GENDREAU soutient i) qu’elle est bien titulaire de la marque 496, peu important que cette marque ait été déposée par Mme [U] et que l’émission litigieuse diffusée par la société C8 était accessible en replay après le dépôt de cette marque, ce qui a été constaté par huissier de justice, ii) que ses deux marques ont été modifiées au sens de l’article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle, puis reproduites et utilisées par la société C8 pour désigner des produits identiques, et qu’elles ont fait l’objet d’une imitation illicite dans l’émission litigieuse, cette imitation étant de nature à créer une confusion dans l’esprit du public, d’autant qu’une campagne publicitaire des produits de la gamme ‘La cuisine d’Océane’ avait été diffusée sur les chaînes C8 et D17 en janvier 2016, iii) que la fausse marque créée par les journalistes de C8 a été exploitée dans un contexte commercial, i.e. dans la vie des affaires, la Cour de justice de l’Union européenne définissant l’usage dans la vie des affaires comme un usage se situant ‘dans le contexte d’une activité commerciale visant à un avantage économique et non dans le domaine privé’, ce qui est le cas en l’espèce, l’usage illicite de sa marque par la diffusion du reportage de C8 ayant bien eu pour contrepartie un avantage de nature économique et n’ayant pas été réalisé uniquement dans un but d’information du public, iv) que la marque a bien été utilisée afin d’identifier un produit ou un service dans la mesure où les journalistes ont créé une fausse page Facebook présentant des produits sur lesquels se trouvait apposée la marque litigieuse et qui répondait donc au but d’identification de l’origine du produit.

La société C8 demande la confirmation du jugement pour les motifs qu’il comporte.

La notice INPI de la marque 496 invoquée par la société GENDREAU, fournie par la société C8, fait apparaître comme déposant ‘Mme [B] [U]’ et comme mandataire ‘GENDREAU, Mme [B] [U]’. Ces informations ne sont pas de nature à remettre en cause l’analyse des premiers juges qui ont retenu que la société GENDREAU n’apparaît pas propriétaire de la marque 496, étant observé qu’en première instance, elle se limitait dans le dispositif de ses conclusions à solliciter une condamnation au titre d’actes de contrefaçon par imitation de sa seule marque 166. L’examen de la contrefaçon alléguée sera donc examinée, comme en première instance, au regard de la seule marque semi-figurative 166.

Les signes en conflit n’étant pas identiques, la contrefaçon doit être appréciée au regard des dispositions de l’article L. 713-3 b) du code de la propriété intellectuelle selon lequel ‘Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public : (…) b) L’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement.’, la société GENDREAU visant d’ailleurs ces dispositions dans le dispositif de ses conclusions et sollicitant expressément la reconnaissance d’actes de contrefaçon ‘par imitation’ de sa marque 166.

C’est par des motifs exacts et pertinents, tant en fait qu’en droit, que la cour adopte, que le tribunal a jugé que les conditions d’un usage constitutif d’une contrefaçon de marque n’étaient pas remplies et a débouté en conséquence la société GENDREAU de ses demandes en contrefaçon de marques, après avoir notamment retenu que le signe litigieux ‘LA CUISINE DE SOPHIE’, représenté sur une documentation commerciale réalisée pour les besoins de l’émission ‘Qu’allons nous bientôt manger ”, n’a pas été utilisé pour identifier l’origine d’un produit et afin d’obtenir un avantage économique, même si cet usage est intervenu dans le cadre de l’activité commerciale de la société C8, mais pour permettre la réalisation du tournage et accéder à des informations sur la composition de certains plats cuisinés.

Il sera ajouté que l’affirmation de la société GENDREAU selon laquelle derrière le but affiché d’information de la société C8 se dissimulerait une intention d’inciter le public à boycotter ses produits en tentant de l’assimiler aux sociétés mettant en oeuvre les pratiques dénoncées, ne se trouve corroborée par aucun élément au dossier.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la contrefaçon des droits d’auteur invoqués par la société GENDREAU

La société GENDREAU fait grief à la société C8 de la création d’un logo fictif imitant son propre logo présent sur sa marque et de la reprise à l’identique de ses visuels et emballages comportant les mêmes photos de plats cuisinés et les mêmes désignations de ces plats – ‘moussaka et légumes grillés’ et ‘parmentier de poisson à la ciboulette’ -, seule la dénomination ‘d’Océane’ ayant été changée en ‘de Sophie’. Pour demander l’infirmation du jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande en contrefaçon de droits d’auteur, la société GENDREAU soutient que l’originalité des visuels du logo de sa marque

réside notamment dans :

la forme particulière du logo, quasi rectangulaire,

des couleurs bordeaux/jaune du logo qui ne sont pas couramment utilisées par les fabricants de plats préparés et qui sont largement distinctifs de la marque de la société GENDREAU,

du personnage associé au logo, particulièrement distinctif et que l’on ne retrouve pas sur les autres logos et marques de produits similaires (‘une jeune cuisinière qui agite une spatule de cuisine, sur un fond jaune ‘ orange et des lettres de couleur bordeaux. Ce petit personnage féminin est représenté avec de petites étoiles autour de la spatule, ainsi qu’avec des feuilles de laurier stylisé sur la seconde présentation. Le choix de représenter une femme cuisinière est en réalité l’incarnation d’Océane, la cuisinière créatrice des plats cuisinés de cette marque. La spatule est brandie telle une baguette magique, aspect accentué par les étoiles qui entourent l’instrument de cuisine et l’ombre blanche autour de la silhouette de la femme. Cette position et ces choix esthétiques de représentations sont purement arbitraires et originaux’),

des éléments entourant le logo, à savoir les feuilles de laurier (sur l’une des représentations) (‘l’ajout des feuilles dorées sur le côté du logo ressemble à du blé, qui rappelle l’origine française des produits utilisés ainsi que le logo de l’agriculture biologique d’une manière particulièrement originale’).

S’agissant des visuels des produits (plats cuisinés), la société GENDREAU fait valoir que leur originalité résulte notamment de :

la forme particulière de l’emballage qui n’est pas la même que celle de ses concurrents

la présentation du logo et de la marque « La Cuisine d’Océane » sur les emballages, en haut et au milieu, avec la même présentation pour chaque produit

l’apposition de l’encart ‘Carnet de voyages’ sur l’emballage de la moussaka par exemple, marque de la personnalité de la société GENDREAU, cette mention n’apparaissant pas sur les autres produits de concurrents présentés par la société C8

l’association du visuel du logo avec les plats préparés.

Elle expose que ces choix purement créatifs distinguent ses visuels de ceux et créent une identité visuelle relavant d’un effort créatif empreint de la personnalité de son auteur, ajoutant que l’originalité du logo et des visuels doit être appréciée dans leur ensemble.

La société C8 conteste l’originalité du logo, visuels et emballages revendiqués et demande la confirmation du jugement sur ce point.

L’article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création et des lors qu’elle est originale, d’un droit de propriété incorporelle exclusif comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial. L’originalité de l’oeuvre, qu’il appartient à celui qui invoque la protection de caractériser, suppose qu’elle soit issue d’un travail créatif et résulte de choix arbitraires lui conférant une physionomie propre, révélatrice de la personnalité de son auteur.

En l’espèce, comme le tribunal l’a relevé, des visuels de marques concurrentes versés aux débats – ‘LA CUISINE DE BABETH, LES RECETTES DE CHLOE, DANS LA CUISINE D’UN CHEF – montrent que le recours à un petit personnage féminin stylisé (tenant une cuillère Dans la cuisine d’un chef ou un couvercle dans Les recettes de Chloe) est commun dans le secteur considéré, de même que l’utilisation d’un cartouche de forme quasi rectangulaire (La cuisine de Babeth). Les extraits du site de l’INPI produits par l’appelante révèlent par ailleurs que l’expression ‘la cuisine de’ suivie d’un prénom féminin est fréquent (LA CUISINE DE VERA, LA CUISINE DE BABETH, LA CUISINE DE ROSETTE, LA CUISINE DE LUCETTE, LA CUISINE DE LUCIE, LA CUISINE DE ZOE…) . Par ailleurs, les couleurs bordeaux/jaune ou la représentation de feuilles de laurier (ou d’épis de blé) ne sont pas originales pour des plats cuisinés. S’agissant des emballages des plats cuisinés, la société GENDREAU affirme mais sans nullement l’établir que la forme de ses emballages se distinguerait de celle de ses concurrents et cette forme – partiellement arrondie pour le parmentier de poisson ou carrée pour la moussaka -, dictée par la nature et la quantité des contenus, est particulièrement banale pour des plats cuisinés. Il en est de même des visuels apposés sur ces emballages qui, comme les premiers juges l’ont relevé, n’ont d’autre objectif que de représenter fidèlement le produit – en l’occurrence, du parmentier de poisson ou de la moussaka – disposé dans une assiette sous son intitulé, selon un agencement et une combinaison on ne peut plus courants dans le secteur des plats cuisinés, l’ajout de cartouches pour souligner la composition du produit (‘J’ai ajouté de la ciboulette ciselée’ ; ‘Mon carnet de voyage, selon la tradition grecque, ma Moussaka est préparée avec du B’uf et de l’Agneau’) ne présentant en soi aucune originalité révélatrice de la personnalité de l’auteur.

La société GENDREAU argue de ce qu’aucun visuel semblable aux siens ne se retrouve sur d’autres pats préparés mais le fait que les visuels de la société GENDREAU se distinguent de ceux de concurrents, ce qui résulte nécessairement de l’apposition de sa marque sur les emballages et de la nature des produits qu’elle choisit de commercialiser, n’établit pas en soi leur originalité.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a dit que, faute d’originalité, les logo, visuels et emballages revendiqués par la société GENDREAU ne peuvent bénéficier de la protection du droit d’auteur.

Sur le dénigrement et l’atteinte à l’image de la société GENDREAU

La société GENDREAU demande la confirmation du jugement en ce qu’il a retenu l’atteinte portée à son image par le reportage ‘Qu’allons nous bientôt manger ” pour les motifs qu’il contient et ceux repris ci-après. Elle soutient que les faits sont aussi constitutifs de dénigrement du fait de l’assimilation et de la confusion opérées entre les produits dénoncés dans l’émission, à base de pulpe de poissons (l’émission étant sous-titrée : ‘La pulpe de poisson : de la pâtée pour chats à vos plats spécialisés dans la fabrication des plats préparés’) et les produits de sa marque que l’on a fait passer pour des produits bas de gamme contenant de la pulpe de poissons.

Pour critiquer le jugement qui a retenu une atteinte portée à l’image de la société GENDREAU, la société C8 soutient que le tribunal n’a pu sans contradiction écarter le grief de dénigrement et retenir l’atteinte à l’image et lui reprocher l’utilisation d’éléments d’identification de la société GENDREAU (personnage du logo, intitulé de plats, emballages) auxquels il n’a reconnu aucune protection. Elle fait valoir que le nom et les marques de la société GENDREAU n’apparaissent à aucun moment dans le reportage litigieux, que le journaliste a expressément mentionné la création d’une société factice LA CUISINE DE SOPHIE créée pour les besoins de l’enquête, que les images litigieuses présentant cette société et ses produits sont extrêmement brèves, qu’ainsi rien ne permet au téléspectateur d’assimiler les produits de la société GENDREAU à ceux contenant de la pulpe de poissons, et ce d’autant qu’il était expliqué que la pulpe de poissons n’est pas utilisée dans tous les plats préparés.

C’est par des motifs que la cour adopte, que le tribunal a rejeté la demande de la société GENDREAU au titre du dénigrement en retenant notamment qu’en diffusant le documentaire litigieux, la société C8 n’avait pas cherché à favoriser certains opérateurs du secteur de l’industrie alimentaire en jetant le discrédit sur la société GENDREAU et à en retirer un bénéfice. Le jugement sera confirmé de ce chef.

C’est par des motifs exacts et pertinents, tant en fait qu’en droit, que la cour adopte, que le tribunal a jugé que l’émission litigieuse ‘Qu’allons nous bientôt manger ” a porté atteinte à l’image de la société GENDREAU du fait de la reprise servile du personnage du logo figurant sur ses produits, des intitulés de deux plats comme de leur emballage dont les formes, couleurs et illustrations ont été reproduites à l’identique, une telle reprise des éléments d’identification de la société GENDREAU conduisant le téléspectateur, bien qu’avisé du procédé employé, à associer les produits distribués sous la marque ‘LA CUISINE D’OCEANE’ aux pratiques dénoncées dans l’émission et à percevoir ces produits comme des exemples de plats contenant des ingrédients d’origine douteuse. Le tribunal a relevé très pertinemment que le risque d’association était d’autant plus réel que la société GENDREAU avait, en janvier 2016, soit deux mois avant la diffusion du reportage litigieux, engagé une campagne publicitaire sur la chaîne D8 portant sur les produits distribués sous sa marque ‘LA CUISINE D’OCEANE’. C’est également à juste raison que les premiers juges ont écarté l’argumentation de la société C8 qui faisait valoir qu’elle n’était pas producteur de l’émission mais seulement diffuseur, en retenant qu’elle n’ignorait ni le contenu de l’émission ni les conséquences susceptibles de s’attacher à l’imitation d’une marque qui avait fait précédemment l’objet d’une campagne publicitaire sur sa propre antenne.

Il sera ajouté que le fait de retenir l’atteinte portée à l’image de la société GENDREAU du fait de la reprise servile d’éléments permettant de l’identifier (son logo, sa marque, les emballages de deux des plats qu’elle commercialise) n’entre pas en contradiction avec le rejet des demandes en contrefaçon de marque et de droits d’auteur, motivé respectivement par l’absence d’usage à titre de marque dans la vie des affaires et par l’absence d’originalité des éléments revendiqués.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a dit que la société C8, en diffusant le documentaire Déjà demain diffusé intitulé ‘Qu’allons nous bientôt manger ”, a porté atteinte à l’image de la société GENDREAU et lui a causé un préjudice.

Sur le parasitisme

La société GENDREAU soutient qu’elle a été victime de parasitisme puisque la société C8 a profité de ses investissements et de sa notoriété pour créer une fausse marque pour les besoins de son reportage. Elle fait valoir que la diffusion du reportage a bien été réalisée à des fins commerciales et que la société C8 en a retiré un avantage commercial, qu’en tout état de cause, la recherche d’un bénéfice économique peut l’être au bénéfice d’un tiers et qu’en l’espèce, les bénéficiaires des agissements parasitaires de la société C8 sont ses concurrents qui ont pu directement profiter de la mauvaise publicité faite à ses produits et à sa marque.

La société C8 demande la confirmation du jugement et oppose que les agissements qui lui sont reprochés n’ont pas été réalisés dans le but d’obtenir un avantage ou un profit économique mais dans celui de réaliser un reportage d’investigation. Elle conteste toute volonté de jeter le discrédit sur la société GENDREAU ou ses produits et de faire profiter les concurrents de cette dernière d’un avantage économique.

Le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.

En l’espèce, si la volonté de la société C8 de jeter le discrédit sur la société GENDREAU et ses produits n’est nullement avérée, pas plus que celle, comme il a été dit, d’appeler au boycott des produits GENDREAU, il reste que pour les besoins du reportage qu’elle a diffusé sur sa chaîne, a été créée une fausse société LA CUISINE DE SOPHIE et, au nom de celle-ci, une brochure commerciale, des cartes de visite, un site internet et une page Facebook, des emballages de plats cuisinés ont, à cette fin, été réalisés (cf. constat d’huissier du Me [S]). Ont ainsi été repris, pour les besoins de la création de l’émission diffusée sur C8, non seulement des éléments d’identification de la société GENDREAU (logo, marque à l’exclusion du prénom Océane changé en Sophie) mais aussi, à l’identique, deux plats cuisinés proposés par la société GENDREAU (une ‘moussaka et légumes grillés’ et un ‘parmentier de poisson à la ciboulette’) avec leurs emballages et les intitulés et visuels correspondants.

Ces appropriations, qui ont incontestablement permis la réalisation d’économies, sont constitutives d’actes de parasitisme, les logo, marque, recettes, emballages et visuels de la société GENDREAU constituant une valeur économique dont il a été indûment tiré profit, sans bourse délier, indépendamment du préjudice résultant de l’atteinte qui a été portée à l’image de cette société.

La société C8 ne peut s’exonérer en faisant valoir qu’elle n’est pas productrice de l’émission qu’elle a seulement diffusée sur sa chaîne, dès lors que, comme l’ont justement relevé les premiers juges, elle n’ignorait ni le contenu de l’émission ni les conséquences susceptibles de s’attacher à l’imitation d’une marque qui avait fait peu de temps auparavant l’objet d’une campagne publicitaire sur sa propre antenne.

Le jugement sera par conséquent infirmé en ce qu’il a débouté la société GENDREAU de sa demande au titre du parasitisme.

Sur les mesures réparatrices

Sur la demande indemnitaire

La société GENDREAU demande une somme de 107 395,39 € à titre de dommages et intérêts tous postes de préjudice confondus, incluant le remboursement de la somme de 17 395,39 € TTC correspondant aux frais de publicité de ses produits, facturés en février 2016 par la chaîne C8. Elle souligne la forte audience dont a bénéficié l’émission litigieuse (730 000 téléspectateurs en audience cumulée, soit 3,1 % de part d’audience) le 27 mars 2016 et du fait qu’elle a pu être visionnée en streaming plus de 2300 fois au jour de l’assignation sur le site internet de la chaîne C8.

La société C8 répond que la société GENDREAU ne justifie d’aucun préjudice, que le tribunal a exactement retenu qu’elle ne communiquait aucun élément permettant d’apprécier l’impact du documentaire sur ses ventes ou la perception de ses produits, qu’aucune baisse des ventes n’est justifiée, que le documentaire a été diffusé après la campagne publicitaire portant sur les produits GENDREAU qui ne visait d’ailleurs pas les deux plats en cause dans cette affaire, que les images litigieuses n’apparaissent qu’un peu plus d’une minute sur une heure 40 environ, qu’elle a supprimé très rapidement le passage litigieux.

Le tribunal a procédé à une exacte estimation du préjudice souffert par la société GENDREAU, par des motifs que la cour adopte, en lui accordant une somme de 25 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte portée à son image, en retenant à juste titre qu’aucun élément ne permettait d’apprécier l’impact du documentaire sur ses ventes ou la perception de ses produits et justifier le remboursement de la campagne publicitaire.

Le préjudice subi du fait des actes de parasitisme sera justement réparé par l’allocation d’une somme supplémentaire de 10 000 € à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera réformé en ce sens.

Sur les mesures d’interdiction, de publication, de diffusion d’un communiqué sur la chaîne C8

Le jugement en ce qu’il a interdit à la société C8 de diffuser le documentaire ‘Qu’allons nous bientôt manger ” dans sa version du 27 mars 2016 doit être confirmé.

En revanche, la mesure d’interdiction en ce qu’elle porte sur la diffusion en replay n’est pas justifiée, la société GENDREAU admettant dans ses conclusions que l’émission litigieuse n’est plus diffusée sous cette forme.

Le préjudice de la société GENDREAU étant suffisamment réparé par les dommages et intérêts alloués et l’interdiction prononcée par le tribunal, et eu égard à l’ancienneté des faits et à la suspension spontanée de la diffusion du programme sur l’antenne et sur le site internet de la société D8 déjà constatée par le juge des référés, il ne sera pas fait droit à la demande de publication de la décision dans la presse, ni à la demande de publication d’un communiqué sur le site internet de l’appelante ainsi que sur la chaîne C8 dans un futur numéro de l’émission Déjà demain.

Sur la demande de remboursement par la société GENDREAU

Le sens de la présente décision prive d’objet la demande de la société C8.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société C8, partie perdante, supportera la charge des dépens et sera condamnée à verser à la société GENDREAU, qui a dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits en appel, une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme de 10 000 euros.

Les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance seront confirmées.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement si ce n’est en ce qu’il a débouté la société GENDREAU de sa demande au titre du parasitisme,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la société C8 a commis des actes de parasitisme au préjudice de la société GENDREAU,

Condamne la société C8 à payer la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts à la société GENDREAU en réparation de son préjudice résultant des actes de parasitisme,

Déboute la société GENDREAU du surplus de ses demandes,

Condamne la société C8 aux dépens d’appel et au versement à la société GENDREAU de la somme de 10 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

LE PRÉSIDENTLE GREFFIER

 


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