Engagement de caution : 9 novembre 2004 Cour de cassation Pourvoi n° 00-17.203

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Engagement de caution : 9 novembre 2004 Cour de cassation Pourvoi n° 00-17.203
Ce point juridique est utile ?

Attendu que M. Y… et Mme Z…, alors mariés sous le régime de la séparation de biens et propriétaires indivis d’un fonds de commerce de bar-restaurant, dénommé “Le Brouilly”, ont bénéficié d’une promesse de vente portant sur les parts de la SNC “Le Villars”, exploitant un fonds de commerce de brasserie ; que, pour la réalisation du montage juridique et financier de cette opération qui impliquait la vente de leur fonds de commerce indivis, ils étaient assistés par la société A… Audit & conseil, société de conseil juridique, dirigée par son président directeur général, M. Bertrand A…, lui-même conseil juridique ;

que, pour assurer le financement de cette acquisition, la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de l’Aveyron, devenue Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Quercy-Rouergue (la CRCAM), leur a consenti deux prêts et a aussi accordé un prêt à la SNC “Le Villars”, garanti par leur cautionnement ;que le Crédit lyonnais leur a également consenti un prêt-relais jusqu’à la vente du fonds de commerce “Le Brouilly”, remboursable en un an et garanti par le cautionnement de L’Union des Brasseries aux droits de laquelle se trouve la société Brasserie Heineken ; qu’avec l’intervention de la société A… Audit & conseil et en présence de M. Y…, a été conclu le contrat de cession des parts de la SNC “Le Villars” au profit de Mme Z…, seule, laquelle, titulaire de la totalité des parts, a transformé la société en nom collectif en EURL ; qu’après le divorce des époux B…, les échéances des emprunts étant impayées, l’EURL “Le Villars” a été mise en liquidation judiciaire et M. Y…, qui s’était refusé à vendre le fonds de commerce “Le Brouilly”, a fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire ; qu’il a assigné, outre son ex-épouse et l’EURL “Le Villars”, la société Brasserie Heineken et la CRCAM en annulation des prêts pour absence de cause et dol, et la société A… Audit & conseil et M. Bertrand A… en responsabilité pour manquement à leur devoir de conseil ; que la société Brasserie Heineken et la CRCAM ont également recherché la responsabilité de ces derniers ;

que l’arrêt attaqué a condamné M. A… et la société A… Audit & conseil à payer à M. C…, en sa qualité d’administrateur au redressement judiciaire de M. Y…, le montant du passif de ce dernier et a dit que les condamnations prononcées par le tribunal à l’encontre des ex-époux B… au profit de la CRCAM et de la société Brasserie Heineken le sont solidairement à l’encontre de M. A… et de la société A… Audit & conseil, à concurrence de certains montants ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Attendu que la société A… Audit & conseil et M. A… reprochent à l’arrêt de les avoir condamnés à payer à M. C…, en sa qualité d’administrateur judiciaire de M. Y…, le montant de l’insuffisance d’actif de ce dernier, alors que, selon le moyen, le devoir de conseil du conseil juridique ne peut avoir pour objet que d’informer et d’éclairer les parties sur des éléments de fait ou de droit qu’elles peuvent légitimement ignorer ; que la société A… Audit & conseil et M. A… avaient soutenu dans leurs conclusions d’appel que M. Y… était présent lors de la signature de l’acte de cession des parts de la SNC “Le Villars” à son épouse, ce que les premiers juges avaient expressément constaté, qu’il avait en outre donné en toute connaissance de cause son consentement aux différents prêts souscrits et dont il était solidairement débiteur avec son épouse, ce qui résultait des dispositions du jugement entrepris passé en force de chose jugée sur le rejet de l’action en nullité pour erreur desdits prêts et qu’en conséquence il savait parfaitement que les engagements financiers qu’il avait pris étaient destinés à financer l’acquisition faite par son épouse ; qu’en reprochant à la société A… Audit & conseil et à M. A… d’avoir omis d’informer M. Y… du caractère déséquilibré à son détriment de l’opération litigieuse sans répondre à ce moyen établissant que M. Y… connaissait parfaitement l’étendue de ses droits et obligations, la cour d’appel a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière d’information doit rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation ; qu’ayant relevé que la société A… Audit & conseil et M. A… n’avaient pas justifié avoir informé M. Y… de l’étendue de ses droits et obligations et de leur caractère déséquilibré à son détriment par rapport à ceux de son épouse, la cour d’appel n’avait pas à répondre à une argumentation d’où ne résultait pas la preuve qui incombait à ces conseils juridiques, la souscription des emprunts par leur client et sa présence lors de l’établissement de l’acte de cession des parts sociales au profit de son épouse n’établissant pas qu’il ait connu la portée et les effets de cet acte ;

que le grief n’est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches, en ce qu’il concerne la CRCAM du Quercy-Rouergue :

Attendu que la société A… Audit & conseil et M. A… font grief à l’arrêt d’avoir dit que les condamnations prononcées par le tribunal au profit de la CRCAM du Quercy-Rouergue le sont solidairement à leur encontre dans la limite d’un certain montant, alors que, selon le moyen :

1 ) le conseil juridique n’est tenu d’un devoir d’information et de conseil qu’à l’égard de son client ; qu’il ne résulte d’aucune constatation de l’arrêt attaqué que M. A… et la société A… Audit & conseil auraient été investis d’une quelconque mission ou mandat par la CRCAM ; qu’en retenant néanmoins à l’encontre de M. A… et de la société A… Audit & conseil qu’ils avaient commis une faute en omettant d’informer la CRCAM de ce que Mme Z… était seule acquéreur des parts sociales de la société Le Villars, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1382 du Code civil ;

2 ) en toute hypothèse, la cour d’appel a omis d’indiquer si elle fondait sa décision sur la responsabilité contractuelle ou sur la responsabilité délictuelle ; qu’en laissant ainsi incertaine la base juridique de son arrêt, la cour d’appel a violé l’article 12 du nouveau Code de procédure civile, les articles 1147 et 1382 du Code civil, ensemble la règle du non-cumul des responsabilité contractuelle et délictuelle ;

Mais attendu qu’ayant relevé que les conseils juridiques étaient intervenus dans l’obtention et la conclusion des prêts consentis par la CRCAM et n’avaient pas informé celle-ci de la circonstance que Mme Z… acquérait seule les parts sociales de la SNC “Le Villars”, circonstance qui était de nature à réduire les garanties de la banque, la cour d’appel a, à bon droit, retenu la responsabilité de la société A… Audit & conseil et de M. A…, lesquels, au demeurant, avaient, dans leurs conclusions, admis avoir “reçu pouvoir de consentir le financement à la SNC “Le Villars”” et n’a pu que donner un fondement contractuel à sa décision, ainsi légalement justifiée ;

Mais, sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches :

Vu l’article 1147 du Code civil ;

Attendu que, pour condamner la société A… Audit & conseil et M. A… à payer à M. C…, ès-qualités d’administrateur judiciaire de M. Y…, le montant de l’insuffisance d’actif de ce dernier, la cour d’appel, après avoir retenu que les conseils juridiques avaient manqué à leur obligation de conseil et engagé leur responsabilité de ce chef, s’est bornée à déterminer l’importance du préjudice ;

Qu’en statuant ainsi, sans caractériser le lien de causalité entre la faute et ce préjudice, alors que la société A… Audit & conseil et M. A… imputaient les difficultés financières de M. Y… à son refus de vendre son fonds de commerce à la suite de sa décision de divorcer, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;

 


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