Télétravail : 25 mai 2023 Cour d’appel de Rouen RG n° 21/01591

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Télétravail : 25 mai 2023 Cour d’appel de Rouen RG n° 21/01591
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25 mai 2023
Cour d’appel de Rouen
RG n°
21/01591

N° RG 21/01591 – N° Portalis DBV2-V-B7F-IXZ3

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 25 MAI 2023

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES D’EVREUX du 17 Mars 2021

APPELANT :

Monsieur [T] [S]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Matthieu ROUSSINEAU de l’AARPI ROUSSINEAU AVOCATS, avocat au barreau de ROUEN

INTIMEE :

S.A.S. CONNECTEURS ELECTRIQUES DEUTSCH

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Emmanuelle DUGUÉ-CHAUVIN de la SCP EMO AVOCATS, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Florian BIJOK, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 12 Avril 2023 sans opposition des parties devant Madame BERGERE, Conseillère, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Madame BACHELET, Conseillère

Madame BERGERE, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

M. GUYOT, Greffier

DEBATS :

A l’audience publique du 12 Avril 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 25 Mai 2023

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 25 Mai 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [T] [S] a été engagé par la SAS Connecteurs électriques Deutsch en qualité de chef de produits par contrat de travail à durée indéterminée du 14 janvier 2014.

Les relations contractuelles des parties étaient soumises à la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

Le licenciement pour faute grave a été notifié au salarié le 31 octobre 2018.

Par requête du 4 octobre 2019, M. [S] a saisi le conseil de prud’hommes d’Evreux en contestation de son licenciement, ainsi qu’en paiement de rappels de salaire et d’indemnités.

Par jugement du 17 mars 2021, le conseil de prud’hommes a dit que le licenciement prononcé à l’encontre de M. [S] repose sur une cause réelle et sérieuse constitutive d’une faute grave, débouté M. [T] [S] de ses demandes d’indemnité compensatrice de préavis, indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, indemnité de licenciement, dommages-intérêts pour licenciement abusif, débouté M. [S] de sa demande de rappel de prime « PMIP » au titre de l’exercice 2018, débouté M. [S] de sa demande d’exécution provisoire et de sa demande au titre de l’article 700 de code de procédure civile, débouté la SAS Connecteurs électriques Deutsch de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile, condamné M. [S] [T] aux entiers dépens.

M. [T] [S] a interjeté appel de cette décision le 15 avril 2021.

Par conclusions remises le 16 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, M. [T] [S] demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté la SAS Connecteurs électriques Deutsch de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile, statuant à nouveau, dire que son licenciement pour faute grave est dénué de toute cause réelle et sérieuse, condamner en conséquence la SAS Connecteurs électriques Deutsch à lui verser les sommes suivantes :

indemnité au titre du préavis non exécuté sur 3 mois : 12 871,47 euros bruts,

congés payés sur le préavis : 1 287,14 euros bruts,

indemnité de licenciement : 5 180,76 euros nets,

dommages et intérêts pour licenciement abusif : 25 742,00 euros nets,

prime « PMIP » : 4 158,10 euros bruts,

indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 5 000 euros en ce compris les frais de première instance et d’appel,

ordonner la remise des documents suivants : une attestation Pôle Emploi conforme, un bulletin de salaire rectificatif mentionnant l’intégralité des indemnités et rappels de salaires mentionnés dans l’arrêt, sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification de l’arrêt et jusqu’à la délivrance de la totalité des documents sollicités ainsi que jusqu’à la régularisation auprès des organismes sociaux au bénéfice desquels ont été acquittées les cotisations mentionnées sur les bulletins de salaire, condamner la SAS Connecteurs électriques Deutsch aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Par conclusions remises le 8 février 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, la SAS Connecteurs électriques Deutsch demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il l’a déboutée de sa demande au titre de l’article 700 de code de procédure civile, le réformer sur ce point, éventuellement, statuant de nouveau, à titre principal, constater que les griefs retenus à l’encontre de M. [S] sont établis et constitutifs d’une faute grave, en conséquence, dire que son licenciement est fondé sur une faute grave, constater que son salaire de référence est de 4 062,98 euros brut, débouter M. [S] de l’intégralité de ses demandes, à titre subsidiaire, ramener le quantum des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à de plus justes proportions, dans la limite maximale de 20 317,90 euros bruts, en tout état de cause, débouter M. [S] du surplus de ses demandes, le condamner à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, si la cour considérait tout ou partie des demandes de dommages et intérêts présentées par M. [S] fondées, dire que les éventuelles condamnations à des sommes de nature salariale et/ou les éventuels dommages et intérêts alloués à cette dernière s’entendent comme des sommes brutes et avant CSG et CRDS, dans les conditions et limites légales en vigueur.

L’ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 9 février 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I – Sur le paiement de la prime ‘PMIP’

Le contrat de travail impose au salarié de fournir une prestation de travail qui est la contrepartie du salaire. La possibilité est donnée à l’employeur de préciser ses attentes par la formulation d’objectifs professionnels plus précis, de manière à prendre en compte des situations nouvelles et évolutives qui ne peuvent être prévues au moment même de la conclusion du contrat de travail. Ces objectifs professionnels précis peuvent se présenter sous la forme d’une clause d’objectifs ou de résultat. Les objectifs peuvent être définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction. L’accord du salarié n’est pas nécessaire.

En outre, lorsqu’une prime d’objectifs constitue la partie variable de la rémunération versée au salarié en contrepartie de son activité, elle s’acquiert au prorata du temps de présence du salarié dans l’entreprise au cours de l’exercice, peu important que les objectifs aient été ou non fixés. Il en va différemment uniquement lorsque le contrat de travail ou une disposition conventionnelle subordonnent expressément le paiement de la rémunération variable à la présence du salarié dans l’entreprise à la date de son versement. Dans cette hypothèse, le versement prorata temporis n’est plus de droit et doit résulter d’un usage ou d’une stipulation contractuelle pour que le salarié puisse y prétendre.

Enfin, si l’employeur peut valablement prévoir, en plus du salaire fixe, un élément de rémunération laissé à sa discrétion, ce caractère discrétionnaire ne doit néanmoins pas le conduire à traiter différemment des salariés placés dans une situation comparable. Une différence de rémunération entre des salariés exerçant un travail égal est licite, dès lors qu’elle est justifiée par des critères objectifs et pertinents, étrangers à toute discrimination. Si la différence de traitement découle d’une décision unilatérale de l’employeur, celui-ci doit nécessairement en justifier.

En l’espèce, bien que cette modalité de rémunération ne soit pas prévue par le contrat de travail liant les parties, il est constant qu’une prime Product Management Incentive Plan (PMIP) était annuellement versée au salarié en fonction d’objectifs pré-définis. Au demeurant, l’examen des bulletins de salaires produit aux débats le confirme, puisqu’il en ressort que tous les ans, M. [S] a perçu une telle prime.

Pour l’année 2018, M. [S] justifie que les objectifs à atteindre pour sa perception lui ont été notifiés le 11 décembre 2017.

Certes, ce document est en anglais, mais la société Connecteurs électriques Deutsch ne peut, pour cette seule raison, lui dénier toute valeur probante, puisque c’est elle qui a rédigé ce document et fixé les objectifs qui y sont contenus.

En outre, contrairement à ce qu’elle soutient, c’est sur elle que porte la charge de la preuve de ce que M. [S] ne peut prétendre au versement de sa prime au motif qu’il n’aurait pas atteint les objectifs puisqu’elle est la seule à détenir les éléments comptables de l’activité du salarié pouvant établir cette situation.

Pour les mêmes raisons tenant au régime probatoire, elle ne peut, en l’absence d’explications et a fortiori d’éléments justificatifs, valablement soutenir que la somme réclamée par M. [S] sur la base d’éléments chiffrés qu’il a communiqués à son supérieur hiérarchique par mail est mal fondée, étant précisé qu’il s’agit d’une prime calculée sur les résultats de l’exercice clôturé au 30 septembre de chaque année et qu’il n’est ni établi, ni même soutenu que son versement était conditionnée à la présence du salarié dans l’entreprise au moment de son versement.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement entrepris et de condamner la société Connecteurs électriques Deutsch à lui payer la somme de 4 158,10 euros bruts.

II – Sur le licenciement

II – a) Sur la faute grave

Conformément aux dispositions de l’article L.1232-1 du code du travail, le licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, laquelle implique qu’elle soit objective, établie, exacte et suffisamment pertinente pour justifier la rupture du contrat de travail.

L’article L. 1235-1 du même code précise qu’à défaut d’accord, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Il appartient à l’employeur qui l’invoque d’en rapporter la preuve.

En l’espèce, la lettre de licenciement pour faute grave du 31 octobre 2018, qui fixe les limites du litige, est rédigée comme suit :

‘ […] Le 21 juin 2018, lors d’une réunion de l’équipe dont vous êtes membres, la possibilité de bénéficier de télétravail a été proposée par votre manager. Les détails pour bénéficier de ce dispositif ont été confirmées le même jour par courriel, qui stipulait notamment les éléments relatifs à la durée maximale du home office (1 jour par semaine) et au formalisme à respecter pour en bénéficier (signature d’un avenant au contrat de travail).

Dans votre courriel du 2 juillet 2018, adressé au service Ressources Humaines, vous avez demandé à bénéficier de télétravail à raison de 2 jours par semaine ( alors même que cette faculté n’était ouverte, au maximum, qu’à raison d’un jour par semaine).

Pire, sans attendre l’accord de la société, vous avez de façon unilatérale effectué du télétravail à raison de 2 jours par semaine à compter du mois d’août.

Et ce en parfaite violation des dispositions de notre règlement intérieur qui stipulent que :

article 3 – Discipline Générale

‘Le personnel est tenu de se conformer aux instructions qui lui sont données par un responsable hiérarchique ainsi qu’aux consignes et prescriptions portées à sa connaissance par note de service ou procédures applicables dans l’entreprise.’

Après la période des congés d’été des différents intervenants, et conformément à votre demande, vous avez eu des échanges via Skype avec le service Ressources Humaines les 3 et 13 septembre 2018 afin que cette situation soit régularisée.

Lors de ces échanges, il vous a été confirmé que seul le télétravail à raison d’une journée par semaine était possible, comme cela avait été annoncé et validé par votre manager le 21 juin 2018.

En réponse à ces éléments, vous avez alors indiqué ne pas vouloir signer d’avenant de télétravail : dans ces conditions, vous avez donc expressément renoncé (ce qui est votre droit) à la possibilité de bénéficier de cette organisation du travail.

Pourtant, vous avez continué par la suite à travailler depuis votre domicile à raison de 2 journées par semaine.

Votre manager vous alors reçu le 18 septembre 2018 dans le but de mettre un terme à cette situation inacceptable.

En effet :

– si vous souhaitiez bénéficier d’une journée de télétravail par semaine, il vous appartenait de recueillir l’accord de l’entreprise (c’est-à-dire de signer un avenant en ce sens)

– au contraire, en l’absence d’accord avec l’entreprise, vous aviez alors l’obligation de ne pas travailler à distance et d’être présent sur site lorsque vous n’étiez pas en déplacement pour les besoins de votre activité.

Lors de cet entretien, nous avons attiré votre attention sur les risques de sanctions disciplinaires qu vous preniez en persistant dans votre comportement. Vous avez reconnu être parfaitement conscient de ces risques et avez maintenu votre position de continuer à ne pas respecter les instructions de votre hiérarchie.

Nous avons alors tenté une dernière fois de vous faire entendre raison en vous remettant, le 1er octobre 2018, un courrier de mise en demeure de respecter l’organisation du travail mise en place dans l’entreprise.

Cette mise en demeure est restée sans effet et vous avez persisté dans votre comportement fautif.

Enfin, lors de l’entretien préalable du 23 octobre dernier, vous nous avez confirmé votre refus de signer un avenant contractuel prévoyant un jour de télétravail par semaine, ainsi que votre décision de travailler deux jours par semaine en télétravail et ce sans autorisation.

Ainsi, face à votre persistance à ne pas respecter l’organisation du service et à refuser systématiquement de vous conformer aux instructions de vos supérieurs, nous ne pouvons que constater une volonté délibérée et répétée d’insubordination de votre part.

Nous considérons donc que votre comportement est constitutif d’une faute grave rendant totalement impossible la poursuite de votre contrat de travail.’

En l’espèce, si M. [S] reconnaît qu’à l’occasion des discussions sur l’organisation du télétravail au cours des mois de juin-juillet 2018, il a sollicité l’autorisation de son employeur pour pouvoir bénéficier de deux journées de télétravail, sa famille étant depuis peu installée loin d'[Localité 3] dans le Maine et Loire, en revanche, il conteste avoir appliqué unilatéralement cette modalité d’organisation du travail, faisant au demeurant observer à ce titre que la société Connecteurs électriques Deutsch ne vise aucune date précise où il aurait travaillé chez lui alors qu’il aurait dû être présent sur le site d'[Localité 3] et qu’elle ne rapporte pas la preuve des absences sur site qui lui sont reprochées.

Alors que la charge de la preuve pèse sur l’employeur, cette critique du salarié est tout à fait pertinente, puisqu’il est exact que ni la lettre de licenciement, ni aucun autre document produit par l’employeur ne précise quels seraient les jours de travail sur lesquels M. [S] se serait autorisé, sans l’accord de l’employeur, à télétravailler. Au demeurant, contrairement à ce qu’elle soutient, la société Connecteurs électriques Deutsch n’établit aucunement que M. [S], persistant dans ce comportement, a été rappelé à l’ordre à plusieurs reprises. Ainsi, il n’est produit aucune pièce attestant de la programmation des rendez-vous par Skype, aucun échange de mails à cet effet, ni aucun compte-rendu de ces discussions ‘de recadrage’.

En effet, le seul document qu’elle produit aux débats est un courrier de ‘mise en demeure de respect de l’organisation’ rédigée le 18 septembre 2018 remis en mains propres au salarié le 1er octobre 2018 rédigé comme suit :

‘À la suite des différents échanges que vous avez pu avoir avec votre hiérarchie concernant le télétravail, nous vous confirmons que vous ne pouvons accepter votre demande de télétravail à domicile 2 jours par semaine et ce, pour des raisons d’organisation de l’équipe.

Nous vous proposons néanmoins la possibilité de travailler à votre domicile 1 jour par semaine, à savoir le vendredi. Un avenant en ce sens est disponible au service Ressources Humaines si cela peut vous convenir.

Dans le cas contraire, nous vous mettons en demeure de respecter, sans délai, l’organisation de votre équipe. Aussi, lorsque vous n’êtes pas en déplacement pour les besoins de votre activité, vous devez être présent au sein du site d'[Localité 3].

Nous attirons votre attention sur le fait que, sans respect de ces dispositions, nous pourrions être contraints d’engager une procédure disciplinaire à votre encontre.’

Cette unique lettre n’est pas suffisamment précise pour caractériser le comportement d’insubordination reproché à M. [S] et par suite fonder son licenciement pour faute grave, aucun élément circonstancié et daté ne permettant d’établir qu’il est absent sur site et en télétravail à son domicile les jours où il n’était pas en déplacement professionnel.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement entrepris et de dire que le licenciement de M. [S] est dénué de cause réelle et sérieuse.

II – b) Sur les conséquences financières

Sur l’indemnité compensatrice de préavis

Conformément à l’application de l’article 27 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie et sur la base d’un salaire mensuel justement chiffré par l’employeur à la somme de 4 062,98 euros, il revient à ce titre à M. [S] trois mois de salaires, soit la somme de 12 188,94 euros bruts, outre 1 218,89 euros bruts au titre des congés payés afférents.

Sur l’indemnité légale de licenciement

En application des dispositions des articles L.1234-9 et R.1234-1 à R.1234-4 du code du travail dans leur rédaction issue de l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 et du décret du 25 septembre 2017 applicable au présent litige, le salarié licencié qui compte au moins huit mois d’ancienneté au service du même employeur a droit à une indemnité de licenciement dont le montant ne peut être inférieur à un quart de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoute un tiers de mois de salaire par année au-delà de dix ans d’ancienneté. En cas d’année incomplète, l’indemnité est calculée proportionnellement au nombre de mois complets. La convention collective applicable ne contient pas de dispositions plus favorables.

En application de ces dispositions, M. [S], qui a 5 ans d’ancienneté durée du préavis inclus, peut prétendre à une indemnité de [(4 062,98/4) x 5] = 5 078,72 euros nets.

Sur les dommage et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

M. [S] ayant plus de deux ans d’ancienneté dans une entreprise employant de manière habituelle plus de onze salariés, il est fondé à obtenir réparation du préjudice résultant de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, conformément aux dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail dans sa rédaction issue de l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 applicable au présent litige.

En considération de son ancienneté de cinq ans qui fixe le montant de l’indemnité entre trois et six mois de salaire, de son âge au moment de la rupture du contrat de travail (31 ans), des circonstances de la rupture, et de ce qu’il justifie avoir perçu des indemnités Pôle emploi pendant un an avant de retrouver un emploi, il y a lieu d’allouer à ce titre à M. [S] une somme de 15 000 euros nets.

II – c) Sur les demandes accessoires

Les conditions de l’article L.1235-4 du code du travail étant réunies, il convient d’ordonner le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés des indemnités chômage versées au salarié licencié dans la limite de trois mois d’indemnités de chômage, du jour de la rupture au jour de la présente décision.

Conformément à la demande du salarié, il convient d’ordonner la remise de l’attestation Pôle Emploi et d’un bulletin de salaire rectificatif mentionnant l’intégralité des indemnités et rappels de salaires mentionnés dans le présent arrêt, sous astreinte de 30 euros par jour de retard passé le délai d’un mois à compter de la signification de la décision.

III – Sur les dépens et frais irrépétibles

En qualité de partie succombante, il y a lieu de condamner la société Connecteurs électriques Deutsch aux entiers dépens, y compris ceux de première instance, de la débouter de sa demande formulée en application de l’article 700 du code de procédure civile et de la condamner à payer à M. [S] la somme de 3 000 euros sur ce même fondement pour les frais générés tant en première instance qu’en cause d’appel pour les frais non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Condamne la SAS Connecteurs électriques Deutsch à payer à M. [T] [S] les sommes suivantes :

prime ‘PMIP’ pour l’année 2018 : 4 158,10 euros bruts

indemnité compensatrice de préavis : 12 188,94 euros bruts

congés payés y afférents : 1 218,89 euros bruts

indemnité légale de licenciement : 5 078,72 euros nets

dommages et intérêts pour licenciement

sans cause réelle et sérieuse : 15 000,00 euros nets

Ordonne le remboursement par la SAS Connecteurs électriques Deutsch aux organismes intéressés des indemnités chômage versées à M. [T] [S] dans la limite de trois mois d’indemnités de chômage, du jour de la rupture au jour de la présente décision ;

Ordonne à la SAS Connecteurs électriques Deutsch de remettre à M. [T] [S] une attestation Pôle Emploi et un bulletin de salaire rectificatifs conformes à la présente décision, sous astreinte de 30 euros par jour de retard passé le délai d’un mois à compter de la signification de la décision ;

Condamne la SAS Connecteurs électriques Deutsch aux entiers dépens de première instance et d’appel ;

Déboute la SAS Connecteurs électriques Deutsch de sa demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SAS Connecteurs électriques Deutsch à payer à M. [T] [S] la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés tant en première instance qu’en cause d’appel.

La greffière La présidente

 


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