Télétravail : 12 mai 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/04404

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Télétravail : 12 mai 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/04404
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12 mai 2023
Cour d’appel de Toulouse
RG n°
21/04404

12/05/2023

ARRÊT N°2023/224

N° RG 21/04404 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OOJY

FCC/AR

Décision déférée du 21 Septembre 2021 – Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de TOULOUSE ( F 18/01288)

LOBRY S.

S.A.S. NOVAL

C/

[W] [P]

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le 12 05 23

à Me Alfred PECYNA

Me Pierre ESPLAS

CCC POLE EMPLOI

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2

***

ARRÊT DU DOUZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

S.A.S. NOVAL

prise en la personne de son représentant légal, domicilié ès qualités audit siège sis [Adresse 2]

Représentée par Me Alfred PECYNA de la SCP LAPUENTE PECYNA, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

Monsieur [W] [P]

[Adresse 1]

Représenté par Me Pierre ESPLAS, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant C. BRISSET, Présidente, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. BRISSET, présidente

A. PIERRE-BLANCHARD, conseillère

F. CROISILLE-CABROL, conseillère

Greffier, lors des débats : A. RAVEANE

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par C. BRISSET, présidente, et par A. RAVEANE, greffière de chambre

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [W] [P] a été embauché selon un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 15 septembre 2008 par la SAS Noval en qualité de directeur marketing et commercial, statut cadre.

La convention collective nationale des cadres de la métallurgie est applicable.

M. [P] a été placé en arrêt de travail pour maladie du 25 avril au 3 juin 2018.

Lors de la visite de reprise du 4 juin 2018, le médecin du travail a rédigé un avis en ces termes : ‘favorable à la reprise avec aménagement de poste nécessaire pendant un mois sous la forme de 1 à 2 journées de télétravail par semaine – à revoir dans 1 mois’.

Par LRAR du 12 juin 2018, contenant mise à pied à titre conservatoire, M. [P] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé le 21 juin 2018, puis licencié pour faute grave par LRAR du 5 juillet 2018.

Le 3 août 2018, M. [P] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse aux fins notamment de paiement de rappels de salaire pendant la mise à pied conservatoire, de l’indemnité compensatrice de préavis, de l’indemnité de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Par jugement de départition du 21 septembre 2021, le conseil de prud’hommes de Toulouse a :

– dit que le licenciement de M. [P] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

– condamné la SAS Noval à payer à M. [P] les sommes suivantes :

* 4.834,60 € à titre de rappel de salaire au titre des jours de mise à pied à titre conservatoire soit du 12 juin 2018 au 5 juillet 2018, outre 483,46 € de congés payés y afférents,

* 37.836 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 3.783,60 € de congés payés afférents,

* 25.598,90 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

* 63.060 € bruts à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que la moyenne des trois derniers mois de salaire au sens de l’article R 1454-28 du code du travail s’élève à 6.306 €,

– rappelé que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire en ce qu’elle ordonne le paiement de sommes au titre de rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l’article R 1454-14 du code du travail,

– ordonné l’exécution provisoire pour l’éventuel surplus,

– débouté M. [P] et la SAS Noval du surplus de leurs demandes,

– condamné la SAS Noval aux entiers dépens.

La SAS Noval a relevé appel de ce jugement le 28 octobre 2021, dans des conditions de forme et de délai non discutées, en énonçant dans sa déclaration d’appel les chefs critiqués.

Par conclusions récapitulatives et responsives II notifiées par voie électronique le 20 février 2023, auxquelles il est expressément fait référence, la SAS Noval demande à la cour de :

– déclarer recevable l’appel interjeté par la SAS Noval,

– infirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

Statuant à nouveau :

– juger que le licenciement de M. [P] repose sur une faute grave,

– débouter M. [P] de l’intégralité de ses prétentions,

– allouer à la SAS Noval la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [P] en tous les dépens.

Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 9 février 2023, auxquelles il est expressément fait référence, M. [P] demande à la cour de :

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement en ce qu’il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la SAS Noval au paiement des sommes de 4.834,60 € à titre de la mise à pied conservatoire outre 483,46 € de congés payés y afférents, 37.836 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 3.783,60 € de congés payés afférents, 25.598,90 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement, 63.060 € nets de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et 2.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,

– le réformer pour le surplus,

– condamner la SAS Noval au paiement de la somme de 31.530 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

– dans tous les cas, condamner la SAS Noval aux entiers dépens d’appel outre au paiement de la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles engagés par le concluant en cause d’appel.

MOTIFS

1 – Sur le licenciement :

Dans sa lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, l’employeur a licencié le salarié pour faute grave. La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié au sein de l’entreprise ; la charge de la preuve de la faute grave pèse sur l’employeur.

La lettre de licenciement était ainsi motivée :

‘Vous êtes employé par notre société en qualité de directeur marketing et commercial.

Vous avez fait l’objet d’un arrêt de travail qui a couru jusqu’au 3 juin 2018 inclus à l’issue duquel vous avez repris votre activité.

Le 4 juin 2018, vous avez été examiné dans le cadre de la visite médicale de reprise par le médecin du travail, qui vous a déclaré apte, spécifiant toutefois que vous deviez bénéficier d’une possibilité de télétravail un jour ou deux par semaine pendant un mois.

Les motifs de notre décision sont les suivants :

* Dès février 2018, vous avez organisé la participation de notre société au salon Architect@Work qui se déroulait à [Localité 3].

Vous n’ignorez pas qu’il s’agit pour notre société d’un salon important au cours duquel l’opportunité nous est offerte de rencontrer des architectes, des sociétés de bâtiment, des sociétés industrielles, etc…auxquels nous présentons nos produits aux fins de les inciter à prescrire ou utiliser ces derniers dans le cadre de leurs études, plans, réalisations,…

Du reste, ce sont, pour notre entreprise, les retombées commerciales potentielles de notre participation à ce salon qui justifiaient :

– d’une part, le coût élevé de la dépense que génère cette dernière,

– d’autre part, les moyens humains mobilisés à cette occasion puisque vous deviez y participer avec Monsieur [O] [L], technico-commercial grands comptes et M. [J] [K], technico-commercial service clients.

Or, nous avons été informés, bien évidemment a posteriori, qu’après avoir participé à l’installation du stand le 6 juin 2018, veille de l’ouverture de ce salon d’une durée de deux jours (7 et 8 juin 2018), dès le 7 juin 2018 au soir, vous avez décidé de regagner la région toulousaine, abandonnant sur ce stand pour la journée du 8 juin 2018, nos deux autres collaborateurs (dont l’un non cadre et l’autre cadre débutant) qui n’affichaient qu’une ancienneté de 18 mois chacun.

Vous avez estimé de votre propre chef, sans requérir notre autorisation ni même nous en informer au préalable, qu’il était préférable – certainement pour vous – de participer, le 8 juin 2018 au matin, à une journée clients organisée par l’un de nos fournisseurs (la société FUDM), laquelle se décomposait en une matinée « studieuse et professionnelle », un après-midi « festif » et une soirée « joviale ».

En agissant de la sorte, vous avez gravement manqué à vos obligations et à vos responsabilités.

En effet, votre mission consiste notamment à :

– assurer le développement commercial de l’entreprise,

– négocier les contrats, les ventes,

– analyser le marché,

– proposer une stratégie commerciale,

– et assurer la communication commerciale.

Dès lors, nous ne pouvons pas admettre que vous préfériez négliger un salon pour lequel notre participation a nécessité un investissement important mais qui se justifie pour nous à plusieurs titres puisque c’est l’occasion de rencontrer de nombreux clients et prospects, au profit d’une participation à une journée clients largement festive organisée par l’un de nos fournisseurs, alors que, de surcroît, notre société était déjà largement représentée à cette journée par des collaborateurs en charge des achats et des projets directement concernés par nos relations fournisseurs. La circonstance que des clients que nous pouvons avoir en commun avec la société FUDM et que

des sociétés qui peuvent être des prospects pour Noval, aient été également invités à cette journée, n’est pas de nature à minimiser les conséquences de votre choix inconsidéré d’y participer. En effet, une telle journée clients n’est absolument pas comparable avec les opportunités de contacts que vous avez négligées et que présentait pour nous le salon Architect@work précité.

De plus, abandonner sur le stand d’un salon d’une telle importance, deux collaborateurs (dont l’un non cadre et l’autre cadre débutant), avec une ancienneté toute relative, est absolument inconséquent et inacceptable au regard des enjeux commerciaux que présentait pour nous cette participation à ce salon.

Votre comportement a largement porté atteinte à l’image de sérieux et de professionnalisme de notre société à l’égard de notre clientèle potentielle.

De surcroît, votre comportement a donné à nos deux collaborateurs, une image détestable de l’implication de l’encadrement de notre société dans la bonne marche de l’entreprise.

Le vendredi après-midi vous avez déclaré avoir travaillé en télétravail.

Si vous estimiez que votre état de santé ne vous permettait pas de demeurer deux jours consécutifs sur le salon, ce que nous pouvons comprendre, il vous appartenait de nous en informer au préalable afin de nous organiser en conséquence et, à supposer que par extraordinaire, ce soit au cours de la journée du 7 juin, que vous ayez brutalement découvert les difficultés que vous auriez rencontrées à continuer de participer à ce salon, il vous appartenait au moins de nous en informer immédiatement de façon à ce que nous puissions prendre les mesures idoines afin de suppléer à votre absence. Mais bien évidemment, telle n’a pas été votre démarche.

* Mais bien plus, par courrier électronique du 13 juin 2018, c’est-à-dire durant la mise à pied conservatoire dont vous avez fait l’objet, M. [B] [T] de la société Renson a contacté M. [F] [I] (chargé d’études électroniques) au sujet des commandes qu’il vous avait adressées et à propos desquelles il n’avait aucun retour. A cette occasion, il a exprimé son inquiétude sur le niveau anormalement bas des stocks de boîtiers pour pergolas que nous leur fournissons.

Nous avons alors découvert :

– que la commande de la société Renson n°1871853 vous avait eté transmise le 19 avril 2018 mais qu’alors que vous étiez présent, vous ne l’aviez nullement fait parvenir aux collaborateurs concernés au sein de notre société,

– qu’il en était de même pour la commande n°1872081. Certes, cette commande vous avait été adressée le 4 mai 2018, c’est-à-dire pendant votre arrêt de travail pour maladie (ce qui pouvait justifier qu’elle n’ait pas été traitée en son temps) mais il se trouve que vous n’avez donné aucune suite à la relance par courrier électronique que M. [T] vous a adressée à ce propos le 8 juin 2018.

Ces commandes s’élevaient chacune à environ 35.000 euros, soit au total 70.000 euros, représentant de l’ordre de 15 % du chiffre d’affaires habituellement réalisé annuellementavec la société Renson (+/- 450.000 euros).

Une nouvelle fois, votre désinvolture et votre inconséquence ont largement porté préjudice à nos intérêts commerciaux et également à l’image de sérieux et de professionnalisme de notre société…’

En l’espèce M. [P] a donc été licencié pour :

– avoir quitté prématurément le salon Architect@work sans en avoir informé la société, abandonnant ainsi deux salariés inexpérimentés sur un salon d’une grande importance stratégique pour l’entreprise, afin de se rendre, le lendemain matin, à la journée clients organisée par la société FUDM ;

– ne pas avoir transmis deux commandes de clients aux collaborateurs concernés et ne pas avoir donné suite aux relances du client.

Sur le premier grief :

M. [P] conteste son licenciement en faisant valoir qu’en raison de sa classification il ne lui était pas nécessaire de solliciter l’autorisation de la société afin de s’absenter du salon, qu’il avait fait le choix de deux collaborateurs complémentaires afin de participer au salon, et que le coût de participation au salon était à relativiser en comparaison avec le budget annuel de représentation de la société. Il précise qu’il a quitté le salon Architect@work à [Localité 3] le 7 juin 2018 au soir pour participer, le matin du 8 juin 2018, à la journée commerciale de la société FUDM à [Localité 4], puis pour télétravailler depuis son domicile l’après-midi du 8 juin, conformément aux recommandations du médecin du travail.

Les premiers juges ont, par des motifs pertinents que la cour adopte, estimé que M. [P], directeur marketing et commercial, avait des responsabilités et une autonomie lui permettant de ne pas rendre compte à sa hiérarchie de la moindre de ses décisions, que la SAS Noval ne justifiait pas de l’importance stratégique du salon de [Localité 3] telle que M. [P] devait impérativement y rester les deux jours en personne, que la société ne prouvait pas non plus lui avoir donné une telle instruction, que M. [P] avait délégué M. [K] pour le 2e jour afin que la SAS Noval soit bien représentée au salon, et que M. [P] n’avait assisté qu’à la partie « studieuse et professionnelle » de la journée FUDM, c’est-à-dire celle du matin, et non au reste de la journée puisqu’il n’était pas resté à l’après-midi « festif » ni à la soirée « joviale », télétravaillant depuis son domicile comme le médecin du travail le préconisait.

Les critiques formées par la SAS Noval en cause d’appel à l’encontre de cette motivation ne sont pas fondées. En effet :

– la SAS Noval ne peut pas soutenir que le conseil de prud’hommes aurait dénaturé l’avis du médecin du travail qui préconisait une possibilité de télétravail un à deux jours par semaine, alors que le jugement mentionnait une demi-journée par semaine ; il s’agit en effet d’une simple erreur matérielle du jugement ; de plus, si M. [P] était autorisé d’un point de vue médical à télétravailler un à deux jours par semaine, a fortiori l’employeur ne saurait lui reprocher de n’avoir télétravaillé qu’une demi-journée ;

– la SAS Noval prétend que le jugement se serait contredit en indiquant que M. [P] avait un niveau hiérarchique élevé et une autonomie importante, et qu’il devait recevoir des instructions très précises voire écrites : le jugement a simplement estimé que, si la SAS Noval avait attendu que M. [P] assiste les deux jours au salon, elle aurait dû lui donner des instructions en ce sens, et qu’à défaut de telles instructions, M. [P] gardait son pouvoir d’apprécier l’opportunité de passer deux jours au salon ;

– c’est en vain que la SAS Noval critique les pièces versées par M. [P], notamment l’attestation de M. [K], alors que la charge de la preuve de la faute grave pèse exclusivement sur la société ;

– le fait que le conseil de prud’hommes ait estimé que l’employeur ne justifiait pas du préjudice lié à l’absence de M. [P] au salon le 8 juin 2018, alors que la faute grave est indépendante du préjudice, ne disqualifie pas la motivation du jugement.

Sur le second grief :

S’agissant de la commande n° 1871853 du 19 avril 2018 d’un montant de 34.632 €, à livrer pour le 16 mai 2018, M. [T] l’a transmise à M. [P] le jour même, et M. [P] ne l’a pas transmise au service production. Néanmoins, la SAS Noval ne démontre pas que cette transmission entrait dans les attributions de M. [P] qui était directeur marketing et commercial, étant rappelé que la charge de la preuve de la faute grave pèse sur la société, et que M. [P] a été placé en arrêt maladie quelques jours plus tard, à compter du 25 avril 2018. D’ailleurs, le mail de relance de M. [T] du 8 juin 2018 concernant des ‘ordres non confirmés’ était adressé à M. [A], M. [P] n’étant qu’en copie.

Ces remarques valent également pour la commande n° 1872081 du 16 mai 2018 d’un montant de 25.770 €. De surcroît, cette commande a été émise et adressée à M. [P] pendant son arrêt maladie qui a duré jusqu’au 3 juin 2018, de sorte qu’il ne saurait en tout état de cause lui être reproché de ne pas avoir traité cette commande en mai 2018. La SAS Noval se prévaut d’un mail de relance du 8 juin 2018 adressé à M. [P] ; toutefois, ce mail, en anglais non traduit, ne sera pas retenu.

C’est donc à juste titre que le conseil de prud’hommes a considéré que le second grief ne justifiait, pas plus que le premier, un licenciement, qu’il soit pour faute grave ou même pour faute constitutive d’une cause réelle et sérieuse. Le jugement sera confirmé de ce chef.

2 – Sur les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse :

M. [P], né le 19 novembre 1967, était âgé de 50 ans lors de la notification du licenciement.

Il avait une ancienneté de plus de 9 ans.

Il allègue un salaire moyen mensuel de 6.306 €, que la SAS Noval ne conteste pas.

Sur les salaires pendant la mise à pied conservatoire :

La SAS Noval ne contestant pas la somme retenue par le jugement de 4.834,60 €, outre congés payés de 483,46 €, la cour confirmera de ce chef.

Sur l’indemnité compensatrice de préavis :

En application de la convention collective, M. [P], cadre, qui était dans la tranche d’âge 50-55 ans et avait au moins 5 ans d’ancienneté, avait droit à un préavis de 6 mois.

Il lui est donc dû une indemnité compensatrice de préavis de 37.836 € outre congés payés de 3.783,60 €, le jugement étant confirmé de ce chef.

Sur l’indemnité de licenciement :

En application de la convention collective, M. [P] qui était dans la tranche d’âge 50-55 ans et avait plus de 7 ans d’ancienneté avait droit à une indemnité de licenciement égale à 1/5e de mois dans la tranche d’un à 7 ans d’ancienneté et de 3/5e de mois par année d’ancienneté au-delà, indemnité majorée de 20 %, dans la limite de 18 mois, l’indemnité étant calculée au jour de la fin du préavis de 6 mois.

La somme allouée de 25.598,90 € sera confirmée.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

En vertu de l’article L 1235-3 du code du travail, modifié par l’ordonnance du 22 septembre 2017, applicable aux licenciements survenus à compter du 24 septembre 2017, si le licenciement survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, et si l’une des parties refuse la réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité comprise entre un montant minimal et un montant maximal figurant dans un tableau.

L’ancienneté à prendre en compte s’apprécie au jour de la notification du licenciement et non à la fin du préavis.

Selon le tableau, pour un salarié ayant 9 ans d’ancienneté au jour du licenciement, dans une entreprise comprenant au moins 11 salariés, cette indemnité est comprise entre 3 et 9 mois de salaire brut.

Ainsi, le jugement qui a alloué des dommages et intérêts de 63.060 € égaux à 10 mois de salaire a excédé le barème.

M. [P] justifie avoir été inscrit au chômage jusqu’au 1er septembre 2019 et avoir retrouvé un emploi en contrat à durée indéterminée à compter du 2 septembre 2019 en qualité de directeur général délégué, ce contrat de travail ayant été rompu au 31 janvier 2022.

Infirmant le jugement, la cour réduira les dommages et intérêts à 45.000 €.

La cour n’a pas le pouvoir de déroger aux dispositions du code de la sécurité sociale relatives au paiement de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale et de dire que les indemnités allouées sont nettes comme le demande M. [P].

Sur les dommages et intérêts pour licenciement abusif :

M. [P] soutient que son état de santé a joué un rôle dans son licenciement. Toutefois, l’attestation de M. [K] à laquelle se réfère M. [P] ne permet pas d’établir un lien même indirect entre son licenciement et son état de santé. Il ne justifie pas de ce que le licenciement aurait un caractère discriminatoire, ni d’aucune circonstance vexatoire, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu’il l’a débouté de sa demande de dommages et intérêts.

Sur le remboursement à Pôle Emploi :

En application de l’article L 1235-4 du code du travail, si le licenciement du salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, et si le salarié a une ancienneté d’au moins 2 ans dans une entreprise d’au moins 11 salariés, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour du jugement, dans la limite de 6 mois d’indemnités.

Il convient donc d’office d’ordonner le remboursement par l’employeur au Pôle emploi des indemnités chômage à hauteur de 6 mois.

3 – Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile :

L’employeur qui perd sur le licenciement supportera les entiers dépens de première instance et d’appel, ainsi que ses propres frais irrépétibles, et ceux exposés par le salarié en première instance (2.500 €), sans qu’il y ait lieu d’allouer à ce dernier une somme supplémentaire en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement, sauf sur le quantum des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, cette disposition étant infirmée,

Statuant à nouveau sur la disposition infirmée et y ajoutant,

Condamne la SAS Noval à verser à M. [W] [P] la somme de 45.000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Ordonne le remboursement par la SAS Noval à Pôle Emploi des indemnités chômage versées à M. [W] [P] du jour du licenciement au jour du jugement à hauteur de 6 mois,

Condamne la SAS Noval aux dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Catherine BRISSET, présidente, et par Arielle RAVEANE, greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

Arielle RAVEANE Catherine BRISSET.

 


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