Contrat d’édition : 17 janvier 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 21/00991

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Contrat d’édition : 17 janvier 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 21/00991
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ARRET N°6

N° RG 21/00991 – N° Portalis DBV5-V-B7F-GHKK

SARL SOLINOME

C/

S.A.S. SPIE BATIGNOLLES SU OUEST

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 17 JANVIER 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/00991 – N° Portalis DBV5-V-B7F-GHKK

Décision déférée à la Cour : jugement du 26 février 2021 rendu par le Tribunal de Commerce de LA ROCHELLE.

APPELANTE :

SARL SOLINOME

[Adresse 2]

[Localité 1]

ayant pour avocat postulant Me Henri-noël GALLET de la SCP GALLET-ALLERIT-WAGNER, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me GARDACH, avocat au barreau de La Rochelle-Rochefort

INTIMEE :

S.A.S. SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST

[Adresse 4]

[Localité 3]

ayant pour avocat postulant Me Ludovic PAIRAUD de la SELARL PAIRAUD AVOCAT, avocat au barreau de DEUX-SEVRES et pour avocat plaidant Me Sébastien CHEVALIER, avocat au barreau de NANTES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 07 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Madame Anne VERRIER, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,

ARRÊT :

– Contradictoire

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ :

La société Spie Batignolles Sud Ouest, retenue dans le cadre d’un marché public pour le réaménagement du mess de la base aérienne 721 de [Localité 6]-[Localité 5], a sous-traité à la société Solinome la fourniture et la pose du carrelage et de la faïence selon marché forfaitaire de 19.657 euros HT en date du 17 avril 2019 stipulant une durée d’exécution comprise entre le 6 et le 27 mai 2019.

Elle a régularisé une déclaration de sous-traitance de premier rang auprès du maître de l’ouvrage, l’USID de [Localité 5].

Par mise en demeure du 5 juin 2019, elle a reproché à Solinome d’une part, d’avoir sous-traité elle-même ses prestations à un sous-traitant de second rang qui ne lui avait pas été présenté et que le maître de l’ouvrage n’avait pas agréé, et d’autre part des retards et des malfaçons dans l’exécution du marché. Elle a ensuite fait dresser un état contradictoire des ouvrages et adressé à Solinome un projet de décompte général définitif de 11.843 euros retenant un état d’avancement des travaux de 70% et 4.000 euros de pénalités sanctionnant huit manquements, en lui demandant d’avoir quitté et nettoyé le chantier pour le 12 juillet.

Solinome a quitté le chantier à la date fixée mais a contesté ce décompte.

Spie Batignolles lui a adressé le 19 juillet un chèque de 11.843 euros.

Par acte signifié le 6 avril 2020, la SARL Solinome a fait assigner la société Spie Batignolles Sud Ouest devant le tribunal de commerce de La Rochelle en sollicitant, dans le dernier état de ses demandes, qu’il prononce la résolution du contrat de sous-traitance aux torts exclusifs de la défenderesse et condamne celle-ci à lui payer :

.17.366,60 euros au titre du prix de ses travaux

.3.911,40 euros au titre de la perte de gains occasionnée par la rupture du contrat

.383,19 euros au titre des pénalités de retard contractuelles

.2.000 euros en réparation de son préjudice moral

outre 4.000 euros au titre de ses frais irrépétibles.

Elle soutenait que sa cocontractante avait toujours été informée de l’intervention d’un sous-traitant de second rang et l’avait accepté, mais qu’elle avait malicieusement refusé de le présenter à l’agrément du maître de l’ouvrage dans le but de l’évincer elle-même du chantier, et qu’elle n’avait pas respecté les conditions stipulées au marché pour le résilier.

La société Spie Batignolles Sud Ouest concluait au rejet de ces prétentions et sollicitait la condamnation de Solinome à lui verser 10.000 euros de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte à son image et 5.000 euros d’indemnité de procédure.

Par jugement du 26 février 2021, le tribunal de commerce de La Rochelle a :

* dit mal fondée la demande de la société Solinome tendant à voir prononcer la résiliation du contrat de sous-traitance aux torts exclusifs de la société Spie Batignolles Sud Ouest

* débouté la société Solinome de l’ensemble de ses demandes

* débouté la Spie Batignolles Sud Ouest de sa demande au titre d’un préjudice d’image

* condamné Solinome aux dépens et au paiement d’une indemnité de procédure.

Pour statuer ainsi les juges consulaires ont retenu, en substance,

.que Solinome avait sous-traité son marché à une société KDM sans respecter les conditions prévues à l’article 2.3 du contrat

.qu’elle ne rapportait pas la preuve de son affirmation, contestée, selon laquelle elle aurait obtenu l’approbation de Spie Batignolles pour le faire, ni ne démontrait lui avoir fait parvenir sa demande d’agrément du sous-traitant de second rang au moins vingt-et-un jours avant le début de l’intervention de l’entreprise comme stipulé au contrat

.qu’elle n’était ainsi pas fondée à voir prononcer la résiliation du marché aux torts de sa cocontractante

.que Spie Batignolles Sud Ouest ne démontrait pas de son côté avoir subi un préjudice d’image du fait de son sous-traitant.

La société Solinome a relevé appel le 25 mars 2021.

Les dernières écritures prises en compte par la cour au titre de l’article 954 du code de procédure civile ont été transmises par la voie électronique :

* le 30 novembre 2021 par la SARL Solinome

* le 28 juin 2021 par la SASU Spie Batignolles Sud Ouest

La SARL Solinome demande à la cour de réformer le jugement entrepris sauf en ce qu’il a rejeté la demande reconventionnelle de dommages et intérêts formée par Spie Batignolles Sud Ouest, qui déclare y renoncer en cause d’appel, et statuant à nouveau

-de juger que Spie Batignolles Sud Ouest n’a pas exécuté de bonne foi le contrat de sous-traitance qui les liait

-de dire irrégulière et abusive sa résiliation

-de prononcer la résiliation du contrat aux torts exclusifs de Spie Batignolles

-de condamner celle-ci à lui payer

.au titre du prix de ses travaux :

.à titre principal : 17.366,60 euros

.à titre subsidiaire les 11.843 euros HT dont elle s’est reconnue redevable

.3.911,40 euros au titre de la perte de gains occasionnée par la rupture du contrat

.383,19 euros au titre des pénalités de retard contractuelles

.2.000 euros en réparation de son préjudice moral

outre 6.000 euros au titre de ses frais irrépétibles.

Elle affirme avoir dit à Spie Batignolles quinze jours avant le début du chantier qu’elle avait un problème de personnel et entendait recourir à la sous-traitance, mais que le conducteur des travaux M. [T] lui demanda de ne pas faire de déclaration pour ne pas retarder le chantier.

Elle indique que lorsque la maîtrise d’ouvrage expulsa les ouvriers après avoir découvert qu’ils n’étaient pas ses préposés, elle fit savoir à Spie Batignolles qu’elle souhaitait toujours les faire agréer, ce qui aurait régularisé la situation, mais qu’il ne lui fut même pas répondu, puis que la maîtrise d’ouvrage émit hors sa présence des réserves sur la qualité des travaux exécutés.

Elle indique prouver que l’intimée connaissait parfaitement la situation depuis le début, comme l’attestent les quatre courriels successifs par lesquels l’identité et la carte de séjour des ouvriers devant intervenir sur le chantier furent adressés à M. [T], où il était mentionné à chaque fois que leur employeur était la société KDM et non pas Solinome, et elle ajoute que Spie Batignolles a transmis ces documents au maître de l’ouvrage pour que celui-ci établisse à ces personnes le badge qui leur permit d’entrer sur la base aérienne afin d’y oeuvrer. Elle se prévaut d’une attestation du gérant de KDM certifiant que Spie Batignolles connaissait son intervention.

Elle fustige la mauvaise foi de l’intimée, en faisant valoir que celle-ci lui ayant donné tacitement son approbation, ne pouvait feindre de découvrir la sous-traitance de second rang.

Elle soutient que la rupture du contrat est ainsi abusive.

Elle affirme qu’elle est, de plus, irrégulière, en ce que Spie Batignolles

-n’a pas respecté le délai de 8 jours calendaires imparti au sous-traitant pour régulariser la situation aux termes de l’article 14-1 du contrat, en lui donnant 48 heures pour le faire sans justifier de l’urgence lui permettant de réduire ainsi le délai contractuel

-a invoqué à l’appui de sa résiliation,

.un motif erroné tiré d’une insuffisance manifeste d’effectifs, alors que les reproches portaient sur de banals problèmes de finition

.un retard par rapport au délai convenu dont rien n’établit qu’il lui était imputable, d’autant que le délai avait nécessairement été repoussé du fait des travaux supplémentaires commandés en cours de chantier

.un abandon du chantier qui n’existe pas, les salariés de KDM ayant été expulsés

-n’a pas établi le procès-verbal emportant réception avec réserves des travaux exécutés prévu à l’article 14-2 sur constat contradictoire, le constat établi l’ayant été unilatéralement.

Elle considère que ni le constat ni le chiffrage invoqués par Spie Batignolles ne lui sont opposables,et qu’aucune pénalité ne peut lui être appliquée en l’absence de constat contradictoire.

Elle chiffre ses demandes au titre du prix des travaux exécutés, de sa perte de gains, des pénalités pour retard de paiement stipulées à l’article 6 et de son préjudice moral.

Elle conteste l’existence d’un préjudice d’image subi de son fait par sa cocontractante, en observant que Spie Batignolles continue de se voir confier des chantiers par la base aérienne.

La SASU Spie Batignolles Sud Ouest demande à la cour de confirmer le jugement déféré et de condamner l’appelante aux dépens d’appel et à lui verser 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle rappelle que le marché signé entre les deux sociétés stipulait en son article 2-3 que les demandes d’agrément de sous-traitant de second rang devraient lui parvenir au moins 21 jours avant la date du début de leur intervention.

Elle indique que la maîtrise d’oeuvre eut des doutes début juin 2019 sur la capacité des ouvriers de Solinome à être présents sur le chantier, et découvrit alors que les trois personnes qui y travaillaient étaient salariés d’une entreprise tierce, de sorte qu’elle les expulsa.

Elle soutient que Solinome n’aurait pas dû accepter le chantier puisqu’elle indique aujourd’hui n’avoir pas eu le personnel pour l’honorer.

Elle affirme que Solinome n’aurait pas dû le sous-traiter, en faisant valoir qu’une sous-traitance de second rang nécessitait des démarches qui auraient dû être entreprises très en amont du début du chantier, et un agrément du maître de l’ouvrage qui n’a jamais été demandé.

Elle conteste avoir accepté cette sous-traitance, en objectant que l’appelante procède par simples affirmations, produit des courriers équivoques dont il ne ressort pas qu’elle entendait sous-traiter, et ne communique pas les réponses ; qu’elle verse des attestations non probantes.

Elle estime avoir été en droit d’impartir à Solinome vu l’urgence le délai de régularisation de deux jours prévu à l’article 14 du contrat.

Elle récuse toute irrégularité de sa manière de procéder, en faisant valoir que les désordres et les retards d’exécution ont fait l’objet d’un constat contradictoire le 11 juin 2019 ; que ce constat a entraîné l’application des pénalités contractuelles conformément à l’article 17-5 du marché ; que la société Solinome a reconnu sa responsabilité et fait l’aveu de son incapacité à terminer elle-même le chantier.

Elle considère que son décompte est pertinent, et rappelle avoir adressé dès le 19 juillet 2019 à Solinome un chèque de 11.843 euros qui fut reçu le 22.

L’ordonnance de clôture est en date du 12 septembre 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Les conditions particulières du contrat de sous-traitance conclu entre les sociétés Spie Batignolles Sud Ouest et Solinome stipulent en leur article 1.2 que les pièces contractuelles sont constituées des présentes conditions particulières et leurs annexes, des documents du marché principal et des conditions générales du contrat de sous-traitance du BTP édition 2014.

Aux termes de l’article 2.3 des conditions particulières, ‘..le sous-traitant ne peut lui-même sous-traiter une partie des prestations qui lui sont confiées par le présent contrat qu’après avoir obtenu l’approbation de l’entrepreneur principal et ce, avant même que le sous-traitant de second rang soit présenté au maître de l’ouvrage pour acceptation et agrément de ses conditions de paiement. Le sous-traitant devient alors entrepreneur principal à l’égard de son sous-traitant et doit en conséquence respecter les dispositions de la loi du 31 décembre 1975.

Enfin, il est rappelé que les demandes d’agrément de sous-traitants de rang 2 devront parvenir à l’entrepreneur principal au moins 21 jours avant la date d’intervention desdits sous-traitants’.

L’article 2-2 des conditions générales du contrat de sous-traitance du BTP édition 2014 (pièce n°2) stipule que ‘..le sous-traitant qui envisage de sous-traiter à son tour doit

-obtenir l’autorisation préalable de la part de l’entrepreneur principal comme indiqué à l’article 4-32

-obtenir du maître de l’ouvrage l’acceptation de son sous-traitant et l’agrément de ses conditions de paiement’.

L’article 4-32 stipule que ‘sauf disposition contraire précisée aux conditions particulières, le sous-traitant ne peut…sous-traiter tout ou partie des travaux faisant l’objet du présent contrat sans l’autorisation préalable et écrite de l’entrepreneur principal’, et que ‘..si le sous-traitant ne respecte pas l’obligation qui lui est faite, l’entrepreneur principal peut exiger l’exécution complète des travaux par le sous-traitant ou, à défaut d’exécution, prononcer la résiliation du présent contrat par application de l’article 14-2 ci après…’.

L’article 14-2 stipule :

‘La défaillance contractuelle dûment établie du sous-traitant peut entraîner de plein-droit la résiliation du contrat après mise en demeure adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Cette mise en demeure comporte

.l’indication des manquements auxquels il doit être mis fin

.la référence aux dispositions du présent article

.éventuellement, les dispositions qui doivent être mises en oeuvre par le sous-traitant.

Lorsque la mise en demeure est restée infructueuse à l’expiration d’un délai de huit jours, l’entreprise principale peut résilier le contrat dans sa totalité ou pour les seules obligations dont la carence du sous-traitant est établie.

L’entreprise principale notifie au sous-traitant par lettre recommandée avec demande d’avis de réception la décision de résiliation et la date à laquelle il sera procédé à un constat contradictoire d’état des lieux et d’avancement des travaux. En l’absence d’un représentant du sous-traitant, le constat d’état des lieux et d’avancement de travaux est réputé contradictoire et opposable au sous-traitant.

….

En cas de résiliation complète ou partielle du contrat, l’entreprise principale peut procéder au remplacement du sous-traitant. Les charges supplémentaires, y compris les incidences du retard résultant de ce remplacement, sont à la charge du sous-traitant.’.

L’article 14-1 ‘RÉSILIATION’ des conditions particulières stipule :

‘Le présent contrat peut être résilié de plein droit aux torts du sous-traitant après mise en demeure restée infructueuse pendant un délai de 8 jours calendaires (pouvant être ramené à 2 jours en cas d’urgence) dans les cas suivants :

. Abandon du chantier : absence totale ou insuffisance manifeste d’effectif au regard des tâches restantes

. Incapacité : constatée au niveau de la qualité d’exécution de ses travaux, fournitures et prestations

. Insuffisance ou réduction d’activité : ayant pour conséquence de perturber le déroulement normal du chantier

. Retard caractérisé : dans cette hypothèse, le sous-traitant est convoqué à une réunion pour examiner les mesures à prendre afin de rattraper le retard. Un CR est dressé par l’entrepreneur principal et lui est remis. Si le sous-traitant n’a pas donné suite aux décisions ainsi prises dans les 5 jours calendaires suivants, sa défaillance contractuelle est établie, et le contrat résilié.’.

Il est constant aux débats, et en tant que de besoin établi par les productions, que les ouvriers qui ont oeuvré sur le chantier de la réfection du mess de la base aérienne 721 pour y exécuter le lot ‘carrelage- faïences’ sous-traité par Spie-Batignolles à Solinome n’étaient pas des salariés de cette entreprise mais d’une société KDM à laquelle cette dernière a indiqué avoir elle-même sous-traité son marché ‘faute d’effectif interne disponible’ (pièce n°7 de l’intimée).

Cette entreprise n’était pas, contrairement à Solinome, agréée par le maître de l’ouvrage, et ses ouvriers ont été expulsés du chantier le jour même, 5 juin 2019, de la découverte de cette situation par le maître d’oeuvre.

La société Solinome ne prouve ni prétend avoir sous-traité son marché à un sous-traitant de second-rang après avoir obtenu l’approbation de l’entrepreneur principal requise comme un préalable par l’article 2.3 des conditions particulières, ni avoir pour ce faire disposé de l”autorisation préalable et écrite’ prévue par l’article 4-32 des conditions générales du contrat de sous-traitance du BTP édition 2014.

Il est sans incidence sur le constat de ce manquement à ses obligations qu’elle ait adressé à un conducteur de travaux de la société Spie Batignolles en vue de permettre l’établissement d’un badge d’entrée sur l’enceinte militaire des renseignements sur les ouvriers qui interviendraient mentionnant qu’ils étaient salariés non d’elle-même mais d’une société tierce, KDM, dès lors qu’elle ne disposait pas de l’autorisation de l’entrepreneur principal écrite et préalable requise par le contrat, elle-même évoquant d’ailleurs un accord de la société Spie Batignolles seulement ‘tacite’, étant ajouté qu’il n’est ni établi ni prétendu que ce conducteur de travaux aurait eu le pouvoir de donner l’autorisation de sous-traiter en second rang au nom de la société Spie Batignolles.

De plus, la société Solinome écrit dans ses conclusions d’appel (cf page 8) que c’est ‘quinze jours avant le début des travaux qu’elle avait alerté le conducteur des travaux de la société Spie Batignolles, M. [M] [T], sur le fait qu’elle allait être contrainte de déclarer un sous-traitant faute de disponibilité pour ce chantier’.

Elle l’avait précédemment écrit dans des courriers adressés à Spie Batignolles Sud Ouest, y compris sous la plume de son conseil (cf ses pièces 7 et 13).

Or ainsi qu’il vient d’être dit, l’article 2.3 des conditions particulières fixait à 21 jours au moins avant l’intervention du sous-traitant de second rang la date minimale à laquelle l’entrepreneur devait être prévenu du souhait de son sous-traitant de sous-traiter lui-même son marché.

Outre qu’il était de rigueur entre les parties, ce qui suffisait à requérir de le respecter, un tel délai se justifie par le temps requis par l’instruction et l’appréciation d’une telle demande par l’entrepreneur principal, et par la nécessité d’obtenir un agrément du sous-traitant de second rang par le maître de l’ouvrage.

Il est d’ailleurs à cet égard significatif que la SARL Solinome indique que le conducteur des travaux lui avait demandé de ne pas procéder à une déclaration de sous-traitance de second rang car ‘les délais étaient trop courts’ (cf pièce n°12) et ne permettraient pas un retour favorable du maître de l’ouvrage à temps pour respecter la date prévue d’engagement des travaux compte-tenu de la nécessité de les commencer rapidement (cf pièce n°7 et pièce n°10 dernière page).

En n’affectant pas les membres de son personnel requis pour exécuter les prestations de son marché, et en sous-traitant son propre marché sans l’autorisation et l’agrément préalable requis, la société Solinome a manqué à ses obligations.

La transmission opérée à la société Spie Batignolles le 5 juin 2019 par le maître d’oeuvre d’un procès-verbal de constatation de présence de travailleurs non déclarés sur un chantier en cours sur le domaine militaire, et l’expulsion concomitante de ces ouvriers, caractérisaient la situation d’urgence justifiant au vu de l’article 14-1 du contrat que la SASU Spie Batignolles Sud Ouest ait, le jour même, mis en demeure (pièce n°6) par courrier recommandé avec demande d’avis de réception visant cette clause la société Solinome de ‘mettre les moyens nécessaires à la bonne fin du chantier’, dont elle était fondée à avoir constaté l”abandon’, au sens dudit article, compte-tenu de cette expulsion.

La société Solinome n’a pas déféré à cette mise en demeure, répondant que cette sous-traitance de second rang était connue de l’entrepreneur principal et qu’elle restait disposée à en faire la déclaration formelle, ce qui n’était pas compatible avec les nécessités de poursuite et d’achèvement du chantier, au vu du délai d’une telle procédure, qui avaient précisément selon elle déjà fait obstacle à ce qu’il fût procédé ainsi antérieurement.

La société Spie Batignolles Sud Ouest était fondée, dans ces conditions, et sans mauvaise foi ni duplicité, contrairement à ce que prétend l’appelante, à lui notifier la résiliation du contrat à ses torts, et à faire achever le chantier par l’entreprise de son choix après constat contradictoire de l’état du chantier et des ouvrages.

Ce constat contradictoire a eu lieu, non pas le 6 juin 2019 comme le soutient l’appelante pour prétendre qu’il ne lui était pas contradictoire, s’agissant là de l’état de situation auquel le maître de l’ouvrage avait convoqué l’entrepreneur principal sitôt l’expulsion des ouvriers exécutée (cf pièce n°4 de l’intimée, page 2), mais le 11 juin 2019, date à laquelle la société Spie Batignolles Sud Ouest l’avait convoquée à 8h30 par son courrier de mise en demeure du 5 juin 2019 (cf pièce n°6, page 2).

La société Solinome lui a répondu le 6 juin qu’elle y serait présente (cf pièce n°8), et elle y fut, de fait, représentée par un de ses préposés, M. [F], auquel elle a dit avoir donné ‘les pleins pouvoirs de décision’ (cf pièce n°10).

L’établissement d’un tel constat n’était pas un préalable au prononcé de la résiliation du contrat, et devait intervenir après que celle-ci avait été décidée et notifiée, ainsi qu’il résulte de l’article 14-2 des conditions particulières en ce qu’il stipule : ‘en cas de résiliation du sous-traité, il est alors procédé à un constat contradictoire’.

L’appelante n’est ainsi pas fondée à soutenir que l’entrepreneur principal aurait résilié leur contrat de façon irrégulière,

-le délai de mise en demeure de 48 heures étant justifié par l’urgence

-le motif, tiré d’un abandon du chantier, étant prévu au contrat, et avéré

-et le constat contradictoire prévu ayant été établi entre les parties.

Il est sans incidence sur la régularité de cette résiliation que ce constat n’ait pas été accompagné ou suivi de l’établissement d’un procès-verbal de réception des prestations réalisées.

Il est, de même, sans incidence sur cette régularité, que lors du constat entre les cocontractants dressé le 11 juin 2019, l’entrepreneur principal ait repris à son compte des constatations, ou doléances, formulées par le maître de l’ouvrage ou son maître d’oeuvre lors de l’état de situation établi entre eux le 6 juin.

La société Solinome a ainsi été déboutée à bon droit de sa prétention à voir prononcer la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la SASU Spie Batignolles Sud Ouest et à voir celle-ci condamner à l’indemniser de sa perte de gains consécutive à la résiliation du marché.

La société Spie Batignolles a ensuite établi un décompte qui était conforme à ce constat, et qui n’est pas contredit.

L’état d’avancement du chantier à 70% au jour de son ‘abandon’ au sens du contrat est en effet conforme aux constatations opérées par la maîtrise d’oeuvre, annexées au courrier de l’entrepreneur principal et transmis au sous-traitant, qui ne l’a pas réfuté, et il est cohérent avec les relevés du constat contradictoire opéré le 11 juin 2019.

Quant aux huit pénalités de 500 euros chacune également appliquées, la faculté de les prononcer est prévue au contrat ; elles correspondent à des défauts relevés par le maître de l’ouvrage le 6 juin 2019 selon un état avec croquis qui a été transmis au sous-traitant ; et elles sont en cohérence avec le constat contradictoirement dressé le 11 juin 2019 entre les parties.

Il sera observé que dans son courrier détaillé de réponse du 19 juin 2019 (pièce n°10 de l’appelante), le gérant de la société Solinome reconnaît expressément la réalité de plusieurs des malfaçons fondant ces pénalités ; il y admet aussi le défaut d’alignement de certains joints en indiquant qu’il allait y être remédié ce qui est inopérant puisque la résiliation de son marché y faisait désormais obstacle ; et il conteste les autres au motif, non pertinent, que ‘le sujet n’avait pas été abordé le 11 juin’, ce qui n’empêche pas de retenir un défaut s’il est établi, ce qui est le cas.

La société Spie Batignolles Sud Ouest était ainsi fondée à appliquer à la société Solinome des pénalités, dont le calcul est conforme aux clauses du contrat.

Le décompte définitif de 11.843euros établi par l’entrepreneur principal et par lui notifié au sous-traitant par lettre recommandée dont l’avis de réception est signé du 1er juillet (sa pièce n°10) est donc pertinent.

La société Solinome est fondée en sa prétention subsidiaire à voir juger que c’est cette somme qui lui revient au titre du marché résilié.

La société Spie Batignolles justifie par sa pièce n°14 avoir adressé à la société Solinome en lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 19 juillet 2019 reçue le 22 juillet un chèque bancaire de ce montant libellé à son nom et daté du 19 juillet.

Elle a en cela rempli son obligation, et la société Solinome n’est pas fondée à solliciter sa condamnation à lui verser une pénalité de retard.

Ni les productions, ni les écritures des parties ne permettent de savoir si ce chèque a été encaissé, alors que Solinome arguait d’une créance supérieure.

La prétention subsidiaire de l’appelante formulée dans le dispositif de ses conclusions tendant à voir l’intimée condamnée à lui payer au titre des travaux effectués avant la résiliation du contrat ‘..la somme (de) 11.843 euros HT ..correspondant à la somme dont la société Spie Batignolles reconnaît être redevable à l’égard de la société Solinome’ est de nature à laisser penser qu’elle n’aurait pas encore perçu cette somme, ce qui supposerait qu’elle n’ait pas mis à l’encaissement le chèque reçu, ou que celui-ci ait été dépourvu de provision suffisante ce qui est des plus improbables et qu’elle n’aurait pas manqué d’indiquer.

Il sera dans ces conditions prononcé contre la société Spie Batignolles Sud Ouest une condamnation en deniers ou quittance à payer cette somme, dont il lui sera aisé de justifier de l’encaissement effectif en cas de litige au niveau de l’exécution.

Le sens du présent arrêt justifie la confirmation du rejet de la prétention de la société Solinome à obtenir des dommages et intérêts pour préjudice moral, la société Spie Batignolles n’ayant ni manqué à ses obligations, ni commis une faute à son préjudice.

Les chefs de décision du jugement afférents aux dépens et à l’indemnité de procédure de première instance sont pertinents et adaptés, et doivent être également confirmés.

La société Solinome succombe devant la cour et supportera les dépens d’appel.

Elle versera à l’intimée une indemnité de procédure en application de l’article 70à du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

la cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, dans la limite des appels :

CONFIRME le jugement entrepris

ajoutant :

CONDAMNE en tant que de besoin la SASU Spie Batignolles Sud Ouest à payer en deniers ou quittances à la SARL Solinome la somme de 11.843 euros HT dont elle s’est reconnue redevable et qui a fait l’objet de sa part le 19 juillet 2019 de l’envoi d’un chèque bancaire

REJETTE toutes demandes autres ou contraires

CONDAMNE la société Solinome aux dépens d’appel

LA CONDAMNE à payer en application de l’article 700 du code de procédure civile une indemnité de procédure de 2.000 euros à la société Spie Batignolles Sud Ouest.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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