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20 juillet 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/06674
Copies exécutoires République française
délivrées aux parties le : Au nom du peuple français
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 5
ORDONNANCE DU 20 JUILLET 2023
(n° /2023)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/06674 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHN4W
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Mars 2023 du Tribunal de Commerce de MARSEILLE – RG n° 2022F00675
Nature de la décision : Contradictoire
NOUS, Hélène BUSSIERE, Magistrat, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Cécilie MARTEL, Greffière.
Vu l’assignation en référé délivrée à la requête de :
DEMANDEUR
S.A.S. COMPAGNIE D’AFFRETEMENT ET DE TRANSPORT
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056
Et assistée de Me Isaure CORNUT-GENTILLE substituant Me Richard ESQUIER de l’Association Laude Esquier et Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R144
à
DEFENDEUR
Me [H] [T], mandataire judiciaire, pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la S.A.R.L. COURONNE AUTO
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Dominique MUNIZAGA du Cabinet BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753
Et après avoir appelé les parties lors des débats de l’audience publique du 15 Juin 2023 :
Par jugement du 21 mars 2023, le tribunal de commerce de Marseille a :
– déclaré que la société compagnie d’affrètement et de transport, ci-après CAT, a rompu brutalement une relation commerciale établie avec Couronne Auto,
– condamné CAT à payer à Maître [H] [T] ès qualités de liquidateur judiciaire de Couronne Auto les sommes de :
* 643.936,33 € au titre du préjudice né de la rupture brutale des relations commerciales établies en application de l’article L. 442-1 du code de commerce,
* 5.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté Maître [H] [T] ès qualités de liquidateur judiciaire de Couronne Auto du surplus de ses demandes,
– condamné CAT aux dépens toutes taxes comprises de l’instance tels qu’énoncés par l’article 695 du code de procédure civile,
– ordonné l’exécution provisoire,
– rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du jugement.
Par déclaration du 7 avril 2023, CAT a relevé appel de ce jugement devant la cour d’appel de Paris et par acte du 21 avril 2023, elle a fait assigner Maître [H] [T] pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de Couronne Auto en référé devant le premier président aux fins d’arrêt de l’exécution provisoire. A titre subsidiaire, elle demande à être autorisée à consigner entre les mains de Mme la Bâtonnière de l’Ordre des avocats de Paris ou de tout autre séquestre la somme de 649 000 €.
Aux termes de ses conclusions déposées et développées oralement à l’audience du 15 juin 2023, elle entend voir rejeter la demande de sursis à statuer formulée par le défendeur et réitère ses prétentions initiales.
Elle fait valoir que la demande de sursis à statuer ne relève pas d’une bonne administration de la justice et que ses demandes sont, en l’état, parfaitement recevables. Sur le fond, elle soutient que l’exécution provisoire dont est assortie le jugement du tribunal de commerce de Marseille est de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives. Subsidiairement, elle indique que la consignation de la somme qu’elle a été condamnée à payer permettra d’en garantir le montant.
Aux termes de ses conclusions déposées et développées oralement à l’audience du 15 juin 2023, Maître [H] [T] pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de Couronne Auto demande, in limine litis, qu’il soit sursis à statuer dans l’attente de l’issue de la procédure introduite par CAT devant le juge de l’exécution de Nanterre en contestation de la saisie-attribution pratiquée le 27 avril 2023 à hauteur de 652 769,17 €. En tout état de cause, il conclut au débouté et à la condamnation de CAT à lui verser une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
En premier lieu, il expose que la demande d’arrêt de l’exécution provisoire ne peut avoir d’objet que si le juge de l’exécution ordonne la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée de manière fructueuse. En second lieu, il soutient que la demande d’arrêt de l’exécution provisoire est irrecevable eu égard à l’effet attributif immédiat de la saisie pratiquée. En troisième lieu, il observe qu’il n’est pas démontré de conséquences manifestement excessives dans la mesure où la clôture pour extinction du passif ne ferait nullement obstacle à une procédure en restitution eu égard au montant de la condamnation qui permet de couvrir le montant de l’insuffisance d’actif.
Le conseil de CAT observe que l’irrecevabilité soulevée en défense n’a pas été plaidée in limine litis.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour l’exposé des moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
SUR CE,
La bonne administration de la justice commande de ne pas ordonner de sursis à statuer dans l’attente de la décision du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nanterre.
Maître [H] [T] pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de Couronne Auto a dénoncé à CAT, le 5 mai 2023, la saisie attribution pratiquée avec succès le 27 avril 2023, dont elle a sollicité la mainlevée devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nanterre par une assignation en date du 2 juin 2023.
Lorsque le débiteur conteste, comme en l’espèce, la saisie dans le délai d’un mois à compter de la dénonciation qui lui en est faite, le paiement par le tiers saisi est, en application de l’article R 211-11 du code des procédures civiles d’exécution, différé jusqu’à la décision du juge de l’exécution.
En conséquence, la mesure d’exécution n’est pas consommée et le délégataire du premier président reste compétent pour connaître des mesures d’arrêt ou d’aménagement de l’exécution provisoire.
Il résulte de l’article 524 premier alinéa 2° du code de procédure civile, dans sa version applicable aux instances introduites devant les juridictions du premier degré avant le 1er janvier 2020, que, lorsque l’exécution provisoire a été ordonnée, le premier président statuant en référé peut l’arrêter si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.
Les conséquences manifestement excessives s’apprécient en ce qui concerne les condamnations pécuniaires par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d’infirmation de la décision assortie de l’exécution provisoire.
Le risque de conséquences manifestement excessives suppose un préjudice irréparable et une situation irréversible en cas d’infirmation.
Au cas présent, le tribunal de commerce de Salon-de-Provence a, par jugement du 23 janvier 2000, ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la société Couronne Auto. Cette situation démontre à elle seule le risque d’insolvabilité de cette société et ainsi celui de non-représentation des sommes versées.
La circonstance que le liquidateur soit tenu, par application de l’article L.641-8 du code de commerce, de verser toute somme reçue en compte de dépôt à la Caisse des dépôts et consignations, ne suffit pas à prévenir tout risque, dès lors que ce versement n’emporte pas affectation spéciale et que les fonds déposés demeurent le gage des créanciers.
Le fait qu’une éventuelle clôture de la liquidation judiciaire pour extinction du passif n’aurait pas pour effet de mettre fin à la société ne saurait davantage écarter ce risque dès lors que les associés pourraient alors décider de liquider amiablement la société et de se partager ainsi le boni de liquidation dégagé.
Par ailleurs, il convient de rappeler que la présente juridiction n’est pas juge d’appel de la décision rendue en première instance et n’a donc aucunement à apprécier si la décision frappée d’appel comporte des erreurs de droit ou de fait ni à apprécier les chances de réformation dans le cadre de l’appel interjeté, les observations sur le fond du litige important donc peu.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, la demande d’arrêt de l’exécution provisoire doit être accueillie.
Il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de Maître [H] [T] pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de Couronne Auto demande.
Chaque partie conservera la charge des dépens de la présente instance par elle engagés.
PAR CES MOTIFS
Disons n’y avoir lieu de surseoir à statuer ;
Déclarons la demande d’arrêt de l’exécution provisoire formée par la société compagnie d’affrètement et de transport recevable ;
Arrêtons l’exécution provisoire dont est assorti le jugement du tribunal de commerce de Marseille du 21 mars 2023 (RG n°2022F00675) ;
Rejetons la demande formée par Maître [H] [T] pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de Couronne Auto demande en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Laissons à chaque partie la charge des dépens par elle engagés.
ORDONNANCE rendue par Mme Hélène BUSSIERE, Magistrat, assistée de Mme Cécilie MARTEL, greffière présente lors de la mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
La Greffière, La Conseillère